Ayman Mghames ou comment résister à Gaza à travers le rap

Pour le rappeur palestinien Ayman Mghames, survivre est un combat permanent (Photo, fournie).
Pour le rappeur palestinien Ayman Mghames, survivre est un combat permanent (Photo, fournie).
Short Url
Publié le Samedi 29 octobre 2022

Ayman Mghames ou comment résister à Gaza à travers le rap

  • «Je suis né au Liban, j’ai été éduqué en Tunisie et je vis en Palestine. Je considère ces trois pays comme les miens», confie le rappeur
  • Ses chansons parlent de l’occupation israélienne, de la cause palestinienne, du sang des martyrs, de la douleur des prisonniers dans les geôles de l’État hébreu

Comme si la guerre et le blocus ne suffisait pas à rendre la vie difficile à Gaza… Pour le rappeur palestinien Ayman Mghames, survivre est un combat permanent. Toutefois, ni le manque de moyens, ni la manière dont la société conservatrice stigmatise un genre musical importé de l’Occident ni la recherche patiente d’un public n’a pas entamé la détermination de ce jeune chanteur au parcours atypique. Pour cet artiste, le rap constitue une «résistance pacifique» à l’occupation israélienne, à la guerre, à l’oppression.

Ayman Mghames est né dans le camp de réfugiés palestiniens de Badaoui, près de Tripoli, au Liban-Nord, en 1985. Il a été contraint de quitter le pays pour s’installer en Tunisie avec son père, Jamali, qui faisait partie de la garde rapprochée de Yasser Arafat. Toutefois, il a passé ses vacances d’été chez ses grands-parents, ses oncles et ses tantes au Liban, dans les camps de Badaoui et de Nahr al-Bared.

g
Ayman Mghames est né dans le camp de réfugiés palestiniens de Badaoui, près de Tripoli, au Liban-Nord, en 1985 (Photo, fournie).

Ses souvenirs d’enfance sont marqués par un lourd sentiment d’insécurité et d’instabilité au niveau financier, psychologique et social en raison de son statut de réfugié. «J’ai été traumatisé par le regard des gens, surtout des Arabes. Je les entendais dire: “C’est un réfugié palestinien. Il n’a pas de pays, il n’a pas… Il n’a pas…” Tout cela est resté gravé dans ma petite tête d’enfant et j’essayais autant que possible de trouver des réponses à mes questionnements causés par cette forme de discrimination à mon égard», se rappelle-t-il.

La période durant laquelle il a vécu au Liban et en Tunisie est compliqué pour le jeune Ayman: «Ma vie dans ces deux pays consistait en un combat intérieur permanent et très difficile. Le Liban et la Tunisie m’ont accueilli dans un moment où j’étais faible. Quand on me demande aujourd’hui d’où je viens, je réponds: “Je suis né au Liban, j’ai été éduqué en Tunisie et je vis en Palestine.” Je considère ces trois pays comme les miens.»

f
La période durant laquelle il a vécu au Liban et en Tunisie est compliqué pour le jeune Ayman (Photo, fournie).

C’est encore en raison du travail de son père que la famille décide de s’installer à Gaza en 1996. «C’était la première fois de ma vie que je vois un soldat israélien, et c’est là aussi que j’ai compris que nous étions toujours sous occupation», se souvient Ayman.

«Quand je suis arrivé à Gaza, j’ai été envahi par une sorte de transe indescriptible. Mais, en même temps, j’ai été choqué par la présence de soldats israéliens au point de passage. Mille questions me sont venues: “Nous ne sommes pas en Palestine? Pourquoi ces soldats sont-ils ici?»

Il croyait retourner en Palestine, le plus beau pays du monde, comme le lui racontaient ses parents et ses grands-parents, et il se retrouve sur un territoire contrôlé par les Israéliens.

Il croyait retourner en Palestine, le plus beau pays du monde, comme le lui racontaient ses parents et ses grands-parents
Il croyait retourner en Palestine, le plus beau pays du monde, comme le lui racontaient ses parents et ses grands-parents (Photo, fournie).

Mais sa plus grande déception est venue de certains habitants de Gaza. Il y a une forme de culture de discrimination latente dans la société gazaouie qui distingue entre les résidents et les réfugiés. «Par exemple, aujourd’hui encore, un mariage entre ces deux groupes sociaux est très mal vu», explique le chanteur.

Du rêve à la désillusion

Ayman Mghames croyait au conte de fées: «J’ai cru que quand j’allais retourner dans ma patrie, mon pays, j’allais enfin retrouver cette paix intérieure que je cherchais depuis longtemps.» La réalité a effacé tous ses rêves; ou plutôt, ils se sont transformés en illusions.

D’abord, il s’est retrouvé coincé dans une société aux idées rétrogrades et conservatrices. Ensuite, il a été le témoin d’un cycle de violence sans fin. Il a ainsi vécu la seconde intifada à partir de l’année 2000, puis, en 2007, le conflit interpalestinien au cours duquel le Hamas a renversé le Fatah à Gaza, faisant des centaines de morts. Vient ensuite l’engrenage sans fin des guerres entre Israël et le mouvement islamiste qui a pris de facto le pouvoir dans la bande côtière. C’est durant le premier conflit armé, en 2008-2009, que son père a été tué. Il a été la cible d’une attaque israélienne alors qu’il se trouvait dans son appartement, situé au 7e étage des tours Al-Makoussi, au nord-est de la ville de Gaza.

Ayman a également vécu les guerres de 2012, 2014, 2021, 2022. Installé dans ces mêmes tours, son appartement tremble à chaque déflagration lorsque des missiles frappent la ville. Il est aujourd’hui marié et père de Joury, une fille de 9 ans et Jamel, un garçon de 5 ans. Le bruit des explosions traumatise ses enfants.

Ayman a vécu les guerres de 2012, 2014, 2021, 2022
Ayman a vécu les guerres de 2012, 2014, 2021, 2022 (Photo, fournie).

«D’une guerre à l’autre, nous vivons quotidiennement sous la menace des assassinats; les drones nous surveillent tout le temps», explique Ayman. «D’un réfugié qui, au moins, pouvait voyager, je suis devenu un Palestinien détenu dans une grande prison», déplore-t-il.

Une grande partie de ses amis et de ses connaissances ont quitté Gaza pour aller vivre en Europe, «afin de s’épargner cette vie d’humiliation», ajoute-t-il. «Mais moi, je sais aussi ce que veut dire “être un réfugié”, et c’est pour cette raison que j’ai décidé de rester ici.»

S’exprimer à travers le rap

Les chansons d’Ayman ressemblent à sa vie. «Je ne peux pas écrire des chansons romantiques. J’ai vécu dans l’adversité et le chagrin. Mon environnement est plein de pauvreté, de bombardements, de sang, de martyrs et de morts.» Il est bien conscient que le public aime les chansons d’amour, mais se dit incapable d’en écrire. Pour lui, il s’agit de faire passer ses sentiments. Toute autre chose serait artificielle et ne lui ressemblerait pas. C’est donc à travers le rap qu’il a décidé de s’exprimer. «Mes chansons expriment une réalité palpable. Et le rap me donne la possibilité de transmettre mon vécu.»

C’est pourquoi ses chansons parlent notamment de l’occupation israélienne, de la cause palestinienne, du sang des martyrs, de la douleur des prisonniers détenus dans les geôles de l’État hébreu. Le rap est pour Ayman un moyen pour «résister pacifiquement à l’occupation israélienne» en attendant la paix et la liberté.

«Je ne peux me déplacer sans autorisation de l’occupant, je ne peux recevoir des marchandises que si l’occupant accepte d’ouvrir les frontières; je n’ai accès à l’électricité que si l’occupant le désire. Les Israéliens contrôlent tous les détails de mon existence.» Depuis quelque temps, il a changé de registre et ses chansons évoquent également des réalités sociales devenues, elles aussi, de plus en plus pesantes.

Malgré les guerres, les violences, le blocus, Ayman Mghames a réussi à organiser des concerts à Gaza avec son groupe de rappeurs, qui a pour nom «PR» («Palestinian Rappers»). Son identité et sa musique sont désormais connues bien au-delà des frontières de l’enclave palestinienne. Il a ainsi participé à plusieurs documentaires et s’est produit à l’occasion de festivals internationaux en Tunisie, en Égypte, en France, en Espagne, au Danemark, en Suède. Lors de chacun de ces événements, il représente la Palestine avec fierté.

Malgré les guerres, les violences, le blocus, Ayman Mghames a réussi à organiser des concerts à Gaza avec son groupe de rappeurs
Malgré les guerres, les violences, le blocus, Ayman Mghames a réussi à organiser des concerts à Gaza avec son groupe de rappeurs (Photo, AFP).

Toutefois, son art ne lui permet pas de vivre de manière décente. Pour joindre les deux bouts, il a créé DeliaArts, une structure qui comprend un studio doté de tout l’équipement nécessaire pour enregistrer et qui permet de subvenir aux besoins des artistes gazaouis. Contre vents et marées, il a toujours foi en l’avenir…


Eurovision: Nemo rend son trophée 2024 pour protester contre la participation d'Israël

Le chanteur suisse Nemo, qui représentait la Suisse avec la chanson « The Code », célèbre sur scène avec son trophée après avoir remporté la finale du 68e Concours Eurovision de la chanson (CEC) 2024, le 11 mai 2024 à la Malmö Arena de Malmö, en Suède. (AFP)
Le chanteur suisse Nemo, qui représentait la Suisse avec la chanson « The Code », célèbre sur scène avec son trophée après avoir remporté la finale du 68e Concours Eurovision de la chanson (CEC) 2024, le 11 mai 2024 à la Malmö Arena de Malmö, en Suède. (AFP)
Short Url
  • L’artiste suisse Nemo, vainqueur de l’Eurovision 2024, rend son trophée pour protester contre la participation maintenue d’Israël, dénonçant une contradiction avec les valeurs d’unité et de dignité affichées par l’UER
  • Cinq pays — Islande, Espagne, Pays-Bas, Irlande et Slovénie — ont déjà annoncé leur boycott de l’édition 2026, sur fond de critiques liées à la guerre à Gaza et d’accusations d’irrégularités de vote

GENEVE: L'artiste suisse Nemo, qui a remporté l’Eurovision 2024 en Suède, a annoncé jeudi rendre son trophée pour protester contre le maintien de la participation d'Israël dans la compétition, qui a déjà provoqué le boycott de cinq pays.

"En tant que personne et en tant qu'artiste, aujourd'hui, je ne pense plus que ce trophée ait sa place sur mon étagère", a déclaré dans une vidéo postée sur Instagram Nemo, qui s'était déjà joint aux appels réclamant l'exclusion d'Israël du plus grand événement musical télévisé en direct au monde.

"L'Eurovision prétend défendre l'unité, l'inclusion et la dignité de tous (...) Mais la participation continue d'Israël, alors que la commission d'enquête internationale indépendante (mandatée par) l'ONU a conclu à un génocide, démontre un conflit évident entre ces idéaux et les décisions prises par" l'Union européenne de Radio-Télévision (UER), a déclaré le chanteur de 26 ans.

"Il ne s'agit pas d'individus ou d'artistes. Il s'agit du fait que le concours a été utilisé à maintes reprises pour redorer l'image d'un État accusé de graves atrocités", a ajouté Nemo, devenu en 2024 le premier artiste non binaire à être sacré à l'issue d'une édition déjà marquée par une controverses sur la participation d'Israël en pleine guerre dans la bande de Gaza.

Mercredi, la télévision publique islandaise RUV a annoncé boycotter l'édition 2026 de l'Eurovision après le feu vert donné à la participation d'Israël, devenant le cinquième pays à ne pas participer au prochain concours à Vienne.

Début décembre, la majorité des membres de l'UER avaient estimé qu'il n'était pas nécessaire de voter sur la participation d'Israël avec sa télévision publique KAN.

Cette décision a déclenché instantanément les annonces de boycott des diffuseurs de l'Espagne, des Pays-Bas, de l'Irlande et de la Slovénie, sur fond de critiques de la guerre dans la bande de Gaza mais aussi d'accusations d'irrégularités dans les votes lors des précédentes éditions.

"Quand des pays entiers se retirent, il est évident que quelque chose ne va pas du tout. C'est pourquoi j'ai décidé de renvoyer ce trophée au siège de l'UER à Genève, avec gratitude et un message clair : incarnez vos valeurs", a ajouté Nemo, avant de déposer son trophée dans une boite.


Layali Diriyah réchauffe le cœur historique du Royaume

Layali Diriyah est organisé dans l'une des fermes du district d'Al-Murayih, transformant ce site historique en une expérience vivante et en plein air. (Photo AN/Huda Bashatah)
Layali Diriyah est organisé dans l'une des fermes du district d'Al-Murayih, transformant ce site historique en une expérience vivante et en plein air. (Photo AN/Huda Bashatah)
Short Url
  • L’événement constitue un pilier de la Diriyah Season, célébration vibrante de la culture saoudienne
  • La gastronomie y occupe une place majeure, avec un large éventail de cuisines saoudiennes et internationales

​​​​​​RIYAD : Layali Diriyah est de retour comme pièce maîtresse de la Diriyah Season de cette année, attirant les visiteurs vers un Al-Murayih transformé en une célébration en plein air de la culture, de la cuisine et de l’artisanat saoudiens.

L’événement se tient tous les jours de 17h à 2h du matin jusqu’en mars 2026. Des allées bordées de palmiers illuminées de guirlandes scintillantes instaurent une atmosphère mêlant l’héritage traditionnel najdi à la créativité saoudienne contemporaine.

Pour de nombreux visiteurs, le cadre lui-même fait partie de l’expérience. Shatha Abdulaziz, une visiteuse, a confié à Arab News : « Mon expérience a été merveilleuse et très agréable. Ce qui m’a réellement impressionnée, c’est l’atmosphère paisible, le thème traditionnel, l’organisation et les détails.

« Bien que je sois déjà venue lors des saisons précédentes, je pense qu’il y a eu une amélioration significative cette année. »

La gastronomie est un attrait majeur, avec un large choix de cuisines saoudiennes et internationales, dont des spécialités italiennes et méditerranéennes proposées par des restaurants exclusifs présents cette année.

« Ce fut une excellente expérience », a déclaré le visiteur Mohammed Fahad, ajoutant que l’attention portée aux détails était remarquable, tout comme « l’authenticité historique dans chaque recoin de Diriyah Nights ».

Il a ajouté : « Cela mêle véritablement le présent et le passé avec une touche raffinée et artistique. »

Des boutiques et stands proposent des articles en édition limitée à ceux en quête d’une expérience de shopping singulière.

Rawan Alsubaie, habituée de Diriyah mais présente à Layali Diriyah pour la première fois, a souligné le caractère exclusif des produits.

Elle a expliqué : « J’ai regardé certaines boutiques et stands et je les ai trouvés uniques, avec des produits introuvables en dehors de Diriyah Nights.

« Il y a des parfums que je n’ai trouvés nulle part ailleurs. J’ai même demandé aux commerçants s’ils avaient d’autres points de vente, mais ils m’ont dit que non, ce que je trouve remarquable.

« Je suis venue en m’attendant à découvrir quelque chose d’exceptionnel et, effectivement, l’endroit est magnifique, surtout durant la saison hivernale. C’est parfait. »

La Diriyah Season de cette année continue de mettre en valeur la richesse de l’héritage najdi tout en embrassant la créativité qui façonne l’Arabie saoudite moderne.

À travers des spectacles, des expositions et des expériences immersives, les visiteurs découvrent les traditions qui définissent Diriyah, ainsi que l'énergie qui anime son renouveau culturel.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La durabilité à l’honneur à Médine pour la Journée mondiale des sols

Les sols de la région sont confrontés à des défis, notamment la salinisation due à une irrigation déséquilibrée et au changement climatique. (SPA)
Les sols de la région sont confrontés à des défis, notamment la salinisation due à une irrigation déséquilibrée et au changement climatique. (SPA)
Short Url
  • Médine renforce ses efforts de conservation des sols face à la salinisation et au changement climatique grâce à des programmes durables et une meilleure gestion des ressources
  • La Journée mondiale des sols rappelle l’importance de protéger le patrimoine agricole et de soutenir les objectifs environnementaux de la Vision 2030

MÉDINE : Médine s’est jointe au monde pour célébrer la Journée mondiale des sols le 5 décembre, mettant en lumière l’importance de la conservation des sols pour la sécurité alimentaire et les écosystèmes, selon l’Agence de presse saoudienne (SPA).

La journée revêt une importance particulière à Médine en raison de sa riche histoire agricole, de la diversité de ses sols — allant de l’argile au sable en passant par les formations volcaniques Harrat — et de son lien historique avec la production de dattes.

Le sol de la région fait face à plusieurs défis, notamment la salinisation due à un déséquilibre de l’irrigation et au changement climatique, ajoute la SPA.

Les autorités y répondent par des programmes de protection des sols, l’amélioration des techniques d’irrigation et la promotion de pratiques agricoles durables.

Le sol joue un rôle essentiel dans la purification de l’eau, agissant comme un filtre naturel. Avec l’arrivée de l’hiver, c’est une période opportune pour préparer les sols en vue du printemps, étendre les cultures et favoriser les récoltes, rapporte la SPA.

Le ministère de l’Environnement, de l’Eau et de l’Agriculture à Médine met en œuvre des initiatives visant à améliorer l’efficacité des ressources, renforcer la sensibilisation des agriculteurs et lutter contre la désertification. Les agriculteurs contribuent également en utilisant des fertilisants organiques et en recyclant les déchets agricoles.

La Journée mondiale des sols souligne la nécessité d’une collaboration entre les organismes gouvernementaux, les agriculteurs et les parties prenantes pour assurer la durabilité des sols, préserver le patrimoine agricole et soutenir les objectifs de développement durable de la Vision 2030.

Approuvée par l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture en 2013, la Journée mondiale des sols vise à sensibiliser au rôle crucial des sols dans la santé des écosystèmes et le bien-être humain.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com