Nouvelles motions de censure rejetées, budget de la Sécu validé par l'Assemblée

La Première ministre française Elisabeth Borne, le ministre délégué aux Relations avec le Parlement Franck Riester et le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire (Photo, AFP).
La Première ministre française Elisabeth Borne, le ministre délégué aux Relations avec le Parlement Franck Riester et le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 01 novembre 2022

Nouvelles motions de censure rejetées, budget de la Sécu validé par l'Assemblée

  • L'ensemble du projet de budget 2023 de la Sécu est considéré comme adopté en première lecture et passera mercredi en commission au Sénat
  • L'appui des députés RN à la motion LFI a une nouvelle fois été pointé par les macronistes

PARIS: Le projet de budget de la Sécu a été adopté lundi en première lecture à l'Assemblée, du fait du rejet de deux nouvelles motions de censure contre le gouvernement, et malgré un soutien renouvelé du RN à celle de LFI.

Elisabeth Borne, qui pourrait dégainer une quatrième fois cette semaine l'arme constitutionnelle du 49.3, a renvoyé dos à dos les deux groupes d'opposition.

"La nouvelle union des populismes ne construit pas de majorité alternative", a attaqué la Première ministre à la tribune, épinglant "la préférence nationale d'un côté" et "une version anachronique de la lutte des classes de l'autre".

Leurs motions ont été largement repoussées par l'Assemblée nationale: celle du Rassemblement national n'a recueilli que 90 voix, celle de La France insoumise 218, loin de la majorité absolue des 289 suffrages nécessaires.

L'ensemble du projet de budget 2023 de la Sécu est considéré comme adopté en première lecture et passera mercredi en commission au Sénat.

L'appui des députés RN à la motion LFI a une nouvelle fois été pointé par les macronistes.

Il y a une semaine déjà, le soutien du groupe de Marine Le Pen à une motion de la Nupes avait créé un malaise dans la coalition de gauche et suscité les critiques du camp présidentiel. "Vous entretenez la confusion", a répété lundi Mme Borne en s'en prenant au "grand leader" de LFI Jean-Luc Mélenchon.

La France insoumise a fait cette fois cavalier seul à gauche dans le dépôt d'une motion. Elle n'a pas fait le plein à gauche, 22 voix des alliés de la Nupes faisant défaut, dont celles du patron du PCF Fabien Roussel et de la socialiste Valérie Rabault.

La Première ministre avait déjà dégainé il y a dix jours le 49.3 pour faire passer sans vote les parties recettes des projets de budget de la Sécu et de l'Etat.

Avec cet "usage répété", Clémence Guetté, pour LFI, a critiqué un "acte brutal", "preuve éclatante" de la "minorité" du camp présidentiel, privé de majorité absolue. "Votre gouvernement ne tient donc plus qu'à un fil: le 49.3!", s'est-elle exclamée.

"Le 49.3 est un échec, votre échec", a considéré Olivier Faure, numéro un du PS, à l'adresse de Mme Borne. Mais "la motion est un argument ultime" et à en déposer à chaque fois, "on prend le risque d'affaiblir la force du message", a-t-il averti, cette fois à l'intention de LFI.

«Halloween» pour l'humanisme

Socialistes et écologistes ont martelé qu'ils ne voteraient "jamais aucune motion du RN". Et "vos voix, nous n'en voulons pas", a exhorté Sébastien Jumel (PCF) en se tournant vers les bancs les plus à droite. Avec les propositions du RN, c'est "un Halloween permanent pour nos valeurs humanistes", selon Benjamin Lucas (EELV).

A l'appui des 49.3, l'exécutif invoque un blocage. Les oppositions lui reprochent, elles, de le déclencher pour interrompre les échanges avant des sujets sensibles - déserts médicaux, collectivités - et de ne pas retenir des amendements adoptés contre son avis, ce que récuse Elisabeth Borne.

"Le 49.3 permet de conclure un débat, jamais de l'interdire", a-t-elle assuré en citant son lointain prédécesseur Michel Rocard, recordman de cette procédure.

Les députés LR, dont les voix étaient nécessaires pour renverser le gouvernement, ont refusé comme la semaine dernière de "provoquer un chaos institutionnel", selon Thibault Bazin. Mais "cela ne vaut pas blanc-seing au gouvernement", a-t-il précisé.

Les parlementaires ont repris ensuite l'examen des crédits "Ecologie, développement et mobilité durables" du budget de l'Etat. Ils s'affichent en hausse de près de 29%, ce qui n'est "pas à la hauteur des efforts nécessaires", selon les oppositions.

L'Assemblée a approuvé un amendement du gouvernement à 3 milliards d'euros pour aider les PME face à la flambée des prix de l'énergie en 2023, un "amortisseur électricité" accueilli plutôt favorablement par les députés.

Puis, malgré ses appels à la responsabilité, le gouvernement a essuyé une série de revers avec le vote d'amendements écologiste et PS pour rajouter un total de près de 12 milliards d'euros à la rénovation thermique des logements, soutenus par le RN.

Puis l'adoption d'un amendement socialiste, avec le soutien du RN, pour investir trois milliards de plus dans le ferroviaire.

"C'est magique, c'est gratuit, c'est Halloween, c'est le contribuable qui paye", a déploré le ministre des Transports Clément Beaune.

L'exécutif aura toutefois le loisir de ne pas les retenir au moment de dégainer un quatrième 49.3, évoqué pour cette semaine. Il viendrait clore la première lecture des budgets à l'Assemblée.


Salamé au 20H: Glucksmann «très fier» mais reconnaît une «incompatibilité» s'il concourt en 2027

L'eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann s'est dit jeudi "très heureux", "très fier", de voir sa compagne Léa Salamé présenter le 20 Heures de France 2 depuis lundi, tout en reconnaissant une "incompatibilité" s'il se présentait à la présidentielle en 2027. (AFP)
L'eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann s'est dit jeudi "très heureux", "très fier", de voir sa compagne Léa Salamé présenter le 20 Heures de France 2 depuis lundi, tout en reconnaissant une "incompatibilité" s'il se présentait à la présidentielle en 2027. (AFP)
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  • Interrogé sur la position de Léa Salamé s'il venait à concourir à la présidentielle en 2027, il a reconnu que "c'est évident que ce sera dans ce cas-là un problème et une incompatibilité", sans lever davantage le voile sur ses intentions
  • "On est en 2025 et une femme n'a pas les opinions politiques de son mari et je peux vous garantir d'ailleurs que, en l'occurrence, c'est probablement très vrai sur certains sujets"

PARIS: L'eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann s'est dit jeudi "très heureux", "très fier", de voir sa compagne Léa Salamé présenter le 20 Heures de France 2 depuis lundi, tout en reconnaissant une "incompatibilité" s'il se présentait à la présidentielle en 2027.

"J'ai été extrêmement fier et j'ai trouvé que c'était un moment incroyable pour elle donc c'est ma fierté pour elle, pour ce qu'elle représente, pour ce à quoi elle aspire", a déclaré le chef de Place publique sur franceinfo, rappelant que le couple "a toujours su bien être complètement séparés dans (ses) carrières".

Interrogé sur la position de Léa Salamé s'il venait à concourir à la présidentielle en 2027, il a reconnu que "c'est évident que ce sera dans ce cas-là un problème et une incompatibilité", sans lever davantage le voile sur ses intentions.

"On est en 2025 et une femme n'a pas les opinions politiques de son mari et je peux vous garantir d'ailleurs que, en l'occurrence, c'est probablement très vrai sur certains sujets", a ajouté le responsable politique, qui s'exprime très rarement sur sa vie privée.

Ne sont-ils pas d'accord sur tout ? "Ah ben non, non, d'ailleurs, c'est un fait que je partage devant vous", a-t-il ironisé.

Mais "à la fin, je vous dis, il n'y aura pas de conflit d'intérêts en cas de" candidature à la présidentielle, a-t-il conclu.

Alors que le gouvernement Bayrou est à quelques jours de sa très probable chute, les manœuvres vont bon train pour sa succession, le PS souhaitant être appelé à former un gouvernement.

"Je veux une personnalité de gauche", a expliqué Raphaël Glucksmann, soucieux "d'essayer autre chose", "une autre méthode" après "deux gouvernements minoritaires de droite successifs".

Mais, a-t-il prévenu, "la personnalité qui doit faire un travail qui est très ingrat" comme Premier ministre sans majorité parlementaire, "ne doit pas être suspecté d'avoir des ambitions pour la suite parce que sinon, les forces politiques a priori de toute façon refuseront de lui faire des cadeaux".

"Je serais suspecté de cela", a-t-il estimé.


LR ne censurera «ni un gouvernement PS, ni un gouvernement RN», assure Wauquiez

La ministre déléguée et porte-parole du gouvernement français Sophie Primas, le ministre français des Outre-mer Manuel Valls et le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement Patrick Mignola quittent l'Élysée à Paris après une réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 3 septembre 2025. (AFP)
La ministre déléguée et porte-parole du gouvernement français Sophie Primas, le ministre français des Outre-mer Manuel Valls et le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement Patrick Mignola quittent l'Élysée à Paris après une réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 3 septembre 2025. (AFP)
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  • Selon son entourage, le patron des députés LR a défini cette ligne "dès l'été 2024" après la dissolution, lorsqu'il s'était engagé à "ne censurer d'office aucun gouvernement, sauf s'il y a des ministres LFI"
  • "Mais évidemment, on ne s'interdit rien ensuite en fonction de la politique qui est menée", a ajouté cette source

PARIS: Les Républicains ne censureront "ni un gouvernement PS, ni un gouvernement RN" pour éviter "une instabilité catastrophique", a assuré jeudi le patron des députés LR Laurent Wauquiez qui a cependant précisé qu'un "grand nombre" de ses troupes ne votera pas la confiance lundi à François Bayrou.

"On ne censurera pas un gouvernement socialiste, on ne censurera pas un gouvernement RN", a affirmé le député de Haute-Loire sur BFMTV.

"Nous ne faisons pas partie de ceux qui font tomber des gouvernements dans ce pays, tout simplement (...) parce que je pense que l'instabilité est catastrophique pour le pays".

Selon son entourage, le patron des députés LR a défini cette ligne "dès l'été 2024" après la dissolution, lorsqu'il s'était engagé à "ne censurer d'office aucun gouvernement, sauf s'il y a des ministres LFI".

"Mais évidemment, on ne s'interdit rien ensuite en fonction de la politique qui est menée", a ajouté cette source.

Comme Nicolas Sarkozy dans Le Figaro mardi, Laurent Wauquiez a estimé que le Rassemblement national "fait partie de l'arc républicain", tout en reprochant au parti d'extrême droite de ne pas vouloir "réguler l'assistanat".

"Un parti qui se présente à des élections, qui a des élus et qui n'est pas interdit et qui est légal, bien sûr qu'il est dans l'arc républicain", a affirmé celui qui a plaidé ce printemps pour une alliance des droites allant de Gérald Darmanin à Sarah Knafo (Reconquête).

Avant le vote de confiance de lundi à l'Assemblée, qui devrait acter la chute du gouvernement, il s'est déclaré "déçu" par François Bayrou, qui ne s'est pas engagé publiquement à revenir sur la suppression de deux jours fériés, alors qu'il "m'avait donné son accord" lors d'une réunion avec la direction de LR mardi à Matignon.

"J'espère qu'aujourd'hui ou demain ce sera clarifié de façon beaucoup plus nette", a ajouté le député de Haute-Loire, laissant entendre que tous les députés LR ne suivront pas dans ces conditions les mots d'ordre du parti pour soutenir le chef du gouvernement.

"A l'intérieur aujourd'hui des Républicains, si jamais la voix de la France qui travaille n'est pas entendue, il y a un grand nombre de députés qui ne voteront" pas la confiance, a-t-il assuré, précisant que lui-même la votera "sans enthousiasme, mais par esprit de responsabilité".


Entre Bayrou et le PS, la défiance règne

Le Premier ministre français François Bayrou quitte le Palais de l'Élysée après une réunion hebdomadaire du cabinet, le 3 septembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou quitte le Palais de l'Élysée après une réunion hebdomadaire du cabinet, le 3 septembre 2025. (AFP)
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  • La tentative de François Bayrou de construire un "grand courant central" en s’alliant à l’aile modérée du PS a échoué, sur fond de malentendus historiques et tensions autour du budget 2025
  • Le Parti socialiste refuse désormais tout compromis, dénonçant une "provocation" dans la méthode Bayrou

PARIS: A Matignon, François Bayrou devait assurer la stabilité en nouant des accords avec le PS. Neuf mois plus tard, le Premier ministre est proche de la chute, ultime chapitre d'une "histoire d'actes manqués" entre les socialistes et le fondateur du MoDem.

François Bayrou connaît ses classiques. Hors micro, il lui arrive de citer cette réplique d'un film dialogué par Michel Audiard: "J'ai été enfant de choeur. Mon père tenait un bistrot. Et j'ai été militant socialiste. C'est dire si j’ai entendu des conneries dans ma vie".

Fasciné par François Mitterrand, mais ancien ministre d’Édouard Balladur et d'Alain Juppé, le patron du MoDem n'est pas d'obédience socialiste. Mais depuis qu'il a choisi d'émanciper le centre de la droite, la frange sociale-démocrate du PS fait l'objet de ses convoitises dans le but de forger ce "grand courant central de la vie politique française". Contrariant ainsi le parti à la rose et son logiciel d'union de la gauche.

"Quelle différence entre Delors et moi ? Entre Jean-Yves Le Drian et moi ? Aucune", a régulièrement plaidé, en privé, le Premier ministre, qui a longtemps espéré le soutien de Michel Rocard en 2007.

Entre François Bayrou et le PS, le premier épisode de cette "histoire d'actes manqués" --expression du premier vice-président du MoDem Marc Fesneau-- date de cette année-là, Ségolène Royal, en ballotage défavorable face à Nicolas Sarkozy, cherchant en vain l'alliance avec le centriste, jusque sous ses fenêtres du 7e arrondissement de Paris.

Le malentendu s'est accentué en 2012 quand François Bayrou, après avoir voté pour François Hollande --"c'est moi qu'il l'ai fait élire", estime-t-il-- se retrouve battu aux législatives par une candidate PS.

Renversement de tendance en 2017: François Bayrou s'allie avec Emmanuel Macron. Moribond après le quinquennat de François Hollande, le PS subit la fuite de ses cadres. Mais sept ans plus tard, le vent a tourné, le président a dissout l'Assemblée et le PS, bien qu'allié avec La France insoumise, est redevenu incontournable.

Après l'échec de Michel Barnier, censuré par le RN dont il convoitait la mansuétude, "le pari de Bayrou était de traiter avec les socialistes", explique un proche. Lesquels, moyennant quelques concessions, laissent passer le budget 2025.

-"Provocation"-

"On a considéré qu’il fallait lui laisser le bénéfice du doute. On se disait que le budget était plutôt imaginé par Attal et élaboré par Barnier. Mais là, c’est le sien. Ce qu’il propose le 15 juillet, c’est une véritable provocation", explique le président des sénateurs socialistes, Patrick Kanner.

Dès l'hiver, les relations se sont rapidement dégradées. Après sa sortie sur le "sentiment" de "submersion" migratoire, les socialistes déposent une motion de censure. "François les a atomisés", se remémore un proche.

L'affaire Bétharram fournit un nouvel épisode, avec une question piquante posée à l'Assemblée par Colette Capdevielle, députée PS des Pyrénées-Atlantiques, le fief du Premier ministre.

Nouvelle contrariété avec la réélection d'Olivier Faure, artisan de l'alliance avec LFI, à la tête du PS. Jusqu'à l'échec du "conclave" sur les retraites qui fragilise la méthode Bayrou.

Dès les annonces du 15 juillet, les socialistes promettent la censure. François Bayrou ne quitte pas Paris mais aucune négociation ne s'enclenche. "Ils étaient en vacances", avance le Premier ministre. Nouveau psychodrame.

"Je me suis dit: un Bayrou qui s’est imposé comme Premier ministre à Macron, il va aussi imposer une méthode, une façon de travailler différemment. Et il ne se passe rien. C'est l'inverse", explique le député PS Jérôme Guedj.

"Bayrou n'a mis personne en condition de voter la confiance. Même avec la meilleure volonté du monde, c'était compliqué", explique une proche de François Hollande. Lequel a pourtant "activement travaillé contre la censure".

François Bayrou annonce un vote de confiance, le PS la lui refuse quasi-immédiatement. Le contre-budget proposé par le PS achève de convaincre le MoDem qu'aucun compromis n'est possible. Rupture consommée.

"Le PS nous a toujours renvoyés dans un camp, n'a jamais ouvert son jeu aux modérés. Continûment, par confort, ils n’ont jamais accepté qu’on puisse être autre chose que le camp de la droite ou le camp Macron, en nous y enfermant", regrette Marc Fesneau.