Quatre semaines au procès du crash du Rio-Paris: quelques réponses et beaucoup de questions

Cette photo d'archive publiée le 8 juin 2009 par la marine brésilienne montre des plongeurs récupérant une partie de la queue de l'avion A330 d'Air France qui s'est écrasé en plein vol au-dessus de l'océan Atlantique alors qu'il reliait Rio de Janeiro à Paris. (Photo de la Marine brésilienne / AFP)
Cette photo d'archive publiée le 8 juin 2009 par la marine brésilienne montre des plongeurs récupérant une partie de la queue de l'avion A330 d'Air France qui s'est écrasé en plein vol au-dessus de l'océan Atlantique alors qu'il reliait Rio de Janeiro à Paris. (Photo de la Marine brésilienne / AFP)
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Publié le Vendredi 04 novembre 2022

Quatre semaines au procès du crash du Rio-Paris: quelques réponses et beaucoup de questions

  • Le premier jour du procès, le 10 octobre, fut électrique, entre les dirigeants du constructeur et de la compagnie aérienne déclarant leur «compassion» et certaines parties civiles explosant de colère, plus de treize ans après l'accident qui a fait 228 mor
  • Tous ont entendu, pour la première fois et à huis clos le 17 octobre, l'enregistrement des voix des pilotes, issu des boites noires repêchées à 3.900 mètres au fond de l'Atlantique

PARIS : Pendant quatre semaines de procès sur le crash du Rio-Paris en 2009, l'attention du tribunal s'est focalisée, lors de débats techniques, sur la réaction des pilotes de l'AF447, sondant en creux les responsabilités d'Airbus et d'Air France avant l'interrogatoire de leurs représentants.

Le premier jour, le 10 octobre, fut électrique, entre les dirigeants du constructeur et de la compagnie aérienne déclarant leur «compassion» et certaines parties civiles explosant de colère, plus de treize ans après l'accident qui a fait 228 morts.

Depuis, les débats sont devenus techniques à la 31e chambre qui a entendu une vingtaine de témoins: gendarmes, experts aéronautiques, responsables des autorités de contrôle, ancien cadres des entreprises prévenues, pilotes.

Procédure «IAS douteuses», écran «ECAM», rapport «ASR»... Présidé par Sylvie Daunis, récemment aux commandes du procès de la Yemenia Airways, le tribunal a pénétré les rouages du monde de l'aviation, maniant son vocabulaire riche en sigles et en expressions anglaises.

Chaque jour, entre vingt et trente proches des victimes s'assoient du côté gauche de la salle d'audience. A droite, les équipes d'Airbus et d'Air France, souvent en costume, occupent là aussi plusieurs rangs. Devant chaque partie, une foule de robes noires.

Tous ont entendu, pour la première fois et à huis clos le 17 octobre, l'enregistrement des voix des pilotes, issu des boites noires repêchées à 3.900 mètres au fond de l'Atlantique.

Un moment «très fort» qui a permis de saisir «l'incompréhension» de pilotes qui ont «tout tenté», et d'écarter un «scénario d'épouvante» du côté de la cabine passagers, a estimé Me Alain Jakubowicz, avocat de l'association Entraide et Solidarité AF447.

- «Effet de surprise» -

En pleine nuit le 1er juin 2009, l'A330 traversait la zone du «Pot au noir» quand il a perdu ses indications de vitesse, à cause du givrage des sondes Pitot. Une panne qui a notamment entraîné une déconnexion du pilote automatique et un basculement dans un mode de pilotage dégradé. L'avion a heurté l'océan 4 mn 23 plus tard.

Pourquoi le copilote aux commandes a-t-il tiré sur le manche, entraînant une trajectoire ascendante qui sera funeste ?

Plusieurs hypothèses ont été émises à la barre, certains y voyant une compensation «réflexe» à un affichage erroné de perte d'altitude, d'autres une réaction à une impression de «survitesse», d'autres encore la volonté de sortir des nuages du Pot au noir pour rejoindre le ciel clair.

Les trois pilotes, tous qualifiés, n'ont pas diagnostiqué la panne, ni appliqué les procédures en vigueur. Ils ont aussi ignoré l'alarme de décrochage, qui a retenti durant 54 secondes: l'ont-ils jugée incorrecte ou ont-ils été victimes d'un «effet tunnel» lié au stress ?

L'«effet de surprise», justement, a été longuement soupesé. Car la compagnie comme le constructeur, jugés pour homicides involontaires, sont entre autres soupçonnés d'avoir «sous-estimé» le danger et trop peu préparé les équipages au gel des sondes.

Si la procédure en cas de perte des vitesses était valable selon Airbus pour «tous les niveaux de vol», elle a été jugée «inadaptée» par les premiers experts, car elle était enseignée en basse altitude. Or l'AF447 était à près de 11 km d'altitude.

- «Énorme défaillance» -

Par ailleurs, il existait bien une procédure face à l'alarme annonçant le décrochage, mais pas pour récupérer un décrochage engagé. Celle-ci a été mise en place après l'accident, en 2010.

«N'y a-t-il pas là une énorme défaillance du constructeur ?» a insisté Thibault de Montbrial, avocat des familles allemandes. Airbus a fait valoir que ces compétences relevaient du pilotage «de base».

Si le phénomène des cristaux de glace en haute altitude était alors mal connu, les pannes de sondes se sont multipliées en 2008, passant de une à quatre par an, à 17 - pour des raisons qui restent encore aujourd'hui mystérieuses.

Trois pilotes alors aux commandes en ont fait le récit, l'un d'eux décrivant la «sidération» face à un «festival» de pannes «qui vous sautent à la figure». Interrogés par la partie civile, ils ont dit ne pas savoir s'ils auraient «fait mieux» que l'AF447.

Peu de précédents ont néanmoins été aussi graves et, à l'époque, les rapports d'incidents ne restituaient pas le «ressenti» des pilotes, ont fait valoir les prévenus.

Air France avait diffusé une note de sécurité en novembre 2008, Airbus a abordé des incidents dans sa revue «Survol», à destination des navigants. Était-ce assez ?

A près de la moitié d'un procès qui doit s'achever le 8 décembre, les débats «mettent le projecteur sur le constructeur», a estimé Me Sébastien Busy, autre avocat de l'association Entraide et Solidarité, disant «attendre avec impatience» les «explications d'Airbus».

Jusqu'ici restés discrets, les prévenus doivent être interrogés à partir de mercredi.


L’histoire de Donia, arrivée de Gaza à Paris, le quotidien morbide des Gazaouis qui ne veulent que vivre

Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
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  • Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
  • Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable.

PARIS: Depuis le début de la guerre à Gaza, les récits qui parviennent à franchir les ruines et le silence imposé sont rares.
Derrière les chiffres et les bilans atones relayés par les médias, il y a des voix : celles de civils qui ont vu leur existence basculer en quelques heures.
Parmi elles, Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable. Donia témoigne de ce que signifie vivre la guerre : vivre avec la peur, la faim, fuir sous les bombes, errer d’un abri de fortune à un autre.
Marcher pour ne pas crever, marcher avec le seul souci de garder en vie ses deux enfants (une fille et un garçon) restés avec elle, les deux autres étant en Égypte.
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous.
Son récit, émouvant par-dessus tout, saccadé par de longs silences et des larmes qui coulent spontanément sur les joues, n’en est pas moins ferme : pour elle, indéniablement, Gaza est le foyer des Gazaouis qui feront tout pour reconstruire.

 


Lecornu recevra les socialistes mercredi, annonce Olivier Faure

Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
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  • Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi
  • Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs

PARIS: Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure.

"On a rendez-vous mercredi matin et donc nous le verrons pour la première fois", a déclaré M. Faure lundi sur France 2. Les Ecologistes de Marine Tondelier et le Parti communiste de Fabien Roussel ont également indiqué à l'AFP être reçus mercredi, respectivement à 14H et 18H.

Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi.

Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs.

Au coeur de ce rendez-vous le projet de budget 2026 que le nouveau gouvernement devra présenter avant la mi-octobre au Parlement.

Les socialistes posent notamment comme conditions un moindre effort d'économies l'année prochaine que ce qu'envisageait François Bayrou et une fiscalité plus forte des plus riches, à travers la taxe sur les très hauts patrimoines élaborée par l'économiste Gabriel Zucman (2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros).

Mais Sébastien Lecornu, s'il s'est dit prêt samedi à "travailler sans idéologie" sur les questions "de justice fiscale" et de "répartition de l'effort", a déjà fait comprendre son hostilité à cette taxe Zucman, et notamment au fait de taxer le patrimoine professionnel "car c'est ce qui permet de créer des emplois".

"Quand on parle patrimoine professionnel, vous pensez à la machine outil ou aux tracteurs mais pas du tout. On parle d'actions, la fortune des ultrariches, elle est essentiellement en actions", lui a répondu M. Faure.

"Si vous dites que, dans la base imposable, on retire ce qui est l'essentiel de leur richesse, en réalité, vous n'avez rien à imposer", a-t-il argumenté.

"C'était déjà le problème avec l'Impôt sur la fortune (ISF, supprimé par Emmanuel Macron) qui touchait les +petits riches+ et épargnaient les +ultrariches+ parce que les +ultrariches+ placent leur argent dans des holdings", a-t-il reconnu.

 


Pour Sébastien Lecornu, un premier déplacement consacré à la santé

Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
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  • Déplacement symbolique à Mâcon : Pour son premier déplacement, Sébastien Lecornu met l'accent sur l'accès aux soins et le quotidien des Français
  • Conscient de l'absence de majorité, il consulte partis et syndicats, cherchant des terrains d'entente sur le budget, tout en laissant la porte ouverte à une fiscalité plus juste

PARIS: Sébastien Lecornu se rend samedi en province, à Mâcon, pour son premier déplacement en tant que Premier ministre consacré à la santé et à "la vie quotidienne" des Français, délaissant pendant quelques heures les concertations qu'il mène activement à Paris avant de former un gouvernement.

Quatre jours à peine après sa nomination, le nouveau et jeune (39 ans) locataire de Matignon va à la rencontre des Français, pour qui il reste encore un inconnu. Il échangera notamment avec des salariés d'un centre de santé de Saône-et-Loire dont le but est d'améliorer l'accès aux soins.

Lui-même élu local de l'Eure, où il a été maire, président de département et sénateur, ce fils d'une secrétaire médicale et d'un technicien de l'aéronautique avait assuré dès le soir de sa nomination "mesurer les attentes" de ses concitoyens et "les difficultés" qu'ils rencontraient.

Celles-ci sont souvent "insupportables" pour accéder à un médecin ou à un professionnel de santé, parfois "source d'angoisse", souligne son entourage. Le Premier ministre entend dans ce contexte "témoigner de la reconnaissance de la Nation à l’égard des personnels soignants" et "réaffirmer la volonté du gouvernement de faciliter l’accès aux soins".

Il s'agit aussi pour Sébastien Lecornu de convaincre l'opinion, autant que les forces politiques, du bien-fondé de sa méthode: trouver des terrains d'entente, en particulier sur le budget, permettant de gouverner sans majorité.

Sébastien Lecornu est très proche d'Emmanuel Macron, avec qui il a encore longuement déjeuné vendredi à l'Elysée.

- Mouvements sociaux -

Sa nomination coïncide avec plusieurs mouvements sociaux. Le jour de sa prise de fonction, une mobilisation lancée sur les réseaux sociaux pour "bloquer" le pays a réuni 200.000 manifestants, et une autre journée de manifestations à l'appel des syndicats est prévue jeudi.

"Il y a une grande colère" chez les salariés, a rapporté Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, premier syndicat de France, à l'issue d'une entrevue vendredi avec le nouveau Premier ministre, qui lui a dit travailler sur une "contribution des plus hauts revenus" dans le budget 2026.

C'est sur le budget que ses deux prédécesseurs, François Bayrou et Michel Barnier, sont tombés. Et Sébastien Lecornu cherche en priorité une forme d'entente avec les socialistes.

Mais il lui faut dans le même temps réduire les déficits, alors que l'agence de notation Fitch a dégradé vendredi soir la note de la dette française.

Le centre et la droite de la coalition gouvernementale se disent prêts à taxer plus fortement les ultra-riches sans pour autant aller jusqu'à l'instauration de la taxe Zucman sur les plus hauts patrimoines, mesure phare brandie par les socialistes et dont LR ne veut pas.

Une telle mesure marquerait en tout cas une des "ruptures" au fond prônées par Sébastien Lecornu à son arrivée, puisqu'elle briserait le tabou des hausses d'impôts de la macronie.

- Méthode -

Sébastien Lecornu veut aussi des changements de méthode.

Il a d'abord réuni jeudi --pour la première fois depuis longtemps-- les dirigeants des partis du "socle commun", Renaissance, Horizons, MoDem et Les Républicains, afin qu'ils s'entendent sur quelques priorités communes.

Un format "présidents de parti" qui "permet de travailler en confiance, de façon plus directe, pour échanger sur les idées politiques, sur les arbitrages", salue un participant.

Avant les oppositions et à quelques jours d'une deuxième journée de manifestations, il a consulté les partenaires sociaux, recevant vendredi la CFDT et Medef, avant la CGT lundi.

En quête d'un compromis pour faire passer le budget, le chef de gouvernement pourrait repartir du plan de son prédécesseur François Bayrou délesté de ses mesures les plus controversées. A l'instar de la suppression de deux jours fériés.

L'hypothèse d'une remise sur les rails du conclave sur les retraites semble aussi abandonnée. Les partenaires sociaux refusent de toute façon de le rouvrir.

Des gestes sont attendus à l'égard des socialistes alors qu'à l'Elysée, on estime que le Rassemblement national, premier groupe à l'Assemblée nationale, se range désormais comme la France insoumise du côté du "dégagisme".

Cultivant une parole sobre voire rare, Sébastien Lecornu ne s'exprimera qu'à l'issue de ces consultations "devant les Français", avant la traditionnelle déclaration de politique générale, devant le Parlement.