«C'est pas fini»: En Irak, les rebelles kurdes iraniens face aux missiles de Téhéran

Un peshmerga kurde iranien membre du Parti démocratique du Kurdistan d'Iran (KDPI) inspecte les dégâts au siège du parti suite à une attaque transfrontalière iranienne dans la ville de Koye (Photo, AFP).
Un peshmerga kurde iranien membre du Parti démocratique du Kurdistan d'Iran (KDPI) inspecte les dégâts au siège du parti suite à une attaque transfrontalière iranienne dans la ville de Koye (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 28 novembre 2022

«C'est pas fini»: En Irak, les rebelles kurdes iraniens face aux missiles de Téhéran

  • Dénonçant les discriminations dont souffre la minorité kurde d'Iran, le PDKI veut un «Iran fédéral»
  • «Nous sommes laïques et nous luttons pour les droits des femmes»

KOYSINJAC, Irak: Un toit enfoncé, un mur explosé et des éclats de verre: "c'est les missiles du régime". Dans leur base arrière du nord de l'Irak, les rebelles kurdes iraniens recensent les dégâts causés par le feu de Téhéran, en attendant de nouvelles frappes.

Leur QG, ils l'appellent "La Citadelle". Ce fort de l'époque de Saddam Hussein semble tout droit sorti du "Désert des Tartares". Il est planté à flanc d'une colline désertique, à l'écart de Koysinjaq (Koya, en kurde), gros bourg du Kurdistan d'Irak où le Parti démocratique du Kurdistan d'Iran (PDKI), qualifié de "terroriste" par Téhéran, a élu domicile en 1993.

C'est aussi l'une des cibles des drones et missiles de l'Iran.

"Le régime iranien nous a bombardés trois fois en moins de deux mois", relève Karim Farkhapour, un dirigeant du PDKI. Dans les rangs de son mouvement, douze personnes ont été tuées et 20 autres blessées, selon lui.

Les militants du PDKI ont évacué le fort, mais les dégâts sont encore nettement visibles, notamment après la dernière salve en date, tirée il y a une semaine.

Du toit de la bibliothèque pendouillent des câbles électriques, des étagères déchiquetées gisent au sol. Dans une autre salle, M. Farkhapour slalome entre les gravats pour atteindre un drapeau kurde miraculeusement indemne.

"Le régime de Téhéran va encore nous viser. C'est pas fini, vous verrez", dit-il, un revolver arrimé à la ceinture de son habit traditionnel.

«Mensonge»

Ce n'est pas la première fois que les Gardiens de la Révolution, armée idéologique de la République islamique, revendiquent des frappes contre le PDKI, mais les récents bombardements, qui ont aussi visé d'autres groupes rebelles kurdes iraniens en Irak, ont pris une acuité particulière en raison du contexte politique en Iran.

Le pouvoir iranien accuse ces factions d'"importer des armes" depuis l'Irak et d'encourager les manifestations qui secouent l'Iran depuis la mort le 16 septembre de la jeune Kurde iranienne Mahsa Amini, après son arrestation par la police des mœurs.

"Faux", rétorque Moustafa Mouloudi, l'un des dirigeants du PDKI à Koysinjaq.

"Il n'y a aucune preuve que nous ayons fait passer des armes en Iran", dit-il. "C'est un mensonge proféré par le régime pour cacher la vérité au peuple. Le terroriste, c'est le régime".

Qui sont ces opposants kurdes iraniens installés au Kurdistan d'Irak?

Depuis des décennies, l'opposition kurde iranienne a trouvé refuge au Kurdistan d'Irak, région autonome frontalière de l'Iran. Ces mouvements armés ont toutefois largement abandonné leur insurrection pour se concentrer sur le militantisme politique.

Avec les manifestations qui secouent l'Iran depuis plus de deux mois, Téhéran a intensifié ses bombardements contre ces groupes.

Opposition de longue date 

Installées en Irak depuis les années 1980 - avec la bénédiction de Saddam Hussein en pleine guerre avec le voisin iranien - les factions de l'opposition kurde iranienne sont qualifiées de "terroristes" et "séparatistes" par l'Iran qui les accuse d'attaques contre les forces iraniennes.

Après des décennies d'insurrection armée, ces mouvements limitent drastiquement leurs activités militaires. Mais ils disposent de combattants, qui s'entraînent au maniement des armes sur des bases dans les montagnes du Kurdistan d'Irak (nord).

Très à gauche politiquement, encourageant les valeurs féministes, ces mouvements se présentent souvent comme des partis sociaux-démocrates.

Dénonçant les discriminations dont souffre la minorité kurde d'Iran (environ 10 millions d'habitants sur les 83 millions que compte le pays), le PDKI veut un "Iran fédéral" dans lequel serait créée une province kurde dotée d'une large autonomie, explique Karim Farkhapour.

"Nous sommes laïques et nous luttons pour les droits des femmes", assure-t-il.

«La peur au ventre»

L'organisation, financée grâce notamment aux dons des sympathisants, obéit à une hiérarchie rigide. Pour preuve: lors d'une visite aux militants du PDKI à Koysinjaq, l'AFP est invitée à ne pas s'écarter du programme établi par les instances dirigeantes.

Au sein du PDKI, "nous sommes libres", assure de son côté Shaunem Hamzi, militante de 36 ans vivant à Koysinjaq avec ses parents.

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Une famille kurde iranienne affiliée au PDKI sont assis dans leur maison de la ville de Koye à l'est du district d'Arbil dans la région autonome kurde du nord de l'Irak, le 26 novembre 2022 (Photo, AFP).

Les cheveux au vent, la jeune femme dit avoir vécu dans un camp du PDKI installé à 500 mètres de la citadelle. Avec 200 autres familles, elle habitait une de ces maisons en parpaings ou en béton de plain-pied qui formait ce village miniature. Jusqu'aux salves de Téhéran.

Les dernières attaques "ont été beaucoup plus intenses que les précédentes. Les enfants, les familles ont eu très peur. Maintenant, nous vivons la peur au ventre", énonce-t-elle.

Comme tous les autres habitants, Shaunem Hamzi a dû quitter le camp et vit un jour dans une maison trouvée par le PDKI, un autre jour dans une autre.

En tant que femme kurde iranienne, elle affirme s'identifier fortement au mouvement de contestation qui secoue l'Iran.

"Si le régime tente de nous stopper ne serait-ce que temporairement, les manifestations repartiront quand même de plus belle, parce que c'est dans nos cœurs", tonne-t-elle. "Les protestataires n'obéiront jamais aux règles du régime".


Israël: des élus favorables à une loi instaurant la peine de mort pour les «terroristes»

 La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
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  • Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative
  • La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture

JERUSALEM: La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir.

La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture.

Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative.

Dans une note explicative de la commission, il est indiqué que "son objectif est de couper le terrorisme à sa racine et de créer une forte dissuasion".

Le texte propose qu'un "terroriste reconnu coupable de meurtre motivé par le racisme ou la haine (...) soit condamné à la peine de mort - de manière obligatoire", ajoutant que cette peine serait "non optionnelle".

La proposition de loi a été présentée par une élue du parti Otzma Yehudit (Force Juive) d'Itamar Ben Gvir.

Ce dernier a menacé de cesser de voter avec la coalition de droite de Benjamin Netanyahu si ce projet de loi n'était pas soumis à un vote parlementaire d'ici le 9 novembre.

"Tout terroriste qui se prépare à commettre un meurtre doit savoir qu'il n'y a qu'une seule punition: la peine de mort", a dit le ministre lundi dans un communiqué.

M. Ben Gvir avait publié vendredi une vidéo de lui-même debout devant une rangée de prisonniers palestiniens allongés face contre terre, les mains attachées dans le dos, dans laquelle il a appelé à la peine de mort.

Dans un communiqué, le Hamas a réagi lundi soir en affirmant que l'initiative de la commission "incarne le visage fasciste hideux de l'occupation sioniste illégitime et constitue une violation flagrante du droit international".

"Nous appelons les Nations unies, la communauté internationale et les organisations pertinentes des droits de l'Homme et humanitaires à prendre des mesures immédiates pour arrêter ce crime brutal", a ajouté le mouvement islamiste palestinien.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères et des expatriés, basé à Ramallah, a également dénoncé cette décision, la qualifiant de "nouvelle forme d'extrémisme israélien croissant et de criminalité contre le peuple palestinien".

"C'est une étape dangereuse visant à poursuivre le génocide et le nettoyage ethnique sous le couvert de la légitimité", a ajouté le ministère.


Frappes israéliennes sur le sud du Liban: deux morts 

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé
  • Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani

BEYROUTH: Des frappes israéliennes sur le sud du Liban ont tué lundi deux personnes et blessé sept autres, a indiqué le ministère libanais de la Santé, au lendemain de la menace d'Israël d'intensifier ses attaques contre le Hezbollah pro-iranien.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions du Hezbollah. Et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé dimanche le Hezbollah de tenter de se "réarmer".

Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani.

Sur place, un photographe de l'AFP a vu des pompiers tenter d'éteindre l'incendie de la voiture visée qui s'est propagé à d'autres véhicules à proximité. Des ouvriers ramassaient les bris de verre des devantures de commerces endommagées, a-t-il également constaté.

Une autre frappe sur un village de la région de Bint Jbeil a fait un mort, selon le ministère de la Santé.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah.

Des centaines de personnes ont participé à leurs funérailles dimanche dans la ville de Nabatiyé, scandant "Mort à Israël".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, ce que le Hezbollah refuse.

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", avait averti le Premier ministre israélien dimanche.


La Turquie mobilise ses partenaires musulmans autour de Gaza

La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
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  • Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël
  • "Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens

ISTANBUL: La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien.

Les ministres de ces sept pays (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie), tous membres de l'organisation de la coopération islamique (OCI), avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, avant la présentation du plan de paix américain six jours plus tard.

Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, alors que "le Hamas semble déterminé" à respecter l'accord, estime-t-il.

"Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi une délégation du bureau politique du Hamas emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien.

Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, M. Fidan doit appeler à la mise en place de mécanismes permettant aux Palestiniens d'assurer la sécurité et la gouvernance de Gaza.

"Agir avec prudence" 

"Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a insisté M. Fidan lors d'un forum à Istanbul.

"Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc, plaidant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Le chef de la diplomatie turque accuse Israël de chercher des prétextes pour rompre le cessez-le-feu.

Mais les efforts d'Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d'un mauvais œil par Israël qui juge Ankara trop proche du Hamas.

Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir la Turquie participer à la force internationale de stabilisation à Gaza.

En vertu du plan de Donald Trump, sur lequel est basé l'accord de cessez-le-feu, cette force de stabilisation, formée principalement de troupes de pays arabes et musulmans, doit se déployer à Gaza à mesure que l'armée israélienne s'en retirera.

Seuls des pays jugés "impartiaux" pourront rejoindre cette force, a cependant prévenu le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

Autre signe de la méfiance du gouvernement israélien : une équipe de secouristes turcs dépêchée pour participer à la recherche de corps, y compris israéliens, dans les ruines de Gaza, attendait toujours en fin de semaine dernière le feu vert israélien pour entrer dans le territoire palestinien, selon Ankara.