Comment le Canada a poussé le G7 à élargir ses perspectives

Une rue de Banff, durant la propagation de la Covid-19 au Canada. Lors d’une conférence de presse en mars, le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, a évoqué les mesures convenues par les dirigeants pour lutter contre le virus (Shutterstock)
Une rue de Banff, durant la propagation de la Covid-19 au Canada. Lors d’une conférence de presse en mars, le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, a évoqué les mesures convenues par les dirigeants pour lutter contre le virus (Shutterstock)
Short Url
Publié le Mercredi 18 novembre 2020

Comment le Canada a poussé le G7 à élargir ses perspectives

  • C’est Paul Martin qui, en tant que ministre des Finances du Canada dans les années 1990, a observé le Groupe des sept (G7) et a pensé que davantage de pays devraient être invités au Forum des plus grandes économies dites «avancées» du monde
  • «Le succès sera jugé par la possibilité d'influencer le comportement des gens dans nos démocraties et peut-être même, ce qui est tout aussi important, le comportement des gens de l’extérieur qui nous regardent»

DUBAÏ: Ce que dit le G20, c’est que «nous sommes tous dans le même bateau.» Cela vous rappelle quelque chose? Si oui, c'est peut-être parce que cette phrase est devenue l'un des slogans de la pandémie de coronavirus de 2020.

Mais cette citation est en fait antérieure à la Covid-19. Elle a été prononcée en 2018 par l’homme parfois désigné comme «le père du G20»: Paul Martin, Premier ministre libéral du Canada de 2003 à 2006.

C’est Paul Martin qui, en tant que ministre des Finances du Canada dans les années 1990, observe la composition du Groupe des sept (G7) et propose que davantage de pays soient invités au Forum des plus grandes économies dites «avancées» du monde. (Le Canada avait été invité à y adhérer en 1976, après coup, mais nous en parlerons plus tard.)

Il s’entretient ainsi avec le secrétaire au Trésor américain Lawrence Summers pour rendre le Sommet plus inclusif. En 1999, après avoir établi une liste et l’avoir présentée au G7, le G20 prend forme en tant qu’organisation parallèle rassemblant les ministres des Finances, avec Paul Martin comme premier président.

C'est à la réunion du G20 à Montréal en 2000 que le Canada émet l’idée que le Groupe s’occupe d’enjeux allant au-delà du financier. Le consensus de Montréal sur la mondialisation affirme que les avantages de la croissance économique devraient être partagés plus équitablement et que les plus démunis soient protégés des coûts de la mondialisation.

«Le G20 est à mon avis un outil essentiel, car il représente le pouvoir de chaque région quel que soit l’état de son économie», explique Paul Martin dans un entretien sur l’histoire du G20 sur le site Internet du Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale (CIGI).

 «Comme j’avais participé à la fondation du G20 pour les ministres des finances, j’ai œuvré de toutes mes forces pour établir un nouveau consensus au plus haut niveau politique, celui des dirigeants», poursuit Paul Martin. «Tout le monde était pour, sauf les États-Unis… J'étais sûr, comme nombre d'entre nous, qu'il faudrait une crise pour l'amener au niveau des dirigeants, et c'est exactement ce qui s'est passé avec la crise de 2008.»

Après que son gouvernement libéral minoritaire a perdu les élections de 2006, Paul Martin démissionne de son poste de président du G20. Ironie de l’histoire, il n’a donc jamais posé sur la traditionnelle «photo de classe» du sommet. Lorsque le G20 réunit pour la première fois des dirigeants en 2008, à Washington en novembre en réponse à la crise financière mondiale, c’est le conservateur Stephen Harper qui est le Premier ministre du Canada.

Justin Trudeau, Premier ministre du Canada
Justin Trudeau, Premier ministre du Canada

C’est ce dernier qui préside le seul sommet des dirigeants du G20 organisé par le Canada, tenu à Toronto en juin 2010 alors que le monde sortait de la récession économique. Bien que cette réunion se déroule sans incident, Stephen Harper fait des émules lors du sommet australien de 2014, en prenant position contre l'annexion de l'Ukraine par la Russie. Le président russe, Vladimir Poutine, quitte le sommet après que Harper lui a, semble-il, dit en lui serrant la main de «sortir d'Ukraine».

Cette position semblait aller à l'encontre de sa propre maxime, que Stephen Harper avait partagée lors du sommet de 2009 à Pittsburgh, aux États-Unis : «Le Canada est assez important pour faire la différence mais pas assez pour menacer qui que ce soit. Et cela constitue un énorme atout s'il est correctement utilisé.»

Cet atout, «correctement utilisé», a longtemps permis au Canada d'être invité à la fête.

En 1975, Pierre Trudeau, en tant que Premier ministre du Canada, avait fait pression pour être invité à une réunion des dirigeants des États-Unis, de Grande-Bretagne, de France, d’Italie, d’Allemagne de l’Ouest et du Japon, surnommée «le Groupe des six», pour discuter de solutions à la crise pétrolière. Bien qu’initialement laissé de côté, le Canada intègre le Groupe un an plus tard, faisant de celui-ci le G7. Il semble donc logique que ce soit le pays qui, à l’avenir, fasse pression pour que d'autres soient inclus.

Lors du sommet du G7 en 1976, Pierre Trudeau cherchait déjà à élargir l'objectif du Groupe, affirmant que son succès devrait être mesuré au-delà de la résolution de problèmes économiques. «Le succès sera jugé par la possibilité d'influencer le comportement des gens dans nos démocraties et peut-être même, ce qui est tout aussi important, le comportement des gens de l’extérieur qui nous regardent, afin qu’ils aient confiance en notre vision de la liberté économique et politique pour résoudre les problèmes», a-t-il déclaré.

«Nous devons travailler ensemble pour avoir un impact qui dépasse nos frontières.»

Justin Trudeau, Premier ministre du Canada

Justin Trudeau, l'actuel Premier ministre canadien, n'était qu'un enfant lorsque son père a prononcé ces mots. En novembre 2015, c’est au sommet des dirigeants du G20 à Antalya, en Turquie, que Trudeau fait des débuts remarqués sur la scène mondiale, moins de deux semaines après être devenu Premier ministre. Et tandis que le jeune dirigeant débute des «bromances» avec l'ancien président américain Barack Obama et plus tard avec le président français, Emmanuel Macron, ses échanges difficiles avec le président américain Donald Trump et le président brésilien, Jair Bolsonaro, ont fait jaser.

Cependant, le Canada a une réputation mondiale à tenir en tant qu’intermédiaire, peut-être mieux illustrée par un autre de ses Premiers ministres libéraux.

 Lester B. Pearson a reçu le prix Nobel de la paix en 1957 pour avoir aidé à créer la première force de maintien de la paix des Nations unies pendant la crise de Suez.

Cette faculté à établir des ponts s'est manifestée après que Justin Trudeau a assisté au sommet virtuel extraordinaire du G20 organisé par le roi Salmane d’Arabie Saoudite sur la pandémie de Covid-19 en mars dernier.

Lors d’une conférence de presse après le sommet, Justin Trudeau évoque les mesures convenues par les dirigeants pour lutter contre la Covid-19, notamment l'injection de 5000 milliards de dollars dans l'économie mondiale et la promesse d'aider des pays plus vulnérables par le biais d'organisations telles que l'ONU et l'Organisation mondiale de la santé.

«Nous devons travailler ensemble pour avoir un impact qui dépasse nos frontières», a souligné Justin Trudeau.

Ou, comme l'a dit le fondateur du G20, Paul Martin : «Nous sommes tous dans le même bateau.»

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Automobile: les équipementiers français pressent Bruxelles d'imposer un contenu local

 Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
Short Url
  • Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe
  • Mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie"

PARIS: Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi.

Dans cette missive adressée à la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et datée du 12 décembre, les dirigeants des équipementiers Valeo, Forvia et OPmobility demandent à la Commission "des mesures claires sur le contenu local lors des annonces du 16 décembre".

Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe, mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie", écrivent Christophe Périllat (Valeo), Martin Fisher (Forvia) et Félicie Burelle (OPmobility).

"Les perspectives actuelles indiquent que 350.000 emplois et 23% de la valeur ajoutée des automobiles dans l'UE sont en danger d'ici 2030 si des mesures fortes ne sont pas prises de manière urgente", ajoutent-ils.

Ces équipementiers soutiennent "la position des ministres français en faveur de +flexibilités ciblées+ dans la réglementation sur (les émissions de) CO2 si elle est assortie de conditions de critères de contenu local, dans l'intérêt des emplois, du savoir-faire dans l'automobile" et de "l'empreinte carbone" en Europe.

Les constructeurs automobiles européens et l'Allemagne notamment réclament depuis des semaines de nets assouplissements dans l'interdiction de vendre des voitures neuves thermiques ou hybrides prévue à partir de 2035.

Les annonces de la Commission sont attendues mardi après-midi.

La semaine dernière, plusieurs ministres français avaient envoyé une lettre aux commissaires européens pour dire qu'ils acceptaient des "flexibilités ciblées", à condition qu'elles s'accompagnent d'une règlementation incitative à la production en Europe.

"On est prêt à faire preuve de flexibilité", avait ensuite expliqué Roland Lescure, ministre français de l'Economie. "Si vous voulez vendre encore un peu de moteurs thermiques en 2035 très bien, mais il faut qu’ils soient faits en Europe", avec "au moins 75% de la valeur ajoutée faite en Europe", avait-il ajouté.


Espagne: amende de 64 millions d'euros contre Airbnb pour avoir publié des annonces de logements interdits

Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays. (AFP)
Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays. (AFP)
Short Url
  • L'amende qui vise Airbnb et atteint précisément 64.055.311 euros est "définitive", a précisé dans un communiqué le ministère de la Consommation
  • "Des milliers de familles vivent dans la précarité à cause de la crise du logement, tandis que quelques-uns s'enrichissent grâce à des modèles économiques qui expulsent les gens de chez eux"

MADRID: Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays.

En Espagne, les plateformes de location de courte durée suscitent un vif débat, surtout dans les grandes villes touristiques, où de nombreux habitants leur reprochent de contribuer à la flambée des loyers.

L'amende qui vise Airbnb et atteint précisément 64.055.311 euros est "définitive", a précisé dans un communiqué le ministère de la Consommation, ajoutant que la plateforme basée aux Etats-Unis devait désormais "corriger les manquements constatés en supprimant les contenus illégaux".

"Des milliers de familles vivent dans la précarité à cause de la crise du logement, tandis que quelques-uns s'enrichissent grâce à des modèles économiques qui expulsent les gens de chez eux", a critiqué le ministre de la Consommation, Pablo Bustinduy, cité dans le communiqué.

"Aucune entreprise en Espagne, aussi grande ou puissante soit-elle, n'est au-dessus des lois", a-t-il poursuivi.

L'Espagne a accueilli en 2024 un nombre record de 94 millions de visiteurs, ce qui en fait la deuxième destination touristique dans le monde derrière la France. Ce chiffre pourrait être battu cette année.

Mais si le tourisme est un moteur de l'économie, de nombreux Espagnols dénoncent la congestion des infrastructures, la disparition des commerces traditionnels, remplacés par des boutiques touristiques, et surtout la flambée des loyers, les propriétaires de logements se tournant vers la location touristique, y compris sur Airbnb, nettement plus rentable.

Face à cette poussée de colère, plusieurs régions et municipalités ont annoncé des mesures ces derniers mois, à l'image de la mairie de Barcelone (nord-est), qui a promis de ne pas renouveler les licences de quelque 10.000 appartements touristiques, qui expireront en novembre 2028.

 


La RATP se cherche un ou une présidente

Cette photographie montre le logo de la société française de transports publics RATP, sur un bâtiment à Paris, le 3 mars 2025. (AFP)
Cette photographie montre le logo de la société française de transports publics RATP, sur un bâtiment à Paris, le 3 mars 2025. (AFP)
Short Url
  • Après le départ de Jean Castex à la SNCF, l’Élysée s’apprête à nommer rapidement le nouveau président ou la nouvelle présidente de la RATP
  • Plusieurs profils circulent, tandis que la régie fait face à d’importants défis

PARIS: Après le départ de Jean Castex à la SNCF, la RATP se cherche un ou une présidente, dont la nomination pourrait intervenir "rapidement", selon des sources concordantes.

L'annonce se fera par communiqué de l'Elysée en vertu de l'article 13 de la Constitution qui prévoit que le président de la République nomme aux emplois civils et militaires de l'Etat.

Suivront, deux semaines plus tard, deux auditions de l'impétrant devant les sénateurs, puis devant les députés. Les parlementaires ont la possibilité de s'opposer au candidat d'Emmanuel Macron s'ils réunissent trois cinquième de leurs votes cumulés contre le nom choisi par l'Elysée.

En revanche, si le candidat est adoubé par le Parlement, son nom est proposé en conseil d'administration comme nouvel administrateur, puis confirmé dans la foulée par un décret suivant le conseil des ministres.

Depuis l'arrivée de l'ancien Premier ministre Jean Castex à la tête de la SNCF début novembre, les rumeurs se multiplient sur le nom de celui ou celle qui sera chargé de lui succéder aux commandes de la Régie autonome des transports parisiens, vieille dame créée le 21 mars 1948 et désormais plongée dans le grand bain de l'ouverture à la concurrence.

Les articles de presse pèsent les différents "profils" pressentis, politiques ou techniques qui pourraient "faire le job".

Les noms qui reviennent le plus souvent sont ceux de Xavier Piechaczyk, président du directoire du distributeur d'électricité RTE et ex-conseiller énergie-transport de Jean-Marc Ayrault et François Hollande, Alain Krakovitch, actuel directeur des TGV et Intercités à SNCF Voyageurs, Jean-François Monteils, président du directoire de la Société des grands projets (SGP) et selon la Tribune, Valérie Vesque-Jeancard, présidente de Vinci Airways et directrice déléguée de Vinci Airports.

"Si le nom sort de l'Elysée avant la fin de l'année, cela permettrait au PDG de prendre ses fonctions fin janvier-début février" souligne un fin connaisseur des milieux ferroviaires qui requiert l'anonymat.

- "Aller vite" -

"Une entreprise industrielle comme la RATP ne peut pas rester sans pilote très longtemps" souligne une autre source, proche du dossier, qui requiert aussi l'anonymat, avant d'ajouter "il faut aller vite, car c'est aussi une boite politique, la RATP".

Une entreprise aux enjeux d'autant plus complexes, que malgré son ancrage initial parisien, la RATP dépend du financement de la région Ile-de-France pour ses matériels, s'étend de plus en plus loin dans la banlieue, voire en métropole, et gère des réseaux de transports dans 16 pays sur les cinq continents.

En France, elle est notamment pressentie pour gérer les transports ferroviaires régionaux autour de Caen en Normandie à partir de 2027 après avoir répondu - via sa filiale RATP Dev - à des appels d'offre d'ouverture à la concurrence.

A Paris, la RATP est en train d'introduire progressivement de nouveaux matériels sur son réseau. Le nouveau métro MF19 construit par Alstom, ira d'abord sur la ligne 10 puis sept autres lignes (7 bis, 3 bis, 13 d'ici 2027, puis 12, 8, 3 et 7 d'ici 2034).

L'ensemble du processus prendra une dizaine d'années environ de travaux de modernisation sur les lignes concernées: beaucoup d'ingénierie fine à organiser pour réaliser les travaux pendant la nuit sans interrompre le trafic diurne et de désagréments pour les voyageurs.

A échéance plus lointaine, le ou la future patronne devra déterminer la stratégie du groupe dans les nouvelles ouvertures à la concurrence qui se dessinent: les tramway en 2030 puis le métro en 2040.

Sur le réseau de bus francilien, où la RATP a d'ores et déjà perdu son monopole, elle est parvenue à conserver l'exploitation de 70% des lignes d'autobus qu'elle gérait à l'issue des dernières vagues d'appels d'offre de mise en concurrence qui se sont achevées cet automne.

En particulier, elle continue d'exploiter via RATP Dev tous les bus de Paris intra-muros et a engagé un processus de verdissement de sa flotte de bus, financé par Ile-de-France Mobilités (IDFM), l'autorité organisatrice des transports.

Ses concurrents Keolis (filiale de la SNCF), Transdev et l'italien ATM ont pris les rênes le 1er novembre des lignes remportées.