Macron promet des réponses concrètes face à la crise du système de santé

Emmanuel Macron dévoilera des "mesures très concrètes, avec des clauses de revoyure précises et rapprochées pour s'assurer de leur exécution", a ajouté la présidence, sans en détailler la teneur. (AFP)
Emmanuel Macron dévoilera des "mesures très concrètes, avec des clauses de revoyure précises et rapprochées pour s'assurer de leur exécution", a ajouté la présidence, sans en détailler la teneur. (AFP)
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Publié le Vendredi 06 janvier 2023

Macron promet des réponses concrètes face à la crise du système de santé

  • Durant la campagne pour sa réélection au printemps, Emmanuel Macron avait d'ailleurs fait de la santé l'un des deux «chantiers majeurs» de son second quinquennat, avec l'école
  • Les médecins libéraux ont manifesté par milliers jeudi à Paris, point d'orgue d'une grève qui a débuté au lendemain de Noël pour réclamer le doublement de la consultation, de 25 à 50 euros

PARIS: Emmanuel Macron a concédé vendredi qu'une partie des revendications des soignants étaient "légitimes" et promis de formuler des réponses à la crise du système de santé avec "respect et intelligence", face à des personnels hospitaliers qui lui ont crié leur mal-être et leur épuisement.

"Il y a des demandes qui existent et qui ont leur part de légitimité et qu’il faut entendre", a-t-il déclaré à son arrivée au Centre hospitalier Sud Francilien (CHSF) de Corbeil-Essonnes (Essonne).

"Il y a aussi une situation à laquelle on doit tous faire face et une responsabilité collective pour que nos compatriotes aient aussi des soignants et puissent trouver pour eux-mêmes, leurs enfants, leurs parents une réponse", a-t-il ajouté.

"On va essayer de faire tout cela avec engagement, respect, intelligence", a assuré le chef de l'Etat, venu adresser ses voeux aux soignants et qui doit faire à cette occasion des annonces "concrètes" à la mi-journée face à un système de santé "à bout de souffle".

Emmanuel Macron, qui était accompagné du ministre de la Santé François Braun, a pu prendre en direct le pouls de l'état du système de soins lors d'un échange avec les équipes du service d'urgences pédiatriques du CHSF.

"C'est très dur", "on veut vous témoigner de notre fatigue", "la rémunération n’est certainement pas à la hauteur des efforts accomplis”, ont enchaîné infirmières, sage-femmes, puéricultrices.

Déserts et pénuries: les plaies ouvertes du système de santé

Ses "vœux aux acteurs de la santé" ont été annoncés tardivement, mais Emmanuel Macron est attendu vendredi au chevet d'un secteur profondément malade et dont les symptômes connus de longue date ne montrent aucun signe d'amélioration.

Déserts médicaux partout

Le diagnostic est vraisemblablement bien pire que ce qu'en disent les statistiques. Selon le ministère de la Santé, 5,7% des Français vivaient dans une "zone sous-dense" en médecins généralistes en 2018. Des chiffres officiels sans doute largement sous-estimés.

L'UFC-Que Choisir dénonce pour sa part un accès aux soins (tant géographique que financier) "particulièrement difficile" pour plus de 20% de la population. La ministre déléguée aux Professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, va encore plus loin, répétant ces derniers mois que "87% du territoire est considéré comme un désert médical".

La situation n'est pas prêt de s'améliorer: alors que les besoins augmentent sous l'effet du vieillissement, la profession traverse un "creux" démographique qui ne sera pas rattrapé avant 2035, le temps que la suppression du "numerus clausus" à l'entrée des études de médecine produise ses effets.

Les politiques d'incitations ayant montré leurs limites, la pression monte de toutes parts et les propositions de loi se multiplient pour restreindre la liberté d'installation des médecins et mieux répartir la pénurie. Le gouvernement s'y oppose et défend un partage des tâches avec les autres soignants, notamment les infirmiers.

Sauf que les praticiens refusent cette perspective et attendent plutôt des hausses de tarifs. En pleine négociation avec l'Assurance maladie, un collectif soutenu par plusieurs syndicats a organisé une grève depuis Noël et une manifestation à Paris pour revendiquer un doublement de la consultation de base, de 25 à 50 euros.

Hôpitaux sans bras

La "triple épidémie" hivernale de bronchiolite, Covid-19 et grippe s'est abattue à la fin de l'automne sur un système hospitalier déjà exsangue en raison d'une pénurie structurelle de soignants. Il manque jusqu'à 40% d'effectifs paramédicaux (infirmiers et aides-soignants) dans certains services.

Aux urgences, la plupart des mesures de la "mission flash" (accès filtré, majoration des heures de nuit, recours aux infirmiers libéraux) mises en œuvre durant l'été ont été pérennisées, sans faire de miracle.

En décembre, un collectif de plus de 5.000 médecins, soignants et agents hospitaliers a imploré l'exécutif d'agir urgemment pour soulager un hôpital public "en train de se fissurer et bientôt de s'écrouler", incapable "d'amortir la moindre crise sanitaire". Il exige notamment un horaire défini et un ratio maximal de patients par infirmière, ce qui nécessiterait d'embaucher "environ 100.000 infirmières" sur trois ans.

Au-delà des recrutements, l'enjeu pour l'hôpital est déjà de garder ses soignants, alors qu'aux Hôpitaux de Paris, par exemple, les effectifs infirmiers ont fondu de 10% en quatre ans, aggravant à 16% le taux de lits fermés. Les revalorisations financières issues du Ségur de la santé en 2020 n'ont pas suffi. Tous les professionnels insistent sur la nécessité d'améliorer les conditions d'exercice et de vie au travail.

Spécialités en crise

L'épidémie précoce et particulièrement virulente de bronchiolite a jeté une lumière crue sur le manque de pédiatres à l'hôpital comme en ville.

"Au printemps, restera-t-il quelqu'un pour soigner les enfants?", se sont interrogés en décembre quelque 10.000 soignants réunis au sein du Collectif de pédiatrie.

Pour répondre à cette crise "historique", l'exécutif a promis des "assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant" pour le printemps, en constituant un comité de pilotage mais sans préciser la date de ce rendez-vous à des professionnels qui s'impatientent.

Des assises, la psychiatrie en a déjà connues en septembre 2021, avec à la clé la création de 800 postes d'infirmiers dans les centres médico-psychologiques (CMP).

Une annonce jugée largement insuffisante, alors que la pénurie de médecins et d'infirmiers touche aujourd'hui cinq établissements hospitaliers sur six, selon les syndicats d'un secteur de la santé mentale "délabré".

Le gouvernement assure avoir "pleinement conscience" des difficultés de la psychiatrie. Des discussions devraient avoir lieu en ce début 2023 en vue de la présentation d'un nouveau "plan d'ampleur".

«Plusieurs vitesses»

Signe du caractère prioritaire accordé à la crise qui frappe l'hôpital mais aussi la médecine de ville, c'est la première fois depuis qu'il est arrivé à l'Elysée en 2017 qu'Emmanuel Macron dédie une cérémonie de vœux spécifiquement aux "acteurs de la santé, hospitaliers et libéraux".

Ses annonces sont très attendues par des personnels qui ne cessent de dénoncer la "déliquescence" de l'offre de soins, avec des urgences débordées et un manque criant de soignants, sur fond de triple épidémie hivernale de Covid-19, grippe et bronchiolite.

Dans un rare communiqué commun, l'ordre et les syndicats de médecins ont esquissé jeudi, à la veille des "décisions politiques", leur ligne rouge en affirmant "s'opposer à une médecine à plusieurs vitesses" qui ne respecterait pas leur rôle de "chef d'orchestre" du système.

Le premier mandat d'Emmanuel Macron a été marqué, après l'irruption de la pandémie en 2020, par le "Ségur de la santé", avec 12 milliards d'euros annuels pour mieux rémunérer les soignants et 19 milliards d'investissements dans les hôpitaux.

Mais dès 2018, son plan "Ma Santé 2022" avait installé sa philosophie, avec la suppression du "numerus clausus" qui plafonnait le nombre d'étudiants en médecine.

Le défi reste néanmoins majeur alors qu'il faut dix ans pour former un médecin. “On n’a pas assez de soignants et on va mettre des années à en faire" mais "on peut mettre plus de paramédicaux", a lancé le président.

Il avait reconnu qu'il faudrait "aller beaucoup plus loin, plus vite et plus fort", notamment en renforçant la prévention, "la simplification de l'hôpital", "l'accès aux soins en urgence" et la lutte contre les déserts médicaux.

Retraites: cinq ans d'atermoiements et revirements de Macron

Du grand système universel concocté en 2017 mais balayé par le Covid en 2020, à un simple report de l'âge de départ que le gouvernement doit présenter mardi, le dossier des retraites a été marqué par de nombreux atermoiements et revirements, sur le fond comme la méthode.

Les ambitions «universelles»

"Le bon débat n'est pas tant entre ceux qui voudraient passer la retraite à 65 ans ou la laisser à 62 ans, avoir tant ou tant de trimestres, mêmes si ces questions ne doivent pas être éludées", écrivait fin 2016 Emmanuel Macron dans son livre "Révolutions". Face au candidat de la droite, François Fillon, le futur président s'oppose à un décalage de l'âge de départ qui "n'est pas juste". Il entend "construire progressivement un régime universel" en fusionnant les dizaines de régimes existants.

Les «phrases» de Delevoye

En septembre 2017, l'ancien ministre RPR Jean-Paul Delevoye est nommé Haut-Commissaire aux retraites.

Le chantier est lancé avec force concertations mais ne débouche sur un projet que fin 2019, la crise des "gilets jaunes" ayant bouleversé l'agenda. Une réforme "très ambitieuse" mais "illisible" portée par un ministre qui "faisait des phrases mais ne maîtrisait pas son dossier", selon un acteur-clé. M. Delevoye finira par démissionner, fragilisé par des révélations sur des mandats non déclarés.

Le pivot de «l'âge pivot»

En avril 2019, Emmanuel Macron refuse toujours le report de l'âge légal: "quand aujourd’hui on est peu qualifié, quand on vit dans une région en difficulté industrielle, quand on est soi-même en difficulté, qu’on a une carrière fracturée, bon courage déjà pour arriver à 62 ans".

Mais le débat s'est installé au sein de sa majorité: faut-il accompagner la refonte du système de mesures financières ? Ce dilemme débouche sur un concept nouveau: "l'âge d'équilibre" ou "âge pivot". La réforme perd le soutien de la CFDT qui juge "totalement stupide de fixer un âge de liquidation de la retraite complète à 64 ans".

La réforme confinée

SNCF, RATP, enseignants, avocats... Un an après les "gilets jaunes", le projet suscite un mouvement social de grande ampleur. Des concessions sont accordées à une dizaine de professions. Édouard Philippe finit par se dire "disposé à retirer", sous conditions, l'âge pivot de 64 ans.

Alors qu'il bénéficie d'une confortable majorité à l'Assemblée, le Premier ministre engage le 49.3 pour couper court aux 41.000 amendements des oppositions. Le texte est adopté mais deux semaines plus tard, la France est confinée et la réforme abandonnée.

Virage à l’Élysée

La laborieuse sortie du Covid s'accompagne de quelques galops d'essais dans l'opinion sur l'éventualité d'une réforme avant la présidentielle de 2022. Sans suite.

En mars 2022, Les Échos dévoilent l'axe majeur de la campagne de réélection du président: la retraite à 65 ans. "Nous sommes dans une société qui vieillit, c’est une chance" et "il est donc normal, surtout compte-tenu aujourd’hui de la nature des comptes publics, de la réalité, que nous travaillions plus", explique M. Macron pour justifier cette mesure également défendue par la candidate des Républicains (LR), Valérie Pécresse.

Mais dès l'entre-deux tours, Emmanuel Macron lâche du lest. "Je ne veux pas diviser le pays", explique-t-il, se disant "prêt à discuter du rythme et des bornes" de la réforme. Le président est réélu mais, un mois plus tard, perd la majorité absolue.

Feuilleton de fin d'année

En septembre, Emmanuel Macron évoque une réforme-éclair via un amendement au Budget de la sécu. Son allié François Bayrou s'oppose à ce "passage en force". L'option est abandonnée, Élisabeth Borne entame de nouvelles concertations avec les syndicats et les partis politiques.

En octobre, M. Macron se redit "ouvert" à une solution à 64 ans avec accélération de la réforme dite Touraine sur le nombre de trimestres à cotiser. "Tout le monde a compris qu'on ne fera pas 65 ans", estime un ministre. Mais en décembre, surprise: la présentation de la réforme est repoussée au 10 janvier, après d'ultimes concertations menées cette semaine par Matignon.

"Il n'y a plus beaucoup de suspense: oui, ce sera 64 avec accélération de la loi Touraine", affirme le président de la CFTC, Cyril Chabanier. Soit la réforme votée chaque année par la droite au Sénat. "Comme m'a dit un des leaders parmi les plus importants des partenaires sociaux: +au moins avec vous, on a la stabilité du point de vue+", glisse le président de la Haute Assemblée, Gérard Larcher.

Foyers de mécontentement 

Durant la campagne pour sa réélection au printemps, Emmanuel Macron avait d'ailleurs fait de la santé l'un des deux "chantiers majeurs" de son second quinquennat, avec l'école.

Il avait reconnu qu'il faudrait "aller beaucoup plus loin, plus vite et plus fort", notamment en renforçant la prévention, "la simplification de l'hôpital", "l'accès aux soins en urgence" et la lutte contre les déserts médicaux.

François Braun, lors de sa nomination en juillet, évoquait même un "système de santé à bout de souffle". Mais, malgré quelques mesures et rallonges budgétaires décidées en urgence ces derniers mois, la crise ne cesse de s'intensifier.

Et les foyers de mécontentement se multiplient.

Les médecins libéraux ont manifesté par milliers jeudi à Paris, point d'orgue d'une grève qui a débuté au lendemain de Noël pour réclamer le doublement de la consultation, de 25 à 50 euros.

Le ministre de la Santé s'est dit jeudi "prêt à augmenter cette consultation", mais en échange d'efforts pour permettre aux Français d'accéder plus aisément à un médecin, et certainement pas à hauteur des 50 euros demandés.

FO-Santé, deuxième syndicat de la fonction publique hospitalière, a appelé à son tour à une grève illimitée à partir du 10 janvier pour protester contre "l'inaction" du gouvernement. Tandis que les biologistes libéraux menacent de fermer leurs laboratoires à partir de lundi.


France: un Ukrainien inculpé pour le meurtre d'une Franco-Russe dans un conflit de voisinage

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  • Selon le parquet, il y avait de la part de cette femme "une attitude régulièrement agressive avec des menaces de mort envers" ses voisins ukrainiens arrivés en France en mars 2022 pour fuir l'invasion de leur pays par la Russie
  • Née au Kazakhstan en 1967, alors en URSS, elle était arrivée en France en 2004, d'après la même source

EVREUX: Un Ukrainien de 69 ans a été inculpé pour meurtre et placé sous contrôle judiciaire après le décès mardi de sa voisine franco-russe à Evreux, dans le nord de la France, lors d'un différend de voisinage, a-t-on appris vendredi auprès du parquet local.

Un couple de retraités ukrainiens ainsi que leur amie avaient été agressés avec un couteau d'environ 20 cm par leur voisine franco-russe, vers 5H00 locales (7H00 GMT) dans la nuit de lundi à mardi, a expliqué le procureur de la République d'Evreux Rémi Coutin lors d'une conférence de presse.

Le mari du couple ukrainien aurait alors retourné l'arme blanche contre sa voisine la blessant à trois reprises, dont une mortelle à la cuisse, toujours selon le procureur.

"Pour nous c'est la victime, celle qui a reçu les coups de couteau et est décédée mardi matin, qui était venue agresser au moins à deux reprises cette nuit-là les personnes ukrainiennes qui se trouvaient dans l'appartement au-dessus d'elle", a déclaré Rémi Coutin, justifiant ainsi le non placement en détention de l'auteur présumé des faits.

Selon le parquet, il y avait de la part de cette femme "une attitude régulièrement agressive avec des menaces de mort envers" ses voisins ukrainiens arrivés en France en mars 2022 pour fuir l'invasion de leur pays par la Russie.

Née au Kazakhstan en 1967, alors en URSS, elle était arrivée en France en 2004, d'après la même source.

Un voisin a déclaré avoir passé la soirée à boire des bières chez la quinquagénaire avant que celle-ci ne décide "de monter le son de la musique, de donner des coups de balai dans le plafond afin d'embêter ses voisins du dessus", puis de se rendre chez eux pour une première altercation.

Déjà condamné à cinq reprises pour violences, ce voisin est mis en examen pour violences aggravées pour avoir frappé l'homme ukrainien lors cette première rencontre nocturne, a relevé le parquet.

Un habitant de l'immeuble a indiqué lors de son audition qu'il avait déjà demandé l'intervention à la police les 22 et 30 juin, parce que la victime était en train de donner des coups de poing dans la porte de l'appartement de ses voisins ukrainiens.

Entendu par la police, l'ex-mari de la femme franco-russe a relaté que s'agissant de la guerre entre la Russie et l'Ukraine, elle considérait que la Russie devait "se défendre, chasser les nazis d'Ukraine et lutter contre l'OTAN".

 


Audiovisuel public: Dati dégaine le «vote bloqué» pour accélérer les débats

Brigitte Macron et Rachida Dati. (AFP)
Brigitte Macron et Rachida Dati. (AFP)
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  • Vendredi matin, à la reprise, rien n'a laissé présager que les discussions puissent s'accélérer. Un peu plus d'une demi heure après le début des débats, Mme Dati a annoncé que le gouvernement demandait au Sénat "de se prononcer par un vote unique
  • Cette procédure très rarement utilisée permet d'accélérer les débats en n'organisant qu'un seul vote, sur le texte et les amendements que le gouvernement choisit de conserver

PARIS: Fin de session chaotique au Sénat: face à l'"obstruction" de la gauche, la ministre de la Culture Rachida Dati a dégainé vendredi matin l'arme constitutionnelle du "vote bloqué" sur la réforme de l'audiovisuel public, pour tenter d'aboutir avant les congés parlementaires.

C'est une nouvelle vicissitude pour ce texte au parcours chaotique, porté à bout de bras par la ministre face à l'hostilité des syndicats, et qui pour l'essentiel prévoit de créer le 1er janvier 2026 une holding, France Médias, qui chapeauterait France Télévisions, Radio France et l'Ina (Institut national de l'audiovisuel), sous l'autorité d'un président-directeur général.

L'examen du texte a avancé à très faible allure jeudi: suspensions de séance à répétition, rappels au règlement, motions de rejet préalable, invectives en pagaille... En plus de huit heures de débats, les sénateurs ont à peine démarré l'examen de l'article premier de la proposition de loi du sénateur Laurent Lafon.

A la manoeuvre, la gauche, bien décidée à jouer la montre, alors que la session extraordinaire doit théoriquement s'achever vendredi à minuit.

Vendredi matin, à la reprise, rien n'a laissé présager que les discussions puissent s'accélérer. Un peu plus d'une demi heure après le début des débats, Mme Dati a annoncé que le gouvernement demandait au Sénat "de se prononcer par un vote unique sur l'ensemble du texte", "en application de l'article 44 alinéa 3 de la Constitution".

Cette procédure très rarement utilisée permet d'accélérer les débats en n'organisant qu'un seul vote, sur le texte et les amendements que le gouvernement choisit de conserver.

"Après plus de sept heures de débat, nous n'avons pu débattre que de 31 amendements sur ce texte. On a vu encore ce matin (...) de l'obstruction, toujours de l'obstruction et encore de l'obstruction", a-t-elle justifié. Il restait alors environ 300 amendements à débattre.

Les débats, suspendus vers 10H15, ont repris près de deux heures plus tard, et le président de séance Didier Mandelli (LR) a pris acte de la demande du gouvernement.

Débats "escamotés" 

Les orateurs de la gauche ont successivement protesté contre ce "coup de force", selon le mot de l'ancienne ministre socialiste Laurence Rossignol. "On parle de liberté de la presse. Mais commençons déjà par respecter les droits du Parlement", a-t-elle tonné, rappelant que le Sénat avait d'autres outils à sa disposition pour discipliner les discussions.

Et ce alors que les débats ont déjà été "escamotés" en première lecture à l'Assemblée le 30 juin, après le vote surprise d'un motion de rejet déposée par les écologistes, face aux bancs désertés de la coalition gouvernementale.

"C'est vous qui êtes responsables du fait que le débat ne peut pas avoir lieu. Ce n'est pas nous", leur a rétorqué le rapporteur du texte, Cédric Vial (LR).

Le président de la commission de la culture Laurent Lafon (UDI) a lui aussi défendu la décision du gouvernement, pointant une obstruction "caractérisée" destinée à "empêcher que le Sénat confirme son soutien" au texte.

Selon des sources parlementaires, la décision de déclencher le "vote bloqué" était sur la table depuis jeudi.

Mais, alors que le président du Sénat et le ministre des Relations avec le Parlement étaient enclins à laisser le débat se dérouler, "c'est bien Rachida Dati", en première ligne face à la gauche, qui "à un moment donné (...) a tranché pour tout le monde", selon un poids lourd.

Désormais, l'examen du texte devrait pouvoir "aller au bout" avant la fin de la session, selon cette source. Et revenir sans doute à l'automne à l'Assemblée, à une date indéterminée.


La session parlementaire se clôt sur un vote mouvementé de la réforme de l'audiovisuel

La ministre française de la Culture, Rachida Dati, s'exprime lors d'une séance de débat sur le projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la réforme de l'audiovisuel public, à l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement français, à Paris, le 30 juin 2025. (AFP)
La ministre française de la Culture, Rachida Dati, s'exprime lors d'une séance de débat sur le projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la réforme de l'audiovisuel public, à l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement français, à Paris, le 30 juin 2025. (AFP)
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  • Les sénateurs ont approuvé largement vendredi en deuxième lecture la réforme de l'audiovisuel public, au terme de débats écourtés grâce à l'arme constitutionnelle du "vote bloqué"
  • La proposition de loi de Laurent Lafon (UDI), qui pour l'essentiel prévoit de créer le 1er janvier 2026 une holding, France Médias, qui chapeauterait France Télévisions, Radio France et l'Ina (Institut national de l'audiovisuel), sous l'autorité d'un prés

PARIS: Fin de session chaotique au Parlement: les sénateurs ont approuvé largement vendredi en deuxième lecture la réforme de l'audiovisuel public, au terme de débats écourtés grâce à l'arme constitutionnelle du "vote bloqué", un choix du gouvernement vivement contesté par la gauche.

La proposition de loi de Laurent Lafon (UDI), qui pour l'essentiel prévoit de créer le 1er janvier 2026 une holding, France Médias, qui chapeauterait France Télévisions, Radio France et l'Ina (Institut national de l'audiovisuel), sous l'autorité d'un président-directeur général, était le dernier texte inscrit à l'agenda de la chambre haute.

La chambre basse avait mis fin à ses travaux jeudi.

Mais, dans une chorégraphie qui rappelait davantage les usages du Palais Bourbon, l'examen du texte a tourné court au Palais du Luxembourg: face à "l'obstruction" de la gauche, la ministre de la Culture Rachida Dati (LR) a annoncé vendredi matin que le gouvernement demandait au Sénat "de se prononcer par un vote unique sur l'ensemble du texte", "en application de l'article 44 alinéa 3 de la Constitution".

Cette procédure très rarement utilisée permet d'accélérer les débats en n'organisant qu'un seul vote, sur le texte et les amendements que le gouvernement choisit de conserver.

Les débats jeudi avaient été marqués par une particulière lenteur, entre suspensions de séance à répétition, rappels au règlement, motions de rejet préalable, invectives en pagaille... A la manœuvre, la gauche, qui craint que la réforme ne soit l'occasion d'une reprise en main politique et d'une réduction du budget de l'audiovisuel public.

- La gauche claque la porte -

Après deux heures de suspension vendredi matin, les travaux ont repris, occasion pour les groupes de gauche de protester à l'unisson contre un "coup de force" démocratique, selon le mot de l'ancienne ministre socialiste Laurence Rossignol. "On parle de liberté de la presse. Mais commençons déjà par respecter les droits du Parlement", a-t-elle tonné, rappelant que le Sénat avait d'autres outils à sa disposition pour discipliner les discussions.

Et ce alors que les débats ont déjà été "escamotés" en première lecture à l'Assemblée le 30 juin, après le vote surprise d'un motion de rejet déposée par les écologistes, face aux bancs désertés de la coalition gouvernementale.

"C'est vous qui êtes responsables du fait que le débat ne peut pas avoir lieu. Ce n'est pas nous", leur a rétorqué le rapporteur du texte, Cédric Vial (groupe LR).

Le président de la commission de la culture Laurent Lafon a lui aussi défendu la décision du gouvernement, pointant une obstruction "caractérisée" destinée à "empêcher que le Sénat confirme son soutien" au texte.

Peu après la reprise de la séance en début d'après-midi, les différents groupes de gauche ont renouvelé leurs critiques avant de quitter les lieux.

Le texte a finalement été adopté largement, par 194 voix contre 113. La version des sénateurs, compromis entre la majorité sénatoriale et le gouvernement, exclut de la holding France Médias Monde, comme le souhaitait le gouvernement, et conserve le deuxième volet du texte, sur la "souveraineté", que Mme Dati avait fait supprimer en commission à l'Assemblée.

Une victoire au forceps pour la ministre, qui défend bec et ongles la réforme depuis son entrée au gouvernement, face à l'hostilité des syndicats et à un agenda parlementaire contrarié.

- Victoire "à la Pyrrhus" ? -

Selon des sources parlementaires, la décision de déclencher le "vote bloqué" était sur la table depuis jeudi.

Mais, alors que le président du Sénat et le ministre des Relations avec le Parlement étaient enclins à laisser le débat se dérouler, "c'est bien Rachida Dati", en première ligne face à la gauche, qui "à un moment donné (...) a tranché pour tout le monde", selon un poids lourd.

Désormais, le texte devrait revenir à l'automne à l'Assemblée, à une date indéterminée. "Ce passage en force au Sénat sera une victoire à la Pyrrhus (...) Nous serons mobilisés dès la rentrée pour lui faire obstacle", a promis le député Aurélien Saintoul (LFI).

Le texte bénéficie à la chambre basse du soutien de la majorité du socle commun et de la relative bienveillance du RN, "plutôt partisan de s'abstenir" selon son vice-président Sébastien Chenu.