Guyane: polémique autour d'un projet de décret dérogatoire sur la biomasse

Sur cette photo d'archive prise le 2 février 2022, un homme passe devant la centrale de biomasse Voltalia, à Cacao, près de Roura, lors d'une visite du ministre français de la Transition écologique dans le cadre d'un voyage de cinq jours en Guyane française. Un projet de loi gouvernemental controversé est présenté, qui permettrait de suspendre les règles européennes de conservation des forêts pour favoriser la production de centrales biomasse dans le territoire d'outre-mer de la Guyane. (AFP).
Sur cette photo d'archive prise le 2 février 2022, un homme passe devant la centrale de biomasse Voltalia, à Cacao, près de Roura, lors d'une visite du ministre français de la Transition écologique dans le cadre d'un voyage de cinq jours en Guyane française. Un projet de loi gouvernemental controversé est présenté, qui permettrait de suspendre les règles européennes de conservation des forêts pour favoriser la production de centrales biomasse dans le territoire d'outre-mer de la Guyane. (AFP).
Short Url
Publié le Dimanche 15 janvier 2023

Guyane: polémique autour d'un projet de décret dérogatoire sur la biomasse

  • En préparation depuis deux ans, le texte doit permettre aux porteurs de projets de déroger à la législation européenne sur la protection des forêts primaires, et de continuer à bénéficier de subventions publiques, dans ce département d'outremer
  • Défendu par le gouvernement comme un moyen d'encadrer strictement l'usage du bois de coupe, le futur décret risque d'avoir l'effet inverse, selon les associations Wild Legal et Maïouri Nature Guyane

CAYENNE : En Guyane, allier production d'électricité en quantité suffisante et respect des normes environnementales relève du casse-tête : un projet de décret sur le développement de centrales à biomasse est accusé par des associations écologistes de menacer la forêt amazonienne.

En préparation depuis deux ans, le texte doit permettre aux porteurs de projets de déroger à la législation européenne sur la protection des forêts primaires, et de continuer à bénéficier de subventions publiques, dans ce département d'outremer.

Il a franchi une étape clé avant sa promulgation, avec la fin vendredi de la phase de consultation obligatoire.

Défendu par le gouvernement comme un moyen d'encadrer strictement l'usage du bois de coupe, le futur décret risque d'avoir l'effet inverse, selon les associations Wild Legal et Maïouri Nature Guyane.

"L'objectif du décret est de se donner un encadrement clair", explique à l'AFP le ministère de la Transition énergétique.

Le texte permet d'utiliser du bois de coupe mais exclusivement "issu du défrichement légal" et ce, "plutôt que de le laisser brûler de manière incontrôlable ce qui n’est pas souhaitable pour le climat et l’environnement", souligne-t-on de même source.

Il permet aussi, dans le cadre d'un plafond limité à 15% de la surface agricole, d'utiliser les cultures exclusivement énergétiques pour alimenter la filière biomasse.

"Scandale", contestent Wild Legal et Maïouri Nature Guyane qui voient dans le texte un "appel d'air sans précédent pour encourager le remplacement de milliers d'hectares de forêts très riches en biodiversité par des plantations intensives d'arbres à vocation énergétique en percevant les aides d'Etat".

"Ce décret prévoit la possibilité de déroger aux règles visant à assurer la durabilité et la régénération des forêts", analyse Marine Calmet, juriste des associations. Cela va permettre qu'"on brûle du bois issu de la forêt tropicale qui est un puits de carbone" et de "maintenir artificiellement une filière qui n'est pas durable", ajoute cette avocate spécialisée dans les droits de la Nature.

Un communiqué résume sans ambages : "La France veut raser la forêt amazonienne pour faire décoller des fusées +bio+", en référence aux projets de centrales à biomasse destinées à servir les besoins du centre spatial guyanais de Kourou. Le port spatial consomme 18% de l'électricité produite dans un département qui en manque cruellement.

Un quart des Guyanais sans électricité

"La nouvelle législation européenne (en cours d'adoption, ndlr) mettait un terme au soutien public pour les porteurs de projet, notamment sur le tarif de rachat de l'électricité, plus chère à produire ici. Cela risquait de mettre un coup d'arrêt brutal à la filière biomasse, pourtant en plein développement en Guyane", rétorque Thibault Lechat-Vega, 3e vice-président de la Collectivité territoriale de Guyane.

"Ce que nous avons défendu en septembre à Bruxelles, c'est le maintien d'un régime dérogatoire déjà en place, pas une évolution de la législation", ajoute-t-il.

Depuis 2016, la biomasse monte en puissance en Guyane, qui dépend majoritairement du barrage de Petit-Saut pour son électricité alors que Cayenne et ses environs sont alimentés par une centrale au fioul.

La biomasse représente aujourd'hui "20% de l'électricité produite sur le territoire avec trois centrales en activité et deux en construction", selon M. Lechat-Vega. Un développement qui nécessite une filière d'approvisionnement stable.

Ce que le décret doit permettre en autorisant le prélèvement de bois directement pour produire du carburant de biomasse.

"Aujourd’hui, 75% de notre mix énergétique est vert. Nous sommes le département français le plus en avance sur les objectifs d’énergies renouvelables. Quand est-ce que l’on va arrêter de nous mettre sous cloche alors qu'un quart des Guyanais n’a pas accès à l'électricité ?", s’emporte M.Lechat-Vega.

"Les contraintes européennes sont éloignées des nôtres. Ici, nous n’avons pas d’autres débouchés que la biomasse pour nos connexes d'exploitation car nous ne faisons pas de papier, pas de carton, pas de bois de chauffage", explique Thomas Caparros, le président de l’Interprobois Guyane, qui rassemble les acteurs de la filière.

On appelle "connexes" les petits arbres tombés lors de l’abattage des bois, cimes, branches etc. Ils représentent "70% d’une grume", précise Thomas Caparros. "Seul 30% d'un arbre est utilisé pour le bois d'œuvre, le reste est notamment destiné à la filière biomasse qui fait entièrement partie de notre équilibre financier. Sans elle, 15 à 20% du chiffre d’affaires des scieries et des exploitants forestiers s’en va", indique-t-il.


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Short Url
  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
Short Url
  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
Short Url
  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».