Sur les chantiers des JO-2024, des sans-papiers si encombrants

Cette photo prise le 15 décembre 2022 montre un travailleur sans papiers du Mali tenant sa carte d'accès au chantier où il travaillait illégalement, le Centre Aquatique de Marville à proximité de La Courneuve, qui servira de base d'entraînement pour Paris 2024 Jeux olympiques, alors qu'il pose devant sa chambre dans une résidence abritant principalement des travailleurs maliens, à Aubervilliers, en banlieue nord de Paris. (Photo by Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
Cette photo prise le 15 décembre 2022 montre un travailleur sans papiers du Mali tenant sa carte d'accès au chantier où il travaillait illégalement, le Centre Aquatique de Marville à proximité de La Courneuve, qui servira de base d'entraînement pour Paris 2024 Jeux olympiques, alors qu'il pose devant sa chambre dans une résidence abritant principalement des travailleurs maliens, à Aubervilliers, en banlieue nord de Paris. (Photo by Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
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Publié le Vendredi 20 janvier 2023

Sur les chantiers des JO-2024, des sans-papiers si encombrants

  • Comme les autres, il ne voit pas de différence, sur le terrain, entre son chantier olympique et les précédents: «C'est toujours à 80% des immigrés qui font le boulot. On voit des Maliens, des Portugais, des Turcs. Et les Français, dans les bureaux»
  • Alors que le gouvernement veut créer un titre de séjour dans les «métiers en tension», Jean- Albert Guidou a déjà accompagné une trentaine de travailleurs des JO dans des procédures de régularisations, certaines déjà obtenues

PARIS: A première vue, rien d'inhabituel. Sur son chantier, Gaye Sarambounou devait manier le marteau-piqueur et décoffrer le béton, enchaîner les journées à rallonge payées une misère, sans contrat, sans jour de repos. En somme, poursuivre sa routine de travailleur sans-papiers.

Sauf que cette fois, il ne s'agit pas d'un chantier comme un autre: sur les sites en construction des futurs Jeux olympiques de Paris, qui doivent être la vitrine de la France en 2024, la présence de cette main d'oeuvre illégale est devenue un enjeu de crispation politique et d'exemplarité sociale.

Le 26 septembre dernier, lorsque des inspecteurs du travail font irruption dans le centre aquatique de Marville (Seine-Saint-Denis), qui servira de base d'entraînement olympique, "le patron m'a dit +tu reviens plus!+", se souvient le Malien de 41 ans, dont cinq en France.

Durant trois mois, Gaye Sarambounou, barbiche et visage rond toujours flanqué d'un bonnet aux couleurs du Mali, raconte avoir travaillé de 9H à 17H, parfois 19 ou 20H. La journée est payée 80 euros, 40 si une urgence oblige à partir plus tôt. Évidemment, "les heures supplémentaires n'étaient jamais payées".

"J'ai accepté parce que je connais ma situation. Si t'as pas de papiers, tu fais tout ce qui est difficile, toute la merde, t'as pas le choix", expose-t-il, en faisant bouillir de l'eau sur un réchaud à même le sol, dans la minuscule chambre qu'il partage avec quatre compatriotes.

«Tabou»
Gaye Sarambounou travaille sous "alias", en empruntant les papiers d'un proche.

Combien sont-ils, comme lui, sur cet ouvrage pharaonique qui transfigure la banlieue nord ? Difficile à dire, par définition.

Sur les chantiers, le "tabou" règne: "Tout le monde sait, personne n'en parle", sourit-il. Les autorités, elles, rient jaune. Car le phénomène fait tache.

"Il y a une grande hypocrisie de la part des autorités politiques", résume Bernard Thibault, qui co-préside le Comité de suivi de la charte sociale de Paris 2024. Selon l'ancien secrétaire général de la CGT, "on peut supposer qu'il y a d'autres" sans-papiers sur les chantiers et l'"évidence" voudrait qu'on les régularise.

Signe que le sujet inquiète, l'inspection du travail a créé une unité spécialisée qui a contrôlé près d'un site par jour depuis deux ans. Du jamais-vu.

Depuis le printemps dernier, le mouvement s'accélère. En juin, neuf travailleurs irréguliers sont identifiés sur un chantier dont le maître d'ouvrage n'est autre que la Solideo (Société de livraison des ouvrages olympiques), l'établissement public chargé de la construction des sites.

Au même moment, le parquet de Bobigny ouvre une enquête préliminaire notamment pour "travail dissimulé" et "emploi d'étranger sans titre en bande organisée".

«Nébuleuse»

"On a écrit au procureur de Bobigny pour dire qu'on souhaite se joindre aux procédures contre les employeurs indélicats", a déclaré mardi le directeur général de la Solideo, Nicolas Ferrand, rappelant la "volonté d'exemplarité des chantiers olympiques".

Lorsque le sujet s'est posé pour la Solideo, "on a immédiatement pris les dispositions qui s'imposaient", en résiliant le contrat du sous-traitant incriminé mais aussi du géant du bâtiment qui y avait recours, explique Antoine du Souich, directeur de la stratégie et de l'innovation.

L'établissement public a depuis "renforcé ses procédures" et va "plus loin que ce que demande la réglementation", insiste-t-il.

Construire un système "absolument imperméable (à la fraude), on en est incapables", convient M. du Souich, qui reconnaît qu'un "certain nombre de tricheurs sont passés entre les mailles du filet". L'objectif est de "resserrer les mailles" pour repérer les "situations grossières de triche".

Cette toile du travail illégal est tissée par une "nébuleuse d'entreprises turques" sous- traitantes, observe Jean-Albert Guidou, de la CGT Seine-Saint-Denis.

Un "système qui marche à plein tube", avec des sociétés qui se placent en liquidation dès qu'elles sont inquiétées, décortique le syndicaliste.

Accidents

Alors que le gouvernement veut créer un titre de séjour dans les "métiers en tension", Jean- Albert Guidou a déjà accompagné une trentaine de travailleurs des JO dans des procédures de régularisations, certaines déjà obtenues.

"Ils occupent les postes les plus accidentogènes et ils sont surexploités", s'indigne-t-il. "Sur les chantiers, la seule variable d'ajustement, c'est le prix du travailleur. Et quand il faut mettre les bouchées doubles pour livrer, ces entreprises ne sont pas regardantes sur les conditions de travail."

D'ailleurs, sous-traitants et géants du BTP sont-ils au courant quand un ouvrier n'est pas en règle ?

Cheickna (il ne souhaite pas donner son nom) en rigole. "Bien sûr! Moi j'ai donné deux fois des papiers différents à la même entreprise, j'ai été pris", se souvient cet autre Malien de 38 ans.

Sur son téléphone, il fait défiler des photos datées du 6 mai et sur lesquelles on le voit, casque de chantier et t-shirt, sur une nacelle de la Tour Pleyel, futur hôtel de luxe des JO-2024.

Lui aussi a été évincé après un contrôle, en octobre.

"On fait ça pour la famille (restée) au Mali, qu'on fait vivre. On fait tous les sacrifices pour ce boulot", explique à son tour Moussa (il requiert l'anonymat pour des raisons de sécurité), 43 ans.

«Chantage»

"Tous ces beaux stades sont construits par des gens pauvres (...) qui sont exploités", poursuit le gaillard qui vit dans la "peur" depuis qu'il a été sorti manu militari de son chantier, en décembre, après s'être exprimé publiquement sur ses conditions de travail.

Jeux olympiques ou pas, "on te fait du chantage", raconte-t-il: lorsqu'on demande des heures supplémentaires, "c'est soit tu restes, soit tu prends tes affaires", affirme celui qui a fait du "piochage" et de la maçonnerie pendant quatre mois sur le futur village des athlètes.

En quinze ans de présence en France, Moussa a toujours travaillé, d'abord dans le nettoyage, puis la restauration, désormais le bâtiment.

Comme les autres, il ne voit pas de différence, sur le terrain, entre son chantier olympique et les précédents: "C'est toujours à 80% des immigrés qui font le boulot. On voit des Maliens, des Portugais, des Turcs. Et les Français... dans les bureaux".

Comme les autres, il demande à être régularisé, "rien de plus", ne serait-ce que pour pouvoir circuler librement sans avoir "peur d'un contrôle" d'identité.

Gaye Sarambounou ne demande pas mieux. La CGT s'apprête à déposer son dossier de régularisation. S'il l'obtient dans les dix-huit mois, ces déboires récents seront oubliés comme un vilain cauchemar, s'éclaire-t-il: "Je serais en règle pour les Jeux!"

Chantiers des JO: «Il faut régulariser» les travailleurs sans- papiers, réclame Bernard Thibault

PARIS: "Il faut régulariser ceux qui travaillent clandestinement sur les chantiers des Jeux olympiques", a demandé dans un entretien avec l'AFP Bernard Thibault, l'ancien patron de la CGT qui copréside désormais le Comité de suivi de la charte sociale de Paris-2024.

Alors que plusieurs situations de travail illicite sur des chantiers olympiques ont été mis au jour lors de contrôles, l'ex-syndicaliste, qui supervise l'établissement public chargé de la construction des sites (Solideo), dénonce l'"hypocrisie" de l'Etat sur ce dossier.

Quelle est l'ampleur du recours à des travailleurs sans-papiers sur ces chantiers ?

"Il y a une hypocrisie de la part des autorités politiques, parce qu'on sait que cette main d'oeuvre est indispensable dans beaucoup de secteurs, y compris le BTP. On s'attendait à constater ce qu'on voit déjà sur les chantiers en général et on a bien eu des recours à des travailleurs sans-papiers.

On peut supposer qu'il y en a d'autres, mais on a sur les chantiers des JO des
dispositifs d'alerte et de suivi plus développés qu'ailleurs. On a, par exemple, des permanences sur les chantiers, avec un représentant du comité de suivi présent régulièrement. Ensuite, l'inspection du travail réalise près d'un contrôle par jour sur les sites.

Surtout, on a un appui politique plus soutenu dès qu'un problème se pose, car les autorités ont conscience que les chantiers doivent être irréprochables, que le monde entier regarde la France. Le gouvernement ne veut pas de scandale autour des Jeux."

Faut-il muscler la lutte contre ce travail illicite ?

"L'enjeu, c'est d'identifier les responsables pour les cas déjà connus. Les grands groupes du bâtiment ne peuvent pas juste se poser en victimes de sous-traitants peu scrupuleux! On voit bien qu'il y a, parfois, des vrais montages réalisés pour déroger au droit social, payer moins de cotisations et, in fine, faire des économies et des gains sur la main d'oeuvre, avec l'usage de ces travailleurs qui sont exploités.

Il appartiendra à la justice, qui a ouvert une enquête préliminaire, de faire la part des choses: qui est victime, qui est l'auteur et qui est co-auteur d'une infraction. Mais il faudra aussi se poser la question de la limitation des niveaux de sous-traitance, si on veut éviter les dérives propres au BTP. Car plus il y a d'étages de sous-traitance, plus il est difficile de contrôler le secteur."

Êtes-vous favorable à la régularisation de ces ouvriers ?

"Oui, il faut régulariser ceux qui travaillent clandestinement sur les chantiers des JO. Reconnaître à des personnes qui travaillent l'égalité des droits avec les autres, ça devrait même être une évidence. Il arrive que des inspecteurs (du travail) nous saisissent pour qu'on accompagne certains dans des procédures de régularisation. On en a une vingtaine en cours.

Sur ce sujet, le rapport de force est avant tout politique et je suis satisfait que le sujet soit posé en toute transparence par le gouvernement, dont le projet de loi sur l'immigration comporte un volet sur ces travailleurs sans-papiers.

On a toutefois des interrogations sur les modalités du titre de séjour métiers en tension en préparation. On n'imagine pas qu'on puisse demander à un travailleur d'accepter un emploi dans un métier en tension en offrant un droit au séjour d'un an et que, si le besoin n'est plus présent, on lui demande de repartir. Il faut tenir compte de la dimension humaine: on n'utilise pas les personnes comme des mouchoirs."

«Tabou»
Gaye Sarambounou travaille sous "alias", en empruntant les papiers d'un proche.

Combien sont-ils, comme lui, sur cet ouvrage pharaonique qui transfigure la banlieue nord ? Difficile à dire, par définition.

Sur les chantiers, le "tabou" règne: "Tout le monde sait, personne n'en parle", sourit-il. Les autorités, elles, rient jaune. Car le phénomène fait tache.

"Il y a une grande hypocrisie de la part des autorités politiques", résume Bernard Thibault, qui co-préside le Comité de suivi de la charte sociale de Paris 2024. Selon l'ancien secrétaire général de la CGT, "on peut supposer qu'il y a d'autres" sans-papiers sur les chantiers et l'"évidence" voudrait qu'on les régularise.

Signe que le sujet inquiète, l'inspection du travail a créé une unité spécialisée qui a contrôlé près d'un site par jour depuis deux ans. Du jamais-vu.

Depuis le printemps dernier, le mouvement s'accélère. En juin, neuf travailleurs irréguliers sont identifiés sur un chantier dont le maître d'ouvrage n'est autre que la Solideo (Société de livraison des ouvrages olympiques), l'établissement public chargé de la construction des sites.

Au même moment, le parquet de Bobigny ouvre une enquête préliminaire notamment pour "travail dissimulé" et "emploi d'étranger sans titre en bande organisée".

«Nébuleuse»

"On a écrit au procureur de Bobigny pour dire qu'on souhaite se joindre aux procédures contre les employeurs indélicats", a déclaré mardi le directeur général de la Solideo, Nicolas Ferrand, rappelant la "volonté d'exemplarité des chantiers olympiques".

Lorsque le sujet s'est posé pour la Solideo, "on a immédiatement pris les dispositions qui s'imposaient", en résiliant le contrat du sous-traitant incriminé mais aussi du géant du bâtiment qui y avait recours, explique Antoine du Souich, directeur de la stratégie et de l'innovation.

L'établissement public a depuis "renforcé ses procédures" et va "plus loin que ce que demande la réglementation", insiste-t-il.

Construire un système "absolument imperméable (à la fraude), on en est incapables", convient M. du Souich, qui reconnaît qu'un "certain nombre de tricheurs sont passés entre les mailles du filet". L'objectif est de "resserrer les mailles" pour repérer les "situations grossières de triche".

Cette toile du travail illégal est tissée par une "nébuleuse d'entreprises turques" sous- traitantes, observe Jean-Albert Guidou, de la CGT Seine-Saint-Denis.

Un "système qui marche à plein tube", avec des sociétés qui se placent en liquidation dès qu'elles sont inquiétées, décortique le syndicaliste.

Accidents

Alors que le gouvernement veut créer un titre de séjour dans les "métiers en tension", Jean- Albert Guidou a déjà accompagné une trentaine de travailleurs des JO dans des procédures de régularisations, certaines déjà obtenues.

"Ils occupent les postes les plus accidentogènes et ils sont surexploités", s'indigne-t-il. "Sur les chantiers, la seule variable d'ajustement, c'est le prix du travailleur. Et quand il faut mettre les bouchées doubles pour livrer, ces entreprises ne sont pas regardantes sur les conditions de travail."

D'ailleurs, sous-traitants et géants du BTP sont-ils au courant quand un ouvrier n'est pas en règle ?

Cheickna (il ne souhaite pas donner son nom) en rigole. "Bien sûr! Moi j'ai donné deux fois des papiers différents à la même entreprise, j'ai été pris", se souvient cet autre Malien de 38 ans.

Sur son téléphone, il fait défiler des photos datées du 6 mai et sur lesquelles on le voit, casque de chantier et t-shirt, sur une nacelle de la Tour Pleyel, futur hôtel de luxe des JO-2024.

Lui aussi a été évincé après un contrôle, en octobre.

"On fait ça pour la famille (restée) au Mali, qu'on fait vivre. On fait tous les sacrifices pour ce boulot", explique à son tour Moussa (il requiert l'anonymat pour des raisons de sécurité), 43 ans.

«Chantage»

"Tous ces beaux stades sont construits par des gens pauvres (...) qui sont exploités", poursuit le gaillard qui vit dans la "peur" depuis qu'il a été sorti manu militari de son chantier, en décembre, après s'être exprimé publiquement sur ses conditions de travail.

Jeux olympiques ou pas, "on te fait du chantage", raconte-t-il: lorsqu'on demande des heures supplémentaires, "c'est soit tu restes, soit tu prends tes affaires", affirme celui qui a fait du "piochage" et de la maçonnerie pendant quatre mois sur le futur village des athlètes.

En quinze ans de présence en France, Moussa a toujours travaillé, d'abord dans le nettoyage, puis la restauration, désormais le bâtiment.

Comme les autres, il ne voit pas de différence, sur le terrain, entre son chantier olympique et les précédents: "C'est toujours à 80% des immigrés qui font le boulot. On voit des Maliens, des Portugais, des Turcs. Et les Français... dans les bureaux".

Comme les autres, il demande à être régularisé, "rien de plus", ne serait-ce que pour pouvoir circuler librement sans avoir "peur d'un contrôle" d'identité.

Gaye Sarambounou ne demande pas mieux. La CGT s'apprête à déposer son dossier de régularisation. S'il l'obtient dans les dix-huit mois, ces déboires récents seront oubliés comme un vilain cauchemar, s'éclaire-t-il: "Je serais en règle pour les Jeux!"


Mercosur: les syndicats rencontrent Macron à l'Elysée, la dermatose en toile de fond

Des agents de la police nationale française bloquent une route alors que des agriculteurs manifestent contre l'accord UE-Mercosur, alors que le président français Emmanuel Macron rencontre les lecteurs du quotidien « La Voix du Nord », à Arras, dans le nord de la France, le 19 novembre 2025. (AFP)
Des agents de la police nationale française bloquent une route alors que des agriculteurs manifestent contre l'accord UE-Mercosur, alors que le président français Emmanuel Macron rencontre les lecteurs du quotidien « La Voix du Nord », à Arras, dans le nord de la France, le 19 novembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron reçoit les syndicats agricoles, opposés à l’accord UE-Mercosur, dont la signature a été reportée, mais les tensions restent fortes malgré les concessions évoquées par le gouvernement
  • La rencontre se déroule sur fond de crise sanitaire liée à la dermatose bovine et de blocages agricoles persistants, avec une remobilisation annoncée début janvier

PARIS: Emmanuel Macron reçoit mardi après-midi les syndicats agricoles pour parler de l'accord UE-Mercosur auquel ils sont opposés mais le sujet de la dermatose bovine sera difficile à éviter au regard des blocages routiers qui persistent sur le terrain.

La FNSEA, les Jeunes agriculteurs (JA), la Coordination rurale et la Confédération paysanne sont reçus à 16H30, ont-ils annoncé à l'AFP.

C'est la première rencontre entre le chef de l'Etat et les syndicats depuis début décembre et l'amorce de la crise qui secoue l'élevage français, face à la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

C'est aussi la première depuis l'annonce jeudi dernier du report de la signature du traité décrié entre l'UE et des pays du Mercosur, après une mobilisation de plusieurs milliers d'agriculteurs avec leurs tracteurs à Bruxelles.

Cet accord faciliterait l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel et soja sud-américains, ce qui alarme les filières concernées qui affirment que ces produits ne respectent pas les mêmes normes, notamment environnementales et sanitaires, que les produits européens.

Il permettrait en revanche aux Européens d'exporter davantage de véhicules, machines, vins et spiritueux en Amérique du Sud.

Emmanuel Macron s'était félicité du report de la signature, demandant que les "avancées" réclamées par la France, mais aussi l'Italie, se concrétisent afin que "le texte change de nature".

Les syndicats agricoles sont remontés depuis des mois et demandaient au président de prendre clairement position, après que celui-ci eut déclaré en novembre être "plutôt positif" quant à la possibilité d'accepter l'accord.

Emmanuel Macron avait rencontré des représentants de différents syndicats à Toulouse mi-novembre, des manifestations ayant changé le programme d'un déplacement qui devait être consacré aux réseaux sociaux et au spatial.

- "Mercosur = NON" -

"Le message de la FNSEA au Président de la République restera inchangé, ferme et clair: Mercosur = NON", a indiqué mardi le syndicat dominant dans une déclaration à l'AFP. Son président Arnaud Rousseau fera une déclaration à la presse à l'issue. Il avait déjà rencontré le président mi-novembre.

La Coordination rurale et la Confédération paysanne, fer de lance de la contestation de la gestion de la dermatose par l'Etat et opposants historiques au traité UE-Mercosur, ont ensuite confirmé à l'AFP leur venue.

Pour ces deux syndicats, c'est la première rencontre entre le président et des représentants nationaux depuis le dernier Salon de l'agriculture.

Plusieurs sources diplomatiques ont indiqué que la nouvelle échéance visée pour la signature était désormais le 12 janvier au Paraguay.

"Nous ne nous contentons pas de nous opposer à cet accord. En l'état, nous obtenons des concessions inédites au bénéfice de nos agriculteurs, que cet accord soit signé ou qu'il ne le soit pas", a déclaré lors des questions au gouvernement mardi Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, citant des "mesures miroir pour garantir la réciprocité", des "contrôles douaniers" et des clauses de sauvegarde annoncées en septembre par la Commission européenne.

Les agriculteurs français ont déjà prévenu qu'ils se remobiliseraient début janvier, jugeant ces réponses insuffisantes.

Mais certains sont mobilisés depuis plus de 10 jours sur le terrain, notamment contre la stratégie gouvernementale pour lutter contre la dermatose bovine dans le Sud-Ouest, mais aussi ponctuellement plus au nord, contre le Mercosur et les autres crises qui pèsent sur le monde agricole.

En Gironde, la Coordination rurale (CR33) a annoncé organiser un "réveillon de Noël façon auberge espagnole" sur l'A63 au sud de Bordeaux.

"Le côté festif, ça permet de durer plus longtemps", résume à l'AFP Jean-Paul Ayres, porte-parole de la CR33, alors qu'un terrain de moto-cross a été improvisé sur le terre-plein central de l'autoroute.

Les bureaux centraux des syndicats se sont bien gardés d'appeler à lever les blocages, laissant les sections locales décider et appelant simplement au "repos" de leurs troupes et à une "trêve" pour certains pour mieux reprendre en janvier si nécessaire.

La mobilisation des agriculteurs a connu un léger regain lundi (35 actions mobilisant 1.200 personnes) par rapport à dimanche (23 actions), mais elle est nettement en baisse comparée à la semaine dernière (110 actions jeudi, 93 vendredi).


Vol au Louvre: une grille de protection installée sur la fenêtre empruntée par les cambrioleurs

Des ouvriers installent des grilles de protection en fer sur les fenêtres de la galerie d'Apollon du musée du Louvre, côté quai François Mitterrand, à Paris, le 23 décembre 2025, quelques semaines après que des voleurs aient utilisé un monte-meubles pour s'introduire dans le musée. (AFP)
Des ouvriers installent des grilles de protection en fer sur les fenêtres de la galerie d'Apollon du musée du Louvre, côté quai François Mitterrand, à Paris, le 23 décembre 2025, quelques semaines après que des voleurs aient utilisé un monte-meubles pour s'introduire dans le musée. (AFP)
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  • Une grille de protection a été installée sur la porte-fenêtre du Louvre utilisée lors du vol spectaculaire de bijoux du 19 octobre, dont le butin de 88 millions d’euros reste introuvable
  • Le musée renforce sa sécurité après de vives critiques : grilles supplémentaires, dispositifs anti-intrusion et vidéosurveillance accrue prévue d’ici 2026

PARIS: Une grille de protection a été installée mardi matin sur la porte-fenêtre du musée du Louvre à Paris, empruntée par les cambrioleurs lors du spectaculaire vol de bijoux du 19 octobre, a constaté un journaliste de l'AFP.

Le 19 octobre, quatre malfaiteurs ont réussi à approcher le bâtiment en camion-élévateur et à hisser deux d'entre eux jusqu'à cette fenêtre menant à la galerie d'Apollon, qui donne sur les quais de Seine, grâce à une nacelle.

Ils ont dérobé huit joyaux de la Couronne de France. Le butin, estimé à 88  millions d'euros, reste introuvable.

Depuis le cambriolage, la sécurité du musée le plus visité au monde se retrouve au cœur des critiques, le braquage ayant révélé une série de défaillances.

La grille de protection "est l'une des mesures d'urgence décidées après le vol ", a précisé mardi à l'AFP Francis Steinbock, administrateur général adjoint du musée.

Des "réflexions" sont en cours concernant la "sécurisation sur les autres fenêtres", a ajouté le responsable.

La présidente du Louvre, Laurence des Cars, avait assuré la semaine dernière devant les sénateurs français qu'une grille serait reposée "avant Noël". Elle avait précisé que la précédente avait été retirée en 2003-2004, lors d'importants travaux de restauration.

Autre chantier majeur: le renforcement de la vidéosurveillance sur les façades du palais. "Nous avons annoncé un dispositif d'une centaine de caméras positionnées autour du palais. Le marché a été signé et l'installation pourra débuter tout au long de l'année 2026 ", a précisé Francis Steinbock.

La semaine dernière, le Louvre avait également annoncé l'achèvement de la mise en place de dispositifs anti-intrusion autour du musée.

Du 15 au 18 décembre, les agents du Louvre étaient en grève pour réclamer de meilleures conditions de travail et des moyens supplémentaires pour la sécurité. Le mobilisation a été levée vendredi, mais les négociations se poursuivent entre les syndicats et le ministère de la Culture pour répondre aux inquiétudes des agents.


La "loi spéciale" au Parlement, rendez-vous en janvier pour reparler budget

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu et le ministre français de l'Économie et des Finances Roland Lescure quittent l'Élysée après la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu et le ministre français de l'Économie et des Finances Roland Lescure quittent l'Élysée après la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
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  • Faute d’accord sur le budget de l’État, le Parlement vote une loi spéciale pour reconduire provisoirement le budget 2025 et assurer le fonctionnement de l’État
  • Les débats budgétaires reprendront en janvier, sur fond de déficit élevé, de tensions politiques et de discussions autour d’un possible recours au 49.3

PARIS: Le Parlement pose une rustine sur ses désaccords budgétaires. L'Assemblée nationale et le Sénat devraient voter tour à tour mardi la "loi spéciale" présentée par le gouvernement pour continuer de financer provisoirement l'État et les administrations.

Les votes des deux assemblées ponctuent deux mois et demi de débats budgétaires qui se soldent par un échec partiel pour le Premier ministre Sébastien Lecornu.

Le dialogue privilégié engagé par le Premier ministre avec le Parti socialiste a permis l'adoption du budget de la Sécurité sociale pour 2026, au prix de concessions sur les retraites et le financement de la Sécurité sociale.

Mais les profondes divergences entre l'Assemblée nationale et le Sénat, tenu par des partis de droite et du centre hostiles à tout prélèvement supplémentaire, ont empêché l'approbation du second texte budgétaire, celui sur le financement de l'État.

Les parlementaires se retrouveront donc en début d'année pour de nouvelles joutes sur ce texte, alors que la France est confrontée à un endettement croissant et que les discussions budgétaires n'ont pas permis de dessiner une trajectoire de réduction des déficits.

"Nous devrons au plus vite, en janvier, donner un budget à la nation" qui "devra tenir l'objectif de 5% de déficit et financer nos priorités", a déclaré Emmanuel Macron lundi soir lors du Conseil des ministres, selon la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon.

"L'Élysée commence à s'impatienter", glissait lundi un cadre du camp gouvernemental.

Rentré d'Abou Dhabi où il était allé célébrer Noël avec les troupes françaises, Emmanuel Macron a présidé lundi soir un Conseil des ministres de crise pour la présentation de la loi spéciale.

- Pas de dépense nouvelle -

Le texte reconduit temporairement le budget de 2025, il permet de lever l'impôt et de payer les fonctionnaires. Mais il ne comprend pas de dépenses nouvelles, y compris sur la défense, érigée en priorité face à la menace russe.

Ce projet de loi spéciale devrait être voté mardi en toute fin d'après-midi par l'Assemblée nationale, puis dans la soirée par le Sénat. A l'unanimité ou presque. Avant d'être promulgué dans les jours suivants par le chef de l'État.

Déjà l'an dernier, l'exécutif avait dû y avoir recours après la chute du gouvernement de Michel Barnier, renversé par une motion de censure sur le budget de la Sécurité sociale. Les deux textes budgétaires 2025 avaient finalement été approuvés au mois de février, quelques semaines après l'arrivée de François Bayrou à Matignon.

Anticipant la reprise des débats en janvier, Sébastien Lecornu a reçu dimanche et lundi les forces politiques, à l'exception de la France insoumise et du Rassemblement national. Un ballet devenu habituel de responsables politiques exprimant leurs exigences et lignes rouges rue de Varenne, à l'issue de ces entretiens.

Le premier secrétaire du PS Olivier Faure a appelé à un budget qui ne fasse pas "peser les efforts sur les plus modestes" et préserve les investissements en matière d'écologie.

Quant à la cheffe des députés écologistes Cyrielle Châtelain, elle s'est inquiétée d'une copie budgétaire trop calquée sur les positions du Sénat. En cas de 49.3, les Ecologistes choisiront "la censure", a-t-elle prévenu.

Car on reparle de plus en plus de cet outil constitutionnel permettant de faire adopter un texte sans vote, sauf motion de censure.

Écarté par le Premier ministre à la demande des socialistes, qui le jugent brutal, il est évoqué avec insistance par des responsables de droite et du bloc central qui lui demandent de revenir sur son engagement.

Il faudrait alors pour le gouvernement trouver avec les socialistes des conditions de non-censure. Pour espérer enfin tourner la page du débat budgétaire.

Mais pour l'heure, Sébastien Lecornu s'y refuse, jugeant le projet de budget "encore votable sans intervention du gouvernement", selon Mme Bregeon.