Retraites: De retour dans la rue mardi, les syndicats veulent frapper plus fort

Des manifestants brandissent une banderole indiquant «assemblée générale interprofessionnelle 20 en lutte jusqu'au retrait» lors d'une manifestation contre la réforme des retraites à Paris, le 26 janvier 2023 (Photo, AFP).
Des manifestants brandissent une banderole indiquant «assemblée générale interprofessionnelle 20 en lutte jusqu'au retrait» lors d'une manifestation contre la réforme des retraites à Paris, le 26 janvier 2023 (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 29 janvier 2023

Retraites: De retour dans la rue mardi, les syndicats veulent frapper plus fort

  • Un effet de masse espéré pour venir à bout d'une «réforme injuste» et de sa mesure-phare: le report de l'âge légal de départ en retraite de 62 à 64 ans
  • En réponse à cette défiance grandissante, la majorité a remis ce weekend l'ouvrage sur le métier pour tenter de faire la «pédagogie» de la réforme

PARIS: Galvanisés par le succès de leur première mobilisation contre la réforme des retraites, les syndicats appellent à de nouvelles manifestations partout en France mardi, et menacent déjà de grèves en février alors que le projet de loi arrive à l'Assemblée nationale.

La jauge fera-t-elle la loi ? Après leur tour de force du 19 janvier (1,12 million de manifestants selon Beauvau, plus de deux millions d'après les organisateurs) les huit principaux syndicats français ont appelé "à se mobiliser encore plus massivement le 31".

Un effet de masse espéré pour venir à bout d'une "réforme injuste" et de sa mesure-phare: le report de l'âge légal de départ en retraite de 62 à 64 ans. Mais après cette première journée réussie, "la barre a été placée haut", note le politologue Dominique Adolfatto, et les syndicats "ne peuvent pas se permettre un faux pas".

Ces derniers se montrent plutôt confiants. "Nous sommes bien partis pour être plus nombreux", assure ainsi Céline Verzeletti, secrétaire confédérale de la CGT. Espoir conforté par des sondages attestant d'un rejet croissant de la réforme dans l'opinion.

"La population est très défavorable au projet, et cet avis tend à prendre de l'ampleur", constate aussi le numéro un de la CFDT, Laurent Berger. Qui met en garde l'exécutif: ne pas tenir compte des mobilisations "serait une faute".

En réponse à cette défiance grandissante, la majorité a remis ce weekend l'ouvrage sur le métier pour tenter de faire la "pédagogie" de la réforme.

Dans sa circonscription du Calvados, la Première ministre Elisabeth Borne a déploré la "désinformation" tandis que la secrétaire d'Etat Marlène Schiappa et la cheffe de file des députés Renaissance, Aurore Bergé ont défendu dans le JDD une réforme qui "apporte des réponses utiles" aux femmes précaires.

Si le LFI Jean-Luc Mélenchon a suggéré samedi aux syndicats d'organiser prochainement une "très grande marche" un weekend, c'est dès ce mardi que la participation sera scrutée dans les nombreux rassemblements (plus de 200) prévus, surtout dans les villes moyennes où les cortèges avaient fait le plein il y a dix jours.

La plupart s'étaient déroulés sans accroc, mais quelques défilés avaient été émaillés de heurts, notamment à Rennes ou à Paris, où le parcours doit cette fois-ci s'achever aux Invalides. A quelques enjambées seulement de l'Assemblée nationale, où l'examen du projet de loi aura débuté lundi en commission.

Bruno Le Maire appelle les partis de la majorité «à faire bloc»

"Quand on appartient à une majorité, on soutient les propositions qui faisaient partie du projet présidentiel", a intimé le ministre qui a dit espérer que les Républicains soutiendront cette réforme "jusqu'au bout".

Interrogé sur la pertinence de revoir les dispositifs concernant les carrières longues et les femmes, sujets de nombreuses contestations, M. Le Maire a rétorqué que "la Première ministre n’a cessé d’enrichir le texte. Personne ne peut dire qu’Élisabeth Borne n’a pas écouté".

Avant de développer : "La vraie injustice, ce serait de laisser tomber notre système. Cela fragiliserait les femmes, les plus modestes, ceux qui ont eu des carrières hachées."

Ceux "à qui on demande de travailler plus longtemps" doivent être "mieux rémunérés", a encore jugé le locataire de Bercy qui s'est réjoui de ce "qu’en seulement cinq mois, depuis le vote de la loi pouvoir d’achat, 3,6 millions de Français aient reçu pour 700 euros en moyenne de nouvelle prime Macron."

Grèves à répétition

Plus de 7 000 amendements ont été déposés, essentiellement par la gauche qui entend faire durer les débats, tandis que la droite cherche à faire monter les enchères, consciente que ses voix seront cruciales pour adopter la réforme. Le gouvernement doit en outre composer avec sa propre majorité, où beaucoup réclament des améliorations et certains renâclent à voter le texte.

Des tensions exacerbées par le risque de grèves à répétition. Mardi, des perturbations sont attendues dans les transports en commun, en particulier à la SNCF et à la RATP.

Des fermetures de classes, voire d'écoles, sont aussi à prévoir, le taux de grévistes chez les enseignants de primaire devant être connu lundi.

Mais la suite du mouvement reste incertaine. Du côté de la CGT, certaines fédérations poussent pour un durcissement. De nouvelles grèves sont déjà annoncées dans les ports, raffineries et centrales électriques à partir du 6 février.

Chez les cheminots, ce sera le 7 et le 8, prélude à un préavis reconductible "dès la mi-février", ont prévenu la CGT et SUD. En plein pendant les vacances d'hiver et son grand weekend de chassé-croisé du 18-19.

Mais la CFDT préfère "garder l'opinion" de son côté. "Le niveau d'efficacité syndicale ne se mesure pas au niveau d'emmerdements concrets pour les citoyens", explique M. Berger, qui ne veut pas non plus multiplier les journées d'action "car de nombreux travailleurs ne peuvent pas tenir sur un rythme aussi intense".

"Une ou deux démonstrations de force" supplémentaires suffiront selon lui à faire entendre raison à l'exécutif. Reste à en convaincre les autres leaders syndicaux, qui se réuniront mardi soir au siège de Force ouvrière.

Borne en visite surprise dans le Calvados pour parler retraites

La Première ministre Elisabeth Borne s'est rendue samedi pour un déplacement surprise dans le Calvados où elle échangera sur son projet très contesté de réforme des retraites avec des acteurs locaux à Vire.

Cette visite a lieu quelques jours avant une deuxième journée de grèves et de manifestations, mardi, contre la réforme des retraites du gouvernement. Une première journée le 19 janvier avait réuni dans la rue entre 1 et 2 millions de personnes.

Le projet, qui prévoit un report de l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans et une accélération de l'allongement de la durée de cotisation, entame son examen au Parlement lundi. Il est contesté par l'ensemble des organisations syndicales, l'essentiel des oppositions et une large majorité de l'opinion.

La cheffe du gouvernement s'est d'abord rendue en fin de matinée, sans presse, aux voeux du maire de la petite commune de Saint Rémy, Serge Ladan, selon son entourage. L'insoumis Noé Gauchard avait, aux législatives de juin, obtenu dans cette commune près de 61% des voix, contre 39% pour Mme Borne.

Elle participait à midi aux voeux de son député suppléant, Freddy Sertin (Renaissance), dans sa nouvelle permanence à Vire, a constaté l'AFP. Mme Borne a été élue députée dans la 6e circonscription avec 52,5% des voix, contre 47,5% pour M. Gauchard.

Puis en début d'après-midi, à la mairie de Vire, la Première ministre parlera retraites avec des acteurs locaux et des habitants, lors d'une rencontre organisée par M. Sertin.

Plutôt discrète depuis la présentation de cette réforme le 10 janvier, la Première ministre a déjà participé par surprise, la veille de la première journée de mobilisation, à une réunion publique à Nogent-sur-Marne (Val-de-Marne). Elle y avait défendu un projet "porteur de progrès social pour le pays".

La communication du gouvernement sur cette réforme a connu récemment quelques couacs, notamment quand le ministre des Relations avec le parlement Franck Riester a admis que les femmes étaient "un peu pénalisées" par la mesure d'âge.


S&P dégrade la note de la France, avertissement au nouveau gouvernement

Cette photo d'illustration prise à Toulouse le 29 mars 2025 montre un écran affichant le logo de l'agence de notation Standard and Poor's. (AFP)
Cette photo d'illustration prise à Toulouse le 29 mars 2025 montre un écran affichant le logo de l'agence de notation Standard and Poor's. (AFP)
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  • L’agence S&P a abaissé la note de la France à A+, invoquant une incertitude persistante sur les finances publiques malgré la présentation du budget 2026 et un déficit prévu à 5,4 % du PIB en 2025

PARIS: L'une des plus grandes agences de notation a adressé un avertissement au nouveau gouvernement Lecornu en dégradant la note de la France vendredi, invoquant une incertitude "élevée" sur les finances publiques en dépit de la présentation d'un budget pour 2026.

Moins d'une semaine après la formation de la nouvelle équipe gouvernementale et trois jours après la publication d'un projet de loi de finances (PLF) pour l'année prochaine, S&P Global Ratings a annoncé abaisser d'un cran sa note de la France à A+.

"Malgré la présentation cette semaine du projet de budget 2026, l'incertitude sur les finances publiques françaises demeure élevée", a affirmé l'agence, qui figure parmi les trois plus influentes avec Moody's et Fitch.

Réagissant à cette deuxième dégradation par S&P (anciennement Standard & Poors) en un an et demi, le ministre de l'Economie Roland Lescure a dit "(prendre) acte" de cette décision.

"Le gouvernement confirme sa détermination à tenir l'objectif de déficit de 5,4% du PIB pour 2025", a ajouté son ministère dans une déclaration transmise à l'AFP.

Selon S&P, si cet "objectif de déficit public de 5,4% du PIB en 2025 sera atteint", "en l'absence de mesures supplémentaires significatives de réduction du déficit budgétaire, l'assainissement budgétaire sur (son) horizon de prévision sera plus lent que prévu".

L'agence prévoit que "la dette publique brute atteindra 121% du PIB en 2028, contre 112% du PIB à la fin de l'année dernière", a-t-elle poursuivi dans un communiqué.

"En conséquence, nous avons abaissé nos notes souveraines non sollicitées de la France de AA-/A-1+ à A+/A-1", écrit-elle. Les perspectives sont stables.

"Pour 2026, le gouvernement a déposé mardi 14 octobre un projet de budget qui vise à accélérer la réduction du déficit public à 4,7% du PIB tout en préservant la croissance", a répondu le ministère de l'Economie.

"Il s'agit d'une étape clef qui nous permettra de respecter l'engagement de la France à ramener le déficit public sous 3% du PIB en 2029", a ajouté Bercy.

"Il est désormais de la responsabilité collective du gouvernement et du Parlement de parvenir à l'adoption d'un budget qui s'inscrit dans ce cadre, avant la fin de l'année 2025", selon la même source.

- "Plus grave instabilité" depuis 1958 -

Mais le gouvernement qui, à peine entré en fonctions, a échappé de peu cette semaine à la censure après une concession aux socialistes sur la réforme des retraites, va devoir composer avec une Assemblée nationale sans majorité lors de débats budgétaires qui s'annoncent houleux, alors même que le Premier ministre Sébastien Lecornu s'est engagé à ne pas recourir à l'article 49.3 pour imposer son texte.

Cette nouvelle dégradation de la note de la France par S&P intervient avant une décision de Moody's attendue le 24 octobre. Elle a lieu un mois après que Fitch a elle aussi abaissé la note française à A+.

Les agences comme Fitch, Moody's et S&P Global Ratings classent la qualité de crédit des Etats - soit leur capacité à rembourser leur dette -, de AAA (la meilleure note) à D (défaut de paiement).

Les dégradations de note par les agences sont redoutées par les pays car elles peuvent se traduire par un alourdissement de leurs intérêts.

Ceux payés par la France sont estimés à environ 55 milliards d'euros en 2025, alors que depuis la dissolution de l'Assemblée nationale en juin 2024, la dette française se négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande.

"La France traverse sa plus grave instabilité politique depuis la fondation de la Cinquième République en 1958", a estimé S&P: "depuis mai 2022, le président Emmanuel Macron a dû composer avec deux Parlements sans majorité claire et une fragmentation politique de plus en plus forte".

Pour l'agence, "l'approche de l'élection présidentielle de 2027 jette un doute (...) sur la capacité réelle de la France à parvenir à son objectif de déficit budgétaire à 3% du PIB en 2029".

En tombant en A+ chez S&P, la France se retrouve au niveau de l'Espagne, du Japon, du Portugal et de la Chine.


France : l'ancien Premier ministre Philippe demande encore le départ anticipé de Macron

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  • Allié de M. Macron dont il fut le premier chef de gouvernement de mai 2017 à juillet 2020, Edouard Philippe avait lancé un pavé dans la mare la semaine dernière, après la démission éclair du premier gouvernement de Sébastien Lecornu
  • "Je n'ai pas pris cette position parce que je pensais que je serais populaire ou parce que j'espérais convaincre le président (Macron). Le président, il a envie d'aller au terme de son mandat, et je peux le comprendre"

PARIS: L'ancien Premier ministre français Edouard Philippe a à nouveau réclamé jeudi le départ anticipé du président Emmanuel Macron, pour lui "la seule décision digne qui permet d'éviter 18 mois" de "crise" politique avant la prochaine élection présidentielle prévue pour le printemps 2027.

Allié de M. Macron dont il fut le premier chef de gouvernement de mai 2017 à juillet 2020, Edouard Philippe avait lancé un pavé dans la mare la semaine dernière, après la démission éclair du premier gouvernement de Sébastien Lecornu - reconduit depuis -, en suggérant un départ anticipé et "ordonné" du chef de l'Etat, qui peine à trouver une majorité.

"Je n'ai pas pris cette position parce que je pensais que je serais populaire ou parce que j'espérais convaincre le président (Macron). Le président, il a envie d'aller au terme de son mandat, et je peux le comprendre. Je l'ai dit parce que c'est la seule décision digne qui permet d'éviter 18 mois d'indétermination et de crise, qui se terminera mal, je le crains", a déclaré l'ancien Premier ministre sur la chaîne de télévision France 2.

"Ca n'est pas simplement une crise politique à l'Assemblée nationale à laquelle nous assistons. C'est une crise très profonde sur l'autorité de l'Etat, sur la légitimité des institutions", a insisté M. Philippe.

"J'entends le président de la République dire qu'il est le garant de la stabilité. Mais, objectivement, qui a créé cette situation de très grande instabilité et pourquoi ? Il se trouve que c'est lui", a-t-il ajouté, déplorant "une Assemblée ingouvernable" depuis la dissolution de 2024, "des politiques publiques qui n'avancent plus, des réformes nécessaires qui ne sont pas faites".

"Je ne suis pas du tout pour qu'il démissionne demain matin, ce serait désastreux". Mais Emmanuel Macron "devrait peut-être, en prenant exemple sur des prédécesseurs et notamment le général De Gaulle, essayer d'organiser un départ qui nous évite pendant 18 mois de continuer à vivre dans cette situation de blocage, d'instabilité, d'indétermination", a-t-il poursuivi.

Edouard Philippe, qui s'est déclaré candidat à la prochaine présidentielle, assure ne pas avoir de "querelle" avec Emmanuel Macron. "Il est venu me chercher (en 2017), je ne me suis pas roulé par terre pour qu'il me nomme" à la tête du gouvernement et après avoir été "congédié" en 2020, "je ne me suis pas roulé par terre pour rester".


Motion de censure: Le Pen attend la dissolution avec une «impatience croissante»

 Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
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  • Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu
  • Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver"

PARIS: Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante".

Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu. Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver".

"Poursuite du matraquage fiscal" avec 19 milliards d'impôts supplémentaires, "gel du barème" de l'impôt sur le revenu qui va rendre imposables "200.000 foyers" supplémentaires, "poursuite de la gabegie des dépenses publiques", "absence totale d'efforts sur l'immigration" ou sur "l'aide médicale d'Etat", ce budget "est un véritable musée de toutes les horreurs coincées depuis des années dans les tiroirs de Bercy", a-t-elle estimé.

Raillant le premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui a accepté d'épargner le gouvernement en échange de la suspension de la réforme des retraites sans savoir par "quel véhicule juridique" et sans assurance que cela aboutisse, elle s'en est pris aussi à Laurent Wauquiez, le chef des députés LR, qui préfère "se dissoudre dans le socialisme" plutôt que de censurer.

"Désormais, ils sont tous d'accord pour concourir à éviter la tenue d'élections", "unis par la terreur de l'élection", a-t-elle dit.