Le séisme en Turquie accentue la pression sur Erdogan avant les élections

Le président turc Recep Tayyip Erdogan visite le site des bâtiments détruits lors de sa visite dans la ville de Kahramanmaras, dans le sud-est de la Turquie, deux jours après le grave tremblement de terre qui a frappé la région le 8 février 2023.  (Photo de Adem ALTAN / AFP)
Le président turc Recep Tayyip Erdogan visite le site des bâtiments détruits lors de sa visite dans la ville de Kahramanmaras, dans le sud-est de la Turquie, deux jours après le grave tremblement de terre qui a frappé la région le 8 février 2023. (Photo de Adem ALTAN / AFP)
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Publié le Jeudi 09 février 2023

Le séisme en Turquie accentue la pression sur Erdogan avant les élections

  • Face à la montée des critiques concernant la lenteur et l'inorganisation des secours, le dirigeant au pouvoir depuis 2003 s'est rendu dans la zone sinistrée mercredi et a amorcé un mea culpa
  • Mais avant même que la terre ne tremble aux premières heures du jour lundi, le sol se dérobait sous les pieds du président Erdogan confronté à une série de crises à l'approche des scrutins du 14 mai

ISTANBUL: Le séisme de magnitude 7,8 qui a ravagé le sud de la Turquie lundi accroit la pression sur le président turc Recep Tayyip Erdogan à trois mois d'élections présidentielle et législatives qui s'annonçaient déjà serrées avant la catastrophe.

Face à la montée des critiques concernant la lenteur et l'inorganisation des secours, le dirigeant au pouvoir depuis 2003 s'est rendu dans la zone sinistrée mercredi et a amorcé un mea culpa.

"Bien sûr, qu'il y a des lacunes, il est impossible d'être préparé à un désastre pareil", a-t-il plaidé depuis la province d'Hatay, près de la frontière syrienne.

Le bilan du séisme qui a fait plus de 15.000 tués au total s'élève à plus de 12.300 morts côté turc, un chiffre appelé à s'alourdir encore.

Mais avant même que la terre ne tremble aux premières heures du jour lundi, le sol se dérobait sous les pieds du président Erdogan confronté à une série de crises à l'approche des scrutins du 14 mai.

Son approche non conventionnelle de l'économie a déclenché une spirale inflationniste qui a vu les prix à la consommation augmenter de 85% l'année dernière.

Sentant le danger, le président a contre-attaqué.

Quelques heures après le tremblement de terre, il prenait la parole lors d'une conférence de presse à Ankara - la première d'une longue série.

Mercredi, près de l'épicentre du séisme, dans la province de Kahramanmaras, il étreint une femme éplorée au milieu des ruines. Puis il descend plus au sud vers la province d'Hatay, frontalière de la Syrie, où le nombre de morts est encore plus élevé.

Le chaos de 1999

Recep Tayyip Erdogan se souvient sans doute que c'est l'impéritie des autorités lors du dernier gros tremblement de terre en Turquie, en 1999, qui avait conduit son parti à la victoire trois ans plus tard.

Le Premier ministre d'alors, Bulent Ecevit, avait fait l'objet de vives critiques pour avoir négligé les secours aux populations.

Cette fois, le chef de l'Etat a aussitôt déclaré un niveau d'urgence maximal qui en appelle à l'aide internationale. Le soutien de dizaines de pays - y compris de rivaux régionaux - a rapidement afflué.

Pour les experts, le président peut donc affermir sa position avec une réponse ajustée. Ou tout perdre.

"Une réponse efficace à l'urgence pourrait renforcer le chef de l'Etat et son parti, l'AKP, en suscitant un sentiment de solidarité nationale sous la direction d'Erdogan", estime dans une note Wolfango Piccoli, du cabinet de conseil en risques politiques Teneo, basé à Londres.

"S'il rate la réponse post-séisme, Erdogan pourrait perdre les élections de mai", nuance en revanche Emre Caliskan, chercheur au Foreign Policy Centre, basé au Royaume-Uni.

«Des institutions affaiblies»

La frustration monte dans les régions affectées. Des familles démunies dénonçaient mardi un gouvernement incapable de leur venir en aide et de sauver leurs proches piégés sous les décombres.

L'analyste Gonul Tol, qui se trouvait en Turquie au moment du séisme et qui a perdu des proches dans la tragédie, a senti que la colère était palpable à Hatay.

"Je ne peux pas croire qu'il (Erdogan) ne l'ait pas sentie parce que le niveau de frustration, la colère je les ai vus de mes yeux. Je suis sûr que cela aura un impact", assure la directrice du programme Turquie au Middle East Institute basé aux États-Unis.

En 1999, poursuit-elle, la société civile avait travaillé sans relâche pour aider les victimes. Mais cette fois, il y a moins d'organisations disponibles parce qu'Erdogan en a beaucoup réprimé à la suite du coup d'État manqué en 2016.

"Vingt ans plus tard, nous ne sommes pas mieux lotis", indique-t-elle à l'AFP. "Erdogan a non seulement affaibli les institutions de l'État, mais il a également affaibli la société civile turque."

Médias «favorables»

Erdogan ne fait cependant face à aucune critique de la plupart des médias grand public, rappellent les experts, ce qui lui confère un avantage évident sur l'opposition.

Les chaînes d'information ont très peu évoqué l'impact des mauvaises constructions après

l'effondrement des bâtiments, même ceux de moins d'un an...
Le gouvernement avait pourtant édicté de nouvelles normes dès 1998.

"L'opposition affirme que le nombre élevé de décès n'est pas seulement lié au tremblement de terre, mais à des constructions mal réglementées et de mauvaise qualité", relève Emre Caliskan.

En 1999, la presse avait critiqué la lenteur des autorités, pas cette fois.

"Des médias nationaux largement favorables signifient également qu'Erdogan gérera le récit officiel et pourra profiter de la situation", souligne dans une note Adeline Van Houtte, consultante principale pour l'Europe à l'Economist Intelligence Unit.


JO-2024: le CIO autorise la participation des Russes et Bélarusses sous bannière neutre

Cette photo prise le 14 août 2023 montre l'entrée du siège du Cojo de Paris 2024 à Saint-Denis, au nord de Paris. (Photo de BERTRAND GUAY / AFP)
Cette photo prise le 14 août 2023 montre l'entrée du siège du Cojo de Paris 2024 à Saint-Denis, au nord de Paris. (Photo de BERTRAND GUAY / AFP)
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  • La question est cruciale puisque la crainte de voir une délégation ukrainienne absente ou très affaiblie à Paris a longtemps inquiété l'instance olympique
  • Après avoir banni Russes et Bélarusses du sport mondial fin février 2022, dans la foulée de l'invasion russe de l'Ukraine, le CIO a donc raisonné en deux temps pour organiser leur retour

LAUSANNE: Le Comité international olympique a autorisé vendredi les sportifs russes et bélarusses à participer sous bannière neutre aux JO-2024 de Paris, hors épreuves par équipes et pour peu qu'ils n'aient pas activement soutenu l'invasion russe de l'Ukraine.

Seuls onze "athlètes individuels neutres" se sont pour l'instant qualifiés pour la compétition, soit huit Russes et trois Bélarusses, a précisé le CIO dans un communiqué, contre une soixantaine de sportifs ukrainiens.

La question est cruciale puisque la crainte de voir une délégation ukrainienne absente ou très affaiblie à Paris a longtemps inquiété l'instance olympique, et aurait rendu politiquement plus délicate encore la présence de sportifs russes, même sans hymne ni drapeau.

Après avoir banni Russes et Bélarusses du sport mondial fin février 2022, dans la foulée de l'invasion russe de l'Ukraine, le CIO a donc raisonné en deux temps pour organiser leur retour, expliquant à maintes reprises que les sportifs ne devaient pas "payer" pour les actions de leur gouvernement.

En mars dernier, l'organisation olympique a d'abord recommandé aux fédérations internationales de réintégrer les Russes et Bélarusses sous bannière neutre à leurs compétitions, tout en repoussant "à un moment approprié" sa décision sur les JO-2024 de Paris comme sur les JO-2026 de Milan-Cortina.

L'instance olympique s'est donné le temps d'évaluer le déroulement des compétitions, jugé globalement satisfaisant, et de voir évoluer la position du gouvernement ukrainien, qui a d'abord imposé à ses sportifs de boycotter tout événement impliquant des Russes avant d'assouplir sa position cet été.

Par ailleurs, si les fédérations internationales ont suivi cette recommandation en ordre dispersé - l'athlétisme en particulier refuse toujours de réintégrer les Russes -, le 12e Sommet olympique organisé mardi à Lausanne a débouché sur un signal clair du monde sportif.

Les représentants des fédérations internationales, des 206 comités nationaux olympiques et des athlètes ont tous réclamé une décision "rapide", pour permettre la présence à Paris du petit nombre de sportifs russes et bélarusses qui ont pu franchir l'obstacle des qualifications.


Poutine annonce se présenter à la présidentielle russe de mars 2024

Après une année 2022 marquée par des revers sur le front des combats et une volée de sanctions occidentales, Vladimir Poutine apparaît fin 2023 en meilleure posture. (AFP)
Après une année 2022 marquée par des revers sur le front des combats et une volée de sanctions occidentales, Vladimir Poutine apparaît fin 2023 en meilleure posture. (AFP)
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  • Le chef de l'Etat russe, qu'une révision constitutionnelle de 2020 autorise à être candidat encore en 2024 et 2030, peut théoriquement se maintenir au Kremlin jusqu'en 2036, l'année de ses 84 ans
  • M. Poutine s'exprimait au Kremlin à l'occasion d'un échange avec des combattants en uniforme, la mère d'un soldat tué en Ukraine, une médecin et un ouvrier d'une mine à qui il venait de remettre des décorations

MOSCOU: Pas "d'autre choix" : Vladimir Poutine a annoncé être candidat pour un cinquième mandat à la présidentielle du 17 mars en Russie, sa réélection faisant peu de doute après près d'un quart de siècle au pouvoir et la répression de l'opposition.

Le chef de l'Etat russe, qu'une révision constitutionnelle de 2020 autorise à être candidat encore en 2024 et 2030, peut théoriquement se maintenir au Kremlin jusqu'en 2036, l'année de ses 84 ans.

"A une autre époque, j'ai eu d'autres pensées concernant cette question. Mais je comprends qu'aujourd'hui il n'y a pas d'autre choix possible. Je vais donc me présenter au poste de président de la Russie", a déclaré l'intéressé, âgé de 71 ans.

M. Poutine s'exprimait au Kremlin à l'occasion d'un échange avec des combattants en uniforme, la mère d'un soldat tué en Ukraine, une médecin et un ouvrier d'une mine à qui il venait de remettre des décorations, pendant une cérémonie télévisée.

Fait inhabituel, l'annonce avait été faite aux médias russes quelques minutes plus tôt par un participant à cette réunion, Artiom Joga, un combattant et membre du Parlement local russe à Donetsk, une ville occupée de l'est de l'Ukraine.

"La candidature est chargée de symboles : des héros, des "pères du Donbass" (un territoire ukrainien revendiqué par Moscou, NDLR) veulent voir Poutine à nouveau président.... Poutine a choisi la guerre, la guerre choisit Poutine", a commenté sur Telegram l'analyste Tatiana Stanovaïa.

"Il ne s'agit pas tant de prospérer que de survivre", a-t-elle ajouté, estimant que cette annonce, se voulant informelle, visait à donner l'image d'un "Poutine modeste, occupé par (le règlement) de vraies questions".

Posture favorable 

Le président de la chambre basse du Parlement, Viatcheslav Volodine, a réagi sur Telegram en insistant sur les "qualités uniques" de Vladimir Poutine, tandis que pour son homologue à la chambre haute, Valentina Matvienko, le chef de l'Etat "ne fuira jamais ses responsabilités".

Aucun détracteur du Kremlin ne devrait être en mesure de se présenter au scrutin, les autorités écrasant depuis des années l'opposition. Cette répression s'est accélérée avec l'offensive en Ukraine.

L'élection se déroulera du 15 au 17 mars, peu après le deuxième anniversaire du déclenchement de l'attaque contre l'Ukraine, toujours en cours, et à la veille du dixième anniversaire de l'annexion par la Russie, en 2014, d'un premier territoire ukrainien, la péninsule de Crimée.

L'élection aura d'ailleurs lieu dans les régions ukrainiennes occupées par la Russie, où la loi martiale est actuellement en vigueur.

Après une année 2022 marquée par des revers sur le front des combats et une volée de sanctions occidentales, Vladimir Poutine apparaît fin 2023 en meilleure posture avec l'échec de la contre-offensive entamée cet été par l'Ukraine, l'effritement du soutien européen et américain à Kiev et le redressement de l'économie nationale.

La quasi-totalité des opposants d'envergure, à l'exemple du militant anticorruption Alexeï Navalny, ont été jetés en prison ou poussés à l'exil.

Aucun concurrent 

La Commission électorale russe a annoncé vendredi que le scrutin se déroulerait sur trois jours, une pratique instaurée pendant la pandémie de Covid-19 mais dénoncée par l'opposition comme étant un moyen de faciliter les fraudes et d'obtenir les résultats attendus par le pouvoir.

M. Poutine a été président de 2000 à 2008 et l'est de nouveau depuis 2012. Touché par la limite du nombre des mandats, il avait cédé le Kremlin de 2008 à 2012 à un allié, Dmitri Medvedev, mais était resté en tant que Premier ministre l'homme fort de la Russie.

Né en 1952 à Léningrad (redevenue Saint-Pétersbourg), il a d'abord eu une carrière d'agent du KGB, les services secrets soviétiques, notamment en Allemagne de l'Est, avant de rentrer en Russie à la dislocation de l'URSS.

Il a commencé son parcours politique à la mairie de Saint-Pétersbourg, avant de rapidement rejoindre le Kremlin et d'y gravir les échelons en cultivant l'image d'un homme efficace, en plein tumulte des années 1990 en Russie.

Désigné Premier ministre, puis succédant à Boris Eltsine après sa démission le 31 décembre 1999, Vladimir Poutine a progressivement redressé l'économie grâce à la manne des hydrocarbures et mis au pas son pays, en démontant les acquis démocratiques des années 1990 et prônant une politique de puissance nostalgique de l'URSS, de plus en plus conservatrice et anti-occidentale.

Il a livré ou soutenu quatre guerres depuis son arrivée au pouvoir : la seconde guerre de Tchétchénie (1999-2009), l'invasion d'une partie de la Géorgie (2008), l'intervention en Syrie (2015) et les attaques contre l'Ukraine, d'abord en 2014, puis en 2022.


UE: le Premier ministre hongrois contre des négociations d'adhésion avec l'Ukraine

Le président français Emmanuel Macron accueille le Premier ministre hongrois Viktor Orban à l'Elysée présidentielle à Paris, le 7 décembre 2023. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron accueille le Premier ministre hongrois Viktor Orban à l'Elysée présidentielle à Paris, le 7 décembre 2023. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
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  • Viktor Orban est revenu sur la réforme de l'asile actuellement en discussions à l'UE
  • «En Hongrie, il n'y a aucun migrant, et j'en suis fier», s'enorgueillit le Premier ministre hongrois

PARIS: Le Premier ministre hongrois Viktor Orban reste farouchement opposé à des négociations d'adhésion de l'Union européenne avec l'Ukraine, arguant que le pays est gangrené par la corruption et représente une menace pour l'agriculture européenne.

"L'Ukraine est connue pour être l'un des pays les plus corrompus du monde. C'est une plaisanterie ! Nous ne pouvons pas prendre la décision d'entamer un processus de négociation d'adhésion", fait valoir M. Orban, dans un entretien avec l'hebdomadaire Le Point publié vendredi à quelques jours d'un Conseil européen qui doit aborder le sujet.

En outre, il met en garde les Français sur "ce que signifierait économiquement cette adhésion pour la France".

"Chaque année, il vous faudra verser au budget commun de l'Union plus de 3,5 milliards d'euros supplémentaires", dit-il.

Et de souligner l'importance de l'agriculture de l'Ukraine. "Si vous laissez cette agriculture entrer dans le système agricole européen, elle le détruira le lendemain", assure-t-il.

Le Premier ministre, qui a rencontré jeudi soir le président français Emmanuel Macron, explique par ailleurs que sa position est inflexible car "plus des deux tiers de l'opinion publique hongroise sont opposés à l'ouverture de toute négociation".

Mais "l'Ukraine est en difficulté", reconnaît-il car "elle subit l'invasion russe" et il est "légitime que l'ensemble du Conseil européen (lui) envoie de bons signaux", tel qu'un "partenariat stratégique" avec l'UE plutôt que des négociations pour une adhésion.

"Lorsque nous parviendrons (...) à rapprocher l'Ukraine de l'Europe, dans plusieurs années, nous verrons alors", a-t-il également confié avant son entretien avec Emmanuel Macron jeudi, sur lequel l'Elysée n'a pas communiqué.

Viktor Orban est par ailleurs revenu sur la réforme de l'asile actuellement en discussions à l'UE.

Elle "est peut-être meilleure que la précédente, mais ce n'est pas une solution", estime-t-il. "La solution ultime est que personne ne puisse entrer sur le territoire européen sans obtenir l'autorisation d'une autorité basée sur une procédure".

"Je suis le seul à avoir construit une clôture, s'enorgueillit le Premier ministre hongrois. En Hongrie, il n'y a aucun migrant, et j'en suis fier."

Et d'ajouter : "Si vous pensez qu'accepter les migrants aboutirait à quelque chose d'agréable, à une nouvelle société, à quelque chose de moralement plus élevé que la société traditionnelle, faites-le. C'est votre choix. Mais nous, Hongrois, nous pensons que c'est trop risqué."