Pendant l'acte III des «gilets jaunes», le grand écart entre le terrain et le commandement policier

Un manifestant gît au sol lors d'affrontements avec la police le 20 avril 2019 à Paris, alors que des milliers gilets jaunes sont descendus dans la rue lors de la 23e semaine de marches anti-gouvernementales (Photo, AFP).
Un manifestant gît au sol lors d'affrontements avec la police le 20 avril 2019 à Paris, alors que des milliers gilets jaunes sont descendus dans la rue lors de la 23e semaine de marches anti-gouvernementales (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 17 février 2023

Pendant l'acte III des «gilets jaunes», le grand écart entre le terrain et le commandement policier

  • Pendant ses 8h30 d'interrogatoire en octobre, Gilbert S., commandant de la CRS 43 mise en cause pour ces violences, a détaillé comment, avec un chef d'une autre compagnie, il a refusé d'exécuter des ordres de la préfecture de police
  • Placé sous le statut de témoin assisté, il a étrillé la direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC) de la PP et ses instructions

PARIS: L'enquête sur les violences de CRS sur des manifestants "gilets jaunes" présents dans un Burger King près des Champs-Elysées a mis au jour un grand écart le 1er décembre 2018, jour de chaos à Paris, entre le terrain et le commandement policier.

Pendant ses 8h30 d'interrogatoire en octobre, Gilbert S., commandant de la CRS 43 mise en cause pour ces violences, a détaillé comment, avec un chef d'une autre compagnie, il a refusé d'exécuter des ordres de la préfecture de police pour défendre ses troupes qui "explosaient" sous la violence.

Placé sous le statut de témoin assisté, il a étrillé la direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC) de la PP et ses instructions alors "fluctuantes, irrationnelles, irréalisables et dangereuses" lors de cet acte III des "gilets jaunes" au niveau de violence extrême.

Gilbert S. a versé à l'enquête le son d'instructions de la PP reçues peu avant 18 heures ce jour-là par radio.

"Vous défoncez tout ce qui se présente à vous", lui indique-t-on, des mots qui proviendraient selon lui d'Alexis Marsan, alors adjoint à la DOPC.

Contacté jeudi par l'AFP, le service communication de la préfecture de police n'a pas donné suite.

Un capitaine de CRS avait déjà mis en cause en septembre 2021 la "mauvaise gestion stratégique de l'ordre public".

Sur l'intervention au Burger King mise en cause, Eric Davoine, directeur du centre de formation des CRS de Sainte-Foy-Lès-Lyon (Rhône), a estimé que "compte tenu de l'épuisement, il aurait été préférable de faire intervenir dans ce restaurant "une unité différente" de la CRS 43, sur le terrain depuis une dizaine d'heures.

D'après celui qui était observateur sur place ce jour-là, d'autres unités "disponibles" n'ont pas été engagées. Pour Gilbert S., la DOPC s'y est opposée.

Selon une synthèse de l'activité des CRS du 1er décembre 2018 versée à l'enquête, une dizaine de compagnies dans le secteur des Champs-Elysées ont terminé leur service "sans incident" notable, tandis que seize autres ont affronté des niveaux de violence parfois extrêmes.

Gilbert S. soutient aussi, reconnaissant ne pas en avoir la preuve, que la haute hiérarchie CRS a ordonné, contre l'avis de la DOPC et donc "hors champ réglementaire", l'envoi en soutien à la CRS 43 d'une autre compagnie avant l'intervention litigieuse au Burger King.

Le commandant évoque la "sidération" de ses supérieurs: "Tout le monde était totalement perdu. Je n'ai jamais ressenti de tels flottements".

Après ces violences, les autorités avaient mis en place le dimanche suivant un dispositif renforcé à Paris, qui n'empêchera pas de nouveaux heurts, de nombreux dégâts, mais permettra l'interpellation de 1 082 personnes.

L'Etat condamné à verser plus de 100 000 euros à un manifestant éborgné par un tir de LBD en 2009

L'Etat a été condamné jeudi par la justice administrative à verser plus de 100 000 euros en réparation de préjudices à un manifestant éborgné en 2009 à Montreuil par le tir de LBD (lanceur de balles de défense) d'un policier.

Au pénal, le policier reconnu coupable du tir ayant touché Joachim Gatti avait été condamné en appel en 2018 à 18 mois de prison avec sursis et 24 mois d'interdiction de port d'arme.

Auprès de la justice administrative, la victime - ancien cameraman reconverti dans le social - demandait une somme de 508 508 euros en réparation de plusieurs préjudices.

Jeudi, le tribunal administratif de Montreuil a condamné l'Etat à verser "105 350 euros en réparation des préjudices subis", selon une décision consultée par l'AFP.

Les juges ont notamment admis des préjudices patrimoniaux liés à une perte de revenus.

"Le requérant justifie de ce que son état de santé ne lui permet pas désormais d'espérer un déroulement normal de sa vie professionnelle, en ce que sa blessure l'empêche d'exercer les métiers de caméraman et de monteur qu'il occupait auparavant, ainsi que toute activité professionnelle nécessitant une acuité visuelle normale, limitant ainsi ses possibilités de reconversion professionnelle", écrivent les juges.

Depuis les faits, l'ancien cameraman a notamment travaillé par intermittence en tant que cuisinier ou éducateur.


Commerce: Macron dit préférer une politique "coopérative" avec la Chine aux droits de douane

Le président français Emmanuel Macron attend avant d'accueillir le président roumain à l'Élysée, à Paris, le 9 décembre 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron attend avant d'accueillir le président roumain à l'Élysée, à Paris, le 9 décembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron privilégie une approche coopérative avec la Chine pour corriger des déséquilibres commerciaux « non viables », tout en gardant l’option de droits de douane si Pékin ne réagit pas
  • Il appelle l’UE à renforcer sa compétitivité, à mieux mobiliser son épargne et à promouvoir l’euro

PARIS: Emmanuel Macron, qui avait menacé d'imposer à la Chine des droits de douane européens dans les "prochains mois", appelle dans une tribune publiée mardi dans le Financial Times à privilégier une approche "coopérative" avec Pékin pour résorber les déséquilibres commerciaux qui ne sont "plus viables".

"Imposer des droits de douane et des quotas sur les importations chinoises serait une réponse non coopérative", dit le président français dans le quotidien des affaires britannique.

"Nous devons reconnaître que ces déséquilibres sont à la fois le résultat d'une faible productivité européenne et de la politique chinoise d'une croissance tirée par les exportations. Poursuivre dans cette voie risque d'entraîner un conflit commercial grave, mais la Chine et l'UE ont toutes deux les moyens de corriger ces déséquilibres", plaide-t-il.

Au retour de son déplacement en Chine début décembre, Emmanuel Macron avait affirmé avoir prévenu les dirigeants chinois que "s'ils ne réagissaient pas" pour réduire leur excédent commercial qui ne cesse d'augmenter avec l'Union européenne, les Européens seraient "contraints, dans les tout prochains mois, de prendre des mesures fortes" comme "par exemple des droits de douane sur les produits chinois".

"Je préfère de loin la coopération, mais je plaiderai en faveur de cette dernière solution si nécessaire", explique-t-il dans le Financial Times, tout en se montrant plus conciliant.

"Je suis toutefois convaincu qu'en tenant véritablement compte des besoins et des intérêts de chacun, nous pouvons établir un agenda macroéconomique international qui profitera à tous", ajoute-t-il en effet, rappelant que "la résolution des déséquilibres mondiaux sera au cœur de l'agenda de la présidence française du G7" en 2026.

Pour montrer que l'Europe est prête à faire sa part dans cette approche "coopérative", le président français prône "un nouveau programme économique fondé sur la compétitivité, l'innovation et la protection" au niveau des Vingt-Sept.

"Afin de financer les investissements dont nous avons besoin, l'Europe doit tirer parti de son pool d'épargne d'environ 30.000 milliards d'euros", en en dirigeant une plus grande partie vers les entreprises européennes, estime-t-il.

"L'Europe devrait également chercher à renforcer le rôle international de l'euro à travers le développement de stablecoins en euros et l'introduction d'un euro numérique", ajoute-t-il parmi les mesures proposées.

Emmanuel Macron entend porter ces positions aussi lors du prochain Conseil européen, jeudi à Bruxelles.


Dermatose: Lecornu demande «une accélération de la stratégie vaccinale», va recevoir les syndicats

Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet. (AFP)
Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet. (AFP)
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  • Le Premier ministre tiendra une deuxième réunion à ce sujet à 17H30 avec les mêmes ministres et des préfets en visioconférence
  • Il a demandé à son gouvernement "une clarification et une accélération de la stratégie vaccinale qui doit davantage tenir compte de la réalité de chaque département" pour "protéger nos éleveurs et l'élevage français"

PARIS: Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet.

Le Premier ministre tiendra une deuxième réunion à ce sujet à 17H30 avec les mêmes ministres et des préfets en visioconférence. Il a demandé à son gouvernement "une clarification et une accélération de la stratégie vaccinale qui doit davantage tenir compte de la réalité de chaque département" pour "protéger nos éleveurs et l'élevage français", appelant à "garantir" une "disponibilité des doses" de vaccins "plus forte".

Il a également demandé un "état des lieux des contrôles sur les transports interdits d'animaux", "un plan d’accompagnement pour les petits élevages" ainsi qu'"un plan de repeuplement adapté à l’Occitanie".


Ultime vote sur le budget de la Sécurité sociale à l'Assemblée

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
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  • L’Assemblée devrait adopter définitivement le budget de la Sécurité sociale 2026, fruit de compromis, malgré une majorité introuvable et sans 49.3
  • Le budget de l’État reste très incertain : déficit visé à 5% du PIB, fortes divergences sur les recettes, CMP à haut risque

PARIS: Sauf surprise, l'Assemblée nationale devrait définitivement adopter mardi le budget de la Sécurité sociale pour 2026, un succès arraché à force de concessions par Sébastien Lecornu, qui risque toutefois de ne pas réussir le même pari pour le budget de l'Etat, à l'issue bien plus incertaine.

Alors qu'approche la date butoir du 31 décembre, l'heure est aux dernières tractations pour les parlementaires, au terme de longues semaines de débats. Tous les yeux sont désormais braqués sur le projet de loi de finances (PLF), avec des négociations décisives jusqu'au week-end.

Il y a une semaine pourtant, beaucoup doutaient d'une possible adoption du premier des deux textes budgétaires, la loi de financement de la Sécurité sociale, qui doit notamment acter la suspension de la réforme des retraites.

Pour le PS, qui a érigé cette mesure en condition de sa non-censure, l'étape doit marquer le succès de sa stratégie de négociation avec l'exécutif, à rebours du reste de la gauche. Et pour le Premier ministre, elle couronnerait au moins temporairement sa méthode du compromis.

Après un dernier passage express au Sénat vendredi, le texte revient mardi dans l'hémicycle, où les députés devront renouveler le scrutin serré de la semaine dernière (247 voix contre 234), à haut risque en l'absence de majorité et de 49.3.

Les socialistes, quoique dans l'opposition, avaient consenti à massivement voter pour. Hésitant jusqu'au dernier moment à voter contre, les Ecologistes s'étaient en majorité abstenus. Et malgré les consignes d'abstention de leur parti, 18 députés LR et 9 Horizons l'avaient soutenu.

Au gouvernement, une issue semblable est attendue mardi, même s'il "faut veiller à ce qu'il n'y ait pas de démobilisation" dans l'hémicycle, concède un ministre.

Les syndicats FO et CGT ont appelé à des rassemblements devant l'Assemblée, critiquant notamment la limitation de la durée des arrêts maladie, ou une taxe sur les mutuelles dont ils craignent la répercussion sur les cotisations.

Le texte prévoit par ailleurs la création d'un nouveau congé de naissance, ou d'un "réseau France santé" voulu par M. Lecornu pour l'accès aux soins.

Le gouvernement a vu sa copie profondément remaniée par les députés, qui ont supprimé le gel des pensions de retraite et minima sociaux, et contraint l'exécutif à renoncer à doubler les franchises médicales.

Le déficit anticipé pour la Sécurité sociale est de 19,4 milliards d'euros en 2026 (contre 23 milliards en 2025). Mais au prix de transferts de 4,5 milliards d'euros des caisses de l'Etat vers celles de la Sécu.

- Négociations députés-sénateurs -

Des transferts qui contribuent à compliquer l'équation pour le budget de l'Etat, où ils doivent être compensés.

La copie du budget de l'Etat adoptée lundi au Sénat, qui a peiné à trouver des économies significatives dans les dépenses, porterait le déficit à 5,3% du PIB. Or le gouvernement a placé l'objectif à 5%.

Une commission mixte paritaire (CMP) réunissant sept députés et sept sénateurs doit tenter de trouver un accord vendredi et possiblement samedi, une opération périlleuse au vu des divergences entre les deux chambres.

L'Assemblée avait massivement rejeté le texte en première lecture.

Les négociations avant et pendant la CMP porteront notamment sur la question des recettes, alors que les socialistes réclament des mesures de justice fiscale, quand la droite se montre intransigeante dans son refus de nouveaux prélèvements.

"Il ne pourra pas y avoir d'accord sur un budget qui augmenterait considérablement les impôts et ne réduirait pas significativement la dette", insiste le chef des Républicains Bruno Retailleau.

Même si l'ancien socle commun, majoritaire au sein de la CMP, trouve un accord, il faudra encore qu'il puisse être adopté la semaine prochaine à l'Assemblée.

Et ce alors que les socialistes promettent cette fois de s'abstenir au mieux, et les Écologistes de voter contre.

Autres possibilités: utiliser le 49.3 en s'assurant d'une non-censure dans la foulée -- comme le plaident l'ancienne Première ministre Élisabeth Borne ou l'ex-président François Hollande -- ou se résoudre à une loi spéciale, avec une reprise des négociations en janvier.

Une dernière option loin de remporter l'enthousiasme général.

"Il faut que ça s'arrête cette séquence budgétaire", estime un cadre socialiste. "On connaît toutes les données du problème. Si le compromis est possible, alors il faut qu'il ait lieu maintenant."