À l’ONU, de hauts dirigeants appellent à une «paix juste et durable» pour marquer l’anniversaire de la guerre en Ukraine

Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, s’exprime lors de la 11e session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale sur l’Ukraine, au siège de l’ONU, à New York, le 22 février 2023. (AFP)
Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, s’exprime lors de la 11e session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale sur l’Ukraine, au siège de l’ONU, à New York, le 22 février 2023. (AFP)
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Publié le Jeudi 23 février 2023

À l’ONU, de hauts dirigeants appellent à une «paix juste et durable» pour marquer l’anniversaire de la guerre en Ukraine

  • La proposition, parrainée par une soixantaine de pays, appelle la Russie à retirer «immédiatement, complètement et sans conditions» ses forces militaires d’Ukraine et à une cessation immédiate des hostilités
  • Josep Borrell, haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères, soutient que le fait de ne pas condamner la Russie et de ne pas mettre fin à ses actes en Ukraine conduira à des agressions similaires ailleurs dans le monde

NEW YORK: L’Assemblée générale des nations unies a tenu mercredi une session d’urgence pour marquer l’anniversaire du début de la guerre contre l’Ukraine. Kiev et ses partisans espèrent recueillir un large soutien pour une résolution soulignant la nécessité «d’atteindre une paix compréhensible, juste et durable», conformément à la charte des Nations unies.

La proposition, parrainée par une soixantaine de pays, appelle la Russie à retirer «immédiatement, complètement et sans conditions» ses forces militaires d’Ukraine et à une cessation immédiate des hostilités. Le vote aura probablement lieu jeudi après des discours prononcés par les représentants de plus de 80 pays.

Le texte, qui, contrairement à une résolution du Conseil de sécurité, n’a pas la force contraignante du droit international, mais pourrait aggraver l’isolement de la Russie sur la scène mondiale, réaffirme «l’engagement de l’ONU en faveur de la souveraineté, de l’indépendance, de l’unité et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine» et appelle à une cessation immédiate des hostilités.

Kiev espère recueillir le soutien d’au moins autant de nations qu’en 2022, lorsque près des trois quarts de l’Assemblée générale avaient voté plusieurs résolutions condamnant la Russie.

Dans son allocution devant les 193 membres de l’assemblée, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, appelle l’ONU à soutenir la résolution, qui «renforcera nos efforts conjoints pour mettre fin à la guerre et protéger les principes fondamentaux du droit international et de la charte des Nations unies».

M. Kouleba affirme que le monde, en s’engageant à sauvegarder l’intégrité territoriale de l’Ukraine, enverra un message «fort et clair» à la Russie et la découragera d’attaquer d’autres territoires.

Il indique que son pays n’a d’autre choix que de continuer à se battre pour sa survie «comme chacun de vous le ferait», ajoutant que la situation actuelle sur les lignes de front prouve que les Russes «veulent la guerre, et non la paix. Ils attaquent sur toute la ligne de front, du fleuve Dniepr à la frontière russe».

S’adressant aux pays qui n’ont pas explicitement exprimé leur soutien à l’Ukraine, le ministre des Affaires étrangères leur dit de cesser de se cacher derrière «le masque de la neutralité» et d’opter plutôt pour la charte des Nations unies et le droit international.

«Jamais la frontière entre le bien et le mal n’a été aussi nette dans l’histoire récente. Un pays veut simplement vivre. L’autre veut tuer et détruire.»

C’est la raison pour laquelle les appels à cesser les livraisons d’armes à l’Ukraine sont «mal placés», déclare M. Kouleba.

«Il est parfaitement légitime d’aider une nation qui a été attaquée et qui se défend à juste titre. C’est un acte de défense de la charte des Nations unies. C’est un acte pour mettre plus rapidement fin à la guerre et pour établir une paix durable et juste.»

«Au contraire, il est illégal et contraire à la charte d’apporter une aide militaire à l’agresseur. C’est un acte d’escalade de la guerre et de prolongation des atrocités, des destructions et des souffrances.»

Vassili Nebenzia, représentant permanent de la Russie auprès de l’ONU, exhorte l’Assemblée générale à voter contre le projet de résolution «anti-Russie». Agir autrement encouragerait l’Occident à perpétuer «leurs mensonges militaristes russophobes en utilisant le soutien des États membres de l’ONU comme bouclier».

L’envoyé russe déclare que, un an plus tard, les États membres sont beaucoup mieux informés et qu’il est désormais plus difficile pour le «camp occidental de mobiliser les États membres de l’ONU afin de soutenir leur croisade contre la Russie».

Tout au long de l’année écoulée, précise M. Nebenzia, «il semble évident que l’élément principal de la campagne de propagande antirusse menée par nos anciens partenaires occidentaux» consiste à accuser la Russie de mener une agression non provoquée contre l’Ukraine, guidée par des ambitions impériales, tout en faisant fi de ce qu’il qualifie de «résurgence du nouveau nazisme» en Ukraine.

«Il semble très clair que la crise ukrainienne n’est qu’un catalyseur pour que la russophobie viscérale refasse surface. Elle a désormais contaminé les dirigeants américains et européens. Ils sont en concurrence les uns contre les autres au sujet du nombre de sanctions qui sont imposées à mon pays.»

Il affirme que les sanctions imposées à la Russie nuisent le plus aux pays en développement et que «ce qui est en jeu, après tout, c’est l’hégémonie des États-Unis et de leurs alliés. Ils ne veulent pas que quiconque leur fasse la concurrence en matière de gouvernance à l’échelle mondiale. Ils pensent que c’est leur territoire».

Josep Borrell, haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères, soutient que le monde a besoin de paix en Ukraine, «mais pas [de] n’importe laquelle. Nous avons besoin d’une paix fondée sur les principes de la charte des Nations unies».

Il souligne que la résolution, rédigée par l’Union européenne (UE), est là pour «réitérer notre soutien à l’Ukraine et énoncer les principes de la paix».

«Ce n’est pas une question européenne, je tiens à le répéter. Il ne s’agit pas non plus de l’Occident contre la Russie», poursuit-il. «Non, cette guerre illégale concerne tout le monde: le Nord, le Sud, l’Est et l’Ouest.»

Il annonce à l’assemblée que le fait de ne pas condamner la Russie et de ne pas mettre fin à ses actes en Ukraine conduira à des agressions similaires ailleurs dans le monde.

Selon M. Borrell, l’Ukraine aurait le droit de se défendre. Avant que la Russie ne mette fin aux hostilités et retire ses forces d’Ukraine, «l’UE continuera à apporter à l'Ukraine le soutien dont elle a besoin pour défendre son peuple».

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, décrit la guerre russe comme «un affront à notre conscience collective et une violation de la charte des Nations unies et du droit international qui a des conséquences dramatiques sur le plan humanitaire et celui des droits de l’homme».

Il déclare que l’incidence de la guerre se fait sentir «bien au-delà de l’Ukraine».

«Comme je l’ai dit dès le premier jour, l’attaque de la Russie contre l’Ukraine remet en question les principes fondamentaux et les valeurs de notre système multilatéral.»

Citant directement la charte, António Guterres affirme: «Les membres de l’organisation s’abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations unies.»

M. Guterres affirme que la guerre «attise l’instabilité régionale et alimente les tensions et les divisions mondiales, tout en détournant l’attention et les ressources d’autres crises et de problèmes mondiaux urgents».

Les menaces implicites d’utiliser des armes nucléaires sont «totalement inacceptables», souligne le chef de l’ONU, qui ajoute: «Il est grand temps de s’éloigner du précipice.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.