Au Yémen en guerre, les arbres sacrifiés face à la flambée de l'énergie

Devenus bûcherons sur le tard, Hussein Abdelqaoui et ses collègues amassent des tronçons d'arbres tout juste abattus dans une forêt puis les jettent à l'arrière d'une camionnette en périphérie de Taëz. (AFP)
Devenus bûcherons sur le tard, Hussein Abdelqaoui et ses collègues amassent des tronçons d'arbres tout juste abattus dans une forêt puis les jettent à l'arrière d'une camionnette en périphérie de Taëz. (AFP)
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Publié le Dimanche 26 février 2023

Au Yémen en guerre, les arbres sacrifiés face à la flambée de l'énergie

  • Devant la boulangerie d'Abdelsalam Dabwan, dans le centre commercial de Taëz, des troncs et des branches d'arbres s'entassent
  • Le boulanger confie qu'il a dû se résoudre à utiliser du bois à cause de «l'augmentation incroyable des prix» du gaz et des autres carburants

TAEZ: Entre les montagnes du sud du Yémen, le bruit des scies électriques vient déchirer le calme d'un paysage luxuriant, le bois des arbres devenant une source d'énergie alternative pour une population confrontée à l'un des pires drames humanitaires au monde.

Pays le plus pauvre de la péninsule arabique, le Yémen n'est pas épargné par l'inflation globale et la hausse des prix de l'énergie, même s'il reste largement coupé du monde en raison de la guerre qui oppose depuis plus de huit ans les forces pro-gouvernementales aux rebelles Houthis, proches de l'Iran.

Devenus bûcherons sur le tard, Hussein Abdelqaoui et ses collègues amassent des tronçons d'arbres tout juste abattus dans une forêt puis les jettent à l'arrière d'une camionnette en périphérie de Taëz, une ville du sud assiégée par les Houthis mais encore contrôlée par le gouvernement, appuyé par l'Arabie saoudite voisine.

Ce conflit, qui a fait des centaines de milliers de morts et des millions de déplacés, a également dévasté une économie déjà très fragile, plongeant une grande partie des quelque 30 millions de Yéménites dans une grave précarité.

Beaucoup peinent aussi à s'alimenter, une situation proche de la famine, selon les ONG.

Et avec la hausse des cours de l'énergie depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, se chauffer est de plus en plus difficile.

"On s'est mis à couper des arbres et les vendre car on n'a pas d'autres moyens de subsistance", confirme Hussein Abdelqaoui à l'AFP.

Abattre les arbres du Yémen est encore une "catastrophe" pour le pays, regrette-t-il. "Mais on n'a pas le choix, on les vend", et les gens "n'ont pas le choix et les achètent".

«Augmentation incroyable»

Devant la boulangerie d'Abdelsalam Dabwan, dans le centre commercial de Taëz, des troncs et des branches d'arbres s'entassent. Ils seront brûlés dans les fourneaux pour cuire le pain, aliment essentiel pour les familles les plus pauvres du Yémen.

Alors que ses employés s'activent pour sortir des petites miches et des galettes du four où crépitent des branchettes, le boulanger confie qu'il a dû se résoudre à utiliser du bois à cause de "l'augmentation incroyable des prix" du gaz et des autres carburants.

A défaut, il serait obligé de répercuter la hausse du coût de l'énergie sur le prix du pain, ce qui alourdirait la note pour une population qui "souffre" déjà de l'inflation.

"On utilise le bois pour offrir aux gens ce dont ils ont besoin", assure le boulanger, qui appelle le gouvernement à soutenir les commerçants.

«Catastrophes naturelles»

Selon les chiffres officiels, plus de six millions d'arbres ont été abattus depuis le début de la guerre, dont un dixième rien qu'à Sanaa où il sont largement utilisés par les boulangeries et les restaurants, précise à l'AFP Anouar Al-Chazli, un expert en gestion des ressources naturelles travaillant pour les autorités yéménites.

"L'exploitation forestière existe dans tous les pays mais de façon réglementée et adéquate", ce qui n'est pas le cas au Yémen, souligne le spécialiste.

Dans le pays, notamment à Taëz, les arbres sont coupés "au ras du sol ce qui affecte les nappes phréatiques, les systèmes agricoles et la biodiversité tout en participant à l'érosion des sols", regrette-t-il.

Les autorités doivent intervenir, met-il en garde, en empêchant ces abattages "anarchiques" et en apprenant aux bûcherons amateurs à couper les arbres de manière "adéquate" pour porter le moins possible atteinte à la végétation.

Si cet écologiste convaincu dit comprendre la détresse de la population face à l'inflation et les conséquences économiques de la guerre, il estime urgent que le Yémen agisse pour prévenir les "catastrophes naturelles qui vont s'abattre sur le pays".


Turquie: le chef kurde Öcalan veut agir avec «sérieux et responsabilité»

 Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs. (AFP)
Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs. (AFP)
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  • "Pour passer à une phase positive, il est essentiel que chacun agisse avec sensibilité, sérieux et sens des responsabilités"
  • Abdullah Öcalan, qui a appelé en février son mouvement à se dissoudre, est détenu à l'isolement depuis 1999 sur l'île prison d'Imrali, au large d'Istanbul

ISTANBUL: Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs.

"Pour passer à une phase positive, il est essentiel que chacun agisse avec sensibilité, sérieux et sens des responsabilités", écrit le leader historique du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), auquel une délégation du parti prokurde DEM a rendu visite lundi.

Abdullah Öcalan, qui a appelé en février son mouvement à se dissoudre, est détenu à l'isolement depuis 1999 sur l'île prison d'Imrali, au large d'Istanbul.

Le PKK a annoncé le 26 octobre le retrait vers le nord de l'Irak de ses derniers combattants présents en Turquie, complétant ainsi la première phase du processus de paix initié un an auparavant par Ankara.

Lors d'une cérémonie en juillet, une trentaine de combattants en treillis avaient symboliquement brûlé leurs armes.

Le parti prokurde, troisième force au Parlement, a appelé à "passer à la deuxième phase, à savoir les étapes juridiques et politiques".

"Nous nous efforçons de développer une phase positive, et non une phase destructrice et négative", poursuit M. Öcalan. "L'intégration du phénomène kurde dans toutes ses dimensions dans le cadre légal de la République et un processus de transition solide doivent en constituer le fondement", écrit-il.

Une commission parlementaire transpartisane planche depuis août sur une traduction légale et encadrée de cette transition vers la paix.

Elle doit notamment décider du sort d'Abdullah Öcalan et de possibles garanties de sécurité pour ses combattants.

La libération du leader kurde âgé de 76 ans est au cœur des demandes du PKK. Il a été autorisé en septembre à rencontrer ses avocats pour la première fois en six ans.

Selon des analystes, le PKK est affaibli par des décennies de guérilla qui ont fait au moins 50.000 morts, selon un bilan officiel. Et la communauté kurde, qui représente selon des estimations 20% de la population turque sur 86 millions d'habitants, est épuisée par un long conflit.


Un hôpital de Gaza déclare avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens

L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël. (AFP)
L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël. (AFP)
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  • Sur les 28 otages décédés que le Hamas avait accepté de remettre à Israël dans le cadre de l'accord, 21 ont été restitués à ce jour. Israël exige toujours la restitution des sept dernières dépouilles
  • Le mouvement islamiste palestinien a également libéré le 13 octobre les 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza, en échange de la libération de près de 2.000 prisonniers palestiniens

KHAN YOUNES: L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël.

"La dixième série de dépouilles de martyrs palestiniens, soit 15 martyrs", est arrivée "dans le cadre de l'échange de dépouilles entre la partie palestinienne et l'occupation israélienne", a déclaré l'hôpital en précisant que 285 dépouilles ont été reçues dans la bande de Gaza depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre.

Sur les 28 otages décédés que le Hamas avait accepté de remettre à Israël dans le cadre de l'accord, 21 ont été restitués à ce jour. Israël exige toujours la restitution des sept dernières dépouilles.

Le mouvement islamiste palestinien a également libéré le 13 octobre les 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza, en échange de la libération de près de 2.000 prisonniers palestiniens.

Mardi, la branche armée du Hamas a fait parvenir aux autorités israéliennes la dépouille d'une personne, identifiée mercredi comme Itay Chen, un soldat israélo-américain tué à l'âge de 19 ans.

Dans la bande de Gaza, des proches de personnes arrêtées par Israël et qui attendent leur retour ont dit lors de plusieurs remises de dépouilles par Israël que les corps étaient très difficiles à identifier.

Le service de presse du gouvernement du Hamas à Gaza a de nouveau accusé mercredi les autorités israéliennes de refuser de transmettre des listes de noms des personnes dont les dépouilles arrivent dans le territoire palestinien.


Soudan: 40 morts au Kordofan, les combats s'intensifient dans la région

Une attaque dans la ville stratégique d'El-Obeid, capitale régionale du Kordofan-Nord au Soudan, a fait au moins 40 morts, a annoncé mercredi l'ONU, pendant que les violences continuent dans la région voisine du Darfour. (AFP)
Une attaque dans la ville stratégique d'El-Obeid, capitale régionale du Kordofan-Nord au Soudan, a fait au moins 40 morts, a annoncé mercredi l'ONU, pendant que les violences continuent dans la région voisine du Darfour. (AFP)
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  • L'attaque, qui a visé un enterrement, s'est produite mardi sur la ville assiégée par les paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FSR), alors que les combats pour le contrôle de cette région du centre du Soudan se sont intensifiés ces derniers jours
  • "Des sources locales rapportent qu'au moins 40 civils ont été tués et des dizaines de blessés hier dans une attaque sur un rassemblement lors de funérailles"

PORT-SOUDAN: Une attaque dans la ville stratégique d'El-Obeid, capitale régionale du Kordofan-Nord au Soudan, a fait au moins 40 morts, a annoncé mercredi l'ONU, pendant que les violences continuent dans la région voisine du Darfour.

L'attaque, qui a visé un enterrement, s'est produite mardi sur la ville assiégée par les paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FSR), alors que les combats pour le contrôle de cette région du centre du Soudan se sont intensifiés ces derniers jours.

Le conflit entre l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane et les FSR de Mohammed Daglo a éclaté en avril 2023 et se concentre désormais au Kordofan, région stratégique car située entre la capitale Khartoum, contrôlée par les militaires, et le Darfour, aux mains des paramilitaires.

"Des sources locales rapportent qu'au moins 40 civils ont été tués et des dizaines de blessés hier dans une attaque sur un rassemblement lors de funérailles" à El-Obeid, a déclaré le Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha).

Les violences continuent aussi au Darfour, selon l'Ocha, qui fait état de "multiples frappes aériennes et de drones" survenues dimanche, sans pouvoir donner de bilan du fait de l'accès limité au terrain et des difficultés de communications.

"Viols collectifs" 

Depuis la chute aux mains des paramilitaires le 26 octobre de la ville d'El-Facher, dernier bastion de l'armée au Darfour, l'ONU a fait état de massacres, viols, pillages et déplacements massifs de population.

"Nous nous réveillons en tremblant de peur, les images du massacre nous hantent", a témoigné Amira, mère de quatre enfants réfugiée à Tawila, une ville à environ 70 kilomètres d'El-Facher, où s'entassent les déplacés sous des bouts de tissus transformés en tentes ou en auvent.

"C'étaient des viols collectifs. Des viols collectifs en public, devant tout le monde, et personne ne pouvait les arrêter", a-t-elle raconté.

Des images satellite analysées par le Humanitarian Research Lab (HRL) de l'université américaine de Yale, qui documente la situation à El-Facher depuis le début du siège il y a 18 mois, ont permis de mettre en évidence des atrocités sur place.

Ces rapports ont déclenché l'"indignation générale", a déclaré à l'AFP Nathaniel Raymond, directeur du HRL qui croise les vidéos postées par des paramilitaires "en train de tuer des gens à un volume record" avec les images satellites afin de géolocaliser les exactions.

Le patron de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, s'est indigné des "attaques continues visant le système de santé", affirmant que quatre personnes, dont des enfants, avaient été tuées à l'hôpital pédiatrique de la région de Kernoi, au Darfour, près de la frontière du Tchad.

Pourparlers ou combats ? 

L'émissaire américain pour l'Afrique, Massad Boulos, s'est efforcé ces derniers jours, lors d'un déplacement au Caire, de finaliser une proposition de trêve humanitaire formulée mi-septembre sous son égide par un groupe de médiateurs incluant aussi l'Egypte, l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis.

Ce groupe de médiation, dit du Quad, travaille sur un plan global de paix pour le Soudan, mais ses dernières propositions sont restées lettre morte.

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, avait pourtant exhorté mardi les belligérants à "venir à la table des négociations" et "mettre fin à ce cauchemar de violence".

Mais après avoir étudié la proposition de cessez-le-feu, les autorités pro-armée ont affirmé que la guerre allait continuer.

"Les préparatifs pour la bataille du peuple soudanais se poursuivent", a déclaré le ministre de la Défense, Hassan Kabroun.

Le Conseil de souveraineté présidé par le chef de l'armée, le général al-Burhane, a néanmoins présenté un plan pour "faciliter l'accès à l'aide humanitaire" et "la restauration de la sécurité et de la paix dans toutes les régions du Soudan", selon le compte-rendu du ministre.

 "Malnutrition sévère" 

"La situation sur le terrain est très compliquée", a reconnu la porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt.

Plus de 71.000 civils ont fui El-Facher depuis sa chute et quelque 12.000 arrivées ont été enregistrées à Tawila, selon l'ONU.

La guerre entre l'armée et les FSR a déjà fait des dizaines de milliers de morts et près de 12 millions de déplacés, selon l'ONU.

La situation des populations déplacées reste critique, a averti l'Unicef en soulignant que 14,6% des enfants de moins de cinq ans souffraient de malnutrition sévère.