Tunisie: Des aides discrètes pour des migrants subsahariens au bout du rouleau

Arrivés illégalement, les migrants d'Afrique subsaharienne se sont retrouvés d'un jour à l'autre privés des petits boulots avec lesquels ils survivaient, et à la rue (Photo, AFP).
Arrivés illégalement, les migrants d'Afrique subsaharienne se sont retrouvés d'un jour à l'autre privés des petits boulots avec lesquels ils survivaient, et à la rue (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 03 mars 2023

Tunisie: Des aides discrètes pour des migrants subsahariens au bout du rouleau

  • Depuis le discours présidentiel, des centaines de Subsahariens se sont inscrits dans leurs ambassades sur des listes de rapatriement
  • Dernière en date, l'ambassade du Gabon a ouvert les recensements face à la «crise identitaire» en Tunisie

TUNIS: "En Sierra Leone, je n'ai plus de famille, ici je n'ai nulle part où aller, s'il vous plaît aidez-nous", implore Natasha, les larmes aux yeux, devant les bureaux de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) à Tunis.

Elle est venue ces derniers jours grossir les rangs de dizaines de migrants subsahariens en situation irrégulière qui errent depuis des mois entre les bureaux du HCR (Haut commissariat aux réfugiés) et ceux de l'OIM, dans l'élégant quartier du Lac à Tunis.

Leur situation s'est davantage précarisée après un discours le 21 février du président tunisien Kais Saied appelant à des "mesures urgentes" contre les migrants clandestins d'Afrique subsaharienne qui sont selon lui source de "violence et de crimes" et une menace pour l'identité arabo-musulmane du pays, malgré leur faible nombre selon les chiffres officiels.

"On m'a jeté hors de mon logement il y a deux semaines, on a frappé mes amies. Ici nous souffrons beaucoup, on dort à même le sol, on ne peut pas se laver", dit la jeune femme de 27 ans, en montrant un monticule de couvertures et vêtements.

Beaucoup comme Natasha sont de Sierra Leone, d'autres de Guinée Conakry, du Cameroun, du Tchad ou du Soudan. Arrivés illégalement, souvent ces derniers mois, ils se sont retrouvés d'un jour à l'autre privés des petits boulots avec lesquels ils survivaient, et à la rue.

«Sauver ma vie»

Moumin Sow, 29 ans, a fui Sfax (centre-est), où il travaillait comme barman depuis deux ans: "des bandits tunisiens sont entrés chez nous et nous ont tout pris. Regardez-moi je n'ai que les habits que je porte. Je n'ai rien à part mon téléphone". Ecoeuré, il veut rentrer au Mali: "je suis parti parce que je voulais sauver ma vie. Je ne peux pas rester avec toutes les choses que je vois ici".

Depuis le discours présidentiel, des centaines de Subsahariens se sont inscrits dans leurs ambassades sur des listes de rapatriement. Dernière en date, l'ambassade du Gabon a ouvert les recensements face à la "crise identitaire" en Tunisie.

Un premier vol retour de 50 personnes a été organisé par la Guinée mercredi, d'autres sont prévus par la Côte d'Ivoire qui compte plus de 800 inscrits, et un vol pour 150 personnes est programmé par Bamako pour samedi, selon un diplomate malien.

Abris de fortune, brasero improvisé avec un tronc d'arbre et linge qui sèche sur un fil entre deux maigres arbustes, l'impasse juste devant la porte de l'OIM s'est transformée en campement.

Des employés sortent pour recenser les migrants qui affluent et leur fixer des rendez-vous pour qu'ils exposent leur situation.

"On est débordés, on ne peut pas leur trouver un hébergement à tous, certains veulent bénéficier de nos programmes de retour volontaire (avec aide à la réinstallation)", glisse anonymement à l'AFP une responsable par téléphone.

C'est le cas de Diallo Issagha, un Guinéen de 24 ans: "je suis arrivé il y a un mois et me suis retrouvé dans cette crise, c'est trop dur, on te met dehors, tu ne peux pas travailler, mais je ne peux pas repartir sans rien".

Des aides en cachette

Natasha et ses amies excluent de retourner en Sierra Leone. "J'ai emprunté l'argent pour venir, je veux aller ailleurs, en Europe ou n'importe où, mais pas rester ici. Que le monde nous vienne en aide", lance la jeune femme arrivée il y a deux mois.

À la nuit tombée, des bénévoles tunisiens et étrangers apportent de la nourriture, de l'eau, des couvertures, quelques tentes, collectés par des associations tandis que de jeunes médecins prodiguent des soins.

"Nous préférons être discrets", confie Seif Ghrairi, du Front anti-fasciste, un collectif qui s'est formé après le discours du président Saied. Selon lui "des associations qui collectaient des dons ont fait l'objet de menaces".

Les bénévoles préfèrent "faire la distribution le soir, de façon clandestine, pour ne pas nous exposer à des dangers ni les Subsahariens", ajoute-t-il, déplorant "une campagne raciste contre la peau noire".

Il demande aux autorités de garantir un minimum de droits aux migrants subsahariens: "on exige le respect de la dignité humaine, le respect du choix des personnes, il ne peut pas y avoir de rapatriements forcés".

"Comme on exige le respect du droit des Tunisiens partis de manière irrégulière en Europe, on exige le respect des droits des Subsahariens en Tunisie", ajoute-t-il.


Reconnaître l'État palestinien et mettre fin à l'effusion de sang, demande l'ancien l'ambassadeur saoudien aux États-Unis

 La paix et la stabilité au Moyen-Orient reposent sur une solution juste à la question palestinienne, a déclaré le prince Turki Al-Faisal, ancien ambassadeur saoudien au Royaume-Uni et aux États-Unis, lors d'un important forum de politique étrangère organisé à Washington. (AFP)
La paix et la stabilité au Moyen-Orient reposent sur une solution juste à la question palestinienne, a déclaré le prince Turki Al-Faisal, ancien ambassadeur saoudien au Royaume-Uni et aux États-Unis, lors d'un important forum de politique étrangère organisé à Washington. (AFP)
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  • Le prince Turki Al-Faisal appelle Washington à "tenir compte des voix de ses amis et alliés dans la région"
  • Au Moyen-Orient, les guerres deviennent "presque normales dans cette région assoiffée de conflits", a-t-il déclaré

RIYAD: La paix et la stabilité au Moyen-Orient reposent sur une solution juste à la question palestinienne, a déclaré le prince Turki Al-Faisal, ancien ambassadeur saoudien au Royaume-Uni et aux États-Unis, lors d'un important forum de politique étrangère organisé à Washington.

S'adressant à la conférence annuelle des décideurs arabes et américains organisée par le Conseil national des relations américano-arabes, l'ancien chef des services de renseignement a déclaré que les troubles récurrents avaient plongé la région dans un "état de confusion stratégique".

Au Moyen-Orient, les guerres deviennent "presque normales dans cette région assoiffée de conflits", a-t-il déclaré.

Soulignant la "réponse implacable et destructrice" d'Israël aux attaques du Hamas du 7 octobre, le prince Turki a déclaré que la guerre qui en a résulté "représente un échec politique découlant de l'arrogance et de convictions infondées qui ont conduit à ignorer les souffrances endurées par la population assiégée de Gaza".

Ces "illusions" ont également conduit Israël à mal interpréter les ouvertures arabes en faveur de la paix, a-t-il ajouté.

"Cependant, le Moyen-Orient n'est pas le seul à connaître des troubles et des incertitudes", a déclaré l'ancien diplomate. "Où que nous regardions aujourd'hui sur la carte du monde, nous constatons qu'il y a une crise dans chaque coin, et sans un horizon clair pour trouver des solutions appropriées qui résolvent les problèmes."

Cet état de confusion stratégique contribue énormément à la poursuite et à l'escalade de la violence, a-t-il ajouté.

"Il crée également de nouveaux conflits qui compliquent la situation dans une région où chaque crise engendre une autre crise et où chaque problème est lié à un autre problème. La fatigue et la confusion au Moyen-Orient sont synonymes d'une forte polarisation, d'une multiplicité de questions conflictuelles et d'une multiplicité d'acteurs concurrents qui gèrent la situation au cas par cas.

Le prince Turki a souligné l'absence d'une orientation ou d'une stratégie claire visant à mettre fin aux conflits de manière pacifique et à créer les conditions nécessaires à la paix, à la stabilité et à la sécurité.

Il a salué les mesures prises par des pays tels que la France et la Norvège pour reconnaître l'État palestinien et "convaincre ceux qui ne le sont pas que la paix au Moyen-Orient passe par une solution juste de cette question en suspens".

Appelant les États-Unis à poursuivre leurs efforts pour mettre fin à la guerre de Gaza, le prince Turki a déclaré que Washington devrait "faire le pas le plus important en prenant en compte les voix de ses amis et alliés dans la région" en soutenant les principes de l'initiative de paix arabe et en faisant pression pour mettre fin au conflit.

Les dirigeants qui font des pas supplémentaires pour la paix sont considérés comme de grands dirigeants", a-t-il déclaré lors de la conférence, ajoutant : "Président Trump, c'est à votre tour de faire un pas en avant : "Président Trump, c'est à votre tour d'être ce leader. Menez votre proposition de cessez-le-feu en 20 points jusqu'à l'inévitable 21e point."

Le prince Turki a exhorté le dirigeant américain à profiter de la visite officielle du prince héritier Mohammed bin Salman pour reconnaître l'État palestinien et "mettre fin à jamais à l'effusion de sang des Palestiniens et des Israéliens."


Le président libanais juge le monopole des armes à l'Etat "nécessaire et inévitable"

le président libanais Joseph Aoun s'adressant à la nation à la veille de la fête de l'indépendance dans un discours télévisé depuis le quartier général du commandement du secteur sud du Litani de l'armée libanaise à Tyr, le 21 novembre 2025. (AFP)
le président libanais Joseph Aoun s'adressant à la nation à la veille de la fête de l'indépendance dans un discours télévisé depuis le quartier général du commandement du secteur sud du Litani de l'armée libanaise à Tyr, le 21 novembre 2025. (AFP)
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  • Le président libanais Joseph Aoun affirme que le monopole des armes par l’État est “nécessaire et inévitable”, alors que l’armée prévoit de démanteler la présence militaire du Hezbollah au sud du Liban conformément au cessez-le-feu
  • Ce message intervient dans un contexte de fortes pressions américaines, de frappes israéliennes récurrentes et d’appels libanais à un soutien et un encadrement international pour sécuriser la mise en œuvre de ces engagements

BEYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun, sous forte pression des Etats-Unis pour désarmer le Hezbollah, a jugé dans un discours prononcé vendredi dans le sud du Liban "nécessaire et inévitable" le monopole des armes à l'Etat.

Depuis le cessez-le-feu qui a mis fin il y a un an à une guerre meurtrière entre Israël et le mouvement pro-iranien, le Liban est sous forte pression de Washington pour qu'il pousse le Hezbollah à remettre ses armes à l'armée libanaise.

Conformément à l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, à une trentaine de kilomètres plus au nord.

L'armée a ainsi soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque d'ici la fin de l'année, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais.

Dans son discours, prononcé à la veille de la fête nationale, le président libanais a jugé le monopole de l'Etat sur les armes "nécessaire et inévitable" tout en appelant le comité chargé de surveiller la trêve regroupant Etats-Unis, France, ONU, Liban et Israël, à "s'assurer que les forces armées libanaises contrôlent seules" le sud du pays.

Il a répété que le Liban était prêt à négocier, sous parrainage américain ou international, "tout accord qui mettra fin à ces agressions transfrontalières".

Joseph Aoun a enfin exhorté "les amis du Liban et les pays frères à superviser l'ensemble de ce processus en établissant un calendrier clair et en mettant en place un mécanisme international de soutien à l'armée libanaise".

Au cours des dernières semaines, l'armée israélienne a multiplié les frappes sur le sud du Liban, accusant le Hezbollah de chercher à y reconstruire les infrastructures militaires détruites lors de sa guerre contre ce mouvement soutenu pro-iranien et allié au Hamas palestinien.

Selon le ministère de la Santé, une personne a été tuée lors d'une frappe vendredi dans le sud du Liban. Plus de 330 personnes ont été tuées au Liban et 945 blessées depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, selon la même source.

Morris Tidball-Binz, rapporteur spécial de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a dénoncé vendredi dans un communiqué le "schéma répété de meurtres illégaux et de violations du cessez-le-feu par Israël".


L'armée israélienne affirme que l'attaque au Liban a tué 13 militants du Hamas

Des personnes en deuil portent les cercueils des victimes de la frappe aérienne israélienne de mardi, lors d'un cortège funèbre dans le camp de réfugiés palestiniens d'Ein El-Hilweh, dans la ville portuaire de Sidon, au sud du Liban, jeudi. (AP)
Des personnes en deuil portent les cercueils des victimes de la frappe aérienne israélienne de mardi, lors d'un cortège funèbre dans le camp de réfugiés palestiniens d'Ein El-Hilweh, dans la ville portuaire de Sidon, au sud du Liban, jeudi. (AP)
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  • L’armée israélienne affirme avoir tué 13 membres du Hamas, dont Jihad Saïdaoui, dans une frappe sur le camp d’Aïn el-Héloué, tandis que le Hamas dénonce un « massacre » visant des civils
  • Le lieu de la frappe est au cœur d’un récit contradictoire : Israël parle d’un camp d’entraînement, tandis que des témoins et le Hamas évoquent un terrain de sport fréquenté par des jeunes du camp

JERUSALEM: L'armée israélienne a affirmé vendredi avoir tué "13 terroristes du Hamas" dans sa frappe menée mardi soir sur le camp de réfugiés palestiniens d'Aïn el-Héloué au Liban, dans laquelle les autorités libanaises ont annoncé 13 morts, sans préciser leur identité.

"Treize terroristes du Hamas ont été éliminés" dans cette frappe, "dont Jihad Saïdaoui, impliqué dans la formation de terroristes destinés à mener des attaques" contre Israël et ses soldats à partir territoire libanais, écrit dans un communiqué en hébreu l'armée qui avait aussi utilisé la graphie de "Jaouad Sidaoui".

A l'AFP qui lui demandait de lui fournir la liste nominative des douze autres personnes qu'elle dit avoir éliminées dans la frappe, l'armée israélienne a répondu n'avoir rien à ajouter à ce qui a été publié dans son communiqué.

Dans un avis de décès ayant circulé mercredi au Liban, le Hamas a publié la liste des noms des treize morts, en commençant par celui de Jihad Saïdaoui, avant de publier le lendemain sur Telegram, un message avec les photos de treize hommes d'apparence jeune, voire juvénile, accompagné d'un texte qualifiant la frappe "d'horrible massacre" ayant causé la mort de "plusieurs civils innocents".

Mardi, peu de temps après la frappe, l'armée israélienne avait annoncé avoir visé "des terroristes en opération dans un camp d'entraînement du Hamas".

"Les allégations (d'Israël) selon lesquelles le lieu ciblé serait un complexe d'entraînement appartenant au mouvement ne sont que pure calomnie (et visent) à justifier son agression criminelle et à inciter à la haine contre les camps et notre peuple palestinien", avait répliqué le Hamas, affirmant n'avoir "aucune installation militaire dans les camps palestiniens au Liban".

- "Terrain de sport" -

L'armée israélienne a diffusé ce qu'elle a présenté comme une vidéo de sa frappe montrant une attaque sur un bâtiment.

Mais le mouvement islamiste palestinien affirme que "ce qui a été pris pour cible est un terrain de sport ouvert fréquenté par les jeunes du camp (...) et que ceux qui ont été visés étaient un groupe de jeunes présents sur le terrain au moment de l'attaque".

"On a entendu trois explosions, nos maisons ont vacillé et les enfants tremblaient de peur", a déclaré à l'AFP au lendemain de l'attaque Mohammad Moustafa, habitant d'Aïn al-Heloué, le plus grand des camps de réfugiés palestiniens du Liban, près de la ville de Saïda, dans le sud du pays.

Agé de 67 ans, M. Moustafa a assuré que les morts étaient en majorité "des jeunes du camp qui jouaient au foot dans un terrain à l'intérieur du hangar" visé, dans lequel un correspondant de l'AFP a vu mercredi matin des taches de sang maculant le sol et des secouristes rassemblant des restes humains.

Lors des funérailles organisées à l'intérieur du camp pour 11 des 13 personnes tuées, un correspondant de l'AFP a vu des drapeaux aux couleurs du mouvement islamiste du Hamas, mais aussi des drapeaux palestiniens, sur les cercueils.

Les deux autres, dont une personne identifiée comme étant Jihad Saïdaoui, ont été enterrées dans un cimetière à l'extérieur du camp.

Le Liban "s'est engagé à désarmer les factions armées dans les camps palestiniens, mais les organisations terroristes continuent d'exploiter cyniquement la population et les infrastructures civiles" à leurs fins, écrit vendredi l'armée israélienne.

La frappe sur Aïn el-Héloué est survenue sur fond de trêve entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza et alors que l'armée israélienne intensifie ses tirs sur le sud du Liban malgré un cessez-le-feu avec le Hezbollah, allié du Hamas, qu'elle accuse de chercher à se réarmer.