Liban: record historique pour la livre, à 100 000 pour un dollar sur le marché parallèle

Ce record historique survient alors que les banques ont repris mardi une grève illimitée. (Photo, AFP)
Ce record historique survient alors que les banques ont repris mardi une grève illimitée. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 14 mars 2023

Liban: record historique pour la livre, à 100 000 pour un dollar sur le marché parallèle

  • Le Liban avait adopté le 1er février un nouveau taux de change officiel de 15 000 livres (LL) pour un dollar américain au lieu du taux de 1 507 LL, observé depuis plus de deux décennies, soit une dévaluation de près de 90%
  • Les banques ont repris mardi une grève illimitée qui avait débuté début février pour protester contre ce que l'Association des banques libanaises avait qualifié de mesures judiciaires «arbitraires» contre les créanciers

BEYROUTH : La livre libanaise a franchi le seuil record de 100 000 pour un dollar sur le marché parallèle, ont indiqué mardi à l'AFP des responsables de bureaux de change dans ce pays englué dans une très grave crise économique et financière.

Ce record historique survient alors que les banques ont repris mardi une grève illimitée.

Le Liban avait adopté le 1er février un nouveau taux de change officiel de 15 000 livres (LL) pour un dollar américain au lieu du taux de 1 507 LL, observé depuis plus de deux décennies, soit une dévaluation de près de 90%.

Ce taux officiel est ainsi plus de six fois inférieur à la valeur réelle de la livre sur le marché parallèle, où le billet vert s'échange désormais à 100 000 LL, selon deux bureaux de change.

Avec cette nouvelle dépréciation, la livre a perdu plus de 98% de sa valeur initiale en 2019, année où a débuté la crise économique.

"La livre ne vaut plus rien désormais", a déploré Abou Abbas, 75 ans et propriétaire d'une petite joaillerie à Hamra, artère commerciale de Beyrouth.

"Les médicaments que j'achetais à ma femme coûtaient 40 000 LL, désormais ils coûtent 900 000 LL", a-t-il affirmé.

Grève des banques 

La dépréciation continue de la livre a déclenché une inflation galopante et amputé le pouvoir d'achat d'une population déjà soumise à des restrictions bancaires draconiennes. Les épargnants n'ont plus accès à leurs économies bloquées dans des banques, qui ont restreint les retraits et transferts d'argent depuis 2019.

Les banques ont repris mardi une grève illimitée qui avait débuté début février pour protester contre ce que l'Association des banques libanaises avait qualifié de mesures judiciaires "arbitraires" contre les créanciers, après que des épargnants ont porté plainte pour récupérer leurs économies.

A la suite de dépôts de plaintes, des juges avaient notamment cherché à saisir les fonds de directeurs de banques ou de membres du conseil d'administration d'établissements bancaires.

Les banques avaient rouvert après que le Premier ministre, Najib Mikati, à la tête d'un gouvernement démissionnaire chargé d'expédier les affaires courantes, était intervenu fin février pour entraver le travail d'une des juges accusant plusieurs banques de blanchiment d'argent.

A la mi-février, des dizaines d'épargnants avaient brisé les vitrines de banques et incendié des pneus à Beyrouth pour réclamer leur argent bloqué.

"Les politiciens au pouvoir (...) ont volé le pays et volé l'argent des déposants", s'insurge Mohammad al-Rayes, un commerçant de Beyrouth.

"Ils faut qu'ils s'en aillent", a ajouté l'homme de 65 ans: "Des jours très durs nous attendent".

« Pas de leadership » 

Le Liban connaît l'une des pires crises économiques au monde depuis 1850 selon la Banque mondiale, marquée par une paupérisation inédite de la population.

Début mars, les supermarchés libanais avaient commencé à afficher les prix en dollars, par décision des autorités face à la dépréciation rapide de la monnaie nationale.

Dans un pays qui importe 90% de ses marchandises, les restaurants et les magasins avaient commencé eux il y a plusieurs mois à fixer leurs prix en dollars.

Les prix des denrées alimentaires ont augmenté de façon spectaculaire depuis 2019. Selon la Banque mondiale, le taux d'inflation, le plus élevé au monde, a atteint 332% de janvier 2021 à juillet 2022.

Cette grave situation économique a pour toile de fond une crise politique alors le pays est privé de président depuis le 1er novembre. Le Parlement, divisé, ne parvient pas à s'entendre sur un nouveau chef de l'Etat.

La chute continue de la livre révèle une "perte totale de confiance dans les décideurs politiques du pays", a estimé Saeb el-Zein, un ancien banquier libanais qui a travaillé avec des prêteurs internationaux.

"Vous avez besoin d'un leadership politique pour avoir un leadership économique et nous n'avons pas de leadership politique", a-t-il déclaré.

Lundi, la justice libanaise a demandé au gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, poursuivi dans son pays et à l'étranger pour plusieurs délits financiers, de se présenter devant des juges européens pour être interrogé, selon une source judiciaire.


Syrie: Chareh lance un appel à l'unité un an après la chute d'Assad

Le président syrien Ahmed al-Chareh a exhorté lundi, un an après la chute de Bachar al-Assad, son peuple à s'unir pour rebâtir un pays ravagé par des années de guerre civile. (AFP)
Le président syrien Ahmed al-Chareh a exhorté lundi, un an après la chute de Bachar al-Assad, son peuple à s'unir pour rebâtir un pays ravagé par des années de guerre civile. (AFP)
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  • Après les prières du matin à mosquée des Omeyyades, il a salué "les sacrifices et l'héroïsme des combattants" ayant renversé il y a un an l'ex-dictateur Assad, selon un communiqué de la présidence
  • Ahmed al-Chareh, ancien jihadiste de 43 ans, était devenu dans la foulée chef d'Etat par intérim après 14 ans de guerre civile et plus de cinq décennies d'un régime familial à la main de fer

DAMAS: Le président syrien Ahmed al-Chareh a exhorté lundi, un an après la chute de Bachar al-Assad, son peuple à s'unir pour rebâtir un pays ravagé par des années de guerre civile.

"La phase actuelle exige que tous les citoyens unissent leurs efforts pour bâtir une Syrie forte, consolider sa stabilité, préserver sa souveraineté", a déclaré le dirigeant, endossant pour l'occasion l'uniforme militaire comme le 8 décembre 2024, quand il était entré dans Damas à la tête de forces rebelles.

Après les prières du matin à mosquée des Omeyyades, il a salué "les sacrifices et l'héroïsme des combattants" ayant renversé il y a un an l'ex-dictateur Assad, selon un communiqué de la présidence.

Ahmed al-Chareh, ancien jihadiste de 43 ans, était devenu dans la foulée chef d'Etat par intérim après 14 ans de guerre civile et plus de cinq décennies d'un régime familial à la main de fer.

Il a rompu avec son passé jihadiste et réhabilité la Syrie sur la scène internationale, obtenant la levée des sanctions internationales, mais reste confronté à d'importantes défis sécuritaires.

De sanglantes violences intercommunautaires dans les régions des minorités druze et alaouite, et de nombreuses opérations militaires du voisin israélien ont secoué la fragile transition.

"C'est l'occasion de reconstruire des communautés brisées et de panser des divisions profondes", a souligné dans un communiqué le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres.

"L'occasion de forger une nation où chaque Syrien, indépendamment de son appartenance ethnique, de sa religion, de son sexe ou de son affiliation politique, peut vivre en sécurité, dans l'égalité et dans la dignité".

Les célébrations de l'offensive éclair, qui ont débuté fin novembre, doivent culminer lundi avec une parade militaire et un discours du président syrien.

Elles sont toutefois marquées par le boycott lancé samedi par un chef spirituel alaouite, Ghazal Ghazal. Depuis la destitution d'Assad, lui-même alaouite, cette minorité est la cible d'attaques.

L'administration kurde, qui contrôle une grande partie du nord et du nord-est de la Syrie, a également annoncé l'interdiction de rassemblements et événements publics dimanche et lundi "en raison de la situation sécuritaire actuelle et de l'activité accrue des cellules terroristes".

 


Liban: l'armée annonce six arrestations après une attaque visant des Casques bleus

Israël, dont l'accord de trêve prévoit pourtant le retrait total du pays voisin, maintient de son côté dans la zone cinq positions militaires dans la région. La Finul a à plusieurs reprises accusé les troupes israéliennes de tirs à son encontre. (AFP)
Israël, dont l'accord de trêve prévoit pourtant le retrait total du pays voisin, maintient de son côté dans la zone cinq positions militaires dans la région. La Finul a à plusieurs reprises accusé les troupes israéliennes de tirs à son encontre. (AFP)
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  • L'armée a souligné dans un communiqué qu'elle ne tolérerait aucune attaque contre la Finul mettant en avant son "rôle essentiel" dans le sud du Liban
  • "Les attaques contre les Casques bleus sont inacceptables", avait de fustigé vendredi la Finul, rappelant "aux autorités libanaises leur obligation d'assurer" sa sécurité

BEYROUTH: Six personnes ont été arrêtées au Liban, soupçonnées d'être impliquées dans une attaque d'une patrouille de Casques bleus jeudi dans le sud du pays, qui n'a pas fait de blessés, a annoncé l'armée libanaise samedi.

L'incident s'était produit jeudi soir, selon un communiqué de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) quand "des Casques bleus en patrouille ont été approchés par six hommes sur trois mobylettes près de Bint Jbeil". "Un homme a tiré environ trois coups de feu sur l'arrière du véhicule. Personne n'a été blessé".

L'armée a souligné dans un communiqué qu'elle ne tolérerait aucune attaque contre la Finul mettant en avant son "rôle essentiel" dans le sud du Liban, où, déployée depuis 1978, elle est désormais chargée de veiller au respect du cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la dernière guerre entre Israël et le Hezbollah pro-iranien.

"Les attaques contre les Casques bleus sont inacceptables", avait de fustigé vendredi la Finul, rappelant "aux autorités libanaises leur obligation d'assurer" sa sécurité.

Bastion du Hezbollah, le sud du Liban subit ces dernières semaines des bombardements réguliers de la part d'Israël, qui assure viser des cibles du mouvement chiite et l'accuse d'y reconstituer ses infrastructures, en violation de l'accord de cessez-le-feu.

Israël, dont l'accord de trêve prévoit pourtant le retrait total du pays voisin, maintient de son côté dans la zone cinq positions militaires dans la région. La Finul a à plusieurs reprises accusé les troupes israéliennes de tirs à son encontre.

Mercredi, le quartier général de la Finul a accueilli à Naqoura, près de la frontière avec Israël, de premières discussions directes, depuis des décennies, entre des responsables israélien et libanais, en présence de l'émissaire américaine pour le Proche-Orient Morgan Ortagus.

Le président libanais, Joseph Aoun, a annoncé de prochaines discussions à partir du 19 décembre, qualifiant de "positive" la réunion tenue dans le cadre du comité de surveillance du cessez-le-feu, disant que l'objectif était d'éloigner "le spectre d'une deuxième guerre" au Liban.


Les efforts pour panser les «profondes divisions» de la Syrie sont ardus mais «pas insurmontables», déclare Guterres

Des Syriens font la queue dans les rues de Damas en attendant un défilé de la nouvelle armée syrienne, pour marquer le premier anniversaire de l'éviction de Bashar Assad, le 8 décembre 2025. (AP)
Des Syriens font la queue dans les rues de Damas en attendant un défilé de la nouvelle armée syrienne, pour marquer le premier anniversaire de l'éviction de Bashar Assad, le 8 décembre 2025. (AP)
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  • Antonio Guterres salue "la fin d'un système de répression vieux de plusieurs décennies", "la résilience et le courage" des Syriens
  • La transition offre l'opportunité de "forger une nation où chaque Syrien peut vivre en sécurité, sur un pied d'égalité et dans la dignité"

NEW YORK : Les efforts pour guérir les "profondes divisions" de la Syrie seront longs et ardus mais les défis à venir ne sont "pas insurmontables", a déclaré dimanche le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, à l'occasion du premier anniversaire de la chute du régime Assad.

Une offensive surprise menée par une coalition de forces rebelles dirigées par Hayat Tahrir al-Sham et des milices alliées a rapidement balayé les zones tenues par le régime à la fin du mois de novembre 2024. En l'espace de quelques jours, elles se sont emparées de villes clés et ont finalement capturé la capitale Damas.

Le 8 décembre de l'année dernière, alors que les défenses du régime s'effondraient presque du jour au lendemain, le président de l'époque, Bachar Assad, a fui la République arabe syrienne, mettant fin à plus de 50 ans de règne brutal de sa famille.

"Aujourd'hui, un an s'est écoulé depuis la chute du gouvernement Assad et la fin d'un système de répression vieux de plusieurs décennies", a déclaré M. Guterres, saluant la "résilience et le courage" des Syriens "qui n'ont jamais cessé de nourrir l'espoir en dépit d'épreuves inimaginables".

Il a ajouté que cet anniversaire était à la fois un moment de réflexion sur les sacrifices consentis en vue d'un "changement historique" et un rappel du chemin difficile qui reste à parcourir pour le pays.

"Ce qui nous attend est bien plus qu'une transition politique ; c'est la chance de reconstruire des communautés brisées et de guérir de profondes divisions", a-t-il déclaré, ajoutant que la transition offre l'occasion de "forger une nation où chaque Syrien - indépendamment de son appartenance ethnique, de sa religion, de son sexe ou de son affiliation politique - peut vivre en sécurité, sur un pied d'égalité et dans la dignité".

M. Guterres a souligné que les Nations Unies continueraient à soutenir les Syriens dans la mise en place de nouvelles institutions politiques et civiques.

"Les défis sont importants, mais pas insurmontables", a-t-il déclaré. "L'année écoulée a montré qu'un changement significatif est possible lorsque les Syriens sont responsabilisés et soutenus dans la conduite de leur propre transition.

Il a ajouté que les communautés à travers le pays construisent de nouvelles structures de gouvernance et que "les femmes syriennes continuent de mener la charge pour leurs droits, la justice et l'égalité".

Bien que les besoins humanitaires restent "immenses", il a souligné les progrès réalisés dans la restauration des services, l'élargissement de l'accès à l'aide et la création de conditions propices au retour des réfugiés et des personnes déplacées.

Des efforts en matière de justice transitionnelle sont en cours, a-t-il ajouté, ainsi qu'un engagement civique plus large. M. Guterres a exhorté les gouvernements à soutenir fermement une "transition dirigée par les Syriens et prise en charge par les Syriens", précisant que le soutien doit inclure le respect de la souveraineté, la suppression des obstacles à la reconstruction et un financement solide pour le redressement humanitaire et économique.

"En ce jour anniversaire, nous sommes unis dans un même but : construire les fondations de la paix et de la prospérité et renouveler notre engagement en faveur d'une Syrie libre, souveraine, unie et ouverte à tous", a ajouté M. Guterres.