Déambulation de Macron au Quai d’Orsay: écouter sans céder sur la réforme

Emmanuel Macron se rendra au Quai d'Orsay le 16 mars (Photo, AFP).
Emmanuel Macron se rendra au Quai d'Orsay le 16 mars (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 16 mars 2023

Déambulation de Macron au Quai d’Orsay: écouter sans céder sur la réforme

  • Macron a garanti le maintien du très sélectif «concours d’Orient» pour le recrutement des profils diplomatiques polyglottes
  • Lors de sa «déambulation» au Quai d'Orsay, Macron compte confirmer «sa volonté de réarmer notre diplomatie» pour faire face aux défis

PARIS: C’est un déplacement inédit, «une déambulation», selon les mots de l’Élysée, qu’effectue le président Emmanuel Macron ce jeudi 16 mars dans les services du Quai d’Orsay, temple de la diplomatie française.

Inédit, puisque c’est la première fois que Macron se rend au ministère des Affaires étrangères et européennes «pour parler de la diplomatie et des diplomates».

Depuis son premier mandat en 2017, le président s'est rendu deux fois au ministère: la première pour une réunion de soutien au Liban, et la seconde pendant la pandémie de Covid-19.

Ce nouveau déplacement intervient à l’invitation de la ministre des Affaires étrangères et européennes, Catherine Colonna, au lendemain de la remise du rapport du comité des États généraux de la diplomatie, par le rapporteur général du comité, l’ambassadeur Jérôme Bonnafont.

De quoi s’agit-il?

Les États généraux de la diplomatie ont été lancés à la suite de la colère et la défiance des agents diplomatiques à l’égard de la réforme instaurée par Macron et prévoyant la disparition de deux corps historiques de la diplomatie française, dont le corps des conseillers des affaires étrangères qui fut remplacé par un nouveau corps d'État.

Peur d’une perte de professionnalisation et de prestige

Redoutant une perte de professionnalisation et de prestige de la diplomatie française, les agents du Quai d’Orsay sont allés, contrairement à leur culture, jusqu’à faire grève pour faire entendre leur mécontentement, alors que plusieurs tribunes et pétitions signées par des diplomates et mettant en garde contre les méfaits de cette réforme ont été publiées par les médias français.

Face à ce mouvement de protestation et dans le droit fil de la méthode Macron qui consiste à garder les portes ouvertes et à privilégier le dialogue, Colonna a lancé en octobre 2022 les États généraux de la diplomatie.

Selon la porte-parole du Quai d’Orsay, Anne-Claire Legendre, «il s’agissait de formuler des recommandations opérationnelles sur l’évolution de notre outil diplomatique, en s’appuyant sur une consultation de grande ampleur».

Cette consultation menée sous la houlette de l’ambassadeur Bonnafont et s’appuyant sur une équipe d’une quinzaine de personnes a donné lieu à des travaux structurés, avec la participation de l’ensemble des agents du ministère, tous grades confondus, ainsi que de nombreuses personnalités extérieures.

L’impopularité de la réforme du corps diplomatique auprès des concernés est bien reconnue par l’Élysée qui, cependant, souligne une adhésion grandissante de leur part

S’inspirant «des réflexions et des milliers de propositions formulées par les participants», le rapport remis à Colonna propose «un état des lieux et des recommandations relatives à l’organisation des métiers de la diplomatie», affirme Legendre.

Même son de cloche du côté de l’Élysée qui affirme qu’il s’agit «d’adapter notre outil diplomatique aux besoins d’aujourd’hui» dans un monde très volatile, et de le doter de nouveaux moyens humains et matériels, pour faire face à des crises de natures de plus en plus variées.

«Cette transformation de l’action diplomatique est une nécessité et requiert de la vision politique et de nouvelles compétences techniques» indique l’Élysée, pour faire face aux crises politiques mais aussi climatiques, humanitaires et alimentaires.

Lors de sa «déambulation» au Quai d'Orsay, Macron compte confirmer «sa volonté de réarmer notre diplomatie» pour faire face aux défis, mais il veut également affirmer qu’il est «attentif aux arguments des agents et leurs besoins», assure l’Élysée.

Le climat reste lourd

L’impopularité de la réforme du corps diplomatique auprès des concernés est bien reconnue par l’Elysée qui, cependant, souligne une adhésion grandissante de leur part «puisque nombreux parmi eux ont déjà basculé dans le nouveau corps d'État ou exprimé le souhait de le faire».

Le déplacement au ministère des Affaires européennes et étrangères n’est pas une offensive de charme de la part du président pour mieux faire passer sa réforme auprès des agents, affirme l’Élysée.

Le climat reste lourd du côté des diplomates, résignés, nombre d’entre eux affirmant vouloir être constructifs sans pour autant se délester du sentiment que c’est bien le métier de diplomate qui est menacé

Bien au contraire, «il occupe pleinement le domaine réservé qui est le sien, et c’est celui de la diplomatie», et il veut s’assurer «que le ministère a bien les moyens de notre politique».

On est bien en plein cœur de la méthode présidentielle: écouter sans céder et, dans le meilleur des cas, accepter certains aménagements.

Dans ce cadre, lors de la conférence des ambassadeurs de cet automne, Macron a garanti le maintien du très sélectif «concours d’Orient» pour le recrutement des profils diplomatiques polyglottes.

Il a par ailleurs annoncé la création d’une centaine de nouveaux postes au ministère, et cela pour la première fois depuis trois décennies.

Cependant le climat reste lourd du côté des diplomates, résignés, nombre d’entre eux affirmant vouloir être constructifs sans pour autant se délester du sentiment que c’est bien le métier de diplomate qui est menacé.


S&P dégrade la note de la France, avertissement au nouveau gouvernement

Cette photo d'illustration prise à Toulouse le 29 mars 2025 montre un écran affichant le logo de l'agence de notation Standard and Poor's. (AFP)
Cette photo d'illustration prise à Toulouse le 29 mars 2025 montre un écran affichant le logo de l'agence de notation Standard and Poor's. (AFP)
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  • L’agence S&P a abaissé la note de la France à A+, invoquant une incertitude persistante sur les finances publiques malgré la présentation du budget 2026 et un déficit prévu à 5,4 % du PIB en 2025

PARIS: L'une des plus grandes agences de notation a adressé un avertissement au nouveau gouvernement Lecornu en dégradant la note de la France vendredi, invoquant une incertitude "élevée" sur les finances publiques en dépit de la présentation d'un budget pour 2026.

Moins d'une semaine après la formation de la nouvelle équipe gouvernementale et trois jours après la publication d'un projet de loi de finances (PLF) pour l'année prochaine, S&P Global Ratings a annoncé abaisser d'un cran sa note de la France à A+.

"Malgré la présentation cette semaine du projet de budget 2026, l'incertitude sur les finances publiques françaises demeure élevée", a affirmé l'agence, qui figure parmi les trois plus influentes avec Moody's et Fitch.

Réagissant à cette deuxième dégradation par S&P (anciennement Standard & Poors) en un an et demi, le ministre de l'Economie Roland Lescure a dit "(prendre) acte" de cette décision.

"Le gouvernement confirme sa détermination à tenir l'objectif de déficit de 5,4% du PIB pour 2025", a ajouté son ministère dans une déclaration transmise à l'AFP.

Selon S&P, si cet "objectif de déficit public de 5,4% du PIB en 2025 sera atteint", "en l'absence de mesures supplémentaires significatives de réduction du déficit budgétaire, l'assainissement budgétaire sur (son) horizon de prévision sera plus lent que prévu".

L'agence prévoit que "la dette publique brute atteindra 121% du PIB en 2028, contre 112% du PIB à la fin de l'année dernière", a-t-elle poursuivi dans un communiqué.

"En conséquence, nous avons abaissé nos notes souveraines non sollicitées de la France de AA-/A-1+ à A+/A-1", écrit-elle. Les perspectives sont stables.

"Pour 2026, le gouvernement a déposé mardi 14 octobre un projet de budget qui vise à accélérer la réduction du déficit public à 4,7% du PIB tout en préservant la croissance", a répondu le ministère de l'Economie.

"Il s'agit d'une étape clef qui nous permettra de respecter l'engagement de la France à ramener le déficit public sous 3% du PIB en 2029", a ajouté Bercy.

"Il est désormais de la responsabilité collective du gouvernement et du Parlement de parvenir à l'adoption d'un budget qui s'inscrit dans ce cadre, avant la fin de l'année 2025", selon la même source.

- "Plus grave instabilité" depuis 1958 -

Mais le gouvernement qui, à peine entré en fonctions, a échappé de peu cette semaine à la censure après une concession aux socialistes sur la réforme des retraites, va devoir composer avec une Assemblée nationale sans majorité lors de débats budgétaires qui s'annoncent houleux, alors même que le Premier ministre Sébastien Lecornu s'est engagé à ne pas recourir à l'article 49.3 pour imposer son texte.

Cette nouvelle dégradation de la note de la France par S&P intervient avant une décision de Moody's attendue le 24 octobre. Elle a lieu un mois après que Fitch a elle aussi abaissé la note française à A+.

Les agences comme Fitch, Moody's et S&P Global Ratings classent la qualité de crédit des Etats - soit leur capacité à rembourser leur dette -, de AAA (la meilleure note) à D (défaut de paiement).

Les dégradations de note par les agences sont redoutées par les pays car elles peuvent se traduire par un alourdissement de leurs intérêts.

Ceux payés par la France sont estimés à environ 55 milliards d'euros en 2025, alors que depuis la dissolution de l'Assemblée nationale en juin 2024, la dette française se négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande.

"La France traverse sa plus grave instabilité politique depuis la fondation de la Cinquième République en 1958", a estimé S&P: "depuis mai 2022, le président Emmanuel Macron a dû composer avec deux Parlements sans majorité claire et une fragmentation politique de plus en plus forte".

Pour l'agence, "l'approche de l'élection présidentielle de 2027 jette un doute (...) sur la capacité réelle de la France à parvenir à son objectif de déficit budgétaire à 3% du PIB en 2029".

En tombant en A+ chez S&P, la France se retrouve au niveau de l'Espagne, du Japon, du Portugal et de la Chine.


France : l'ancien Premier ministre Philippe demande encore le départ anticipé de Macron

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  • Allié de M. Macron dont il fut le premier chef de gouvernement de mai 2017 à juillet 2020, Edouard Philippe avait lancé un pavé dans la mare la semaine dernière, après la démission éclair du premier gouvernement de Sébastien Lecornu
  • "Je n'ai pas pris cette position parce que je pensais que je serais populaire ou parce que j'espérais convaincre le président (Macron). Le président, il a envie d'aller au terme de son mandat, et je peux le comprendre"

PARIS: L'ancien Premier ministre français Edouard Philippe a à nouveau réclamé jeudi le départ anticipé du président Emmanuel Macron, pour lui "la seule décision digne qui permet d'éviter 18 mois" de "crise" politique avant la prochaine élection présidentielle prévue pour le printemps 2027.

Allié de M. Macron dont il fut le premier chef de gouvernement de mai 2017 à juillet 2020, Edouard Philippe avait lancé un pavé dans la mare la semaine dernière, après la démission éclair du premier gouvernement de Sébastien Lecornu - reconduit depuis -, en suggérant un départ anticipé et "ordonné" du chef de l'Etat, qui peine à trouver une majorité.

"Je n'ai pas pris cette position parce que je pensais que je serais populaire ou parce que j'espérais convaincre le président (Macron). Le président, il a envie d'aller au terme de son mandat, et je peux le comprendre. Je l'ai dit parce que c'est la seule décision digne qui permet d'éviter 18 mois d'indétermination et de crise, qui se terminera mal, je le crains", a déclaré l'ancien Premier ministre sur la chaîne de télévision France 2.

"Ca n'est pas simplement une crise politique à l'Assemblée nationale à laquelle nous assistons. C'est une crise très profonde sur l'autorité de l'Etat, sur la légitimité des institutions", a insisté M. Philippe.

"J'entends le président de la République dire qu'il est le garant de la stabilité. Mais, objectivement, qui a créé cette situation de très grande instabilité et pourquoi ? Il se trouve que c'est lui", a-t-il ajouté, déplorant "une Assemblée ingouvernable" depuis la dissolution de 2024, "des politiques publiques qui n'avancent plus, des réformes nécessaires qui ne sont pas faites".

"Je ne suis pas du tout pour qu'il démissionne demain matin, ce serait désastreux". Mais Emmanuel Macron "devrait peut-être, en prenant exemple sur des prédécesseurs et notamment le général De Gaulle, essayer d'organiser un départ qui nous évite pendant 18 mois de continuer à vivre dans cette situation de blocage, d'instabilité, d'indétermination", a-t-il poursuivi.

Edouard Philippe, qui s'est déclaré candidat à la prochaine présidentielle, assure ne pas avoir de "querelle" avec Emmanuel Macron. "Il est venu me chercher (en 2017), je ne me suis pas roulé par terre pour qu'il me nomme" à la tête du gouvernement et après avoir été "congédié" en 2020, "je ne me suis pas roulé par terre pour rester".


Motion de censure: Le Pen attend la dissolution avec une «impatience croissante»

 Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
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  • Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu
  • Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver"

PARIS: Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante".

Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu. Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver".

"Poursuite du matraquage fiscal" avec 19 milliards d'impôts supplémentaires, "gel du barème" de l'impôt sur le revenu qui va rendre imposables "200.000 foyers" supplémentaires, "poursuite de la gabegie des dépenses publiques", "absence totale d'efforts sur l'immigration" ou sur "l'aide médicale d'Etat", ce budget "est un véritable musée de toutes les horreurs coincées depuis des années dans les tiroirs de Bercy", a-t-elle estimé.

Raillant le premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui a accepté d'épargner le gouvernement en échange de la suspension de la réforme des retraites sans savoir par "quel véhicule juridique" et sans assurance que cela aboutisse, elle s'en est pris aussi à Laurent Wauquiez, le chef des députés LR, qui préfère "se dissoudre dans le socialisme" plutôt que de censurer.

"Désormais, ils sont tous d'accord pour concourir à éviter la tenue d'élections", "unis par la terreur de l'élection", a-t-elle dit.