Le 49.3, nouveau test de résilience pour Borne

Un manifestant, portant un masque représentant la Première ministre française Elisabeth Borne, participe à une manifestation à Marseille, dans le sud de la France, le 18 mars 2023, deux jours après que le gouvernement français a fait passer une réforme des retraites au Parlement sans vote, en utilisant l'article 49.3 de la Constitution. (Photo par Clement Mahoudeau / AFP).
Un manifestant, portant un masque représentant la Première ministre française Elisabeth Borne, participe à une manifestation à Marseille, dans le sud de la France, le 18 mars 2023, deux jours après que le gouvernement français a fait passer une réforme des retraites au Parlement sans vote, en utilisant l'article 49.3 de la Constitution. (Photo par Clement Mahoudeau / AFP).
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Publié le Dimanche 19 mars 2023

Le 49.3, nouveau test de résilience pour Borne

  • En attendant le rejet probable des motions de censure lundi, l'ancienne préfète plusieurs fois ministre, qui a dédié sa vie au service de l'État, semble prête à quitter son poste
  • «Elle a dit au président : (...) +Je pense que cette réforme est utile, nécessaire. C’est moi le fusible, à moi d’assumer+», témoigne un conseiller d'Emmanuel Macron

PARIS : Elisabeth Borne l'assure: elle ne fait pas de ce 49.3, dégainé sur sa réforme emblématique des retraites, «un enjeu personnel». Mais la séquence chaotique la fragilise à son poste de Première ministre et questionne à nouveau sa résilience.

«Persistante et résiliente». C'est l'espèce d'arbre, un chêne vert, que la Première ministre a plantée dans les jardins de Matignon, à son image.

Une façon aussi de colorer son bail, débuté de manière houleuse pour celle qui n'était pas le premier choix du président à ce poste, et qui doit surmonter une majorité relative, issue d'élections législatives ratées.

Réputée «bosseuse» voire «un peu abrupte», cette Polytechnicienne super techno saura-t-elle aussi rebondir après cette décision du 49.3 qu'elle ne soutenait pas au départ et qui a remobilisé dans la rue les opposants à sa réforme ?

En attendant le rejet probable des motions de censure lundi, l'ancienne préfète plusieurs fois ministre, qui a dédié sa vie au service de l'État, semble prête à quitter son poste. Un sacrifice idéal que celui d'une Première ministre dont la popularité végète en-dessous de celle du président, sans réelle envergure politique.

«Elle a dit au président : (...) +Je pense que cette réforme est utile, nécessaire. C’est moi le fusible, à moi d’assumer+», témoigne un conseiller d'Emmanuel Macron.

- «Ressort» -

Certains l'ont vue laisser poindre son émotion devant les députés de la majorité jeudi, après avoir été considérablement chahutée à l'Assemblée.

Mais «la Première ministre ne pleure pas», elle est «très solide», a assuré vendredi le ministre du Travail Olivier Dussopt. Elle «a le soutien de la majorité et la confiance du président».

En usant d'un outil constitutionnel réputé brutal, elle contredit pourtant sa méthode fondée sur la concertation.

Elisabeth Borne «a raisonné comme quelqu'un de rationnel, or le groupe LR n'est pas le plus rationnel qui soit», nuance une source au sein de l'exécutif.

«Elle est fragilisée par le 49.3 parce que sa stratégie vis-à-vis des syndicats et de LR est mise en échec, mais on ne peut pas l’accabler de tout», souligne un autre conseiller. «Si la motion de censure est rejetée, la réforme sera adoptée et elle n’aura pas perdu la bataille».

Elisabeth Borne «a beaucoup de ressort». «Ce n’est pas une barre de fer. Elle sait l’être mais elle n'est pas que ça», affirme un ministre.

L’ancienne ministre des Transports, de l'Écologie et du Travail n'avait-elle pas su séduire la majorité lors de sa déclaration de politique générale quand elle a souri malicieusement et imperturbablement face aux vociférations des oppositions ?

- Pudique -

Jeudi, elle est aussi restée stoïque quand elle a annoncé, en élevant tout de même la voix, le recours au 49.3 sous les huées de la gauche et les battements de pupitre de l'extrême droite.

Deuxième femme à occuper ce poste depuis la socialiste Edith Cresson (1991-1992), elle est désormais «respectée en tant que femme» même si «en tant que Première ministre elle peut être critiquée», salue la sénatrice socialiste Laurence Rossignol.

Reste à savoir si le président peut se séparer d'elle avant l'échéance symbolique des 10 mois et 18 jours du mandat d'Edith Cresson, soit le 3 avril.

L'entourage de M. Macron s'est empressé de saluer jeudi la posture de «grand désintéressement» de Mme Borne, à qui le chef de l'Etat, soucieux aussi de se protéger, a laissé le pilotage de cette réforme inflammable.

«Une femme de confiance, plus que de confidence», a dit d'elle le président en lui remettant fin décembre les insignes de Grand'croix de l'ordre national du Mérite.

Inconnue du grand public, Elisabeth Borne, née Bornstein, 61 ans, divorcée et mère d'un garçon, est très pudique sur sa vie privée, marquée par une autre résilience, plus personnelle. Celle qui a suivi le suicide, quand elle avait 11 ans, d'un père qui ne s'était jamais remis de la déportation.

Après ce traumatisme, cette ingérieure ne cache pas s'être réfugiée dans les maths, devenus pour elle «quelque chose d'assez rassurant, d'assez rationnel».

Et ne manque jamais dans ses déplacements de saluer la force et le courage ici des femmes subissant des violences, là de Françoise Rudetzki porte-parole des victimes du terrorisme. Des parcours endurants, comme le sien.


Dermatose: Lecornu demande «une accélération de la stratégie vaccinale», va recevoir les syndicats

Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet. (AFP)
Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet. (AFP)
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  • Le Premier ministre tiendra une deuxième réunion à ce sujet à 17H30 avec les mêmes ministres et des préfets en visioconférence
  • Il a demandé à son gouvernement "une clarification et une accélération de la stratégie vaccinale qui doit davantage tenir compte de la réalité de chaque département" pour "protéger nos éleveurs et l'élevage français"

PARIS: Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet.

Le Premier ministre tiendra une deuxième réunion à ce sujet à 17H30 avec les mêmes ministres et des préfets en visioconférence. Il a demandé à son gouvernement "une clarification et une accélération de la stratégie vaccinale qui doit davantage tenir compte de la réalité de chaque département" pour "protéger nos éleveurs et l'élevage français", appelant à "garantir" une "disponibilité des doses" de vaccins "plus forte".

Il a également demandé un "état des lieux des contrôles sur les transports interdits d'animaux", "un plan d’accompagnement pour les petits élevages" ainsi qu'"un plan de repeuplement adapté à l’Occitanie".


Ultime vote sur le budget de la Sécurité sociale à l'Assemblée

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
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  • L’Assemblée devrait adopter définitivement le budget de la Sécurité sociale 2026, fruit de compromis, malgré une majorité introuvable et sans 49.3
  • Le budget de l’État reste très incertain : déficit visé à 5% du PIB, fortes divergences sur les recettes, CMP à haut risque

PARIS: Sauf surprise, l'Assemblée nationale devrait définitivement adopter mardi le budget de la Sécurité sociale pour 2026, un succès arraché à force de concessions par Sébastien Lecornu, qui risque toutefois de ne pas réussir le même pari pour le budget de l'Etat, à l'issue bien plus incertaine.

Alors qu'approche la date butoir du 31 décembre, l'heure est aux dernières tractations pour les parlementaires, au terme de longues semaines de débats. Tous les yeux sont désormais braqués sur le projet de loi de finances (PLF), avec des négociations décisives jusqu'au week-end.

Il y a une semaine pourtant, beaucoup doutaient d'une possible adoption du premier des deux textes budgétaires, la loi de financement de la Sécurité sociale, qui doit notamment acter la suspension de la réforme des retraites.

Pour le PS, qui a érigé cette mesure en condition de sa non-censure, l'étape doit marquer le succès de sa stratégie de négociation avec l'exécutif, à rebours du reste de la gauche. Et pour le Premier ministre, elle couronnerait au moins temporairement sa méthode du compromis.

Après un dernier passage express au Sénat vendredi, le texte revient mardi dans l'hémicycle, où les députés devront renouveler le scrutin serré de la semaine dernière (247 voix contre 234), à haut risque en l'absence de majorité et de 49.3.

Les socialistes, quoique dans l'opposition, avaient consenti à massivement voter pour. Hésitant jusqu'au dernier moment à voter contre, les Ecologistes s'étaient en majorité abstenus. Et malgré les consignes d'abstention de leur parti, 18 députés LR et 9 Horizons l'avaient soutenu.

Au gouvernement, une issue semblable est attendue mardi, même s'il "faut veiller à ce qu'il n'y ait pas de démobilisation" dans l'hémicycle, concède un ministre.

Les syndicats FO et CGT ont appelé à des rassemblements devant l'Assemblée, critiquant notamment la limitation de la durée des arrêts maladie, ou une taxe sur les mutuelles dont ils craignent la répercussion sur les cotisations.

Le texte prévoit par ailleurs la création d'un nouveau congé de naissance, ou d'un "réseau France santé" voulu par M. Lecornu pour l'accès aux soins.

Le gouvernement a vu sa copie profondément remaniée par les députés, qui ont supprimé le gel des pensions de retraite et minima sociaux, et contraint l'exécutif à renoncer à doubler les franchises médicales.

Le déficit anticipé pour la Sécurité sociale est de 19,4 milliards d'euros en 2026 (contre 23 milliards en 2025). Mais au prix de transferts de 4,5 milliards d'euros des caisses de l'Etat vers celles de la Sécu.

- Négociations députés-sénateurs -

Des transferts qui contribuent à compliquer l'équation pour le budget de l'Etat, où ils doivent être compensés.

La copie du budget de l'Etat adoptée lundi au Sénat, qui a peiné à trouver des économies significatives dans les dépenses, porterait le déficit à 5,3% du PIB. Or le gouvernement a placé l'objectif à 5%.

Une commission mixte paritaire (CMP) réunissant sept députés et sept sénateurs doit tenter de trouver un accord vendredi et possiblement samedi, une opération périlleuse au vu des divergences entre les deux chambres.

L'Assemblée avait massivement rejeté le texte en première lecture.

Les négociations avant et pendant la CMP porteront notamment sur la question des recettes, alors que les socialistes réclament des mesures de justice fiscale, quand la droite se montre intransigeante dans son refus de nouveaux prélèvements.

"Il ne pourra pas y avoir d'accord sur un budget qui augmenterait considérablement les impôts et ne réduirait pas significativement la dette", insiste le chef des Républicains Bruno Retailleau.

Même si l'ancien socle commun, majoritaire au sein de la CMP, trouve un accord, il faudra encore qu'il puisse être adopté la semaine prochaine à l'Assemblée.

Et ce alors que les socialistes promettent cette fois de s'abstenir au mieux, et les Écologistes de voter contre.

Autres possibilités: utiliser le 49.3 en s'assurant d'une non-censure dans la foulée -- comme le plaident l'ancienne Première ministre Élisabeth Borne ou l'ex-président François Hollande -- ou se résoudre à une loi spéciale, avec une reprise des négociations en janvier.

Une dernière option loin de remporter l'enthousiasme général.

"Il faut que ça s'arrête cette séquence budgétaire", estime un cadre socialiste. "On connaît toutes les données du problème. Si le compromis est possible, alors il faut qu'il ait lieu maintenant."


Le musée du Louvre resté fermé lundi en raison d'une grève

Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron.  Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture. (AFP)
Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron. Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture. (AFP)
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  • Les personnels du musée le plus visité au monde, réunis en assemblée générale, avaient voté "à l'unanimité" une grève reconductible pour dénoncer les conditions de travail et d'accueil du public
  • Plusieurs dizaines d'agents ont ensuite déployé devant la pyramide une banderole indiquant "Le Louvre en lutte pour des conditions de travail décentes, hausse des salaires, + d'effectifs contre la vétusté du palais et le projet LNR"

PARIS: Le musée du Louvre à Paris est resté fermé lundi en raison d'une "grève reconductible" de ses agents, une nouvelle épreuve pour une institution dans la tourmente depuis le spectaculaire cambriolage du 19 octobre et la mise à nu de ses dysfonctionnements.

A 9H00 (8H00 GMT), les portes du musée sont restées closes devant une file de visiteurs, puis la direction a annoncé la fermeture pour "toute la journée".

"Je suis vraiment déçu, le Louvre était la raison principale de notre venue à Paris, parce que nous voulions voir Mona Lisa", le célèbre tableau de La Joconde de Léonard de Vinci, a déclaré à l'AFP Minsoo Kim, 37, Coréen, en lune de miel.

"C'est normal qu'ils fassent grève s'ils ont besoin de meilleures conditions de travail. Bien sûr, en tant que touriste, ce n'est pas génial d'être ici et que le musée soit fermé, mais nous avons réussi à reporter notre visite, donc ça n'est pas un problème", a estimé de son côté Patricia, une touriste brésilienne qui n'a pas souhaité donner son nom.

Un peu plus tôt, les personnels du musée le plus visité au monde, réunis en assemblée générale, avaient voté "à l'unanimité" une grève reconductible pour dénoncer les conditions de travail et d'accueil du public.

Plusieurs dizaines d'agents ont ensuite déployé devant la pyramide une banderole indiquant "Le Louvre en lutte pour des conditions de travail décentes, hausse des salaires, + d'effectifs contre la vétusté du palais et le projet LNR".

Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron.

Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture.

"Nous avons eu quelques avancées en matière de rémunération, mais cela reste insuffisant et nous attendons une proposition écrite du ministère - certainement mardi - pour nous prononcer", a déclaré à l'AFP Alexis Fritche, du syndicat CFDT-Culture, à l'issue de deux heures de réunion.

Selon lui, "pas d'avancée" non plus sur les emplois: "On nous annonce 28 postes pour la surveillance, mais ils proviennent de redéploiements".

A l'issue de l'AG, le délégué du syndicat CGT Christian Galani avait rappelé que la filière accueil et surveillance avait "perdu 200 équivalents temps plein en l'espace de 15 ans, alors que la fréquentation a augmenté de moitié".

Une prochaine AG est prévue mercredi à 9H00 locales, le mardi étant le jour de fermeture hebdomadaire du Louvre.

Conflit social et réorganisation 

"On est en colère", "nous ne sommes pas d'accord avec la manière dont Le Louvre a été géré", a dit devant la presse Elise Muller, agente de surveillance du syndicat Sud Culture.

Valérie Baud, représentante CFDT, s'était félicitée d'un mouvement "interprofessionnel", regroupant métiers de la "conservation, agents d'accueil et de surveillance, professions support, juristes, graphistes".

En parallèle de ce conflit social, le musée doit faire face à une réorganisation à marche forcée et continuer de répondre aux interrogations sur les failles qui ont permis à un commando de s'emparer de huit joyaux de la Couronne, toujours introuvables.

Fragilisée, la présidente du Louvre, Laurence des Cars, devra travailler en tandem avec Philippe Jost, le haut fonctionnaire chargé du chantier de reconstruction de Notre-Dame, à qui la ministre française de la Culture Rachida Dati a confié vendredi la mission de "réorganiser en profondeur le musée".

Audition de la présidente mercredi 

"Des mesures indispensables sont à prendre, bien au-delà de la sûreté et de la sécurité", a déclaré Mme Dati.

"Toute réflexion sur l'avenir du Louvre ne saurait se limiter à une approche technico-organisationnelle", avait réagi la CFDT.

Le ministère de la Culture a précisé que la mission de M. Jost serait menée en janvier et février et que ses recommandations étaient attendues "fin février".

Des sénateurs vont par ailleurs poursuivre leur quête de réponses sur les dysfonctionnements du musée.

Mardi, ils doivent entendre pour la première fois l'ancien président du Louvre Jean-Luc Martinez, destinataire pendant son double mandat (2013-2021) de deux audits alarmants peu suivis d'effets.

Mercredi, ce sera Mme des Cars, à la tête du musée depuis fin 2021, pour comprendre notamment comment ces deux audits n'ont été découverts par l'actuelle direction qu'après le casse du 19 octobre.