A Aït Kine, un des derniers greniers collectifs en activité du Maroc

Le gardien Lahcen Boutirane arpente l'ancien grenier collectif du village d'Ait Kine dans la région marocaine de Tata (Photo, AFP).
Le gardien Lahcen Boutirane arpente l'ancien grenier collectif du village d'Ait Kine dans la région marocaine de Tata (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 20 mars 2023

A Aït Kine, un des derniers greniers collectifs en activité du Maroc

  • A une cinquantaine de kilomètres de la ville de Tata, ce village berbère de l'Anti-Atlas est perché à plus de 1.000 mètres d'altitude
  • Les greniers collectifs sont considérés comme des espaces sacrés et inviolables, régis par des droits coutumiers

AÏT KINE: "Les traditions disparaissent mais pas chez nous", murmure Hossine Oubrahim, un doyen du village d'Aït Kine, qui abrite l'un des rares greniers collectifs toujours en activité dans le Sud du Maroc.

A une cinquantaine de kilomètres de la ville de Tata, ce village berbère de l'Anti-Atlas est perché à plus de 1.000 mètres d'altitude.

Dans un paysage d'oliviers et de palmiers, adossé à des collines stratifiées, la bourgade est une fenêtre sur l'héritage patrimonial du royaume.

Imposante citadelle de protection et de stockage des biens du village, son grenier collectif (appelé "agadir" en langue amazighe), probablement édifié au XVIIIe siècle et restauré en 2012, est toujours fonctionnel, témoin d'une organisation communautaire multiséculaire qui tend à disparaître.

"Nous avons grandi avec la tradition d'y entreposer nos graines, fruits secs, huiles et objets de valeurs", raconte à l'AFP M. Oubrahim.

"Et on continue à la respecter", affirme fièrement le septuagénaire drapé de la traditionnelle tunique bleu indigo des berbères.

Fierté. Le mot revient souvent dans la bouche des habitants d'Aït Kine à l'évocation du "monument" qui "représente notre esprit communautaire", renchérit Abdelghani Charai, un commerçant de 60 ans de retour sur la terre de ses ancêtres après des années de pérégrinations.

Protection et sécurité 

L'agadir, bâti en pisé au centre du village, est protégé par une muraille presque infranchissable, surmontée d'une tour de guet en pierre.

A l'intérieur, 76 compartiments sont agencés en trois niveaux autour d'une cour à ciel ouvert où a été placée une citerne en pierre pour le stockage de l'eau.

"Il reste 63 familles dans le village qui utilisent chacune leur case. Les autres sont parties, mais elles conservent leurs archives ici", confie le gardien des lieux, Lahcen Boutirane.

Elles y stockent de l'orge, des dattes, des amandes, mais également des documents, tels que des actes de mariages et de naissance, des textes religieux et des contrats, des recettes de remèdes magiques, écrits sur des tiges de palmiers.

"Le grenier était une garantie de sécurité, surtout en cas de +siba+", de rébellion des tribus locales contre le pouvoir central, explique M. Charai.

Les greniers collectifs sont considérés comme des espaces sacrés et inviolables, régis par des droits coutumiers, protégeant les récoltes en cas de sécheresse mais aussi d'attaques, confirme l'archéologue Naïma Keddane, spécialiste de ces édifices de l'Anti-Atlas, une chaîne de montagnes dans le sud-ouest du Maroc.

"De par toute l'histoire qu'il renferme, il est important de garder un lien avec ce lieu qui témoigne de l'ingéniosité de nos ancêtres", plaide Lahcen Boutirane, qui veille sur le grenier d'Aït Kine depuis des années.

«Institutions solidaires»

S'il subsiste encore des greniers collectifs en Afrique du Nord, en Algérie, dans les Aurès, en Tunisie méridionale et en Libye, dans le Djebel Nefoussa, c'est au Maroc qu'ils sont les plus nombreux, même si la plupart ne sont plus utilisés.

Le royaume compte plus de 550 anciens "iguidar" (le pluriel d'agadir) dans différentes régions, principalement dans le Centre et le Sud, selon le ministère de la Culture qui prépare leur inscription au patrimoine mondial de l'UNESCO.

La variété de ces constructions atteste de leur valeur patrimoniale : greniers grottes ou à flanc de falaises, couronnant des collines ou dominant une vallée.

"L'enjeu est de sauvegarder les greniers collectifs marocains alors qu'ils ont quasiment disparu en Algérie, en Tunisie et en Libye", estime l'architecte et anthropologue Salima Naji.

Passionnée par ces "institutions solidaires", elle a entrepris la restauration de l'agadir d'Aït Kine, qui attire désormais aussi bien des érudits que de simples curieux.

Emanuele Maspoli, un voyagiste, accompagne aujourd'hui des touristes italiens qui mitraillent la belle porte en bois sculpté, ornée de fer forgé, du grenier.

"Nous faisons le tour des greniers de la région, des lieux extraordinaires qui témoignent de la richesse historique des oasis marocaines", vante le guide quinquagénaire qui parcourt le Maroc depuis dix ans.

"C'est un lieu magique !", s'enthousiasme Antonella Dalla, une des touristes, en arpentant le grenier.


Photo: Exposition de Bryan Adams à Dubaï

L'exposition durera jusqu'au 30 septembre. (Fourni)
L'exposition durera jusqu'au 30 septembre. (Fourni)
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  • Dans sa dernière incursion créative, Adam utilise du plexiglas multicolore pour transformer la relation entre le sujet et le spectateur dans une exposition qui se tiendra jusqu'au 30 septembre à Dubaï
  • Inspiré par l'expression "voir les choses avec des lunettes teintées", Adams a superposé du plexiglas teinté sur certains de ses portraits les plus célèbres, notamment ceux des mannequins Kate Moss et Naomi Campbell

DUBAI : L'emblématique chanteur canadien Bryan Adams, également connu pour son art photographique, marque aujourd'hui sa toute première exposition au Moyen-Orient avec "#SHOTBYADAMS" à la galerie JD Malat de Dubaï.

Né de parents anglais, l'artiste canadien a passé sa jeunesse à voyager à travers l'Europe et le Moyen-Orient en raison du travail diplomatique de son père avant de signer avec A&M Records à l'âge de 18 ans et d'acquérir une renommée internationale avec des succès tels que "Summer of '69.

Dans sa dernière incursion créative, Adam utilise du plexiglas multicolore pour transformer la relation entre le sujet et le spectateur dans une exposition qui se tiendra jusqu'au 30 septembre à Dubaï.

Inspiré par l'expression "voir les choses avec des lunettes teintées", Adams a superposé du plexiglas teinté sur certains de ses portraits les plus célèbres, notamment ceux des mannequins Kate Moss et Naomi Campbell, de la légende du rock Mick Jagger et de la chanteuse Amy Winehouse, aujourd'hui décédée.

Adams, dont les photographies lui ont valu le German Lead Award en 2006 et 2012, a également photographié des sujets pour i-D, Harper's Bazaar et Vogue. Son portrait de la reine Élisabeth II et du prince Philip, aujourd'hui décédés, est conservé en permanence à la National Portrait Gallery de Londres.

"Le plexiglas agit comme une métaphore visuelle, réfractant non seulement le sujet, mais aussi nos hypothèses. Il s'agit de perception, de distorsion et de la beauté de voir différemment", a déclaré Adams dans un communiqué à propos de son dernier corpus d'œuvres.

Adams est le cofondateur de Zoo Magazine, un journal d'art et de mode basé à Berlin. Ses photographies ont été exposées notamment à la Saatchi Gallery de Londres, à la Fotografiska de Stockholm et au Musée royal de l'Ontario au Canada.


«The Voice of Hind Rajab»: le choc annoncé de la Mostra de Venise

Les enregistrements de l'appel de Hind Rajab aux secours avaient suscité une émotion internationale et sont au cœur du film de Kaouther Ben Hania, déjà remarquée avec "Les filles d'Olfa". (AFP)
Les enregistrements de l'appel de Hind Rajab aux secours avaient suscité une émotion internationale et sont au cœur du film de Kaouther Ben Hania, déjà remarquée avec "Les filles d'Olfa". (AFP)
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  • Agée de 5 ans, Hind Rajab a été retrouvée morte à l'intérieur d'une voiture criblée de balles dans la ville de Gaza, plusieurs jours après avoir passé des heures au téléphone, le 29 janvier 2024, avec le Croissant-Rouge palestinien
  • La réalisatrice a raconté sur Instagram qu'elle avait entendu presque par hasard les extraits des appels à l'aide d'Hind Rajab et contacté le Croissant-Rouge

VENISE: C'est le film le plus attendu de la Mostra: "The Voice of Hind Rajab", sur une fillette palestinienne tuée à Gaza en janvier 2024 par l'armée israélienne, est présenté mercredi aux festivaliers et s'annonce déjà comme un choc.

Les enregistrements de l'appel de Hind Rajab aux secours avaient suscité une émotion internationale et sont au cœur du film de Kaouther Ben Hania, déjà remarquée avec "Les filles d'Olfa".

En lice pour le Lion d'or, le film va conforter la dimension politique de la 82e Mostra, marquée par une manifestation de plusieurs milliers de personnes samedi pour exhorter le festival à prendre clairement position contre les actions d'Israël dans la bande de Gaza, dévastée par la guerre déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du Hamas sur le sol israélien.

Le directeur de la Mostra, Alberto Barbera, espère ne pas susciter de polémique avec le film mais a prévenu, très ému en juillet, qu'il aurait "un fort impact sur le public".

Agée de 5 ans, Hind Rajab a été retrouvée morte à l'intérieur d'une voiture criblée de balles dans la ville de Gaza, plusieurs jours après avoir passé des heures au téléphone, le 29 janvier 2024, avec le Croissant-Rouge palestinien, alors que le véhicule dans lequel elle voyageait avec des membres de sa famille avait été visé par des soldats israéliens.

La réalisatrice a raconté sur Instagram qu'elle avait entendu presque par hasard les extraits des appels à l'aide d'Hind Rajab et contacté le Croissant-Rouge.

"J'ai longuement parlé avec la mère de Hind, avec les personnes qui étaient [avec elle] à l'autre bout du fil, ceux qui ont essayé de l'aider. J'ai écouté, j'ai pleuré, j'ai écrit", a ajouté la Franco-Tunisienne de 48 ans, qui a obtenu le consentement de la famille.

Soutien hollywoodien 

Le film de 1H30 se déroule dans le centre d'appel du Croissant-Rouge, sous tension entre volonté de secourir la fillette et nécessité de respecter les protocoles d'urgence et ne pas mettre en danger les sauveteurs.

La réalisatrice, qui aime brouiller les frontières entre réel et fiction, utilise les véritables appels d'Hind mais fait rejouer les scènes dans le centre d'appel par des acteurs, tous palestiniens.

"The Voice of Hind Rajab" bénéficie déjà de soutiens de poids et compte les acteurs Brad Pitt, Joaquin Phoenix, Rooney Mara, et les réalisateurs Alfonso Cuaron, Jonathan Glazer comme producteurs exécutifs. "Ils ont vu le film et ont été impressionnés", a confirmé l'équipe de presse du film à l'AFP.

Jointe par téléphone à Gaza-ville, la mère d'Hind Rajab, Wissam Hamada, espère de son côté que "ce film contribuera à arrêter cette guerre destructrice et à sauver les autres enfants de Gaza", a-t-elle déclaré à l'AFP.

"Hind n'est qu'un cas parmi des milliers. Pourquoi le monde n'a-t-il pas agi pour sauver les autres parents et les autres enfants?" demande la femme de 29 ans, qui vit avec son fils de 5 ans et dont le mari est mort il y a un an.

Interrogée par l'AFP, l'armée israélienne, qui n'a jamais annoncé une enquête formelle sur ce drame, a indiqué, sans plus de détails, que les circonstances de la mort de la fillette étaient encore "en train d'être examinées".

Après Venise mercredi, le film sera présenté aux festivals de Toronto, Londres, Saint-Sébastien et Busan. Son nom est déjà évoqué pour les Oscars.

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles. Sur les 251 personnes enlevées ce jour-là, 47 restent retenues à Gaza dont 25 ont été déclarées mortes par l'armée israélienne.

La campagne de représailles israéliennes a fait au moins 63.633 morts dans la bande de Gaza, en majorité des civils, selon le ministère de la Santé de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas. Le ministère, dont les chiffres sont jugés fiables par l'ONU, ne précise pas le nombre de combattants tués.


Noor Riyadh revient illuminer la capitale saoudienne

Palais de lumière de Robert Wilson (2021). (Fourni)
Palais de lumière de Robert Wilson (2021). (Fourni)
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  • Plus de 60 installations lumineuses monumentales transformeront les sites historiques, les repères urbains et le réseau de métro
  • Le ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdullah ben Farhane : « À travers Noor Riyadh, nous approfondissons le rôle de l’art public dans l’échange culturel »

RIYAD : L’initiative d’art public Noor Riyadh revient pour sa cinquième édition, du 20 novembre au 6 décembre 2025.

Organisé sous l’égide de Riyadh Art, le festival de lumière métamorphosera une nouvelle fois la capitale saoudienne grâce à des installations innovantes signées par des artistes saoudiens et internationaux de renom.

Le thème de cette année, « En un clin d’œil », s’inspire de la transformation fulgurante de Riyad. Il reflète une identité urbaine en pleine évolution, entre héritage historique et infrastructures futuristes, comme le tout nouveau réseau de métro.

Noor Riyadh s’inscrit dans le programme Riyadh Art, l’un des quatre mégaprojets culturels de la capitale lancés par le roi Salmane dans le cadre de Vision 2030.

Porté par la Commission royale pour la ville de Riyad, Riyadh Art vise à faire de la capitale un centre mondial de l’art contemporain en intégrant l’art dans l’espace public pour enrichir l’expérience urbaine et favoriser l’innovation culturelle.

« Le thème de cette année capture l’élan de changement qui définit Riyad aujourd’hui », a déclaré le prince Badr ben Abdullah ben Farhane, ministre de la Culture et président du comité directeur de Riyadh Art.

« Avec Noor Riyadh, nous poursuivons notre ambition de faire de l’art public un vecteur d’échange culturel, d’enrichissement du quotidien et de rayonnement créatif à l’échelle mondiale. »

Depuis son lancement en mars 2021, le programme Riyadh Art a présenté plus de 550 œuvres réalisées par plus de 500 artistes saoudiens et internationaux, attirant plus de 9,6 millions de visiteurs à travers ses grands événements, dont Noor Riyadh.

L’édition 2025 élargit encore les ambitions curatoriales du festival et entend offrir des moments marquants aux habitants comme aux visiteurs.

Plus de 60 installations lumineuses à grande échelle sont prévues, confirmant Noor Riyadh comme l’une des plateformes majeures de l’art public contemporain. Le festival proposera également une exposition et un programme communautaire riche : ateliers pédagogiques, conférences et performances artistiques.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com