Liban: observer le ramadan quand on n’a même plus les moyens de manger

Les rues sont vides. (Photo Patricia Khodr)
Les rues sont vides. (Photo Patricia Khodr)
Depuis plus de trois ans, le pays du Cèdre fait face à l’une des crises économiques les plus importantes du monde depuis le XIXe siècle, selon la Banque mondiale. (Photo Patricia Khodr)
Depuis plus de trois ans, le pays du Cèdre fait face à l’une des crises économiques les plus importantes du monde depuis le XIXe siècle, selon la Banque mondiale. (Photo Patricia Khodr)
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Publié le Lundi 27 mars 2023

Liban: observer le ramadan quand on n’a même plus les moyens de manger

  • Depuis plus de trois ans, le pays fait face à l’une des crises économiques les plus importantes du monde depuis le XIXe siècle, selon la Banque mondiale
  • «C’est la honte! J’achète même les petites cornes de piments frais à la pièce. Mais je n’ai pas le choix. En plus, j’ai coupé le générateur par manque de moyens»

BEYROUTH: «Nous commencions les préparatifs plus d’une dizaine de jours avant le ramadan. Nous nous rassemblions, ma sœur, ma mère et moi, pour confectionner des fatayers, des rakakats et des sambousseks (bouchées de pâtes farcies aux blettes, au fromage et à la viande) que nous mettions au congélateur pour les frire lors de la rupture du jeûne afin qu’ils accompagnent d’autres plats. Cette année, nous allons les remplacer par des frites et je suis sûre que nous ne pourrons pas manger des desserts ou inviter de la famille comme nous le faisions d’habitude», confie Shérine, une élégante femme de 30 ans, qui travaille dans une boutique de luxe et qui faisait partie de cette classe moyenne qui, aujourd’hui, n’existe pratiquement plus au Liban.

Depuis plus de trois ans, le pays du Cèdre fait face à l’une des crises économiques les plus importantes du monde depuis le XIXe siècle, selon la Banque mondiale. Le dollar est passé d’un taux fixe de 1 500 livres libanaises (LBP) en 2019 à plus de 140 000 LBP aujourd’hui.

Le pays où il faisait bon vivre, qui était connu pour être la Suisse du Moyen-Orient grâce à son système bancaire, s’est complètement effondré. Depuis plus de trois ans, les déposants n’ont pas accès à leurs comptes en banque et plus de 82% des Libanais vivent dans une pauvreté multidimensionnelle selon la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (Cesao), alors qu’un rapport des Nations unies publié en début de semaine classe le Liban à la deuxième place, derrière après l’Afghanistan, des pays les plus tristes du monde.

«Depuis trois ans, les choses empirent et nous n’avons pas encore touché le fond. Avec le manque de moyens dont nous souffrons actuellement, nous perdons même nos traditions», soupire Shérine, qui aimait beaucoup les rassemblements familiaux du mois du jeûne, devenus impossibles aujourd’hui.

Pour la rupture du jeûne, traditionnellement, plusieurs plats sont préparés tous les jours. Il doit y avoir du sirop de jallab (raisin secs), de tamer hindi (tamarin), ou d’amareddine (abricots séchés), une soupe, une salade, un plat à base de viande et de riz, des hors-d’œuvre comme les rakakats, le baba ghanoush, le houmous et les feuilles de vigne farcies. Enfin, un dessert généralement à base de fleur de lait.

«Avec les prix actuels, il faut compter une centaine de milliers de LBP tous les jours pour un véritable repas de ramadan. Nous sommes une famille de cinq personnes. Comment inviter des amis ou des proches?», déplore Shérine.

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Avant la crise, le sac de pain coûtait 1 500 LBP, il est aujourd’hui à 55 000 LBP. (Photo Patricia Khodr)

À Nabaa, dans l’un des quartiers les plus pauvres de Beyrouth, les personnes que nous interrogeons sur les préparatifs du ramadan lèvent les yeux vers le ciel quand ils pensent aux repas à préparer. «Nous comptons sur la Providence», déclarent-ils.

Noura, qui travaille comme caissière dans un supermarché du quartier, témoigne: «Cette semaine, nous n’avons proposé ni poulet ni viande. Nos clients ne peuvent même plus se permettre d’acheter une boîte de thon, comment voulez-vous qu’ils achètent de la viande? Avant la crise, le sac de pain coûtait 1 500 LBP, il est aujourd’hui à 55 000 LBP. Tous les autres produits ont suivi le cours du dollar.»

Manger est devenu secondaire

Un peu plus loin, dans un petit magasin qui vend toutes sortes d’objets, Nazir, père de cinq enfants âgés de 7 à 16 ans, est pensif. «Manger est devenu secondaire pour nous. J’ai reçu ce matin la visite du propriétaire de l’appartement. Il m’a lancé un ultimatum: il faut que je quitte la maison à la fin du mois. Je payais 50 dollars [1 dollar = 0,93 euro] de loyer par mois, il me demande aujourd’hui 200 dollars. Je n’ai pas cet argent et je suis incapable de l’obtenir. Je suis employé dans ce magasin et je gagne un tout petit salaire. Mes enfants mangent deux fois par jour. Cela fait des mois que nous n’avons pas mangé de viande. J’essaie d’acheter des légumes une fois tous les quinze jours. En ce qui concerne les fruits, quand j’ai les moyens, j’achète des bananes. Ce sont les fruits les moins chers. Et les choses ne changeront pas pour nous pour le ramadan», confie-t-il.

Dans le même quartier, Bilel, un employé d’un magasin de fruits et de légumes, note que «de nombreux clients achètent à crédit. Nous possédons le magasin le moins cher du quartier et nos clients achètent beaucoup moins qu’auparavant. Soit ils achètent les fruits et les légumes à la pièce, soit ils n’achètent pas plus d’un kilo», explique-t-il.

Tarek, la trentaine, vient de se marier. Il est soudeur et peine à arrondir ses fins de mois. «C’est la honte! J’achète même les petites cornes de piments frais à la pièce. Mais je n’ai pas le choix. En plus, j’ai coupé le générateur par manque de moyens», indique-t-il.

Depuis plus de deux ans, les Libanais vivent pratiquement sans électricité. Ils comptent sur des générateurs de quartier dont l’abonnement suit le cours du prix du brut, qui a flambé avec la guerre en Ukraine, depuis un an.

Une récente étude de l’ONU souligne que les ménages de ce qui reste de la classe moyenne utilisent 44% de leurs revenus pour payer les frais de l’abonnement au générateur.
Les moins nantis préfèrent couper l’abonnement ou partagent avec leurs voisins l’équivalent de 2 ou 3 ampères, ce qui leur permet d’allumer une lampe à la nuit tombée.
Fadi Ghazzaoui est responsable de l’organisation intitulée «Initiative Ras el-Nabeh». Il s’agit d’un collectif qui vient en aide aux habitants de ce vieux quartier de Beyrouth qui, depuis toujours, abrite une classe moyenne éduquée et qui vit dans la dignité. Ce n’est malheureusement plus le cas actuellement.

«Les gens manquent de tout. Nous aidons des centaines de personnes qui vivent dans le quartier. Certaines d’entre elles ont coupé leur abonnement au générateur. D’autres n’ont pas les moyens d’acheter des bonbonnes de gaz pour les cuisinières; ils ne peuvent donc pas préparer de plats chauds. Désormais, les gens comptent sur les caisses alimentaires des associations pour survivre, mais s’ils n’ont pas de gaz, comment vont-ils cuire leurs aliments?», souligne-t-il.
 
Fadi Ghazzaoui raconte également que les personnes qu’il côtoie n’ont plus les moyens d’acheter des médicaments ou de se rendre chez un médecin. «Elles vivent avec la hantise de tomber malades, car elles savent qu’elles ne peuvent pas se permettre d’aller à l’hôpital. Nous essayons d’intervenir dans la mesure du possible.»
«À Beyrouth, des milliers de familles comptent sur les caisses alimentaires des associations pour pouvoir manger. Pour le ramadan, de nombreuses ONG et des mosquées distribueront des plats chauds, avec aucun doute de la viande ou du poulet, des fruits ou un dessert oriental», indique-t-il.

Noha, 57 ans, est aidée par l’Initiative Ras el-Nabeh. Son mari et elle étaient enseignants. Ils ont une fille unique âgée de 19 ans. «Nous sommes propriétaires d’une petite maison. Jusqu’à la crise, nous vivions dignement. Nous n’étions pas riches, mais nous n’avions besoin de personne. Mon mari et moi travaillions. Aujourd’hui, mon mari a pris sa retraite et je suis au chômage depuis la crise. Actuellement, je partage 5 ampères de générateur avec trois voisins. Je fais la cuisine une fois tous les trois jours pour économiser le gaz. Je prépare surtout des lentilles, du riz, des pâtes, c’est-à-dire ce que nous recevons dans les caisses alimentaires», explique-t-elle.

Sa fille a obtenu des résultats remarquables au baccalauréat et elle a bénéficié d’une bourse dans l’une des plus importantes universités de Beyrouth. «Elle rêve de devenir médecin et je me priverai de tout pour qu’elle soit heureuse. Aujourd’hui, tout coûte cher et je m’endette pour lui acheter des serviettes hygiéniques. J’essaie de lui assurer de l’argent de poche, mais souvent elle va à l’université sans avoir dans son sac de quoi payer un café», confie Noha. Cette dernière a décidé il y a une semaine de ne plus conduire sa voiture – un modèle qui date de 2005, acheté à crédit chez un concessionnaire à l’époque –, car elle n’a plus les moyens de faire un plein d’essence.

 


Les frappes israéliennes font monter la tension, le Liban sous pression concernant les armes du Hezbollah

Les avions israéliens ont pris pour cible la périphérie des villes de Jarmaq (ci-dessus) et d'Aishiyeh, avec huit raids dans le district de Jezzine. (Fourni)
Les avions israéliens ont pris pour cible la périphérie des villes de Jarmaq (ci-dessus) et d'Aishiyeh, avec huit raids dans le district de Jezzine. (Fourni)
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  • L'envoyé américain Barak met en garde contre une "confrontation majeure" pour le Hezbollah si le groupe ne désarme pas, et déclare que les partenaires régionaux sont prêts à investir au Liban
  • Les discussions avec Israël ont été approuvées par toutes les parties, y compris le Hezbollah, a déclaré une source officielle à Arab News

BEYROUTH : L'armée de l'air israélienne a mené une série de raids aériens sur Iqlim Al-Tuffah dans le sud du Liban lundi, alors que des drones et des avions de reconnaissance ont violé l'espace aérien libanais au-dessus de Beyrouth et de sa banlieue sud à basse altitude, atteignant même la vallée de la Bekaa.

Ces frappes ont coïncidé avec un regain de pression des États-Unis sur le Liban pour qu'il désarme le Hezbollah.

Les avions israéliens ont pris pour cible la périphérie des villes de Jarmaq et d'Aishiyeh et ont effectué huit raids dans le district de Jezzine.

Un porte-parole de l'armée israélienne a confirmé avoir frappé des "sites terroristes" et des infrastructures du Hezbollah "reconstruites à travers le Liban en violation des accords existants entre Israël et le Liban".

Le porte-parole a confirmé que "l'armée israélienne continuera à travailler pour éliminer toute menace et protéger l'État d'Israël".

Cette escalade intervient alors que le gouvernement libanais est soumis à une pression croissante pour faire respecter le monopole de l'État sur les armes.

Le président Joseph Aoun a conclu lundi des consultations avec des responsables libanais concernant l'initiative qu'il a lancée la semaine dernière, parallèlement à l'accord sur Gaza, en vue d'entamer des négociations indirectes avec Israël.

Il a rencontré le président du Parlement, Nabih Berri, qui joue le rôle de médiateur entre le Hezbollah et les puissances étrangères.

"Le Liban tente de sortir de l'impasse dans laquelle il se trouve. Les allégations d'obstruction à la mise en œuvre du contrôle des armes sous l'autorité de l'État sont fausses. L'armée libanaise a mis en place un plan et le met en œuvre. Chaque mois, elle soumet au Conseil des ministres un rapport sur ses réalisations au sud du fleuve Litani et continuera à le faire jusqu'à la fin de l'année. Ce plan a été approuvé par la partie américaine et le comité du mécanisme", a déclaré une source officielle à Arab News.

En ce qui concerne la demande israélienne que le plan couvre l'ensemble du Liban avant la fin de l'année, la source a déclaré : "Le Liban dispose actuellement de 9 300 soldats : "Le Liban compte actuellement 9 300 soldats déployés au sud du fleuve Litani. L'augmentation de ce nombre nécessite des ressources que l'armée ne possède pas actuellement. Elle a des besoins spécifiques et demande de l'aide, ce dont toutes les parties sont conscientes.

"La décision du Conseil de sécurité de retirer les forces de la FINUL du Liban d'ici la fin de l'année prochaine vient s'ajouter à ces défis", a ajouté la source. "Les opérations de l'armée au sud du Litani sont menées en coordination avec la FINUL.

La source officielle a souligné que "le concept de négociations avec Israël existe du côté libanais et est approuvé par toutes les parties, y compris le Hezbollah, car le choix est entre la guerre et la diplomatie. Le format de ces négociations sera déterminé en temps voulu."

La semaine dernière, le président Aoun a déclaré : "La région se dirige vers des négociations visant à établir la paix et la stabilité. Le dialogue et les négociations, qui seront déterminés au moment opportun, permettront de trouver des solutions."

Il a poursuivi : "Le Liban ne peut être exclu des efforts visant à résoudre les crises actuelles de la région, car la poursuite de la guerre, de la destruction, des meurtres et des déplacements ne peut plus être tolérée.

M. Aoun a ajouté que le Liban avait déjà négocié avec Israël sous les auspices des États-Unis et des Nations unies, ce qui avait abouti à l'accord de démarcation de la frontière maritime annoncé depuis le quartier général de la FINUL à Naqoura.

"Qu'est-ce qui empêche un processus similaire de se reproduire pour résoudre les questions en suspens, d'autant plus que la guerre a été vaine ? a demandé M. Aoun.

"Israël a négocié avec le Hamas parce qu'il n'avait pas d'autre choix après avoir connu la guerre et la destruction. Aujourd'hui, la situation dans la région est celle d'un compromis et les négociations sont nécessaires. Le cadre des négociations sera déterminé en temps voulu", a-t-il déclaré.

Thomas Barak, l'envoyé américain en Syrie, a averti dans un long message lundi que "si Beyrouth ne prend pas de mesures en matière de désarmement, l'aile militaire du Hezbollah sera inévitablement confrontée à une confrontation majeure avec Israël à un moment où Israël est fort et où le Hezbollah, soutenu par l'Iran, est en position de faiblesse".

Barak a déclaré que "tandis que la Syrie rétablit la stabilité en normalisant ses relations avec ses voisins, y compris Israël et la Turquie, cette étape devrait constituer le premier pilier du cadre de sécurité nordique d'Israël. Le deuxième pilier doit être le désarmement du Hezbollah à l'intérieur du Liban et l'ouverture de discussions sur la sécurité et les frontières avec Israël".

Il a ajouté que Téhéran "continue de financer la milice du Hezbollah malgré les sanctions, et le cabinet libanais envoie des messages contradictoires aux forces armées libanaises, qui manquent de fonds et d'autorité pour mener à bien leurs missions".

Il a également noté que "les partenaires régionaux sont prêts à investir au Liban, à condition que le Liban retrouve le monopole de la force légitime sous le seul contrôle de l'armée libanaise. Si Beyrouth continue d'hésiter, Israël pourrait agir unilatéralement et les conséquences seraient désastreuses.

"Si Israël lance une attaque militaire sérieuse contre le Hezbollah et que le parti perd du territoire, du pouvoir politique ou de la réputation, il cherchera probablement à reporter les élections législatives de mai prochain pour reconstituer sa force militaire et son organisation politique. Toutefois, le report des élections sous prétexte de guerre entraînera un chaos majeur au Liban, ravivant la méfiance sectaire", a-t-il averti.

"La perception qu'une seule milice peut suspendre la démocratie pourrait miner la confiance du public dans l'État, inviter à une intervention régionale et menacer de faire passer le Liban de la crise à l'effondrement institutionnel complet", a conclu M. Barak.

Par ailleurs, le Grand Mufti de la République libanaise, Cheikh Abdul Latif Derian, a rencontré lundi à Dar Al-Fatwa l'ambassadeur saoudien au Liban, Walid Bukhari.

Selon un communiqué du bureau des médias du mufti, la réunion a souligné "l'importance de la stabilité et de la sécurité du Liban (...) en tant que partie intégrante de la sécurité arabe et de la création d'un nouveau paysage régional plus stable, plus humain et plus sûr".

"La sécurité et le développement du Liban ne peuvent être atteints que par une stabilité globale et la pleine prise en charge par l'État de ses responsabilités nationales", a ajouté le communiqué.

Le communiqué précise que les deux parties ont réaffirmé "leur soutien à l'armée libanaise et aux autres forces de sécurité, ainsi que leur soutien à l'extension de l'autorité de l'État sur l'ensemble du territoire libanais, sur la base des efforts de l'armée pour mettre en œuvre les décisions du gouvernement concernant le monopole des armes et la suprématie de la souveraineté de l'État sur l'ensemble de ses terres".

Ils ont également exhorté le gouvernement libanais à continuer à prendre des mesures décisives en faveur des réformes économiques et institutionnelles, tout en poursuivant une diplomatie équilibrée afin de restaurer la confiance et d'attirer le soutien de la communauté internationale.

 


Pressions pour maintenir le cessez-le-feu à Gaza, Vance attendu en Israël

L'administration Trump intensifie ses efforts diplomatiques, avec l'arrivée mardi du vice-président JD Vance en Israël, afin de préserver le fragile cessez-le-feu dans la bande de Gaza après des violences meurtrières et le retard dans le retour de dépouilles d'otages. (AFP)
L'administration Trump intensifie ses efforts diplomatiques, avec l'arrivée mardi du vice-président JD Vance en Israël, afin de préserver le fragile cessez-le-feu dans la bande de Gaza après des violences meurtrières et le retard dans le retour de dépouilles d'otages. (AFP)
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  • Si le Hamas ne respecte pas les termes du cessez-le-feu, il sera "éradiqué" a prévenu lundi le président américain
  • Lundi, ses émissaires Steve Witkoff et Jared Kushner ont rencontré en Israël le Premier ministre Benjamin Netanyahu, prélude à l'arrivée, mardi, du vice-président JD Vance

JERUSALEM: L'administration Trump intensifie ses efforts diplomatiques, avec l'arrivée mardi du vice-président JD Vance en Israël, afin de préserver le fragile cessez-le-feu dans la bande de Gaza après des violences meurtrières et le retard dans le retour de dépouilles d'otages.

Si le Hamas ne respecte pas les termes du cessez-le-feu, il sera "éradiqué" a prévenu lundi le président américain, disant vouloir donner encore "une petite chance" à la poursuite de sa feuille de route pour faire taire les armes à Gaza.

Lundi, ses émissaires Steve Witkoff et Jared Kushner ont rencontré en Israël le Premier ministre Benjamin Netanyahu, prélude à l'arrivée, mardi, du vice-président JD Vance.

"Nous discuterons de deux choses (...). Les défis de sécurité auxquels nous faisons face et les opportunités diplomatiques qui s'offrent à nous. Nous surmonterons les défis et saisirons les opportunités", a affirmé M. Netanyahu, sans préciser quand il doit rencontrer le N.2 de son allié américain.

Ces tractations interviennent après les violences de dimanche dans le territoire palestinien, les plus importantes depuis l'entrée en vigueur le 10 octobre d'un accord de cessez-le-feu, qui a permis la libération des 20 otages vivants du 7-Octobre encore détenus à Gaza en échange de celle de prisonniers palestiniens.

Au terme du texte, le Hamas devait aussi rendre d'ici le 13 octobre les 28 corps d'otages encore retenus à Gaza, mais affirme avoir besoin de matériel et de plus de temps. Il a remis lundi à la Croix-Rouge une 13e dépouille, qui a été rapatriée en Israël et transférée au centre national médico-légal en vue de son identification, a annoncé l'armée.

L'accord, parrainé par Donald Trump, prévoit aussi l'entrée massive d'aide à Gaza, et à terme la fin définitive de la guerre déclenchée par une attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

Se disant "préoccupée" par le regain de violence de dimanche, l'ONU a exhorté "toutes les parties à respecter pleinement leurs engagements".

"Nous avons passé un accord avec le Hamas selon lequel ils vont bien se tenir et si ce n'est pas le cas, nous allons les éradiquer, si nécessaire", a prévenu de son côté M. Trump.

"153 tonnes de bombes" 

La Défense civile à Gaza, services de secours qui opèrent sous l'autorité du Hamas, avait fait état d'au moins 45 Palestiniens tués dimanche dans les frappes israéliennes, dont des civils et un journaliste.

"Je ne comprends pas pourquoi, malgré le cessez-le-feu à Gaza, la guerre a repris", s'est indigné lundi un déplacé, Imad Nahed Issa, dans le camp de Nousseirat, où des proches pleuraient des victimes des frappes de la veille.

L'armée israélienne, qui a affirmé avoir riposté à des attaques du Hamas, démenties par le mouvement islamiste, a annoncé la mort au combat de deux soldats dimanche à Rafah, dans le sud de Gaza. L'armée a largué dimanche après ces décès "153 tonnes de bombes" sur Gaza, a affirmé M. Netanyahu.

Lundi, la Défense civile a fait état de quatre Gazaouis tués par des tirs israéliens à l'est de Gaza-Ville, où l'armée israélienne a dit avoir ciblé des assaillants qui s'approchaient de la "ligne jaune", la ligne de repli des troupes israéliennes à l'intérieur de la bande de Gaza, convenue dans le cadre du cessez-le-feu.

L'armée a ensuite indiqué avoir "commencé" à matérialiser la "ligne jaune" pour "établir une clarté tactique sur le terrain", avec une série de poteaux peints en jaune placés "environ tous les 200 mètres". -

Le Hamas au Caire 

Une délégation du Hamas était de son côté au Caire lundi pour discuter avec les médiateurs égyptiens et qataris du cessez-le-feu et d'un prochain dialogue interpalestinien.

Une étape ultérieure du plan Trump prévoit le désarmement du Hamas et l'amnistie ou l'exil de ses combattants ainsi que la poursuite du retrait israélien de Gaza. Il exclut tout rôle du Hamas dans la gouvernance de Gaza.

Le Hamas refuse jusque-là de désarmer, réclame le retrait total israélien du territoire, et affirme qu'il entend participer à toute discussion sur l'avenir du territoire.

Ce dialogue interpalestinien aborderait "la formation d'un comité d'experts indépendants chargé de la gestion de Gaza" après la guerre, selon une source proche des discussions, alors que le plan américain prône une autorité de transition formée de technocrates, chapeautée par un comité dirigé par le président américain.

L'attaque du 7 octobre a entraîné côté israélien la mort de 1.221 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi par l'AFP à partir de données officielles.

L'offensive israélienne menée en représailles a fait 68.216 morts à Gaza, en majorité des civils, selon les chiffres du ministère de la Santé du Hamas, et provoqué un désastre humanitaire.


Gaza: le Hamas rencontre les médiateurs au Caire

L'Egypte et le Qatar sont des médiateurs de longue date dans les pourparlers indirects avec Israël et le Hamas pour mettre un terme à la guerre à Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023. (AFP)
L'Egypte et le Qatar sont des médiateurs de longue date dans les pourparlers indirects avec Israël et le Hamas pour mettre un terme à la guerre à Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023. (AFP)
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  • Cette rencontre intervient au lendemain de frappes israéliennes sur Gaza, Israël ayant accusé le Hamas de violations du cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, ce que le mouvement islamiste a réfuté
  • La source a précisé que la rencontre avec les médiateurs au Caire devrait porter notamment sur "les dizaines de frappes aériennes israéliennes" ayant fait la veille "des dizaines de morts dans la bande de Gaza"

LE CAIRE: Une délégation du Hamas, conduite par Khalil al-Hayya, rencontre lundi au Caire des responsables égyptiens et qataris pour évoquer le cessez-le-feu fragile et l'après-guerre à Gaza, a indiqué à l'AFP une source proche des négociations.

Cette rencontre intervient au lendemain de frappes israéliennes sur Gaza, Israël ayant accusé le Hamas de violations du cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, ce que le mouvement islamiste a réfuté.

La source a précisé que la rencontre avec les médiateurs au Caire devrait porter notamment sur "les dizaines de frappes aériennes israéliennes" ayant fait la veille "des dizaines de morts dans la bande de Gaza".

L'Egypte et le Qatar sont des médiateurs de longue date dans les pourparlers indirects avec Israël et le Hamas pour mettre un terme à la guerre à Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023.

"Unifier" les mouvements 

Par ailleurs, "la délégation, aux côtés de plusieurs dirigeants du mouvement, tiendra des réunions avec des responsables égyptiens au sujet du dialogue interpalestinien que l'Egypte doit prochainement parrainer", a précisé la source familière des négociations.

L'Egypte a déjà accueilli plusieurs rencontres entre les mouvements politiques palestiniens, notamment les deux principaux groupes politiques palestiniens, le Hamas et le Fatah de Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne.

Ces deux mouvements sont opposés depuis des décennies.

"Ce dialogue vise à unifier le corps politique palestinien et à aborder les grandes questions, notamment l'avenir de la bande de Gaza et la formation d'un comité d'experts indépendants chargé de la gestion du territoire", a déclaré la source, faisant écho à la mise en place d'une autorité de transition formée de technocrates chapeautée par un comité dirigé par le président américain Donald Trump, et proposée par ce dernier.

Le Hamas a déjà fait savoir qu'il ne tenait pas à gouverner la bande de Gaza, ravagée par deux ans de guerre.

Plusieurs responsables politiques palestiniens ont également évoqué ces derniers mois la création d'un groupe de gestionnaires palestiniens, non affiliés, en charge d'administrer le territoire où le Hamas avait pris le pouvoir par la force en 2007.

Une autre source informée a affirmé que "les contacts et efforts des médiateurs ont permis hier soir de rétablir le calme et de réactiver le cessez-le-feu à Gaza", ajoutant que "les médiateurs continueront de suivre et de surveiller les violations israéliennes".