Onze cadres du PKK jugés pour «financement du terrorisme» en France

Un manifestant porte un drapeau du Parti des travailleurs kurdes (PKK) sur ses épaules lors d'affrontements à la suite d'une manifestation de partisans et de membres de la communauté kurde, un jour après qu'un tireur a ouvert le feu dans un centre culturel kurde, tuant trois personnes, sur la place de la République à Paris, le 24 décembre 2022. (Photo, AFP)
Un manifestant porte un drapeau du Parti des travailleurs kurdes (PKK) sur ses épaules lors d'affrontements à la suite d'une manifestation de partisans et de membres de la communauté kurde, un jour après qu'un tireur a ouvert le feu dans un centre culturel kurde, tuant trois personnes, sur la place de la République à Paris, le 24 décembre 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 03 avril 2023

Onze cadres du PKK jugés pour «financement du terrorisme» en France

  • Aucun des onze hommes, tous de nationalité turque, jugés devant le tribunal correctionnel de Paris notamment pour «financement du terrorisme» et extorsion, ne reconnaît ouvertement être membre de l'organisation
  • L'enquête a débuté en 2020 avec deux signalements pour «disparitions inquiétantes» dans le sud-est de la France et, à quelques mois d'écart, de deux femmes kurdes âgées de 18 et 19 ans

PARIS: "Racket" de la diaspora kurde, "propagande" pour recruter des jeunes... La justice française se penche à partir de mardi sur le fonctionnement du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) en France, à travers le procès à Paris de onze de ses cadres.

Le PKK, organisation basée en Turquie luttant pour un Kurdistan indépendant, est l'ennemi juré d'Ankara qui le considère comme "terroriste", à l'instar de l'Union européenne et des Etats-Unis.

Aucun des onze hommes, tous de nationalité turque, jugés devant le tribunal correctionnel de Paris notamment pour "financement du terrorisme" et extorsion, ne reconnaît ouvertement être membre de l'organisation. Elle n'existe que "dans les montagnes" du Kurdistan, loin de la France où ils résident, argumentent-ils.

Mais les enquêteurs sont certains de leur appartenance au PKK. Et estiment que la France, comme l'Allemagne ou les Pays-Bas, sont bien des "bases arrières" où des "cellules clandestines" très hiérarchisées s'emploient à "mobiliser" la communauté kurde (120 à 150 000 personnes en France, 100 000 aux Pays-Bas, 1 million en Allemagne).

L'enquête a débuté en 2020 avec deux signalements pour "disparitions inquiétantes" dans le sud-est de la France et, à quelques mois d'écart, de deux femmes kurdes âgées de 18 et 19 ans.

La piste d'un "recrutement" du PKK pour rejoindre des "camps de formation" en Europe s'est rapidement dessinée. Elle a permis aux enquêteurs d'identifier un réseau actif dans la région, officiellement une "association kurde" de Marseille (sud-est), chargée notamment de collecter l'impôt révolutionnaire, la "kampanya", principale source de financement du PKK.

Malgré l'"omerta" dans la communauté kurde, les témoignages et écoutes téléphoniques ont révélé "un véritable harcèlement" des membres de la diaspora et des méthodes de recouvrement s'apparentant à du "racket", selon les enquêteurs.

La contribution, collectée une fois par an, est fixée arbitrairement par les "collecteurs" en fonction des revenus estimés de chacun.

Au fil des ans, la justice s'est régulièrement intéressée à eux. Pour lui échapper, ils prennent désormais des précautions: les mots "kampanya" ou "PKK" ne sont pas prononcés au téléphone, on prévient plutôt qu'on passe "boire un café".

"Adhésion totale" 

Si "certains" Kurdes paient l'impôt par conviction idéologique et "adhésion totale" au PKK, note l'enquête, "beaucoup" le vivent "comme une obligation" et n'osent s'y soustraire "par peur" de la réprobation de la communauté mais aussi de représailles en cas de non paiement --un témoin a rapporté qu'on avait menacé de lui "casser les jambes".

Pour la "zone sud-est" de la France, le montant annuel collecté a été estimé à deux millions d'euros.

Les enquêteurs se sont aussi intéressés aux techniques de "recrutement" de jeunes Kurdes, parfois "brutalement extraits de leur famille", dans des conditions "proches de l'enlèvement et de la séquestration".

Ces recruteurs "quadrillent" le territoire français pour tenter de convaincre de jeunes Kurdes de rejoindre d'abord un camp de "formation idéologique" en Europe. Ceux qui persévèrent sont ensuite envoyés dans des camps d'entraînement, militaires cette fois, souvent en Irak, avant d'être intégrés aux "forces combattantes révolutionnaires kurdes".

Peuple sans Etat (25 à 35 millions de personnes éparpillées entre Irak, Iran, Syrie et Turquie), les Kurdes ont été endeuillés en France fin décembre par l'assassinat de trois des leurs près d'un centre culturel à Paris.

Ce crime, "raciste" selon les premiers éléments d'enquête, a ravivé le souvenir du triple assassinat de militantes du PKK dix ans plus tôt, qui reste entouré de mystère.

Après la fusillade de décembre, les représentants de la gauche française ont appelé dans une tribune à "accorder aux Kurdes la protection qu'ils méritent" et à "sortir le PKK de la liste des organisations terroristes", en dénonçant leur "persécution" par le régime turc.

La défense des prévenus compte contester la qualification "terroriste" des faits reprochés à leurs clients.

"Tout le débat est de savoir si le PKK est une organisation terroriste et on va se battre là-dessus", confirme Me Martin Méchin.

Son client, remis en liberté il y a peu après deux ans de détention provisoire, est considéré par les enquêteurs comme le "chef" de la "zone sud-est".

Le procès est prévu jusqu'au 14 avril.


Paris salue la conférence de New York et poursuit l’initiative avec Riyad

Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
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  • Paris et Riyad poussent pour une reconnaissance collective de l’État palestinien
  • La France appelle à un cessez-le-feu, la levée du blocus et le désarmement du Hamas

PARIS: Sur fond de crise humanitaire d’une cruauté inqualifiable dans la bande de Gaza, le président Emmanuel Macron a annoncé une opération de largage de vivres conduite par la France, avec le soutien de la Jordanie, des Émirats arabes unis et de l’Allemagne.

« Face à l’urgence absolue, nous venons de conduire une opération de largage de vivres à Gaza », a déclaré le chef de l’État sur X, en remerciant les partenaires impliqués et saluant l’engagement des forces armées françaises.

Mais, de son point de vue, ces largages restent insuffisants : « Il faut qu’Israël ouvre un plein accès humanitaire », a-t-il insisté, réitérant l’exigence française d’une levée immédiate du blocus des aides.

Au-delà de la réponse d’urgence, Paris entend porter une initiative diplomatique structurante : la conférence internationale co-présidée à New York par la France et l’Arabie saoudite a marqué un tournant en posant un cadre politique ambitieux.

Cette conférence, tenue en l’absence des États-Unis et d’Israël, a réuni plus de 40 ministres et 120 participants, aboutissant à l’adoption d’un plan d’action en 42 points.

Malgré les réticences et le scepticisme ambiants, elle a permis l’émergence d’une dynamique inédite vers la reconnaissance de l’État palestinien et un processus de paix régional.

Le plan d’action validé à New York constitue désormais un socle politique partagé entre acteurs européens, puissances arabes, Union européenne et Ligue arabe.

Ce texte appelle à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, à la libération de tous les otages, à l’acheminement massif de l’aide humanitaire, mais surtout à la mise en œuvre concrète de la solution à deux États.

Il prévoit notamment un processus progressif de désarmement du Hamas, condition indispensable à la stabilisation durable de la région.

Pour la France, ce texte marque une rupture avec l’impasse diplomatique des dernières décennies et propose pour la première fois un mécanisme concerté de démilitarisation et de réintégration de Gaza dans le giron de l’Autorité palestinienne.

Le document évoque même la possibilité de confier les armes du Hamas à une tierce partie sous supervision internationale, afin de garantir qu’elles ne soient plus utilisées.

Ce volet, essentiel pour Israël, est aussi le fruit d’un consensus entre les États arabes partenaires, y compris ceux perçus comme proches du Hamas.

Sur le front politique, Paris se réjouit de l’effet de levier de la conférence : peu après, plusieurs pays — Portugal, Royaume‑Uni, Canada — ont annoncé leur volonté de reconnaître l’État palestinien, à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies en septembre.

Une coalition de volontaires est en train de se constituer : quinze États, aux côtés de la Ligue arabe et de l’Union européenne, ont d’ores et déjà signé une déclaration commune en ce sens.

La France espère ensuite entraîner d’autres partenaires européens, notamment l’Allemagne. « Nous continuons à travailler en E3 avec nos partenaires allemands et britanniques », indique une source haut placée.

Si Berlin reste prudent, des signes d’évolution apparaissent dans les récentes déclarations de sa ministre des Affaires étrangères. Paris entend maintenir ces échanges diplomatiques jusqu’à septembre.

Contrairement aux critiques israéliennes et américaines, la France affirme que cette dynamique de reconnaissance ne constitue pas un obstacle à la paix, mais un levier pour la relancer.

Le président Macron estime que cette reconnaissance, inscrite dans un cadre politique exigeant — avec une gouvernance palestinienne réformée et un désarmement du Hamas — peut rebâtir les conditions d’une solution durable.

Les ruptures des négociations avec le Hamas sont antérieures aux annonces de Paris, souligne-t-on à l’Élysée, et ne peuvent donc pas lui être imputées.

La reconnaissance collective envisagée en septembre serait également un signal fort en direction des modérés palestiniens, en particulier l’Autorité palestinienne, qui s’est engagée début juin à respecter une série d’exigences posées par la communauté internationale en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption.

Un des apports majeurs de la conférence de New York est l’introduction formelle de la question du désarmement du Hamas dans un cadre diplomatique multilatéral.

Jusqu’ici marginalisée ou qualifiée d’irréaliste, cette exigence est clairement codifiée dans le plan d’action. Des discussions sont en cours, y compris sur l’exil éventuel de certains cadres du mouvement auprès d’États tiers.

Le Hamas n’a pas accepté ces conditions, mais le message politique est clair : son isolement au sein du monde arabe s’accentue et sa marge de manœuvre se rétrécit.

Face à cette dynamique, Israël et l’administration américaine ont haussé le ton, estimant qu’une reconnaissance unilatérale de la Palestine constituerait une « insulte » aux victimes israéliennes du 7 octobre.

Le président américain Donald Trump a même imposé des sanctions ciblées contre certains membres de l’Autorité palestinienne et de l’OLP, en contradiction avec les efforts en cours pour renforcer cette autorité.

La position américaine révèle un décalage croissant avec une partie de la communauté internationale, y compris des alliés traditionnels, en raison de son soutien inconditionnel à Israël, malgré l’ampleur des pertes civiles à Gaza et la persistance de la colonisation en Cisjordanie.

Cet état de fait suscite déjà des interrogations en Europe, où des pays comme la Suède exigent, par exemple, le gel de la partie commerciale de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël.

La France, de son côté, entend poursuivre cette dynamique au-delà de la conférence de New York. Un sommet est prévu les 21 et 22 septembre, juste avant l’Assemblée générale de l’ONU, pour réunir les États prêts à reconnaître collectivement la Palestine et à faire vivre ce nouveau cadre politique.

« Il s’agit d’une coalition inédite, qui repose sur un équilibre entre exigences sécuritaires et reconnaissance des droits politiques du peuple palestinien », souligne-t-on à Paris.

En réaffirmant l’exigence d’un cessez-le-feu immédiat, la levée du blocus humanitaire, la libération des otages, mais aussi le désarmement du Hamas et la mise en place d’un État palestinien souverain, la France, de concert avec l’Arabie saoudite, tente de reconstruire une architecture de paix.


La défiance à l'égard de Macron et de Bayrou au plus haut, selon un sondage Paris, France

Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
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  • La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat
  • Le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi

PARIS: La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat, tandis que le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi.

Près des trois quarts des Français interrogés (73%) affirment ne pas faire confiance au chef de l'Etat et la moitié (49%) va jusqu'à "ne pas lui faire du tout confiance", le niveau le plus élevé atteint de son second mandat, qu'il n'a dépassé qu'une seule fois depuis son arrivée à l'Elysée en 2017 au plus fort de la crise des gilets jaunes en décembre 2018.

Selon le sondage, seuls 21% des Français font confiance à Emmanuel Macron, soit un point de moins qu'en juin et 6 de perdus par rapport à mars.

Pour François Bayrou, qui a présenté à la mi-juillet les mesures d'économie prévues par le gouvernement dans son projet de budget pour l'année prochaine, la chute se poursuit avec seulement 12% des Français qui disent lui faire confiance, soit un nouveau record d'impopularité (-2 points).

La défiance à l'égard du chef du gouvernement a progressé, avec 80% des Français (+5 points en un mois) qui disent ne pas lui faire confiance et 56% qui affirment ne pas lui faire "du tout" confiance, soit un bond de 9 points depuis juin.

Au classement des personnalités, le RN Jordan Bardella conserve la première place avec 39% des Français (+3 points) qui ont une image positive de lui, devant l'ancien Premier ministre Edouard Philippe (37%) et Marine Le Pen (35%).

A gauche, le mieux classé est l'ancien président François Hollande qui s'installe en huitième position grâce à un bond de 6 points en un mois.

Sondage réalisé par internet les 29 et 30 juillet auprès d'un échantillon de 1.000 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. Marge d'erreur entre 1,4 et 3,1 points.


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.