IA et musique, chant des possibles et régulation à accorder

Sur cette photo prise le 21 juillet 2019, le DJ français David Guetta se produit lors du festival de musique des Vieilles Charrues à Carhaix-Plouger, dans l'ouest de la France. (Photo, AFP)
Sur cette photo prise le 21 juillet 2019, le DJ français David Guetta se produit lors du festival de musique des Vieilles Charrues à Carhaix-Plouger, dans l'ouest de la France. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 07 avril 2023

IA et musique, chant des possibles et régulation à accorder

  • Où sont les frontières à ne pas franchir ? David Guetta a utilisé l'IA pour une voix à la façon du rappeur Eminem pour un de ses shows
  • «On ne devrait pas pouvoir prendre votre nom, votre image et votre apparence sans votre permission», déplore Young Guru

PARIS: La musicienne DeLaurentis utilise un choeur d'intelligence artificielle calqué sur sa voix et les rappeurs d'AllttA provoquent le débat avec un avatar vocal de Jay-Z: l'IA en musique oscille entre moteur de création et questions de régulation.

"Impossible de remettre le génie dans sa lampe quand il en est sorti", a posté sur Instagram, Young Guru, collaborateur de Jay-Z, au sujet de l'IA.

"L'IA est partout, depuis quelques années, même si on commence seulement à ranger ça sous un vocable unique", constate pour l'AFP Alexandre Lasch, du Syndicat national de l'édition phonographique en France (Snep).

Il ne faut pas forcément en avoir peur. "C'est le sens des choses, les technologies ont apporté beaucoup à notre industrie musicale, cette évolution va augmenter le champ des possibles", pose pour l'AFP Clarisse Arnou, de l'Union des producteurs phonographiques français indépendants (Upfi), avant de prévenir qu'il faut "encadrer".

DeLaurentis, artiste électro française, a plongé en autodidacte dans l'IA. Cette fan du film "Blade Runner" - dont les protagonistes sont des "réplicants", doubles artificiels d'humains - travaille pour son prochain album ("Classical Variations Vol.2", le 9 juin) et la scène avec un "choeur virtuel", développé avec l'aide d'un département technologie chez Sony et de l'Ircam à Paris (Institut de recherche et coordination acoustique/musique).

« Surprends-moi »

Son choeur version IA part de sa voix, "multipliée jusqu'à 21 voix", expose l'artiste à l'AFP. "Ce choeur a un comportement intelligent, avec un timbre et une respiration qui se mettent à ma hauteur". "Je peux lui dire: 'tu m'accompagnes en do mineur' ou bien 'surprends-moi', comme un jazzman qui interagit avec les autres musiciens".

Ici, tout part de DeLaurentis, créatrice et maîtresse d’oeuvre. On est dans le cas où l'IA "peut-être considérée comme un outil d'inspiration", décrit à l'AFP Emily Gonneau, auteure de "L'Artiste, le Numérique et la Musique".

Où sont les frontières à ne pas franchir ? David Guetta a utilisé l'IA pour une voix à la façon du rappeur Eminem pour un de ses shows. Le DJ star n'a pas commercialisé ce titre, expliquant à la BBC vouloir "ouvrir la discussion pour une prise de conscience".

Pour "amener une autre pierre au débat", comme le dit à l'AFP leur manager français Yann Nédélec, le groupe franco-américain AllttA vient de dévoiler sur ses réseaux un titre avec un vrai-faux Jay-Z. Aidé par une IA qui simule jusqu'aux gimmicks vocaux du rappeur américain.

"On n'a évidemment pas mis ce titre en distribution commerciale, on veut montrer qu'on est bien dans une zone grise et qu'il y a besoin de réguler", poursuit Yann Nédélec. Ce morceau ne figurera pas sur le nouvel album d'AllttA ("Curio", le 12 mai).

« Ça pose problème »

"On ne devrait pas pouvoir prendre votre nom, votre image et votre apparence sans votre permission", déplore Young Guru. Sont ici soulevées les "questions de l'autorisation, du consentement et, en cas d'exploitation commerciale, la notion de personnalité (droit à l'image, voix)", synthétise Emily Gonneau.

"Pour la contrefaçon, il y a des actions légales types, mais le parasitisme (profiter du travail ou de la notoriété d'autrui pour s'enrichir) et le droit de la personnalité sont plus compliqués à faire valoir" pointe Alexandre Lasch.

"Dès lors qu'on copie une voix, une mélodie, qu'on la ralentit, l'accélère, ça pose problème, l'ayant droit est rarement consulté, ni rémunéré pour sa création originale. Il y a fort à faire pour encadrer", insiste Clarisse Arnou. L'Upfi est associée à une initiative internationale en ce sens (www.HumanArtistryCampaign.com).

"La technologie va beaucoup plus vite que le droit", constate Alexandre Lasch. Avec 100 000 nouveaux morceaux par jour sur les plateformes, il n'y pas assez de radars, ni de gendarmes. "Je ne suis pas si pessimiste, il va y avoir un rattrapage juridique. Mais est-ce que, d'ici là, l'écosystème et la manière de faire de la musique n'auront pas déjà changé ?", conclut Emily Gonneau.


AlUla inaugure la Villa Hegra, un nouveau pont culturel entre la France et l’Arabie saoudite

L’Agence française pour le développement d’AlUla (AFALULA) a salué l’inauguration de la Villa Hegra, un nouvel espace culturel majeur destiné à devenir un carrefour de création et de dialogue franco-saoudien. (AFALULA)
L’Agence française pour le développement d’AlUla (AFALULA) a salué l’inauguration de la Villa Hegra, un nouvel espace culturel majeur destiné à devenir un carrefour de création et de dialogue franco-saoudien. (AFALULA)
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  • La cérémonie officielle s’est tenue le 2 octobre 2025 à AlUla, en présence de Son Altesse le Prince Badr ben Farhane Al Saud, ministre de la Culture, gouverneur de la Commission royale pour AlUla (RCU) et président de la Fondation Villa Hegra
  • Première institution bilatérale consacrée à la coopération culturelle et à la création contemporaine, la Villa Hegra propose des espaces dédiés aux arts visuels, au design, aux arts performatifs, au cinéma et à la recherche

ALULA: L’Agence française pour le développement d’AlUla (AFALULA) a salué l’inauguration de la Villa Hegra, un nouvel espace culturel majeur destiné à devenir un carrefour de création et de dialogue franco-saoudien.

La cérémonie officielle s’est tenue le 2 octobre 2025 à AlUla, en présence de Son Altesse le Prince Badr ben Farhane Al Saud, ministre de la Culture, gouverneur de la Commission royale pour AlUla (RCU) et président de la Fondation Villa Hegra, aux côtés de Jean-Yves Le Drian, président de l’AFALULA.

Première institution bilatérale consacrée à la coopération culturelle et à la création contemporaine, la Villa Hegra propose des espaces dédiés aux arts visuels, au design, aux arts performatifs, au cinéma et à la recherche.

Inscrite dans le cadre de la Vision 2030, l’initiative a pour objectif de renforcer la position d’AlUla comme destination culturelle de premier plan, tout en favorisant la formation et l’émergence de talents saoudiens et internationaux.

« La Villa Hegra incarne une étape décisive dans le rapprochement entre nos deux nations, en offrant un lieu unique de partage artistique et intellectuel », a déclaré Jean-Yves Le Drian lors de l’événement.

Ce projet illustre la volonté commune de la France et de l’Arabie saoudite de développer des partenariats durables dans le domaine culturel et académique, consolidant ainsi des liens historiques et stratégiques entre les deux pays.


«Tout le pays est derrière nous» : Hervé Renard et l'Arabie saoudite unis dans la conviction de la Coupe du Monde

Le sélectionneur de l'équipe nationale, Hervé Renard, se concentre sur la tâche immédiate qui consiste à assurer à nouveau la place de l'Arabie saoudite sur la scène internationale. (Abdulrahman Fahad Bin shulhub/AN)
Le sélectionneur de l'équipe nationale, Hervé Renard, se concentre sur la tâche immédiate qui consiste à assurer à nouveau la place de l'Arabie saoudite sur la scène internationale. (Abdulrahman Fahad Bin shulhub/AN)
L'entraîneur en chef de l'équipe nationale, Hervé Renard, se concentre sur la tâche immédiate d'assurer la place de l'Arabie saoudite sur la scène internationale. (Abdulrahman Fahad Bin shulhub/AN)
L'entraîneur en chef de l'équipe nationale, Hervé Renard, se concentre sur la tâche immédiate d'assurer la place de l'Arabie saoudite sur la scène internationale. (Abdulrahman Fahad Bin shulhub/AN)
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  • Le sélectionneur français a parlé à Arab News des qualifications asiatiques à venir, de la fameuse victoire sur l'Argentine lors de la Coupe du monde 2022 et de sa participation à la nouvelle campagne "You Got This" (Vous l'avez).
  • "Le championnat se renforce", explique Renard. "C'est une bonne chose pour certains joueurs saoudiens. Maintenant, ils doivent être plus compétitifs. Ils jouent avec de très grands joueurs. Cela leur apportera de l'expérience.


RIYADH : La vidéo de la nouvelle campagne "You Got This", qui met en scène le sélectionneur de l'équipe nationale saoudienne, Hervé Renard, commence par une silhouette solitaire qui court - d'abord seule, puis progressivement rejointe par d'autres, jusqu'à ce que la foule elle-même porte le Français vers l'avant.

Il s'agit non seulement d'une métaphore de la philosophie de Renard, mais aussi d'un reflet fidèle de ses méthodes d'entraînement et de l'unité qui, selon lui, est la clé du rêve de l'Arabie saoudite de participer à nouveau à la Coupe du monde. En octobre, son équipe affrontera l'Indonésie et l'Irak lors du quatrième tour des éliminatoires de l'AFC, terminera en tête du groupe B composé de trois équipes et se rendra à la compétition organisée conjointement par les États-Unis, le Canada et le Mexique l'été prochain.

"C'est un très bon soutien", a déclaré Renard à Arab News lors du lancement de la campagne Adidas. "Je pense que le pays tout entier sera derrière nous. Nous savons ce qu'ils attendent de nous, mais nous attendons aussi d'eux qu'ils nous soutiennent. Du premier au dernier coup de feu. Et ensemble, nous devons le faire".

C'est un appel puissant aux armes et aux cœurs. Pour Renard, la course à pied est plus qu'un simple exercice physique ; c'est son espace de réflexion, sa salle de stratégie et son sanctuaire.

"Si je ne cours pas, c'est que je ne me sens pas à l'aise", dit-il, expliquant que ses courses solitaires sont des moments de préparation mentale. "Je n'utilise jamais de musique lorsque je cours. Je pense toujours à ce que je dois dire, à ce que je n'ai peut-être pas bien fait avant, à ce que je dois améliorer ou à ce que je vais dire aux joueurs. Il faut toujours anticiper ce qui va se passer.


Aisha Fareed, journaliste à Arab News, avec Hervé Renard lors d'une interview exclusive. (AN Photo / Abdulrahman bin Shalhoub)
Hervé Renard débat constamment avec lui-même, répétant mentalement chaque discussion d'équipe, chaque changement tactique, chaque résultat.

"En tant qu'entraîneur, nous aimons aussi la pression", a-t-il déclaré, reconnaissant le poids des attentes. "Il y a de l'adrénaline, vous savez ? La compétition. S'il n'y a pas de pression dans le football, ce n'est pas pareil.

Mais il y a une chose qui maintient sa boussole stable : la positivité.

"A la fin, nous pensons toujours que nous serons heureux, c'est le plus important.

Si Renard, dans cette campagne, est le coureur solitaire au départ, le public saoudien est le tonnerre qui gronde derrière lui. L'énergie des supporters lors des matches à domicile a souvent transformé ses joueurs.

"C'est fantastique. Surtout lorsque nous jouons à Jeddah", a déclaré Renard. "L'atmosphère peut être incroyable. Mais je dis toujours aux joueurs que les supporters nous suivront si nous leur montrons que nous sommes déterminés et motivés. Les premières actions viennent de nous.

Il s'agit d'une relation à double sens, fondée sur la conviction. L'équipe se nourrit de la passion des supporters et, en retour, les supporters puisent leur force dans le combat de leurs joueurs. Il n'est pas surprenant que le souvenir de cette fameuse victoire 2-1 sur l'Argentine lors de la Coupe du monde 2022 résonne encore dans chaque chant.

"On se souviendra toujours de ce match", ajoute Renard, dont la voix se perd dans la nostalgie. "Mais l'objectif est d'essayer de faire la même chose dans un avenir proche.

Alors que la Coupe du Monde de la FIFA 2026 se profile à l'horizon et que les qualifications touchent à leur fin, Renard se concentre sur la tâche immédiate qui consiste à assurer à nouveau la place de l'Arabie saoudite sur la scène internationale. Les récents matches amicaux contre la Macédoine du Nord et la Tchécoslovaquie ont, selon le sélectionneur, été déterminants pour son équipe, tant sur le terrain qu'en dehors.

"L'état d'esprit était fantastique", souligne Renard. "Nous avons changé cinq joueurs pour chaque match, mais l'esprit était le même - la façon dont nous avons commencé, la façon dont nous avons terminé. Nous n'avons pas considéré ces matches comme des amicaux. Nous pensions déjà au mois d'octobre.

L'évolution ne concerne pas seulement l'équipe senior. L'Arabie saoudite étant sur le point d'accueillir la Coupe du monde 2034, le développement des jeunes talents devient plus crucial que jamais.

"Le championnat se renforce", explique Renard. "C'est une bonne chose pour certains joueurs saoudiens. Maintenant, ils doivent être plus compétitifs. Ils jouent avec de très grands joueurs. Cela leur apportera de l'expérience.

"Je suis sûr qu'ils l'acquerront. Et ils seront plus forts pour l'avenir".

Le leadership de Renard n'est pas flamboyant. Il est réfléchi, implacable et discrètement imposant - comme un coureur de fond qui n'arrête jamais d'avancer. Dans ses paroles et son travail, il y a toujours un but à atteindre.

"Faisons-le ensemble", conclut-il, en revenant une fois de plus à cette image d'unité. "C'est un travail de collaboration.

Des moments calmes d'introspection lors d'une course solitaire au rugissement du stade de Jeddah, Renard dirige un sprint collectif vers un avenir qui comporte à la fois des défis et des promesses. Et comme le veut la tradition saoudienne, toute la nation court avec lui.


Sotheby’s présente une œuvre de Safeya Binzagr à Riyad

Café de Madina Road - Safeya Binzagr (Fourni)
Café de Madina Road - Safeya Binzagr (Fourni)
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  • Sotheby’s a présenté une œuvre emblématique de 1968, soulignant son rôle pionnier dans l’art moderne saoudien et la place des femmes artistes dans ce mouvement
  • Très peu d’œuvres de Binzagr sont en circulation, du fait de son engagement pour la préservation culturelle plutôt que la vente commerciale

RIYAD : À l’occasion de la toute première Conférence sur l’investissement culturel en Arabie saoudite, inaugurée à Riyad le 29 septembre, la maison de vente aux enchères Sotheby’s a présenté une acquisition rare et significative du monde arabe : une œuvre de la défunte Safeya Binzagr, figure majeure de la scène artistique moderne saoudienne.

« Coffee Shop in Madina Road », réalisée en 1968, date de la même année que la première exposition de Binzagr aux côtés de sa consœur et pionnière de l’art, Mounirah Mosly, à Djeddah.

« Cette exposition a marqué un moment précoce et visible pour les femmes artistes sur la scène artistique moderne du Royaume, influençant les attentes des générations suivantes », a déclaré Alexandra Roy, responsable des ventes Moyen-Orient moderne et contemporain chez Sotheby’s, à Arab News.

L’influence de Binzagr s’étend bien au-delà de son œuvre. Peut-être encore plus marquant : le centre culturel éponyme qu’elle a fondé à Djeddah et qui, selon Roy, « a consolidé son rôle dans la préservation et la transmission des récits culturels saoudiens au grand public ».

Ce centre a aussi contribué à faire émerger une nouvelle génération d’artistes saoudiennes. L’une de ses anciennes élèves, Daniah Alsaleh, a déclaré à Arab News, peu après le décès de Binzagr l’an dernier :
« Safeya était une véritable pionnière, dévouée à l’art et à l’éducation. Son héritage continuera d’inspirer. Je suis immensément reconnaissante de l’impact qu’elle a eu sur mon parcours artistique. »

Binzagr collectionnait également les costumes traditionnels, et vendait ou offrait rarement ses œuvres peintes uniques. Elle a même cessé toute vente au milieu des années 1970 — une décision qui privilégiait la préservation artistique et culturelle à la commercialisation, renforçant ainsi l’intérêt institutionnel et la valeur durable de son œuvre, a précisé Roy.

Cette position explique aussi pourquoi les œuvres de Binzagr apparaissent rarement sur le marché.

« Ce type de pièce est extrêmement rare — sa présence sur le marché constitue un véritable événement — et très peu se trouvent entre des mains privées », a souligné Roy. « Elle date de 1968, au tout début de sa carrière publique, dans une phase formatrice où son langage visuel et ses préoccupations culturelles commençaient à se définir. »

« Replacée dans le contexte de sa reconnaissance muséale ultérieure, cette œuvre témoigne d’une artiste dont la démarche est aujourd’hui conservée institutionnellement », poursuit-elle. « Ce premier exemple revêt donc un poids historique et documentaire important dans le récit de l’art moderne saoudien. »

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com