En Turquie, les déplacés du séisme inquiets de pouvoir voter

Erhan Demirbas, directeur du centre d'hébergement de la municipalité d'Ankara, explique que de nombreuses personnes déplacées suite au tremblement de terre qui a dévasté le 6 février 2023 dix provinces du sud-est de la Turquie, n'ont pas pu s'inscrire sur les listes électorales. (Photo par Adem ALTAN / AFP)
Erhan Demirbas, directeur du centre d'hébergement de la municipalité d'Ankara, explique que de nombreuses personnes déplacées suite au tremblement de terre qui a dévasté le 6 février 2023 dix provinces du sud-est de la Turquie, n'ont pas pu s'inscrire sur les listes électorales. (Photo par Adem ALTAN / AFP)
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Publié le Samedi 15 avril 2023

En Turquie, les déplacés du séisme inquiets de pouvoir voter

  • Mais malgré sa douleur, Ali, étudiant de 23 ans, s'est mobilisé pour garantir le droit de vote des plus de 3 millions de déplacés du sinistre lors des élections du 14 mai
  • Les déplacés du séisme, dont beaucoup ont fui vers la capitale Ankara, Istanbul ou Mersin sur la côte (sud), avaient jusqu'au 2 avril pour modifier leur adresse sur les listes électorales

ANKARA : Ali a tout perdu, le 6 février, lors du séisme qui a fait plus de 50.000 morts dans le sud-est de la Turquie: ses parents sont portés disparus et sa ville natale, Antakya, est un champ de ruines.

Mais malgré sa douleur, cet étudiant de 23 ans s'est mobilisé pour garantir le droit de vote des plus de 3 millions de déplacés du sinistre lors des élections du 14 mai.

Le scrutin s'annonce périlleux pour le président Recep Tayyip Erdogan, critiqué par de nombreux Turcs pour sa gestion de la catastrophe.

Dans certaines provinces, les secours ont mis des jours à arriver, générant un sentiment d'abandon parmi les survivants.

«Il est important de refléter cette colère dans les urnes», affirme Ali, qui vit désormais à Ankara et préfère donner un nom d'emprunt.

Avec des amis, il a lancé un appel sur Twitter pour demander aux partis politiques de prendre en charge les billets de bus des étudiants qui ont dû quitter Antakya après le séisme et veulent retourner y voter.

Le principal parti de l'opposition, le CHP (social-démocrate), s'y est dit favorable.

Les déplacés du séisme, dont beaucoup ont fui vers la capitale Ankara, Istanbul ou Mersin sur la côte (sud), avaient jusqu'au 2 avril pour modifier leur adresse sur les listes électorales.

Un délai jugé bien trop court et contesté par l'opposition.

«Les gens ont perdu leurs proches, tout ce qu'ils avaient de précieux. La plupart n'étaient pas en état de s'occuper des inscriptions électorales», relève Ali Oztunc, député CHP de Kahramanmaras, à proximité de l'épicentre.

- Mises en garde -

Seuls 50.000 des 820.000 électeurs que comptait Kahramanmaras avant le séisme ont pu effectuer leur changement d'adresse, alors que la moitié de la population a quitté la province, assure le député.

Pour pouvoir voter, ces électeurs devront revenir dans leur ville le jour des élections.

Mais «transporter autant d'électeurs relève de l'impossible», estime M. Oztunc. «Il faudrait des milliers de bus et cela provoquerait un embouteillage géant. Aucun parti ne peut organiser cela», note-t-il.

«Le pouvoir aurait pu prolonger les délais et faciliter les inscriptions. Mais il a peur de la réaction des victimes du séisme face à son incapacité à gérer cette crise. Alors il fait tout pour entraver le vote», accuse pour sa part Onursal Adiguzel, vice-président du CHP.

Déplacé originaire de Kahramanmaras, Abdullah dit avoir été découragé par des fonctionnaires de l'Etat civil de modifier son adresse sur les listes électorales.

«On m'a dit que je perdrai mes droits aux aides publiques destinées aux victimes du séisme. J'ai donc gardé mon adresse à Kahramanmaras, mais je ne sais pas si je pourrai m'y rendre pour voter», explique le père de famille installé désormais à Ankara, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille.

Ces mises en garde sans fondement ont effrayé et dissuadé de nombreux déplacés.

- «C'est mon avenir» -

Au centre d'hébergement Araplar en banlieue d'Ankara, qui accueille 525 familles déplacées du séisme, seules 120 d'entre elles ont effectué les démarches nécessaires.

«Malgré notre campagne d'information et notre aide pour faciliter les procédures, beaucoup ont hésité à transférer leur résidence», affirme Erhan Demirbas, directeur du centre géré par la municipalité CHP d'Ankara.

Eymen Gassaloglu, 34 ans, qui vit là avec ses deux filles, est déterminée à aller voter à Antakya, sa ville natale, quitte à dormir sous une tente.

«C'est de mon avenir qu'il s'agit. J'irai voter quoi qu'il arrive, par mes propres moyens», affirme-t-elle.

Pour de nombreux déplacés, voter dans leur province est aussi un moyen de surveiller d'éventuelles irrégularités au moment de l'émargement, les disparus du séisme non déclarés comme décédés figurant toujours sur les listes électorales.

«Les autorités ne communiquent pas le nombre de personnes disparues. Il y a une inquiétude à ce sujet», estime M. Adiguzel.

Ozgur Yusuf Kavukcu, 45 ans, a pu transférer sa résidence à Ankara, mais la plupart de ses connaissances d'Antakya vont voter dans leur ville où de nombreux services restent défaillants.

«Je ne pense pas que des élections libres puissent être organisées dans ces conditions», estime M. Kavukcu.

«Mais il n'y a pas d'autres choix. Nous avons déjà beaucoup perdu avec le séisme. Perdre aussi l'expression de notre libre arbitre serait une catastrophe».


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com