Sans passeport depuis la fermeture des ambassades, des Soudanais piégés dans la guerre

«Le droit international humanitaire garantit la liberté de mouvement» (Photo, AFP).
«Le droit international humanitaire garantit la liberté de mouvement» (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 03 mai 2023

Sans passeport depuis la fermeture des ambassades, des Soudanais piégés dans la guerre

  • Sans passeport, bloqués dans la guerre, de nombreux Soudanais disent adieu à leurs rêves
  • Pour Emma DiNapoli, avocate en droit international humanitaire, «des plaintes pourraient être déposées devant la Cour européenne des droits de l'Homme et les gouvernements pourraient être tenus responsables»

LE CAIRE: Depuis que les diplomates ont fui Khartoum, les portes des ambassades sont closes et de nombreux Soudanais se retrouvent piégés: leurs passeports déposés pour des visas sont inaccessibles et leurs administrations fermées par la guerre n'en délivrent pas de nouveaux.

La famille de Rami Badawi est prête à quitter le Soudan depuis des jours. Mais sans le passeport de leur fils aîné, traverser la frontière est impossible et "ils refusent de partir sans moi", raconte à l'AFP cet ingénieur de 29 ans, qui avait déposé son passeport à l'ambassade de France le 4 avril.

Il devait le récupérer le 17, estampillé d'un visa de travail, mais la guerre qui a éclaté le 15 avril entre les deux généraux rivaux, Abdel Fattah al-Burhane et Mohamed Hamdane Daglo, en a décidé autrement.

Avec les six autres membres de sa famille, il tente de survivre à Khartoum, sous les bombes, sans eau ni électricité.

"L'ambassade ne m'a jamais contacté, ni répondu aux deux e-mails que j'ai envoyés", dit-il.

Iqbal Belah, 65 ans, devait, elle, bénéficier d'un "regroupement familial" avec son mari et son fils malade en Allemagne.

Aujourd'hui, "avec l'ambassade fermée et sans passeport", elle ne sait pas si elle pourra les rejoindre.

«Aucune annonce, aucun appel»

Dans l'immédiat, elle veut sortir de son quartier "à quelques mètres des combats".

"Ma petite-fille de sept ans tremble à chaque bombardement. Avec son père, on la tient fort contre nous pour la rassurer mais rien n'y fait", raconte-t-elle.

Comme les cinq millions d'habitants de Khartoum, Ramah Essam, 30 ans, vit terré chez lui, avec sa famille, en espérant éviter les balles perdues qui peuvent traverser murs et fenêtres à tout moment.

Ce gastro-entérologue devait "se rendre à Johannesburg pour une formation", avant que l'ambassade d'Afrique du Sud ne ferme.

"Les premiers jours, on était sous le choc. Les communications étaient coupées, on n'avait plus d'eau ni d'électricité et quand c'est partiellement revenu le 18 avril, j'ai essayé de contacter l'ambassade d'Afrique du Sud", dit-il.

Mais alors qu'il voyait à la télévision les premières évacuations d'étrangers, il a rapidement compris que ses appels resteraient sans réponse.

"Il n'y a eu aucune annonce, aucun appel", s'emporte-t-il. "Toutes les ambassades ont des employés locaux, pourquoi ne leur ont-elles pas remis nos passeports pour qu'ils nous les redonnent plus tard?".

Interpellé sur Twitter par des Soudanais piégés comme le docteur Essam, le ministère néerlandais des Affaires étrangères répond "regretter profondément la situation".

"Nous avons été obligés de fermer l'ambassade", poursuit-il, "malheureusement, cela signifie que nous n'avons pas accès à votre passeport. Nous vous conseillons d'en demander un nouveau passeport aux autorités locales".

«Vie en danger»

Mais renouveler son passeport est aujourd'hui doublement impossible. "Si on sort, on met notre vie en danger", affirme M. Badawi. Et même en se présentant à une administration, probablement en partie détruite par les combats, aucun fonctionnaire n'y travaille plus sur ordre de l'Etat.

Pour Emma DiNapoli, avocate en droit international humanitaire, "des plaintes pourraient être déposées devant la Cour européenne des droits de l'Homme et les gouvernements pourraient être tenus responsables".

Car "le droit international humanitaire garantit la liberté de mouvement", explique-t-elle à l'AFP.

Sans passeport, bloqués dans la guerre, de nombreux Soudanais disent adieu à leurs rêves.

"Je suis le seul du Soudan et l'un des deux seuls d'Afrique à avoir réussi les examens pour être formé en France au maniement d'un tracteur dernier cri... J'imagine que cela ne se fera jamais", affirme, amer, M. Badawi.

"Ce qui est frappant, c'est que les gouvernements impliqués n'ont pour le moment pris aucune mesure", relève de son côté Mme DiNapoli.

Il y a bien une exception: l'ambassade de Chine qui a choisi de remettre les passeports à leurs propriétaires via ses employés locaux.

Sur Twitter, elle a communiqué deux numéros. Quand l'AFP a appelé, un employé l'a invitée à se présenter à la chancellerie. Mais pour s'y rendre, il faut être prêt à affronter le feu des avions de l'armée de l'air et des mitrailleuses des paramilitaires.


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.


Gaza 2025: 15 journalistes tués, selon le Syndicat des journalistes palestiniens

 Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
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  • Le dernier rapport du syndicat fait état d'une augmentation des arrestations, des menaces et du harcèlement des journalistes par les Israéliens
  • Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes

LONDRES: Au moins 15 professionnels des médias ont été tués à Gaza depuis le début de l'année 2025, selon un nouveau rapport publié par le Syndicat des journalistes palestiniens.

Le rapport, publié ce week-end par le comité des libertés du syndicat chargé de surveiller les violations commises par Israël à l’encontre des journalistes, souligne la persistance du ciblage direct des professionnels des médias.

Sept journalistes ont été tués en janvier et huit en mars, selon le rapport.

Par ailleurs, les familles de 17 journalistes ont été endeuillées, tandis que les habitations de 12 autres ont été détruites par des tirs de roquettes et d’obus. De plus, 11 personnes ont été blessées au cours de ces attaques.

Le rapport note que la violence à l'encontre des équipes de journalistes ne se limite pas aux attaques mortelles. Il fait état de l'arrestation de 15 journalistes, à leur domicile ou alors qu'ils étaient en mission. Certains ont été libérés quelques heures ou quelques jours plus tard, tandis que d'autres sont toujours en détention.

Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes, dont beaucoup ont été avertis d'évacuer les zones qu'ils couvraient.

Le rapport relève également une intensification du harcèlement judiciaire, avec plus d’une dizaine de cas où des journalistes – en majorité issus du quotidien Al-Quds, basé en Cisjordanie – ont été convoqués pour interrogatoire et se sont vu interdire de couvrir des événements aux abords de la mosquée Al-Aqsa et dans la vieille ville de Jérusalem.

En Cisjordanie occupée, environ 117 journalistes ont été victimes d'agressions physiques, de répression ou d'interdictions de reportage, en particulier à Jénine et à Jérusalem. La commission a également recensé 16 cas de confiscation ou de destruction de matériel de travail.

Les violences à l'encontre des journalistes surviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. Les forces israéliennes ont intensifié leur offensive, coupant les approvisionnements vitaux des 2,3 millions d'habitants de Gaza, laissant l'enclave au bord de la famine.

Les actions d'Israël font désormais l'objet d'audiences à la Cour internationale de justice de La Haye, où Tel-Aviv est accusé de violer le droit international en restreignant l'aide humanitaire à Gaza.

Le bilan humanitaire est catastrophique.

Selon le ministère de la santé de Gaza, plus de 61 700 personnes ont été tuées à Gaza depuis qu'Israël a lancé son offensive le 7 octobre 2023. Plus de 14 000 autres sont portées disparues et présumées mortes, les civils constituant la grande majorité des victimes.

Le Comité pour la protection des journalistes, organisme de surveillance de la liberté de la presse basé à Washington, a également lancé un signal d’alarme face au nombre élevé de journalistes tués, indiquant qu’au moins 176 d’entre eux – en grande majorité des Palestiniens – ont perdu la vie depuis le début de l’offensive israélienne sur les territoires occupés.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com