Frankly Speaking: Les États-Unis sont-ils toujours importants pour l'Arabie saoudite?

Le porte-parole de l'ambassade saoudienne, Fahad Nazer à Washington (Photo, Fournie).
Le porte-parole de l'ambassade saoudienne, Fahad Nazer à Washington (Photo, Fournie).
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Publié le Lundi 12 juin 2023

Frankly Speaking: Les États-Unis sont-ils toujours importants pour l'Arabie saoudite?

  • Le porte-parole de l'ambassade saoudienne, Fahad Nazer, affirme que les relations sont «solides depuis de nombreuses années» et que, contrairement aux idées reçues, elles «continuent de se renforcer, de s'élargir et de se développer à plusieurs niveaux»
  • Il répond à des questions relatives à la visite de Blinken, à l'accord avec l'Iran négocié par la Chine et à la manière dont Riyad trouve un équilibre entre ses liens historiques avec les États-Unis et ses nouveaux partenariats

DUBAÏ: La politique régionale du Moyen-Orient est en constante évolution, comme en témoigne la négociation par la Chine d'un accord de paix entre l'Arabie saoudite et l'Iran, deux rivaux de longue date, en mars dernier. Alors que cet accord confère à la Chine le statut de «faiseur de paix» et que la Chine et l'Inde figurent en tête de liste des pays importateurs de pétrole saoudien, les États-Unis restent-ils un partenaire important pour le Royaume?

Fahad Nazer, principal porte-parole de l'ambassade saoudienne à Washington, affirme que malgré les doutes, les liens entre les deux pays sont plus forts que jamais.

«Cette relation a non seulement perduré, mais elle a continué à s'élargir et à se renforcer au fil des ans», a déclaré M. Nazer à Katie Jensen, animatrice de Frankly Speaking, l'émission-débat d'Arab News qui propose des entretiens avec d'importantes personnalités politiques.

M. Nazer a ajouté que la visite du secrétaire d'État américain Antony Blinken en Arabie saoudite «a vraiment renforcé les piliers de la relation. Si elle a changé, c'est pour le mieux, en ce sens qu'elle est devenue plus large, plus étroite et plus forte».

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Katie Jensen, animatrice de Frankly Speaking, lors d'un entretien avec Fahad Nazer, porte-parole de l'ambassade saoudienne à Washington (Photo fournie).

«Tout comme la visite du président Biden en juillet dernier, ces visites ont renforcé les piliers que sont la coopération politique, la coopération en matière de sécurité, la coopération militaire et le commerce. Elles ont également redéfini les bases d'une relation plus étendue qui prévoit la coopération sur de nouveaux fronts, notamment la cybersécurité, la lutte contre le changement climatique, la sécurité alimentaire et même l'exploration de l'espace», a-t-il affirmé.

Certains analystes ont décrit les deux dernières années des relations entre l'Arabie saoudite et les États-Unis comme étant parmi les pires de l'histoire contemporaine, principalement en raison des mesures prises dans les premiers jours de l'administration Biden. Toutefois, M. Nazer conteste l'idée répandue selon laquelle l'animosité mène à la réconciliation.

«Je pense que les relations sont solides depuis de nombreuses années, même si l'on se réfère aux deux dernières années, nos relations, notre coopération et notre coordination sur plusieurs fronts se sont poursuivies», a déclaré M. Nazer, faisant référence aux exercices militaires conjoints que les États-Unis et le Royaume organisent régulièrement, aux milliers de Saoudiens qui poursuivent des études supérieures aux États-Unis et aux milliers d'Américains qui vivent dans le Royaume.

«Je pense qu'il est important de noter que dans toute relation, il y a forcément des divergences d'opinion sur certaines politiques. Toutefois, cela n'enlève rien au fait qu'en ce qui concerne l'Arabie saoudite et les États-Unis, en particulier, nous avons davantage de convergences dans nos politiques que de divergences», a-t-il ajouté.

Au-delà des échanges militaires et universitaires, les relations commerciales entre l'Arabie saoudite et les États-Unis sont au cœur des relations entre les deux pays, explique M. Nazer, qui précise que les 40 milliards de dollars d'échanges commerciaux bilatéraux annuels soutiennent 165 000 emplois américains.

En mars, deux des principaux transporteurs saoudiens, la nouvelle compagnie Riyadh Air et Saudia, ont signé des accords d'une valeur de 37 milliards de dollars (1 dollar américain = 0,93 euro) pour l'achat de 121 Boeing Dreamliner pour leurs flottes.

«Cet accord était important. Je pense qu'il était important pour les deux pays. L'un des nombreux objectifs de l'Arabie saoudite dans le cadre de Vision 2030 est de transformer le Royaume en un pôle logistique mondial, mais aussi en une destination touristique mondiale. Nous pensons que nous avons beaucoup à offrir aux touristes et certainement aux entreprises du monde entier», a affirmé M. Nazer. Il a ajouté qu'en plus de rendre le Royaume plus accessible aux touristes étrangers, l'accord permettra de créer environ 110 000 emplois aux États-Unis.

Selon M. Nazer, la transformation rapide du Royaume au cours des dernières années a convaincu même les détracteurs les plus farouches de réévaluer les relations entre l'Arabie saoudite et les États-Unis. Le sénateur américain Lindsey Graham est revenu sur nombre de ses critiques antérieures à l'égard du Royaume, se rendant en Arabie saoudite en avril pour féliciter le gouvernement de l'accord conclu avec Boeing.

«Les personnes qui visitent l'Arabie saoudite, même il y a sept ou cinq ans, et qui reviennent aujourd'hui, ne peuvent que constater les changements spectaculaires qui ont eu lieu dans le Royaume. Vous le remarquez dès votre arrivée à l'aéroport de Riyad ou de Djeddah», a déclaré M. Nazer, ajoutant que les administrations républicaines et démocrates des États-Unis ont toutes deux maintenu des liens solides avec le Royaume.

«Qu'il s'agisse du sénateur Graham ou d'autres, j'ai eu le plaisir d'accompagner un certain nombre de délégations américaines au cours des deux dernières années. Et là encore, j'entends les mêmes commentaires de la part des chefs d'entreprise, des dirigeants de la société civile et des responsables de groupes de réflexion. Les gens sont stupéfaits de voir à quel point le pays a changé, à quel point il a l'air différent. Il semble différent. Il s'est certainement ouvert. Je ne suis pas surpris de voir les gens revenir impressionnés par ces visites.»

Bien que M. Nazer ait insisté sur la solidité et le renforcement des relations bilatérales, le récent accord de paix entre l'Arabie saoudite et l'Iran, conclu sous l'égide de la Chine, a été qualifié par certains critiques de «gifle aux États-Unis». La Maison Blanche a par la suite déclaré avoir effectivement été informée de l'accord. M. Nazer a ajouté que l'Arabie saoudite mène «des conversations continues avec nos partenaires américains sur plusieurs fronts».

«En ce qui concerne l'Iran en particulier, nous avons toujours dit, et ce depuis plusieurs années, que l'Iran est évidemment notre voisin. Il a un grand potentiel. Sa population est majoritairement jeune. Son histoire et sa culture sont remarquables. Au cours des deux dernières années, nous avons mené des pourparlers dans différents lieux. Ces discussions ont abouti à l'accord annoncé à Pékin en mars, où nous avons révélé le rétablissement des relations diplomatiques et l'ouverture de nos ambassades», a-t-il déclaré.

Selon M. Nazer, cela ne signifie pas la fin de tous les problèmes entre l'Iran et l'Arabie saoudite, en particulier en ce qui concerne les préoccupations du Royaume à l'égard du programme nucléaire iranien. Il a toutefois ajouté que la stabilité potentielle apportée par l'accord de paix entre l'Arabie saoudite et l'Iran aurait des effets positifs à la fois en Arabie saoudite et dans la région.

«Transformer le Royaume en une destination touristique, en un pôle logistique, lutter contre le changement climatique, voilà des défis qui sont, à bien des égards, de nature mondiale et qui exigent que la région jouisse d'une certaine paix et d'une certaine stabilité. C'est donc ce que nous faisons, et à travers nos engagements, que ce soit avec l'Iran ou d'autres partenaires régionaux, mais aussi avec des partenaires dans d'autres régions du monde, nous estimons nécessaire de parvenir à la paix et à la prospérité», a-t-il déclaré.

Les liens de plus en plus étroits entre les États-Unis et l'Arabie saoudite, malgré leurs divergences d'opinion sur les questions régionales, témoignent de leur stabilité et de leur endurance. La normalisation des liens avec la Syrie, qui a récemment réintégré la Ligue arabe et rétabli des relations avec un certain nombre de pays arabes, est un point de désaccord entre les États-Unis et le Royaume.

«Nos dirigeants ont conclu à juste titre que le statu quo n'était tout simplement pas viable. Ainsi, les efforts visant à isoler indéfiniment la Syrie et le gouvernement syrien ne contribuaient pas à stabiliser la Syrie. Ils n'ont certainement pas contribué à permettre la fourniture et l'acheminement de l'aide humanitaire. Et ils n'ont certainement pas aidé au retour en Syrie des millions de personnes qui ont été déplacées et qui sont maintenant réfugiées dans d'autres pays», a affirmé M. Nazer.

En mai, le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane s'est entretenu avec le président syrien Bachar al-Assad en marge du sommet de la Ligue arabe à Djeddah, la première réunion de ce type incluant la Syrie depuis le début de la guerre civile syrienne. Le département d'État américain s'est élevé contre une telle normalisation, s'opposant au rétablissement de la diplomatie entre M. Al-Assad et les pays arabes.

«Ce que nous cherchons à promouvoir, c'est une résolution politique du conflit qui préserve l'indépendance de la Syrie, son intégrité territoriale et son unité, et qui permette aux personnes déplacées de rentrer chez elles en toute sécurité. Il s'agit également de permettre l'acheminement d'une aide humanitaire indispensable aux personnes les plus nécessiteuses», a ajouté M. Nazer.

Bien que la Chine se soit certainement présentée comme un faiseur de paix, les relations entre l'Arabie saoudite et les États-Unis ont montré que le Royaume et les États-Unis sont prêts à agir ensemble en tant que précurseurs de la paix. Avant son arrivée en Arabie saoudite, le secrétaire d'État Blinken a exprimé le désir de son pays de jouer un rôle dans la normalisation entre l'Arabie saoudite et Israël.

«La position de l'Arabie saoudite sur le conflit israélo-palestinien est claire et constante depuis de nombreuses années. En effet, le défunt roi Abdallah a présenté, en 2002, ce que l'on appelle aujourd'hui l'initiative arabe de paix lors du sommet de la Ligue arabe à Beyrouth la même année. La proposition, l'initiative, offre à Israël une normalisation avec tous les membres des États arabes en échange d'une paix juste et globale avec les Palestiniens, basée sur une solution à deux États», a déclaré M. Nazer.

Tout en affirmant que «cette offre reste réellement sur la table», M. Nazer a rappelé que la question centrale des droits des Palestiniens était essentielle avant la poursuite d'une véritable normalisation.

Le dernier effort de collaboration réussi entre les États-Unis et le Royaume a eu lieu à la fin du mois de mai, lorsque les deux pays ont négocié un cessez-le-feu dans un Soudan déchiré par la guerre. Bien que le cessez-le-feu temporaire ait expiré et ait fait l'objet de violations, les deux médiateurs ont tenté de négocier d'autres accords de cessez-le-feu entre les forces armées soudanaises et les Forces de soutien rapide.

«L'Arabie saoudite et les États-Unis travaillent en étroite collaboration pour faire progresser ou contribuer au rétablissement de la paix et de la stabilité au Soudan. Nous avons tous deux favorisé certains des pourparlers qui ont permis l'acheminement d'une partie de l'aide humanitaire au Soudan et une légère baisse des tensions. Nous pensons donc qu'il s'agit d'un pas dans la bonne direction», a affirmé M. Nazer.

Bien au-delà de la politique régionale – ou même de la politique internationale – la coopération entre l'Arabie saoudite et les États-Unis est à l'aube d'une nouvelle ère. À la fin du mois dernier, les deux pays sont entrés dans l'histoire lorsque les sociétés américaines SpaceX et Axiom Space ont envoyé dans l'espace la toute première femme astronaute arabe. Rayyanah Barnawi et son collègue astronaute saoudien Ali al-Qarni ont été les premiers Saoudiens à visiter la Station spatiale internationale, où Mme Barnawi a mené diverses expériences scientifiques.

«D'une certaine manière, c'était une expérience différente. C'était presque une expérience immersive pour le reste du Royaume parce que les astronautes (…) ont pu partager une grande partie de leur expérience avec les habitants du Royaume», a indiqué M. Nazer.

«C'était un événement exceptionnel et un moment de grande fierté pour nous.»

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Vision 2030: le Cabinet remercie les agences impliquées

Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
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  • Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne
  • Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne

RIYAD: Le Conseil des ministres a salué les efforts des agences gouvernementales ayant contribué aux avancées réalisées dans le cadre de la Vision saoudienne 2030, alors que le Royaume se rapproche de l’atteinte de ses objectifs clés, a rapporté mardi l’Agence de presse saoudienne (SPA).

D’après le rapport annuel 2024 de la Vision, 93% des principaux indicateurs de performance ont été entièrement ou partiellement atteints depuis le lancement de l’initiative il y a neuf ans.

Le ministre des Médias, Salman al-Dosari, a précisé que le cabinet avait discuté de la troisième et dernière phase de la Vision 2030, qui débutera en 2026. Cette phase visera à pérenniser l’impact des transformations déjà engagées tout en exploitant de nouvelles opportunités de croissance.

Le Conseil des ministres a également salué le don généreux d’un milliard de riyals saoudiens (266,6 millions de dollars; 1 dollar = 0,88 euro) effectué par le prince héritier Mohammed ben Salmane, destiné à soutenir des projets de logement pour les bénéficiaires saoudiens éligibles et les familles dans le besoin.

Le cabinet a souligné que ce don illustre l’engagement constant du prince héritier à améliorer la qualité de vie des citoyens, ainsi que son intérêt soutenu pour le secteur du logement et les initiatives visant à offrir des logements décents aux familles méritantes à travers le Royaume.

Le prince Mohammed a également informé le Conseil de sa rencontre avec le roi Abdallah II de Jordanie, ainsi que de ses échanges avec le Premier ministre indien Narendra Modi.

Le cabinet a salué les résultats de la deuxième réunion du Conseil de partenariat stratégique saoudo-indien, soulignant le développement continu des relations économiques, commerciales et d’investissement entre les deux pays.

Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne, conformément aux résolutions de la légitimité internationale, à l'initiative de paix arabe et à la création d'un État palestinien indépendant le long des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.

Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne et a renouvelé son appel aux institutions financières régionales et internationales pour qu'elles reprennent et étendent leurs opérations dans le pays.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.