EDF renoue avec les bénéfices après une année noire en 2022

Après ses difficultés de 2022, EDF a renoué avec les bénéfices au premier semestre de cette année (Photo, AFP).
Après ses difficultés de 2022, EDF a renoué avec les bénéfices au premier semestre de cette année (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 28 juillet 2023

EDF renoue avec les bénéfices après une année noire en 2022

  • EDF a relevé ses objectifs financiers pour 2023, bien que toujours contraint par de gigantesques besoins de financement et une dette abyssale
  • Le gouvernement, qui a renationalisé le groupe à 100%, a rencontré la pression sur l'entreprise et réclame une production de 400 TWh en 2030

PARIS: Après ses difficultés de 2022, EDF a renoué avec les bénéfices au premier semestre de cette année, engrangeant 5,8 milliards d'euros, forte du redémarrage de plusieurs de ses réacteurs nucléaires sur fond de prix de l'électricité soutenue.

Cette progression marquée, pour un chiffre d'affaires de 75,5 milliards d'euros, s'explique notamment par "une bonne performance opérationnelle", a souligné jeudi le groupe, qui compte aussi sur la production hydroélectrique grâce à un remplissage des barrages "supérieur aux moyennes historiques".

L'année 2022 avait aussi été plombée par des charges liées à la contribution forcée d'EDF au "bouclier tarifaire" destiné à protéger la facture énergétique des Français.

Le groupe a relevé ses objectifs financiers pour 2023, bien que toujours contraint par de gigantesques besoins de financement et une dette abyssale de 64,8 milliards d'euros.

"Ces résultats reflètent les efforts intensifiés de l'ensemble des équipes d'EDF", a dit son PDG Luc Rémont, arrivé en novembre. "Partout" a été "engagé un travail profond d'amélioration de (l') efficacité" du groupe qui "est en bonne voie pour relever tous ses défis d'avenir".

"C'est un résultat financier exceptionnel", a commenté Nicolas Goldberg, expert en énergie au cabinet Colombus Consulting.

Au premier semestre 2022, EDF avait subi une perte inédite de 5,3 milliards d'euros, en raison d'une baisse de production nucléaire liée à un problème de corrosion dans plusieurs centrales et au décalage des calendriers de maintenance du fait du Covid.

En 2022, sa production nucléaire avait chuté à 279 térawattheures (TWh), plus bas niveau depuis 30 ans. L'année avait fini sur une perte de 17,9 milliards d'euros.

Aujourd'hui, sur les 16 réacteurs les plus sensibles à cette corrosion, 11 ont été réparés, deux sont en cours, deux le seront d'ici fin 2023 et Cattenom 4 le sera à l'occasion de sa maintenance décennale à partir de décembre, selon M. Rémont.

EDF a confirmé une production de 300 à 330 TWh cette année, visant 335 à 365 TWh en 2025. Le tout ne pourra provenir que de ses 56 réacteurs existants, mis en service entre 1979 et 2002, et de l'imminent réacteur EPR de Flamanville, puisque la nouvelle génération de réacteurs (EPR2) n'est plus espérée qu'à partir de 2035.

Pas de «recapitalisation»

Le gouvernement, qui a renationalisé le groupe à 100%, met la pression sur l'entreprise et réclame une production de 400 TWh en 2030.

Cet objectif, annoncé par la direction d'EDF elle-même, est un "défi industriel colossal", juge son patron. Il nécessitera de relever la puissance de certains réacteurs, pour quelque 20 TWh, a-t-il souligné.

Outre la gestion de son parc vieillissant, l'électricien doit dans le même temps traiter une pile de dossiers complexes, liés à la relance du nucléaire et à la nécessité de financer l'essor de sa production éolienne et solaire.

EDF devra doper ses investissements à 25 milliards d'euros par an, un niveau "sans commune mesure" dans son histoire, a prévenu M. Rémont.

La facture du "grand carénage", programme de modernisation et prolongation de la durée de vie des centrales au-delà de 40 ans, est évaluée à environ 66 milliards d'euros. Le gouvernement porte aussi un programme de six à 14 réacteurs EPR, estimés à 51,7 milliards pour les six premiers.

Comment les financer, tout en stabilisant sa dette? EDF ne peut le faire seule.

Une recapitalisation par l'Etat n'est "pas à l'étude", a déclaré jeudi M. Rémont, qui se fixe "des exigences de performance d'une entreprise normale".

Plusieurs options sont avancées, dont des prêts à taux zéro et la mobilisation du livret A, a listé récemment le gouvernement, évoquant une décision d'ici à fin 2024

Surtout, le gouvernement et EDF devront s'accorder sur le prix futur de l'électricité nucléaire, alors que le mécanisme (Arenh) qui contraint l'opérateur historique à vendre de l'électricité à bas prix à ses concurrents s'éteint en 2025.

Le PDG d'EDF souhaite un prix "compatible avec le souhait général de compétitivité et (l')énorme besoin d’investissement" du groupe. "On peut se satisfaire à court terme de prix plus bas, mais dans ce cas-là, on renonce à avoir de l’électricité en quantité et on s’expose à des prix plus hauts dans le futur", a-t-il averti jeudi.

Pour le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, "il faut qu'on trouve un mécanisme post-Arenh qui garantisse un prix compétitif pour notre économie tout en préservant la marge financière d'EDF. Ce sont des travaux très lourds, on y passe beaucoup de temps".

"Nous devons trouver un accord avec EDF sur le futur de la régulation du marché dans les prochains mois", a-t-il dit jeudi.


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.


Face à l'explosion des dépenses militaires, l'ONU appelle à «repenser les priorités»

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
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  • "Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres
  • Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an

NATIONS-UNIES: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté.

"Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres.

Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an.

C'est "l'équivalent de 334 dollars par habitant de la planète", "près de 13 fois le montant de l'aide publique au développement des pays les plus riches et 750 fois le budget ordinaire de l'ONU", a noté Antonio Guterres.

Et en parallèle, la majorité des Objectifs de développement durables (ODD) visant à améliorer le sort de l'humanité d'ici 2030 (éradication de l'extrême pauvreté, égalité hommes-femmes, éducation...) ne sont pas sur la bonne voie.

Pourtant, mettre un terme à la faim dans le monde d'ici 2030 nécessiterait seulement 93 milliards de dollars par an, soit 4% des dépenses militaires de 2024, et faire en sorte que chaque enfant soit totalement vacciné coûterait entre 100 et 285 milliards par an, note le rapport demandé par les Etats membres.

Au total, l'ONU estime aujourd'hui à 4.000 milliards de dollars les investissements supplémentaires nécessaires chaque année pour atteindre l'ensemble des ODD, un montant qui pourrait grimper à 6.400 milliards dans les prochaines années.

Alors le secrétaire général de l'ONU a lancé un "appel à l'action, un appel à repenser les priorités, un appel à rééquilibrer les investissements mondiaux vers la sécurité dont le monde a vraiment besoin".

"Des dépenses militaires excessives ne garantissent pas la paix, souvent elles la sapent, encourageant la course aux armements, renforçant la méfiance et détournant des ressources de ce qui représentent les bases de la stabilité", a-t-il ajouté. "Un monde plus sûr commence par investir au moins autant pour lutter contre la pauvreté que nous le faisons pour faire la guerre".

"Rediriger même une fraction des dépenses militaires actuelles pourraient combler des écarts vitaux, envoyer des enfants à l'école, renforcer les soins de santé de base, développer les énergies propres et des infrastructures résistantes, et protéger les plus vulnérables", a-t-il plaidé.