Le gouverneur de la Banque du Liban, encensé puis maudit

Architecte du redressement du Liban après la guerre, aujourd'hui accusé d'être un des responsables de son effondrement, le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé aura tenu les rênes des finances du pays pendant 30 ans avant de quitter son poste lundi dans l'opprobre. (AFP).
Architecte du redressement du Liban après la guerre, aujourd'hui accusé d'être un des responsables de son effondrement, le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé aura tenu les rênes des finances du pays pendant 30 ans avant de quitter son poste lundi dans l'opprobre. (AFP).
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Publié le Lundi 31 juillet 2023

Le gouverneur de la Banque du Liban, encensé puis maudit

  • Riad Salamé, poursuivi par la justice au Liban et dans plusieurs pays d'Europe, a défendu jusqu'au bout ses politiques décriées et nié toute malversation financière
  • Riad Salamé est visé par deux mandats d'arrêt émis par la France et l'Allemagne, mais le Liban refuse d'extrader ses ressortissants

BEYROUTH: Architecte du redressement du Liban après la guerre, aujourd'hui accusé d'être un des responsables de son effondrement, le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé aura tenu les rênes des finances du pays pendant 30 ans avant de quitter son poste lundi dans l'opprobre.

"Je vais tourner une page dans ma vie, et je crois que sur les 30 ans, la Banque du Liban a contribué pendant 27 ans par ses politiques monétaires à instaurer la stabilité et la croissance", a affirmé l'ancien banquier d'affaires franco-libanais, âgé de 73 ans, dans sa dernière interview à une chaîne libanaise.

Riad Salamé, poursuivi par la justice au Liban et dans plusieurs pays d'Europe, a défendu jusqu'au bout ses politiques décriées et nié toute malversation financière, alors qu'il est suspecté de détournement massif de fonds publics et de s'être constitué un riche patrimoine immobilier et bancaire.

Son mandat expire lundi sans qu'un successeur lui soit désigné, les divergences politiques dans le pays paralysant toute prise de décision. C'est, selon la loi, le vice-Premier gouverneur Wassim Mansouri qui devrait lui succéder.

Riad Salamé est visé par deux mandats d'arrêt émis par la France et l'Allemagne, mais le Liban refuse d'extrader ses ressortissants. La justice française a effectué 12 saisies sur son patrimoine immobilier et bancaire, d'une valeur de plusieurs dizaines de millions d'euros.

Le gouverneur fait en outre l'objet d'une enquête en Suisse. En 2022, la France, l'Allemagne et le Luxembourg avaient gelé 120 millions d'euros d'avoirs soupçonnés de lui appartenir.

Les années fastes 

Depuis le début de l'année, des juges européens se sont rendus à trois reprises au Liban pour l'interroger, ainsi que ses proches, dont son frère Raja.

Au Liban, la justice a ordonné la saisie provisoire de biens qu'il est soupçonné d'avoir acquis frauduleusement.

Riad Salamé, qui détient l'un des records de longévité à la tête d'une banque centrale, a pourtant été applaudi pour avoir été l'architecte d'une politique financière qui a permis au Liban de rebondir après 15 années de guerre (1975-1990).

Mais avec la descente aux enfers du pays depuis fin 2019, beaucoup le rendent responsable, avec les dirigeants politiques auxquels il est étroitement lié, de la ruine du Liban.

Le gouverneur se défend et répète avoir amassé sa fortune lorsqu'il travaillait dans la banque d'investissements américaine Merril Lynch, où il gérait le portefeuille d'actifs du milliardaire Rafic Hariri, qui a fait fortune en Arabie saoudite.

Devenu Premier ministre en 1992, Rafic Hariri - assassiné en 2005 - installe Riad Salamé à la tête de la Banque centrale, poste réservé à la communauté chrétienne maronite en vertu du partage confessionnel du pouvoir au Liban.

Il fixe alors le taux de change de la livre libanaise par rapport au dollar. Commencent des années fastes pour le Liban, qui attire les capitaux, notamment grâce à des taux d'intérêt très élevés.

Riad Salamé accumule les lauriers: il est désigné meilleur gouverneur d'une banque centrale dans le monde par Euromoney en 2006 et par le Banker Magazine en 2009.

« Fuite en avant »

Mais avec la guerre qui éclate en Syrie en 2011, "les signaux rouges" s'accumulent pour l'économie libanaise, explique l'économiste Nicolas Chikhani.

Au lieu de restructurer l'économie et d'abandonner sa politique qui commence à coûter cher au Liban, M. Salamé choisit "la fuite en avant", explique-t-il.

Dès 2016, il se lance dans des montages financiers comparés à une "pyramide de Ponzi", et fin 2019, commence l'effondrement qui fait perdre à la livre libanaise plus de 98% de sa valeur.

Alors que les épargnants n'ont plus accès à leur argent dans les banques, il aide des dirigeants politiques à transférer leurs capitaux vers l'étranger en octobre 2019, juste avant l'effondrement, "pour un total de neuf milliards de dollars", selon un spécialiste des marchés financiers.

Il explique que M. Salamé avait des ambitions présidentielles: "Il ne refusait rien à la classe politique" et "a protégé les banques, dont les principaux actionnaires sont des politiciens".

Mais après avoir profité de l'appui indéfectible de la classe politique, il a affirmé au cours de sa dernière interview qu'il se considérait désormais comme "un bouc émissaire".


Cisjordanie: la police israélienne saisit près de 400.000 euros, accusés de financer le «terrorisme»

La police israélienne a annoncé mercredi avoir confisqué "environ 1,5 million de shekels", plus de 385.000 euros, une somme qu'elle estime liée au "terrorisme", au cours d'une opération en Cisjordanie occupée.  "Les forces de police des frontières en Cisjordanie (Magav) et l'armée israélienne ont confisqué environ 1,5 million de shekels provenant du financement du terrorisme", a déclaré la police dans un communiqué. (AFP)
La police israélienne a annoncé mercredi avoir confisqué "environ 1,5 million de shekels", plus de 385.000 euros, une somme qu'elle estime liée au "terrorisme", au cours d'une opération en Cisjordanie occupée. "Les forces de police des frontières en Cisjordanie (Magav) et l'armée israélienne ont confisqué environ 1,5 million de shekels provenant du financement du terrorisme", a déclaré la police dans un communiqué. (AFP)
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  • Si l'armée israélienne opère souvent en Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1967, il est relativement rare qu'elle intervienne au coeur des villes, à fortiori à Ramallah, où siège l'Autorité palestinienne
  • Mardi, l'armée israélienne avait mené une opération dans le centre-ville de Ramallah, en Cisjordanie occupée, ciblant notamment un bureau de change, au cours de laquelle des dizaines de Palestiniens ont été blessés selon le Croissant-Rouge

JERUSALEM: La police israélienne a annoncé mercredi avoir confisqué "environ 1,5 million de shekels", plus de 385.000 euros, une somme qu'elle estime liée au "terrorisme", au cours d'une opération en Cisjordanie occupée.

"Les forces de police des frontières en Cisjordanie (Magav) et l'armée israélienne ont confisqué environ 1,5 million de shekels provenant du financement du terrorisme", a déclaré la police dans un communiqué.

Elle a précisé qu'une partie de la somme avait été saisie en devises étrangères, notamment des dollars américains et des dinars jordaniens.

Mardi, l'armée israélienne avait mené une opération dans le centre-ville de Ramallah, en Cisjordanie occupée, ciblant notamment un bureau de change, au cours de laquelle des dizaines de Palestiniens ont été blessés selon le Croissant-Rouge.

L'armée avait alors expliqué viser "une entreprise de change qui transférait des fonds destinés aux terroristes du Hamas afin de financer des activités terroristes contre l'Etat d'Israël et ses civils".

Si l'armée israélienne opère souvent en Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1967, il est relativement rare qu'elle intervienne au coeur des villes, à fortiori à Ramallah, où siège l'Autorité palestinienne.

Elle était déjà intervenue dans des bureaux de change palestiniens ces dernières années, au printemps 2025 ou encore en décembre 2023.

Les violences en Cisjordanie se sont intensifiées depuis le début de la guerre à Gaza, déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël le 7 octobre 2023.

Selon un décompte de l'AFP établi à partir de données de l'Autorité palestinienne, au moins 972 Palestiniens, dont de nombreux combattants mais aussi beaucoup de civils, ont été tués par des soldats ou des colons israéliens en Cisjordanie depuis cette date.

Au moins 36 Israéliens, parmi lesquels des civils et des soldats y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors d'opérations militaires israéliennes, selon les données officielles israéliennes.


Liban: la justice décide de libérer sous caution l'ex-gouverneur de la Banque centrale

 La justice libanaise a décidé mardi de libérer l'ancien gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, accusé de corruption, moyennant une importante caution de plus de 20 millions de dollars. (AFP)
La justice libanaise a décidé mardi de libérer l'ancien gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, accusé de corruption, moyennant une importante caution de plus de 20 millions de dollars. (AFP)
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  • L'ex-gouverneur, détenteur de la double nationalité française et libanaise, avait été arrêté en septembre 2024 et accusé de détournement massif de fonds publics dans le pays, qui a connu un effondrement économique sans précédent
  • Il était notamment accusé d'avoir détourné 44 millions de dollars de la Banque centrale. M. Salamé avait déjà obtenu le mois dernier une remise en liberté dans deux autres dossiers dans lesquels il était impliqué

BEYROUTH: La justice libanaise a décidé mardi de libérer l'ancien gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, accusé de corruption, moyennant une importante caution de plus de 20 millions de dollars, a indiqué une source judiciaire à l'AFP.

La source a précisé que cette décision était assortie d'une interdiction de quitter le territoire libanais pendant un an.

L'ex-gouverneur, détenteur de la double nationalité française et libanaise, avait été arrêté en septembre 2024 et accusé de détournement massif de fonds publics dans le pays, qui a connu un effondrement économique sans précédent.

Il était notamment accusé d'avoir détourné 44 millions de dollars de la Banque centrale. M. Salamé avait déjà obtenu le mois dernier une remise en liberté dans deux autres dossiers dans lesquels il était impliqué.

Selon une autre source judiciaire, il s’agit de "la caution la plus élevée jamais fixée au Liban".

L'avocat de Riad Salamé, Marc Habqa, a dénoncé auprès de l’AFP une décision "illégale". "La caution est exorbitante et dépourvue de base légale. J’examinerai avec mon client les recours possibles", a-t-il dit.

La source judiciaire a indiqué que la décision avait été prise "au regard de l’état de santé de Salamé", âgé de 75 ans.

Mais elle a précisé qu’il "aurait de toute façon pu être libéré le 4 septembre à l’expiration de sa détention préventive" qui peut durer un an au maximum.

L'ancien gouverneur de la BdL, qui était étroitement lié à la classe politique, était la première personnalité de premier plan arrêtée depuis le début de l'effondrement économique du Liban il y a près de six ans.

Gouverneur de la Banque centrale de 1993 à juillet 2023, il est accusé par ses détracteurs d'être l'un des principaux responsables de la déroute financière du Liban.

M. Salamé est en outre suspecté de s'être constitué un riche patrimoine immobilier et financier. Il n'a pas répondu à une convocation d'un juge français en mai 2023, et fait depuis l'objet d'un mandat d'arrêt international. Le Liban refuse néanmoins d'extrader ses ressortissants.

Les Etats-Unis, le Canada et le Royaume-Uni ont imposé des sanctions économiques pour corruption contre M. Salamé, Washington estimant que ses "actions corrompues et illégales ont contribué à l'effondrement de l'Etat de droit au Liban".


Désarmement du Hezbollah: les Etats-Unis veulent des actes, selon une émissaire

Tom Barrack et Morgan Ortagus à Beyrouth le 26 août 2025. (AFP)
Tom Barrack et Morgan Ortagus à Beyrouth le 26 août 2025. (AFP)
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  • Une émissaire américaine, Morgan Ortagus, a affirmé mardi à Beyrouth que les autorités libanaises devaient à présent traduire "en actes" leur décision de désarmer le Hezbollah pro-iranien
  • "Nous avons tous été fortement encouragés par la décision historique du gouvernement il y a quelques semaines, mais maintenant il ne s'agit plus de mots, il s'agit d'actes", a déclaré Mme Ortagus

BEYROUTH: Une émissaire américaine, Morgan Ortagus, a affirmé mardi à Beyrouth que les autorités libanaises devaient à présent traduire "en actes" leur décision de désarmer le Hezbollah pro-iranien.

"Nous avons tous été fortement encouragés par la décision historique du gouvernement il y a quelques semaines, mais maintenant il ne s'agit plus de mots, il s'agit d'actes", a déclaré Mme Ortagus.

Elle s'exprimait à l'issue d'une réunion entre une délégation américaine et le président libanais, Joseph Aoun.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'est dit prêt lundi à une réduction "progressive" des troupes israéliennes au Liban si le gouvernement concrétisait son plan de désarmer le Hezbollah.

"Israël est prêt à avancer pas à pas, cela pourrait être de petits pas (..) , des pas de bébé, mais ils sont prêts à avancer étape par étape avec ce gouvernement", a ajouté Mme Ortagus.

"Donc, à chaque pas que fera le gouvernement libanais, nous encouragerons le gouvernement israélien à faire de même".

L'émissaire américain Tom Barrack, qui faisait partie de la délégation, a souligné pour sa part que l'armée libanaise et le gouvernement devaient présenter à la fin du mois un plan concret pour le désarmement de la formation chiite, qui est sortie affaiblie fin novembre de sa dernière guerre avec Israël.

"Lorsqu'ils (les Israéliens) verront cela, ils feront leur contre-proposition concernant les retraits, les garanties de sécurité à leurs frontières", a-t-il expliqué.

"Ce qu'Israël a dit, ce qui est historique, c'est que nous ne voulons pas occuper le Liban", a-t-il ajouté, expliquant que les responsables israéliens attendaient de "voir quel est le plan pour réellement désarmer le Hezbollah".

Le chef du Hezbollah, Naïm Qassem, a réaffirmé lundi le refus de son parti d'abandonner ses armes.

"Zone économique" 

Sous pression des Etats-Unis et face aux craintes d'une intensification des attaques israéliennes, le gouvernement a chargé le 5 août l'armée de préparer un plan visant à désarmer d'ici fin 2025 ce mouvement, fondé et financé par l'Iran, ennemi juré d'Israël.

Cette décision s'inscrit dans le cadre du cessez-le-feu conclu sous médiation américaine, qui a mis fin le 27 novembre 2024 à plus d'un an de conflit entre le Hezbollah et Israël.

En réponse à une question concernant un plan américain prévoyant la création d’une "zone économique Trump" dans le sud du Liban, près de la frontière israélienne, comme rapporté par le site américain Axios, M. Barrack a fait miroiter cette possibilité pour "écarter la tutelle iranienne".

"Quand on dit désarmer le Hezbollah, il faut se souvenir qu’il y a 40.000 personnes qui sont payées par l’Iran pour combattre. Qu’est-ce qu’on va faire d’eux ?", s'est interrogé M. Barrack.

"Nous devons les aider. Et la manière de les aider, c’est de dire que nous, tous ensemble - le Golfe, les États-Unis, les Libanais - allons agir conjointement pour créer un forum économique qui offrira un autre moyen de subsistance", a-t-il ajouté, avant de faire référence à "une nouvelle zone économique".

Selon Axios, l’Arabie saoudite et le Qatar auraient déjà accepté d’y investir après le retrait israélien, afin de limiter le retour du Hezbollah dans la zone tout en répondant aux préoccupations sécuritaires d’Israël sans occupation.