Fin de grève au JDD, Geoffroy Lejeune à la tête d'une rédaction désertée

Geoffroy Lejeune, marqué à l'extrême droite, prend mardi ses fonctions sans les honneurs de ses journalistes (Photo, AFP).
Geoffroy Lejeune, marqué à l'extrême droite, prend mardi ses fonctions sans les honneurs de ses journalistes (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Mercredi 02 août 2023

Fin de grève au JDD, Geoffroy Lejeune à la tête d'une rédaction désertée

  • «Aujourd'hui, Geoffroy Lejeune prend ses fonctions. C'est dans une rédaction vide qu'il entrera. Des dizaines de journalistes refusent de travailler avec lui et devraient quitter le JDD»
  • Même si Arnaud Lagardère, le patron du groupe, s'en défend, nombre d'observateurs voient dans cette nomination la main du milliardaire Vincent Bolloré, aux opinions réputées ultra-conservatrices

PARIS: "Nous n'avons pas gagné": la rédaction du JDD a acté mardi l'échec de sa grève historique entamée le 22 juin contre l'arrivée de Geoffroy Lejeune, journaliste marqué à l'extrême droite, qui vient de prendre la tête de l'hebdomadaire.

"Aujourd'hui, Geoffroy Lejeune prend ses fonctions. C'est dans une rédaction vide qu'il entrera. Des dizaines de journalistes refusent de travailler avec lui et devraient quitter le JDD", a annoncé la Société des journalistes (SDJ) du Journal du dimanche, dans un communiqué au ton amer.

Après 40 jours de mouvement, les grévistes ont fini par conclure un accord avec la direction du groupe Lagardère, propriétaire du titre. Il prévoit "une reprise de l'activité avec un retour de la publication du site web leJDD.fr" dès mardi, "et de la publication du journal" papier dès mi-août, a précisé Lagardère dans un communiqué distinct.

Mardi en milieu de soirée, le site internet du journal n'avait pas été actualisé.

L'accord définit "également la mise en place de conditions d'accompagnement pour les journalistes qui souhaiteraient quitter la rédaction", selon Lagardère.

"Malgré l'unité et la détermination de la rédaction", "de nombreuses tribunes" dont une signée "par plus de 650 personnalités de tous bords", "le dépôt de plusieurs propositions de loi au Parlement" ou l'annonce d'Etats généraux de l'information par l'Elysée, "notre PDG, Arnaud Lagardère, est resté sourd à nos revendications, dans un contexte de reprise en main du groupe par Vivendi", déplore la rédaction.

Celle-ci refusait depuis le 22 juin d'être dirigée par Geoffroy Lejeune, "dont les valeurs sont en totale contradiction avec celles du JDD".

Soutien d'Eric Zemmour à l'élection présidentielle, Geoffroy Lejeune, 34 ans, a suscité plusieurs polémiques, notamment lorsque l'hebdomadaire Valeurs Actuelles, alors sous sa direction, a été condamné à une amende de 1 000 euros avec sursis pour injure publique à caractère raciste envers la députée LFI Danièle Obono.

Les grévistes demandaient aussi à Lagardère d'"offrir aux journalistes des garanties d'indépendance juridique et éditoriale" au travers d'une charte de déontologie.

"Mais devant l'intransigeance de la direction, nous avons finalement préféré renoncer à de maigres avancées plutôt que de signer un document contraire à nos valeurs", précise la rédaction dans son communiqué.

D'autant qu'en "l'absence d'un comité d'indépendance éditoriale" composé de personnalités extérieures, "cette charte n'aurait pas offert aux rédactions de réels garde-fous face à la direction du groupe et aux actionnaires", ajoute-t-elle.

«Partir ou rester»?

Même si Arnaud Lagardère, le patron du groupe, s'en défend, nombre d'observateurs voient dans cette nomination la main du milliardaire Vincent Bolloré, aux opinions réputées ultra-conservatrices.

Vivendi, groupe de M. Bolloré détenant Canal+ et ses chaînes (dont CNews et C8), est en effet en train d'absorber Lagardère, propriétaire du JDD, de Paris Match et d'Europe 1, après une offre publique d'achat réussie.

Les grèves précédentes menées contre les ingérences supposées de l'homme d'affaires à i-Télé (devenue CNews) en 2016 et Europe 1 en 2021 se sont soldées par des départs massifs.

Depuis fin juin, la répétition d'un tel scénario au JDD suscitait de vives inquiétudes parmi les journalistes et une partie des personnalités politiques.

"Geoffroy Lejeune est suffisamment habile pour ne pas faire tout de suite du JDD le futur 'National Hebdo' mais il reste 4 ans avant 2027 à une équipe idéologiquement combative", a estimé la journaliste Anne Sinclair dans les colonnes de Libération mardi.

Le patron du PS, Olivier Faure, a prévenu mardi sur "X" (ex-Twitter) qu'il ne "répond(rait) plus aux sollicitations pour des interviews au JDD" tandis que le secrétaire national du Parti communiste, Fabien Roussel, a relevé "l'intransigeance de la direction du JDD" qui "aura des conséquences lourdes et dangereuses pour la liberté de la presse".

"Aujourd'hui, nous avons perdu une bataille, mais notre lutte ne s'éteint pas", assurent les anciens journalistes grévistes, qui désormais se trouvent confrontés à un "dilemme douloureux: partir ou rester".

"Notre rédaction disparaît, mais un collectif puissant s'est formé. Il restera vivant au sein d'une association qui verra le jour dans les prochaines semaines", assurent-ils.

Son objectif: "défendre auprès des pouvoirs publics la nécessité d'une évolution du cadre législatif encadrant la presse" pour "garantir l'indépendance des rédactions et la protection des journalistes".


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
Short Url
  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
Short Url
  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Short Url
  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.