Iran: le pouvoir sur ses gardes un an après la mort de Mahsa Amini

Une femme parle au téléphone portable alors qu'elle marche dans une rue de Téhéran, le 10 septembre 2023. Les autorités iraniennes ont bloqué les réseaux sociaux populaires, y compris Instagram et WhatsApp, depuis que des manifestations de masse ont éclaté à la suite de la mort en garde à vue, en septembre 2022, d'un Kurde iranien de 22 ans, Mahsa Amini. (AFP)
Une femme parle au téléphone portable alors qu'elle marche dans une rue de Téhéran, le 10 septembre 2023. Les autorités iraniennes ont bloqué les réseaux sociaux populaires, y compris Instagram et WhatsApp, depuis que des manifestations de masse ont éclaté à la suite de la mort en garde à vue, en septembre 2022, d'un Kurde iranien de 22 ans, Mahsa Amini. (AFP)
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Publié le Jeudi 14 septembre 2023

Iran: le pouvoir sur ses gardes un an après la mort de Mahsa Amini

  • Aucun événement n'a été annoncé publiquement pour marquer cet anniversaire, qui intervient samedi, jour férié pour une célébration religieuse
  • Mais des habitants font état d'une présence policière plus marquée dans les rues principales et d'un net ralentissement du débit des connexions Internet ces derniers jours

TEHERAN : Les autorités iraniennes redoublent de fermeté à l'approche du premier anniversaire de la mort Mahsa Amini pour éviter une reprise des manifestations qui avaient placé les femmes au premier rang de la contestation à l'automne 2022.

En apparence, tout est calme dans l'immense agglomération de Téhéran. Aucun événement n'a été annoncé publiquement pour marquer cet anniversaire, qui intervient samedi, jour férié pour une célébration religieuse.

Mais des habitants font état d'une présence policière plus marquée dans les rues principales et d'un net ralentissement du débit des connexions Internet ces derniers jours.

Les services de sécurité et de renseignements "surveillent avec vigilance" d'éventuelles actions de contestation liées à l'anniversaire, a récemment averti le chef adjoint de la justice, Sadeq Rahimi.

Et, tout en affichant sa volonté "d'écoute", le président iranien, Ebrahim Raïssi, a mis en garde "ceux qui entendent abuser du nom de madame Amini" pour "créer l'instabilité dans le pays". Ils paieront "un coût élevé", a-t-il averti, dans un entretien à la chaîne américaine NBC mardi.

Des ONG basées à l'étranger accusent le gouvernement d'avoir mis en oeuvre une répression accrue et placé sous haute surveillance les régions qui ont été au premier plan dans les manifestations de l'an dernier. En particulier le Kurdistan (ouest), la région natale de Mahsa Amini.

Depuis sa mort, le visage de cette jeune femme de 22 ans reste le symbole du mouvement de contestation "Zan, Zendegi, Azadi" ("Femme, vie, liberté", en persan), lancé au lendemain de son décès le 16 septembre 2022 après son arrestation par la police des moeurs pour non-respect du code vestimentaire strict en vigueur en Iran.

Dans les jours suivants, des manifestations se propageaient depuis le Kurdistan jusqu'au Sistan-Baloutchistan au sud, en passant par Téhéran et les grandes villes.

Au total, des centaines de personnes, dont des membres des forces de l'ordre, ont été tuées et des milliers d'autres arrêtées, selon des ONG. Sept hommes ont été exécutés.

Traumatisé

"Le peuple est toujours traumatisé par les événements de l'année dernière et craint que la violence ne se reproduise", souligne Mohammad Sadegh Javadi-Hessar, un militant réformateur basé à Mashhad (est).

Pour Fayyaz Zahed, historien de l'Iran contemporain, "aucune crise dans l'histoire de la République islamique n'a autant creusé le fossé entre le système et le peuple". C'est pourquoi, s'il veut le combler, le pouvoir "ne peut s'appuyer uniquement sur des réponses sécuritaires et répressives", ajoute-t-il.

En février, lors des célébrations du 44e anniversaire de la révolution de 1979, le guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, avait annoncé la fin des troubles, se félicitant de la défaite du "complot" fomenté par "l'ennemi".

Il visait ainsi les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, et les opposants iraniens en exil, qui ont affiché leur soutien aux manifestants.

Ali Khamenei a de nouveau accusé lundi "le gouvernement américain" d'avoir "créé un groupe de crise destiné à instrumentaliser les vulnérabilités" du pays, citant en particulier "la situation des femmes".

Même si elles ne manifestent plus, nombre d'entre elles continuent de défier les autorités en sortant tête nue dans les lieux publics des grandes villes, notamment Téhéran.

"La conséquence du mouvement Mahsa Amini est que la société iranienne est devenue plus colorée et plus vivante. La tenue des femmes a considérablement évolué. Avant, les couleurs étaient sombres dans les rues, mais ce n'est plus le cas", remarque M. Zahed.

Loi pro-hijab

Face à ces actes de désobéissance, les autorités ont tenté de durcir le ton, en annonçant davantage de contrôles, notamment à l'aide de caméras, et en arrêtant des actrices posant sans voile sur les réseaux sociaux.

Un projet de loi est également en discussion pour renforcer les peines, mais il divise au sein même du pouvoir. L'un des principaux dignitaires chiites, le grand ayatollah Makarem Chirazi, a ainsi rejeté le recours à la "violence et la pression" pour imposer le hijab.

Des responsables réformateurs ont en outre critiqué la mise à l'écart de dizaines de professeurs d'université, l'un des foyers de la contestation.

Mais, au-delà de ces questions, la priorité pour de nombreux Iraniens est de faire face à l'inflation galopante, proche de 50% sur un an.

"Aujourd'hui, la principale revendication des gens est l'amélioration de l'économie, et ensuite les libertés civiles et politiques", estime Mohammad Sadegh Javadi-Hessar.


Gaza: les Etats-Unis font pression pour l'adoption de leur résolution à l'ONU lundi

Une Palestinienne marche sous une pluie battante devant des bâtiments détruits par les frappes israéliennes dans le quartier de Sheikh Radwan, à Gaza. (AP)
Une Palestinienne marche sous une pluie battante devant des bâtiments détruits par les frappes israéliennes dans le quartier de Sheikh Radwan, à Gaza. (AP)
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  • Les États-Unis poussent pour l’adoption par le Conseil de sécurité de leur résolution soutenant le plan de paix de Donald Trump pour Gaza
  • Malgré des réticences de certains membres et un texte concurrent présenté par la Russie, Washington met en avant un large soutien arabe et occidental et avertit qu’un rejet ouvrirait la voie à la poursuite du conflit

NATIONS UNIES: Les Etats-Unis ont mis la pression vendredi pour convaincre de la nécessité d'adopter leur projet de résolution endossant le plan de paix de Donald Trump pour Gaza, qui sera mis au vote du Conseil de sécurité de l'ONU lundi.

La semaine dernière, les Américains ont officiellement entamé des négociations au sein du Conseil sur un projet de texte qui "endosse" le plan du président américain ayant permis la mise en place, le 10 octobre, d'un cessez-le-feu fragile dans le territoire palestinien ravagé par deux années de guerre provoquée par une attaque sanglante du mouvement islamiste Hamas. Le texte autorise notamment le déploiement d'une "force de stabilisation internationale" (ISF).

Face aux réserves de certains membres et à la proposition d'un texte concurrent de la Russie, ils ont mis en garde vendredi contre les risques d'un rejet de leur texte et affiché le soutien de plusieurs pays arabes et musulmans.

"Les Etats-Unis, le Qatar, l'Egypte, les Emirats arabes unis, le royaume d'Arabie saoudite, l'Indonésie, le Pakistan, la Jordanie et la Turquie expriment leur soutien conjoint" au projet de résolution américaine autorisant notamment une force internationale dans le territoire palestinien, et espèrent son adoption "rapide", disent-ils dans une déclaration commune.

Ce plan offre "un chemin viable vers la paix et la stabilité, non seulement pour les Israéliens et les Palestiniens, mais pour toute la région", ont-ils insisté.

Le Royaume-Uni a également apporté vendredi son soutien public au texte américain.

Et le Conseil se prononcera lundi à 17H00 (22H00 GMT) sur le texte, ont indiqué vendredi soir plusieurs sources diplomatiques à l'AFP.

Le projet de résolution américain, plusieurs fois modifié, prévoit de donner un mandat jusqu'à fin décembre 2027 à un "comité de la paix" censé être présidé par Donald Trump, organe de "gouvernance de transition" pour administrer Gaza.

Il "autorise" également le déploiement de l'ISF qui pourra utiliser "toutes les mesures nécessaires pour mener son mandat dans le respect du droit international": appui à la sécurisation des frontières en coopération notamment avec Israël et l'Egypte, démilitarisation de Gaza, désarmement "des groupes armés non étatiques", protection des civils, formation d'une police palestinienne...

- Conflit perpétuel" -

La décision de programmer le vote intervient alors que la Russie a fait circuler aux membres du Conseil un projet de résolution concurrente qui n'autorise ni la création d'un "comité de la paix", ni le déploiement immédiat d'une force internationale à Gaza, selon le texte vu vendredi par l'AFP.

Ce texte demande simplement au secrétaire général de l'ONU "d'identifier des options pour appliquer les dispositions" du plan de paix et présenter "rapidement" des "options de déploiement d'une force" à Gaza.

"Nous voulons souligner que notre document ne contredit pas l'initiative américaine", a assuré vendredi dans un communiqué la mission russe à l'ONU.

La "logique" du texte russe est de permettre au Conseil "de définir des modalités claires de déploiement d'un contingent de maintien de la paix et d'établir une administration à Gaza tout en s'assurant que ces modalités sont en accord" avec les normes internationales, a-t-elle ajouté.

Alors que des échanges publics de ce type lors de négociations du Conseil sont plutôt rares, l'ambassadeur américain à l'ONU Mike Waltz a également publié un texte vendredi dans le Washington Post.

"Tout refus de soutenir cette résolution (le texte américain, ndlr) est un vote en faveur de la poursuite du règne des terroristes du Hamas ou en faveur de la reprise de la guerre avec Israël, condamnant la région et sa population à un conflit perpétuel", a-t-il déclaré.

La guerre a été déclenchée par l'attaque du 7 octobre 2023 menée par le Hamas en Israël, qui a entraîné côté israélien la mort de 1.221 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi par l'AFP à partir de chiffres officiels.

Plus de 69.185 Palestiniens ont été tués dans la bande de Gaza par la campagne militaire israélienne de représailles, essentiellement des civils, selon le ministère de la Santé de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas et dont les chiffres sont jugés fiables par l'ONU.


Trump a écrit au président israélien pour lui demander de gracier Netanyahu

Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence. (REUTERS)
Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence. (REUTERS)
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  • "Le président Herzog tient le président Trump en très haute estime et continue d'exprimer sa profonde gratitude" pour son "soutien indéfectible" à Israël
  • "Monsieur le Président Herzog, écoutez le Président Trump", a écrit sur X le ministre d'extrême-droite Itamar Ben Gvir, tout en accusant la justice israélienne d'être biaisée à l'égard de M. Netanyahu

JERUSALEM: Le président américain, Donald Trump, a écrit à son homologue israélien, Isaac Herzog, pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahu, poursuivi dans son pays pour corruption, a indiqué mercredi le bureau de la présidence.

M. Herzog a reçu "ce matin" une lettre de Donald Trump, "l'invitant à envisager d'accorder une grâce" à M. Netanyahu, détaille un communiqué du bureau présidentiel, qui précise que "toute personne souhaitant obtenir une grâce présidentielle doit présenter une demande officielle".

M. Netanyahu est poursuivi dans son pays pour corruption et est régulièrement entendu dans le cadre d'au moins trois procédures judiciaires, dans lesquels aucun jugement n'a encore été rendu.

"Le président Herzog tient le président Trump en très haute estime et continue d'exprimer sa profonde gratitude" pour son "soutien indéfectible" à Israël, "sa contribution considérable au retour des otages, à la refonte de la situation au Moyen-Orient et à Gaza en particulier, et à la garantie de la sécurité de l'Etat d'Israël", précise le communiqué.

Aussitôt plusieurs personnalités politiques israéliennes ont réagi.

"Monsieur le Président Herzog, écoutez le Président Trump", a écrit sur X le ministre d'extrême-droite Itamar Ben Gvir, tout en accusant la justice israélienne d'être biaisée à l'égard de M. Netanyahu.

Une députée également d'extrême-droite mais dans l'opposition, Yulia Malinovsky, du parti Israel Beitenou ("Israël est notre maison" en hébreu), a de son côté suggéré que le président américain faisait cette demande dans le cadre d'un accord avec M. Netanyahu sur des sujets relatifs au cessez-le-feu dans la bande de Gaza.

Quant au dirigeant de l'opposition, Yaïr Lapid, du parti centriste Yesh Atid ("il y a un futur", en hébreu), il a taclé M. Netanyahu en écrivan sur X: "rappel: la loi israélienne stipule que la première condition pour obtenir une grâce est l'aveu de culpabilité et l'expression de remords pour les actes commis".

Lors d'un discours au Parlement israélien le 13 octobre, M. Trump avait déjà suggéré qu'une grâce lui soit accordée.

"J'ai une idée. Monsieur le président (Isaac Herzog), pourquoi ne pas lui accorder une grâce? Ce passage n'était pas prévu dans le discours (...) Mais j'aime bien ce monsieur", avait dit le président américain dans son allocution, mettant en avant qu'il a été "l'un des plus grands" dirigeants "en temps de guerre".

 


Famine: l'ONU alerte sur «16 zones critiques» où la situation s'aggrave

Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations.  L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante".  Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh. (AFP)
Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations. L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante". Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh. (AFP)
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  • Selon un rapport conjoint de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Programme alimentaire mondial (PAM), l'insécurité alimentaire aiguë à laquelle sont confrontées 16 zones critiques dans le monde s'accentue
  • "Les conflits, les chocs économiques, les phénomènes météorologiques extrêmes et l'insuffisance critique des financements exacerbent des conditions déjà désastreuses", notent la FAO et le PAM

ROME: Des millions de personnes supplémentaires dans le monde pourraient être confrontées à la famine ou au risque de famine, ont averti mercredi les deux organes de l'ONU dédiés à l'alimentation et à l'agriculture, dans un contexte tendu par la limitation des financements.

Selon un rapport conjoint de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Programme alimentaire mondial (PAM), l'insécurité alimentaire aiguë à laquelle sont confrontées 16 zones critiques dans le monde s'accentue.

"Les conflits, les chocs économiques, les phénomènes météorologiques extrêmes et l'insuffisance critique des financements exacerbent des conditions déjà désastreuses", notent la FAO et le PAM, tous deux basés à Rome, dans un communiqué commun.

Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen figurent parmi les pays les plus touchés, "où les populations sont confrontées à un risque imminent de famine catastrophique", souligne le rapport des deux organisations.

L’Afghanistan, la République démocratique du Congo, la Birmanie, le Nigeria, la Somalie et la Syrie sont considérés quant à eux comme étant dans une situation "très préoccupante".

Les quatre autres zones critiques sont le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et la situation des réfugiés rohingyas au Bangladesh.

"Nous sommes au bord d'une catastrophe alimentaire totalement évitable qui menace de provoquer une famine généralisée dans de nombreux pays", a mis en garde Cindy McCain, directrice générale du PAM, citée dans le communiqué, ajoutant que "ne pas agir maintenant ne fera qu'aggraver l'instabilité".

Le financement de l'aide humanitaire est "dangereusement insuffisant", alerte également le rapport, précisant que sur les 29 milliards de dollars nécessaires pour venir en aide aux populations vulnérables, seuls 10,5 milliards ont été reçus, précipitant notamment l'aide alimentaire aux réfugiés "au bord de la rupture".

Le PAM indique avoir réduit son assistance aux réfugiés et aux personnes déplacées en raison des coupes budgétaires et suspendu les programmes d'alimentation scolaire dans certains pays.

La FAO prévient de son côté que les efforts pour protéger les moyens de subsistance agricoles sont menacés et alerte sur la nécessité d'un financement urgent pour les semences et les services de santé animale.

"La prévention de la famine n’est pas seulement un devoir moral – c’est un investissement judicieux pour la paix et la stabilité à long terme", a rappelé le directeur général de la FAO, Qu Dongyu.