Le régime iranien intensifie sa violence et son oppression

Le régime a exécuté cette semaine le journaliste iranien dissident Rouhollah Zam (Photo, AN)
Le régime a exécuté cette semaine le journaliste iranien dissident Rouhollah Zam (Photo, AN)
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Publié le Dimanche 20 décembre 2020

Le régime iranien intensifie sa violence et son oppression

Le régime iranien intensifie sa violence et son oppression
  • Le niveau d'oppression nationale a atteint un nouveau sommet en Iran, alors que le régime recourt de plus en plus aux actions brutales pour réprimer les dissidents et ceux qui critiquent ses actions
  • Le régime a exécuté cette semaine par pendaison le journaliste iranien dissident Rouhollah Zam, qui vivait en exil en France et aurait été enlevé par des agents travaillant pour le régime iranien

Le niveau d'oppression nationale a atteint un nouveau sommet en Iran, alors que le régime recourt toujours davantage aux actions brutales pour réprimer les dissidents et ceux qui critiquent ses actions.

L'une des tactiques que le régime utilise de plus en plus fréquemment consiste à faire taire ou à éliminer des personnalités de premier plan qui osent s'opposer à l’établissement théocratique.

À titre d'exemple, le régime a pendu cette semaine le journaliste iranien dissident Rouhollah Zam. Celui-ci vivait en exil en France et aurait été enlevé par des agents travaillant pour le régime iranien, peu de temps après avoir quitté le pays, le 11 octobre 2019. Zam dirigeait le site d'information en ligne AmadNews, et sa chaîne sur l'application Telegram aurait compté plus d'un million d'abonnés.

En exécutant des personnalités aussi prestigieuses, Téhéran tente de semer la peur et d'envoyer à la population un avertissement: toute opposition à l'establishment politique sera durement réprimée.

Le traitement de Zam, depuis son enlèvement jusqu'au jour de son exécution, est très similaire à celui qu’on a réservé à d'autres militants politiques ou défenseurs des droits de l’homme que le régime a emprisonnés ou exécutés. Ainsi, le journaliste a été contraint de se confesser et ses aveux, enregistrés sur bande vidéo, ont été rendus publics. Il a également été reconnu coupable de l’accusation vague de «corruption territoriale», au cours d'un procès qui ne fut ni équitable, ni régulier.

Il y a quelques mois, le régime iranien a exécuté un autre détenu bien connu, le lutteur Navid Afkari. Afkari a été pendu dans la ville méridionale de Chiraz, selon les médias d'État iraniens. Il s'agissait aussi, de toute évidence, d'une exécution effectuée en toute hâte; Afkari s'est même vu refuser une dernière visite de sa famille.

Comme beaucoup d'autres personnes qui ont participé à des manifestations contre le régime, Afkari a été sauvagement torturé. «Pendant environ cinquante jours, j'ai dû endurer les plus horribles tortures physiques et psychologiques», révèle-t-il dans une lettre. «Ils me battaient avec des bâtons et des matraques, me frappant les bras, les jambes, l'abdomen et le dos. Ils mettaient un sac en plastique sur ma tête et me torturaient jusqu'à ce que je suffoque, à deux doigts de la mort. Ils ont également versé de l'alcool dans mon nez.»

Le régime de Téhéran vise également les stars des médias sociaux comme Sahar Tabar, de son vrai nom Fatemeh Khishvand, âgée de 19 ans, qui compte près de 500 000 abonnés sur Instagram. Elle aussi a été accusée de «corruption sur terre» – accusée en particulier de corrompre la jeunesse. Ses aveux forcés ont été diffusés à la télévision d'État iranienne. Le régime a désactivé son compte Instagram et a refusé de la libérer, même après qu'elle a contracté la Covid-19 en prison.

Le régime intensifie son oppression parce qu'il subit des pressions importantes aux niveaux national, régional et mondial, et ses dirigeants se rendent compte que leur emprise sur le pouvoir est en danger.

Sur le plan national, le mécontentement du peuple iranien à l’égard de ses dirigeants a atteint un niveau sans précédent. Cette colère contre le régime est alimentée par des facteurs à la fois politiques et économiques. De nombreux Iraniens sont extrêmement irrités par les mensonges et la corruption généralisée au sommet de l’État et par la manière dont la richesse de la nation est gaspillée afin de satisfaire les ambitions révolutionnaires et géopolitiques des religieux au pouvoir.

En ce qui concerne la région, la popularité du régime est probablement à son plus bas niveau au Moyen-Orient. Les populations libanaise et irakienne ont exprimé leur opposition à l’influence et au soutien qu’apporte l’Iran aux milices dans leur pays, l’accusant d’ingérence.

Téhéran est également en faillite économique. Les religieux au pouvoir font face à l'un des pires déficits budgétaires de leur règne, qui s’étend sur quatre décennies. La République islamique enregistre un déficit de deux cents millions de dollars par semaine et on estime que, si la pression sur Téhéran se poursuit, le déficit total atteindra environ dix milliards de dollars d'ici au mois de mars 2021. Cela augmentera l'inflation et dévalorisera encore davantage la monnaie.

La chute de la monnaie a pour conséquence le fait que le peuple iranien éprouve les plus grandes difficultés à joindre les deux bouts. Même le quotidien d'État Mardomsalari adresse cette mise en garde: «Nous avons une économie extrêmement défaillante et déchue. La principale raison en est le choc monétaire et le pillage de l'économie par les entreprises semi-privées et les banques. Les sanctions constituent désormais une excuse qu’utilisent certaines personnes pour piller le pays. Nous souffrons à la fois de sanctions étrangères et nationales et de ceux qui profitent de cette situation.»

Malgré la répression accrue du régime iranien, l’ONU et l’Union européenne n’ont malheureusement toujours pas désigné les dirigeants du pays comme responsables. L'Union européenne semble plutôt avoir hâte de reprendre l'accord nucléaire de 2015 et de voir les sanctions américaines contre Téhéran levées lorsque Joe Biden entrera à la Maison Blanche.

Comme l'a souligné Amnesty International cette semaine, «le monde ne doit pas rester silencieux alors que les autorités iraniennes portent leurs attaques, qui étaient déjà horribles, contre le droit à la vie et la liberté d'expression, à des niveaux sans précédent. Nous appelons la communauté internationale, y compris les États membres du Conseil des droits de l'homme des Nations unies et l'Union européenne, à prendre des mesures immédiates pour faire pression sur les autorités iraniennes afin qu'elles cessent leur utilisation croissante de la peine de mort comme arme de répression politique.»

En un mot, alors que la pression continue d’augmenter sur le régime iranien, ses dirigeants multiplient les actes de violence, de répression et d'oppression contre leurs propres citoyens.

 

Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard. Twitter : @Dr_Rafizadeh.

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com