Bratislava accuse Moscou d'«ingérence», le populiste Robert Fico désigné Premier ministre

Le président du parti Smer-SD, Robert Fico, arrive pour une conférence de presse au siège du parti après des élections législatives anticipées à Bratislava, en Slovaquie, le 1er octobre 2023 (Photo, AFP).
Le président du parti Smer-SD, Robert Fico, arrive pour une conférence de presse au siège du parti après des élections législatives anticipées à Bratislava, en Slovaquie, le 1er octobre 2023 (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 03 octobre 2023

Bratislava accuse Moscou d'«ingérence», le populiste Robert Fico désigné Premier ministre

  • Le parti de Robert Fico, Smer-SD, a obtenu 23% des voix, et devancé le parti centriste la Slovaquie progressiste (PS, 18%), lors du scrutin de samedi
  • L'ambassade russe à Bratislava a démenti lundi toute interférence

BRATISLAVA: La Slovaquie a accusé lundi la Russie "d'ingérence inadmissible" dans les élections de samedi, tandis que la présidente slovaque confiait la formation du nouveau gouvernement au populiste Robert Fico, opposé à l'aide militaire à l'Ukraine et considéré comme prorusse.

Le parti de M. Fico, Smer-SD, a obtenu 23% des voix, et devancé le parti centriste la Slovaquie progressiste (PS, 18%), lors du scrutin de samedi.

La Slovaquie a accusé lundi la Russie "d'ingérence" dans les élections législatives de samedi et a convoqué un diplomate russe à la suite des déclarations du chef du renseignement extérieur russe qui a évoqué "l'ingérence" de Washington dans la politique intérieure slovaque.

Le ministère slovaque des Affaires étrangères a protesté contre les déclarations de Sergueï Narychkine, qui a remis "en question l'intégrité des élections libres et démocratiques en Slovaquie" et a qualifié ces propos "d'ingérence inadmissible de la Fédération de Russie dans le processus électoral" en Slovaquie.

L'ambassade russe à Bratislava a démenti lundi toute interférence. "Contrairement à certains alliés actuels de la Slovaquie, nous n'interférons pas dans les affaires intérieures d'autres pays et nous ne nous engageons pas dans un changement de régime", a déclaré l'ambassade, citée par des agences de presse russes.

De son côté, le Département d'Etat américain a rappelé que "les Etats-Unis ne prennent pas position dans les élections des pays étrangers".

"Je comprends que les résultats des élections soient associés à diverses préoccupations pour de nombreuses personnes", a déclaré la présidente Zuzana Caputova, elle-même ancienne responsable de la PS.

Or, "la tâche du chef de l'Etat est de respecter le résultat des élections démocratiques", a-t-elle fait valoir.

Pendant la campagne, M. Fico, 59 ans, a juré que la Slovaquie n'enverrait plus "une seule balle de munition" à l'Ukraine et appelé à de meilleures relations avec la Russie.

L'ex-Premier ministre a déclaré récemment que "la guerre en Ukraine a commencé en 2014 lorsque des fascistes ukrainiens ont tué des victimes civiles de nationalité russe", reprenant à son compte des affirmations russes non prouvées.

Dimanche, il a estimé que son pays de 5,4 millions d'habitants avait des "problèmes plus importants" que l'aide à l'Ukraine, alors que jusqu'à présent la Slovaquie, membre de l'UE et de l'Otan, a été un important donateurs européens à l'Ukraine, en proportion de son PIB.

"Nous pensons que l'Ukraine est une immense tragédie pour tous. Si le Smer est chargé de former un cabinet (...), nous ferons de notre mieux pour organiser des pourparlers de paix dès que possible", a déclaré M. Fico à la presse.

«Choix du peuple»

Lundi, le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba a assuré que Kiev respectait "le choix du peuple slovaque".

"Mais il est trop tôt pour dire en quoi le résultat de ces élections va affecter la position de la Slovaquie", a-t-il affirmé en marge d'une réunion ministérielle européenne à Kiev.

Pour gouverner M. Fico, déjà Premier ministre dans les années 2006-2010 et 2012-2018, aura besoin d'une coalition pour avoir la majorité au Parlement de 150 sièges, son parti ayant obtenu 42 sièges.

Le parti de gauche Hlas-SD, formé autour de dissidents du Smer, est l'un des partenaires potentiels.

Hlas qui a obtenu 27 sièges est dirigé par Peter Pellegrini, devenu Premier ministre en 2018 quand M. Fico fut contraint de démissionner à la suite des manifestations nationales après le meurtre du journaliste d'investigation Jan Kuciak et de sa fiancée.

M. Kuciak avait révélé des liens entre la mafia italienne et le gouvernement de Fico, dans son dernier article publié à titre posthume.

Les deux partis pourraient faire équipe avec le parti nationaliste SNS qui a obtenu 10 sièges, pour bénéficier d'une majorité de 79 sièges.

Selon le Kremlin, il est "absurde" de qualifier le parti de M. Fico de "prorusse".

"Nous sommes confrontés à une situation où tout homme politique qui est enclin à penser à la souveraineté de son pays, à défendre les intérêts de son pays, est considéré comme prorusse. C'est absurde", a déclaré aux journalistes le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.

Selon les analystes, le nouveau gouvernement pourrait radicalement changer la politique étrangère de la Slovaquie pour la rapprocher de celle du Premier ministre hongrois Viktor Orban.

M. Orban a lui-même félicité M. Fico sur X, anciennement Twitter, "pour sa victoire incontestable aux élections législatives slovaques".

"Il est toujours bon de travailler avec un patriote. J'ai hâte de pouvoir le faire !", a écrit Orban dimanche.

La Constitution slovaque ne prévoit pas de date limite pour la formation d'un nouveau gouvernement.

Toutefois, le président est tenu de convoquer la première session du parlement dans les 30 jours suivant la publication des résultats des élections.


Canada et Mexique veulent un accord commercial avec les Etats-Unis "plus équitable et plus efficace"

Le Premier ministre canadien Mark Carney (à gauche) et la présidente du Mexique Claudia Sheinbaum (à droite) posent pour une photo après une conférence de presse conjointe au Palais national de Mexico, le 18 septembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre canadien Mark Carney (à gauche) et la présidente du Mexique Claudia Sheinbaum (à droite) posent pour une photo après une conférence de presse conjointe au Palais national de Mexico, le 18 septembre 2025. (AFP)
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  • Le Canada et le Mexique souhaitent renforcer et rééquilibrer l’ACEUM, leur accord de libre-échange avec les États-Unis, dans un contexte de retour annoncé du protectionnisme sous Trump
  • Les deux pays lancent des initiatives pour développer leur commerce bilatéral en utilisant leurs propres ports, afin de réduire leur dépendance logistique et commerciale vis-à-vis des États-Unis

MEXICO: Le Canada et le Mexique ont défendu jeudi leur accord de libre-échange avec les États-Unis, tout en proposant de le rendre "plus équitable et plus efficace" lors de son réexamen prévu pour l'an prochain, face à la poussée protectionniste de Donald Trump.

Lors d'une conférence de presse à Mexico aux côtés de la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum, le Premier ministre canadien Mark Carney a affirmé que son pays était "absolument déterminé à travailler avec (ses) deux partenaires".

Le Canada et le Mexique souhaitent que l'accord commercial ACEUM les liant actuellement aux États-Unis soit "plus équitable et plus efficace", a-t-il souligné.

Mme Sheinbaum s'est pour sa part dite "optimiste" quant à l'avenir de l'accord ACEUM "non seulement par conviction mais parce que je crois que le traité commercial (...) va prévaloir".

L'accord, en place depuis 2020, doit être réexaminé par les trois pays l'année prochaine. Le président américain souhaite le renégocier en assurant des conditions plus favorables aux fabricants américains.

Donald Trump a déjà imposé des droits de douane sur certaines produits provenant du Canada et du Mexique et ne relevant pas de l'ACEUM. Il a menacé ses voisins de nouvelles représailles s'ils ne parviennent pas à freiner la migration illégale et le trafic de drogue.

L'ACEUM, qui a succédé à l'accord de libre-échange Alena, est crucial pour les économies du Mexique et du Canada, qui destinent respectivement environ 80% et 75% de leurs exportations aux États-Unis.

"Nous sommes plus forts ensemble", a insisté Mark Carney.

"La meilleure manière de concurrencer d'autres régions du monde est de renforcer le traité commercial entre les trois pays", a abondé la présidente mexicaine.

La guerre commerciale de l'administration Trump a déjà perturbé de manière significative les relations entre les trois pays.

Des droits de douane américains affectent les secteurs de l'automobile, de l'acier et de l'aluminium au Canada et touchent les industries mexicaines de l'automobile et de l'acier.

La rencontre des deux dirigeants visait également à réduire l'énorme écart entre leur commerce bilatéral et celui que les deux pays entretiennent respectivement avec les États-Unis.

Le commerce de marchandises entre le Mexique et les Etats-Unis a totalisé plus de 763 milliards de dollars en 2024, tandis que celui des États-Unis avec le Canada a atteint près de 762 milliards de dollars au cours de la même période.

En comparaison, les échanges de biens entre le Mexique et le Canada (31,8 milliards de dollars) font pâle figure.

Le Canada est le cinquième partenaire commercial du Mexique dans le monde, tandis que le pays latino-américain occupe la troisième place parmi les nations avec lesquelles les entreprises canadiennes commercent.

Les deux dirigeants, qui cherchent à diversifier leurs exportations, ont annoncé jeudi des programmes pour renforcer leurs échanges commerciaux et les investissements, en utilisant les ports canadiens et mexicains plutôt qu'en expédiant des marchandises à travers les États-Unis.


Gaza et l'avenir des Palestiniens au centre du sommet annuel de l'ONU

Dès lundi, un sommet coprésidé par la France et l'Arabie saoudite se penchera sur l'avenir de la solution à deux Etats, israélien et palestinien, vivant côte à côte en paix et sécurité. (AFP)
Dès lundi, un sommet coprésidé par la France et l'Arabie saoudite se penchera sur l'avenir de la solution à deux Etats, israélien et palestinien, vivant côte à côte en paix et sécurité. (AFP)
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  • Après l'adoption à une majorité écrasante la semaine dernière par l'Assemblée générale d'un texte qui soutient un futur Etat palestinien mais en excluant sans équivoque le Hamas, cette réunion devrait voir la reconnaissance de cet Etat palestinien
  • Un geste "symbolique" qui pourra avoir une vraie portée "si les pays qui reconnaissent la Palestine enchaînent avec d'autres mesures pour tenter de faire pression sur Israël pour mettre fin à sa campagne à Gaza"

NATIONS-UNIES: Quelque 140 chefs d'Etat et de gouvernement sont attendus la semaine prochaine à New York pour la grand-messe annuelle de l'ONU où l'avenir des Palestiniens et de Gaza sera au centre de l'attention, même en l'absence de Mahmoud Abbas.

Près de deux ans après le début de l'offensive israélienne dans la bande de Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas du 7 octobre 2023, la catastrophe humanitaire qui ravage le petit territoire palestinien risque d'éclipser toutes les autres crises et conflits qui ravagent la planète, de l'Ukraine à Haïti ou au Soudan.

Dès lundi, un sommet coprésidé par la France et l'Arabie saoudite se penchera sur l'avenir de la solution à deux Etats, israélien et palestinien, vivant côte à côte en paix et sécurité.

Après l'adoption à une majorité écrasante la semaine dernière par l'Assemblée générale d'un texte qui soutient un futur Etat palestinien mais en excluant sans équivoque le Hamas, cette réunion devrait voir la reconnaissance formelle de cet Etat palestinien par plusieurs pays, en premier lieu par le président français Emmanuel Macron.

Un geste "symbolique" qui pourra avoir une vraie portée "si les pays qui reconnaissent la Palestine enchaînent avec d'autres mesures pour tenter de faire pression sur Israël pour mettre fin à sa campagne à Gaza", commente Richard Gowan, de l'International Crisis Group.

Mais il craint dans le même temps des représailles israéliennes, évoquant un risque d'"escalade" de la part du Premier ministre Benjamin Netanuyahu qui doit s'exprimer à la tribune de l'Assemblée générale en fin de semaine prochaine et a clairement dit qu'"il n'y aurait pas d'Etat palestinien".

Les Etats-Unis, principal allié d'Israël, se sont eux aussi publiquement opposé à ce processus et ont annoncé qu'ils n'accorderaient pas de visa à la délégation palestinienne, dont le président Mahmoud Abbas. L'Assemblée doit voter vendredi pour l'autoriser à s'exprimer par vidéo.

Autre star attendue de ce sommet annuel à New York, Donald Trump. Il s'est lancé depuis son retour à la Maison Blanche dans des coupes massives de l'aide américaine à l'étranger touchant de nombreuses agences onusiennes en difficulté, alors que les besoins humanitaires se multiplient.

Système multilatéral "menacé" 

C'est dans ce contexte de crise financière et de crise du multilatéralisme, et dans un monde qui connaît un nombre record de conflits depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, que l'ONU fête sans tambour ni trompette ses 80 ans, tentant d'écarter les critiques sur son impuissance.

"Le système multilatéral (...) est menacé", s'est inquiété Federico Borello, patron par intérim de Human Rights Watch.

"Pour être du bon côté de l'Histoire, il est crucial de résister aux gouvernements puissants qui tentent de saper les normes internationales et de démolir les moyens de rendre des comptes", a-t-il ajouté, dénonçant les violations du droit humanitaire à Gaza, en Ukraine ou ailleurs.

"Les gens réclament des réponses et des actes. Des actes à la hauteur de la gravité des défis auquel le monde fait face", des guerres au réchauffement climatique, en passant par les inégalités ou les risques des nouvelles technologies, a insisté de son côté le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.

En ce 80e anniversaire, environ 140 chefs d'Etat et de gouvernement devraient s'exprimer à New York, de l'Ukrainien Volodymyr Zelensky au Brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, du Canadien Mark Carney à l'Iranien Massoud Pezeshkian, sans oublier le Syrien Ahmad al-Chareh.

Près d'un an après que ses forces, dirigées par des islamistes, ont renversé Bachar al-Assad, la visite du président syrien par intérim est très attendue alors que le pays tente de se reconstruire après des années de guerre civile.

Autre sujet sensible probablement au menu des discussions diplomatiques, le programme nucléaire iranien, alors que les sanctions de l'ONU contre Téhéran, levées il y a dix ans, pourraient être remises en vigueur fin septembre à la suite d'un processus déclenché fin août par Paris, Londres et Berlin.

Antonio Guterres et le président Lula organiseront par ailleurs mercredi un sommet sur le climat où certains Etats pourraient annoncer ou préciser leurs nouvelles ambitions de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre, à quelques semaines de la COP30 au Brésil.


A l'ONU, l'enquêtrice en chef sur Gaza a encore espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés

Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
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  • Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide"
  • Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger"

GENEVE: Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés.

"La justice est lente", a affirmé l'ancienne juge sud-africaine, dans un entretien à l'AFP.

Mais "comme l'a dit (Nelson) Mandela, cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse. Je considère qu'il n'est donc pas impossible qu'il y ait des arrestations et des procès" à l'avenir, a-t-elle ajouté.

La commission d'enquête, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, a établi qu'Israël commet un génocide à Gaza depuis le début de la guerre déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas du 7-Octobre.

Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide".

Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger".

La Cour pénale internationale (CPI) avait déjà émis des mandats d'arrêt contre MM. Netanyahu et Gallant.

Mme Pillay reconnaît que la CPI dépend des Etats pour la mise en œuvre des mandats d'arrêt car elle n'a "ni shérif, ni forces de police".

Mais elle veut y croire, faisant une comparaison : "Je n'aurais jamais pensé que l'apartheid prendrait fin de mon vivant".

"Tellement douloureux" 

Jeune avocate d'origine indienne dans l'Afrique du Sud de l'apartheid, devenue juge et Haute-Commissaire aux droits de l'homme à l'ONU (2008-2014), Mme Pillay, 83 ans, a l'art de traiter des dossiers difficiles.

Sa carrière l'a menée des cours sud-africaines, où elle a défendu les activistes anti-apartheid et obtenu des droits cruciaux pour les prisonniers politiques, au Tribunal pénal international pour le Rwanda, en passant par la CPI.

Sa mission est des plus ardues depuis qu'elle préside, depuis sa création en 2021, la commission chargée par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU d'enquêter sur les atteintes aux droits dans les territoires palestiniens et en Israël.

Elle déplore d'avoir été qualifiée d'"antisémite" depuis et dénonce les appels sur les réseaux sociaux de ceux qui réclament que les Etats-Unis la sanctionnent, comme Washington l'a fait pour une rapporteure de l'ONU, des juges de la CPI et des ONG palestiniennes.

Mais le plus dur, pour elle et son équipe, est de visionner les vidéos provenant de Gaza.

"Nous nous inquiétons pour notre personnel. Nous les surmenons et c'est traumatisant ces vidéos", dit-elle, citant "des violences sexuelles contre les femmes" et "les médecins qui sont dénudés par l'armée".

"C'est tellement douloureux" à regarder même si "on ne peut pas comparer notre souffrance à celle de ceux qui l'ont vécue", poursuit-elle.

Alors qu'elle présidait le Tribunal pénal international pour le Rwanda, des vidéos de civils abattus ou torturés l'ont aussi "marqué à vie".

Selon elle, la comparaison entre le Rwanda et Gaza ne s'arrête pas là : "Je vois des similitudes. Ce sont les mêmes méthodes".

Du Rwanda à Gaza 

"Dans le cas du Rwanda, c'était le groupe des Tutsi qui était visé. Ici, tous les éléments de preuve montrent que c'est le groupe palestinien qui est visé", dit-elle.

Elle mentionne aussi les propos de dirigeants israéliens qui "déshumanisent" les Palestiniens en les comparant à des "animaux". Comme lors du génocide rwandais, lorsque les Tutsi étaient "traités de cafards", ce qui revient à dire qu'"il est acceptable de les tuer", dénonce-t-elle.

Mme Pillay a indiqué qu'à l'avenir la commission entendait se pencher aussi sur des crimes supposés commis par d'autres "individus", expliquant qu'une grande partie des preuves a été publiée par les soldats israéliens eux-mêmes sur les réseaux sociaux.

Elle déplore toutefois que, faute de financements, la commission n'ait pas pu encore examiner si certains Etats qui fournissent de l'armement à Israël pouvaient être considérés complices.

Un travail qu'elle laisse à son successeur. Elle quitte la commission le 3 novembre en raison de son âge et de problèmes de santé.

Avant cela, elle doit présenter un dernier rapport devant l'Assemblée générale de l'ONU à New York. "J'ai déjà un visa", confie-t-elle.