La Pologne à l'approche de législatives cruciales et serrées

Le candidat du parti ultranationaliste polonais (Konfederacja), Slawomir Mentzen, s'adresse à ses partisans lors d'un rassemblement préélectoral à Lublin, en Pologne, le 6 octobre 2023. (AFP)
Le candidat du parti ultranationaliste polonais (Konfederacja), Slawomir Mentzen, s'adresse à ses partisans lors d'un rassemblement préélectoral à Lublin, en Pologne, le 6 octobre 2023. (AFP)
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Publié le Vendredi 13 octobre 2023

La Pologne à l'approche de législatives cruciales et serrées

  • Si tous les sondages placent le parti populiste-nationaliste au pouvoir, Droit et Justice (PiS), en première position, il semble impossible qu'il obtienne une majorité absolue
  • Le partenaire le plus probable du PiS serait alors la Confédération qui a appelé à en finir avec l'aide à l'Ukraine

VARSOVIE: Les populistes-nationalistes resteront-ils au pouvoir ? La Pologne se prépare à des élections serrées dimanche, considérées comme cruciales pour l'avenir du pays et dont l'issue, selon les sondages, dépendra des résultats des petits partis, nécessaires pour former une coalition.

Si tous les sondages placent le parti populiste-nationaliste au pouvoir, Droit et Justice (PiS), en première position, il semble impossible qu'il obtienne une majorité absolue.

Selon un sondage réalisé les 9 et 10 octobre par la fondation Ibris, le PiS obtiendrait 33,5% des voix, devant la Coalition civique (centre) 28%, la Troisième voie (chrétien-démocrate) 10,9%, la Gauche 10,1% et la Confédération (extrême droite) 9,2%.

Le partenaire le plus probable du PiS serait alors la Confédération qui a appelé à en finir avec l'aide à l'Ukraine.

Selon cette hypothèse, le PiS et la Confédération obtiendraient ensemble une courte majorité au sein du parlement polonais, qui compte 460 sièges.

Toutefois, un autre sondage réalisé cette semaine par la même organisation montre que les deux partis n'atteignent pas la majorité requise.

En revanche, la Coalition civique, dirigée par l'ancien chef du Conseil européen et ex-Premier ministre Donald Tusk, pourrait être en mesure de former une majorité avec deux autres petits partis: la Troisième voie et la Gauche.

"Le PiS ne formera pas le prochain gouvernement en Pologne", estime Wojciech Przybylski, analyste politique du groupe Visegrad Insight, soulignant qu'une alliance PiS-Confédération semble peu probable.

Selon lui, "l'opposition a désormais plus de chances pour former un prochain gouvernement de coalition".

Ces pommes de discorde entre Varsovie et Bruxelles

La Pologne, membre de l'Union européenne depuis 2004, est souvent accusée d'y jouer les trouble-fête depuis l'arrivée au pouvoir en 2015 de la droite populiste nationaliste qui brigue son troisième mandat successif aux élections législatives de dimanche.

Voici les principaux différends apparus dans les relations récentes entre Varsovie et Bruxelles:

Président du Conseil européen

Début 2017, le gouvernement de Varsovie tente de barrer au Polonais Donald Tusk, aujourd'hui à la tête de l'opposition centriste dans son pays, la route vers un second mandat au poste du président du Conseil européen. Honni par le PiS, l'ancien Premier ministre peut continuer sa mission grâce au soutien de 27 pays face à la voix isolée du pouvoir nationaliste polonais.

L'Etat de droit

L'UE est engagée dans un bras de fer depuis plusieurs années avec le gouvernement polonais à propos de ses réformes judiciaires, accusées de saper l'indépendance des juges.

La Pologne est visée par les procédures de l'article 7 du Traité de l'UE, le mécanisme européen le plus puissant, pouvant conduire jusqu'à la suspension du droit de vote au Conseil européen.

Le pays se voit toujours bloquer l'accès aux plus de 35 milliards d'euros prévus pour lui dans le Plan de relance européen, et à d'autres fonds UE, tout en payant de grosses amendes pour non respect de décisions de la justice européenne.

Primauté des lois nationales 

En juillet 2021, sous l'influence du parti au pouvoir, le Tribunal constitutionnel polonais déclare non conformes à la Constitution les décisions de la Cour de Justice de l'UE (CJUE) à propos des réformes judiciaires polonaises.

Les tensions montent encore quatre mois plus tard, quand le même tribunal, saisi par le Premier ministre Mateusz Morawiecki, conteste la suprématie du droit européen en jugeant certains articles des traités de l'UE "incompatibles" avec la Loi fondamentale polonaise.

A la suite des arrêts contestant la primauté du droit européen, la Commission européenne saisit en 2023 la justice de l'UE contre Varsovie.

Politiques climatiques de l'UE 

En août dernier, la Pologne porte plainte devant la CJUE contre les politiques climatiques approuvées par l'UE. Selon Varsovie ces politiques n’ont pas été correctement évaluées, ont outrepassé les compétences de Bruxelles et menacent l’économie et la sécurité énergétique de la Pologne.

Les 27 ont adopté à la majorité des voix une série de législations sur le climat visant à réduire d'ici 2030 leurs émissions nettes de gaz à effet de serre à 55% par rapport aux niveaux de 1990, et à aider les pays de l'Union à se conformer à l’Accord de Paris sur le changement climatique.

La mine de Turow

Prague saisit en 2021 la justice européenne contre son voisin pour le détournement d'eau engendré par l'énorme mine de charbon à ciel ouvert de Turow en Pologne et pour le non-respect des règles sur le climat. La Pologne est sommée de fermer le site.

Arguant de sa sécurité énergétique dépendante du charbon, la Pologne refuse de se plier aux décisions de la justice européenne et maintient le fonctionnement du site mais cherche finalement un accord avec Prague, déboursant des millions d'euros contre le retrait de la plainte.

La forêt de Bialowieza

En 2018, la Pologne est condamnée par la CJUE pour avoir enfreint, avec des abattages massifs d'arbres, la législation sur la protection de l'environnement.

Selon la CJUE ces opérations ont conduit à la disparition d'une partie de la grande forêt naturelle de Bialowieza (nord-est), un site protégé, classé par l'Unesco au programme Natura 2000.

Varsovie argue de la prolifération exceptionnelle de coléoptères xylophages, rongeurs de bois, mais arrête ces abattages aussitôt.

Migrations 

La Pologne, comme la Hongrie, s'oppose aux règles de la solidarité européenne face aux demandeurs d'asile dans l'UE, notamment au système de quotas de réfugiés prévus lors de la crise des années 2015-2016.

Les deux pays tentent en vain, en 2023, de bloquer un compromis sur une nouvelle politique migratoire européenne.

Rhétorique anti-migrants 

Les partisans du PiS affirment que leur victoire permettra au parti de concrétiser sa vision d'une Pologne puissante et souveraine, fondée sur des valeurs traditionnelles.

"Il n'y a rien de mieux en vue", dit Eugeniusz Krzyszton, un petit agriculteur de 71 ans vivant à Godziszow, un village qui a voté à 89% pour le PiS lors des dernières élections de 2019.

Interrogé sur les problèmes économiques que la Pologne a connus ces dernières années, il répond que "le gouvernement a fait de son mieux".

La campagne a été très polarisée, marquée par une série d'attaques personnelles contre Donald Tusk, orchestrée par le parti au pouvoir qui l'a accusé d'agir dans l'intérêt de Berlin, Moscou et Bruxelles.

Le PiS a intensifié sa rhétorique anti-migrants: le Premier ministre Mateusz Morawiecki a déclaré jeudi que les familles polonaises devraient être protégées contre ces immigrés illégaux "qui n'ont aucun respect pour notre culture".

Selon l'opposition, une victoire du PiS entraînerait des tensions croissantes avec l'Union européenne. L'opposition accuse le gouvernement de préparer un "Polexit", c'est-à-dire la sortie de l'UE.

De nombreux partisans de l'opposition et des organisations non gouvernementales avertissent qu'un troisième mandat des nationalistes affaiblirait davantage les libertés démocratiques, telles que l'Etat de droit et les droits des médias.

"Il est grand temps de revenir à la normale, à l'Etat de droit, à la liberté de choix et d'expression", souligne Monika Pieleszynska, une employée de bureau de 43 ans, lors d'un grand rassemblement de l'opposition ce mois-ci.

Dates clés de l'histoire post-communiste de la Pologne

Voici quelques dates clés de l'Histoire récente de la Pologne :

1989 : Chute du communisme

La Pologne fut dirigée par le Parti communiste de la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu'en 1989.

Après des négociations dites de la Table ronde entre le régime du général Wojciech Jaruzelski et l'opposition dirigée par l'icône de la lutte anticommuniste Lech Walesa, les Polonais ont voté le 4 juin 1989 lors d'élections législatives partiellement libres, une première derrière le rideau de fer.

Ces élections ont conduit à un changement non violent de régime et à des réformes démocratiques.

1999 : Adhésion à l'Otan 

En 1999, la Pologne rejoint l'Alliance atlantique, tout comme la République tchèque et la Hongrie. Depuis, elle est protégée par les engagements de l'Otan en matière de défense collective, inscrits à l'article 5 de son traité fondateur.

2004 : Adhésion à l'UE 

La Pologne a rejoint l'Union européenne en 2004, dans le cadre du plus grand mouvement d'élargissement de l'histoire de cette organisation.

À la suite de l'adhésion, des millions de travailleurs polonais ont bénéficié de la liberté de circulation et ont émigré vers d'autres pays de l'UE, créant d'importantes diasporas en Allemagne, aux Pays-Bas, en Irlande et en Grande-Bretagne.

La Pologne n'a pas adopté la monnaie commune de l'Union européenne, l'euro. Elle est sortie relativement indemne de la crise financière mondiale de 2008 et a été le seul Etat membre de l'UE à éviter la récession.

2005 : Premier gouvernement du PiS 

En 2005, le conservateur catholique Jaroslaw Kaczynski, cofondateur et chef du parti Droit et Justice (PiS), remporte les élections législatives.

Peu après, son frère jumeau Lech est élu président.

Le PiS n'est resté au pouvoir que deux ans, la Plateforme civique, un parti libéral et centriste, prenant le relais en 2007 et gouvernant jusqu'en 2015.

2010 : Accident d'avion à Smolensk 

En 2010, un avion transportant le président polonais Lech Kaczynski s'est écrasé dans la forêt près de Smolensk en Russie, tuant les 96 personnes à bord.

La délégation officielle se rendait aux cérémonies commémorant l'assassinat de milliers de Polonais par la police secrète soviétique à Katyn, en 1940.

L'accident a suscité une vive controverse et un débat national, Jaroslaw Kaczynski le qualifiant de "crime de Poutine" et d'"attentat de Smolensk".

La Russie a catégoriquement rejeté toute responsabilité de l'accident, rejetant la faute sur la Pologne.

2015 : Droit et Justice de retour au pouvoir 

En 2015, le PiS a repris le pouvoir en remportant les élections législatives et présidentielles. Depuis, il s'est souvent heurté à l'UE, notamment sur la question de l'Etat de droit et de l'immigration.

Au plus fort de la crise migratoire en Europe, le chef du PiS, Jaroslaw Kaczynski, a marqué des points auprès de l'électorat avec sa rhétorique anti-immigration, notamment en mettant en garde contre les maladies et "toutes sortes de parasites" que les migrants pourraient apporter.

Le gouvernement PiS a refusé de participer à un plan de relocalisation des migrants et d'accueillir une part de demandeurs d'asile arrivés en Grèce et en l'Italie, dans le cadre d'un système européen de quotas.

2022 : Allié de l'Ukraine 

En février 2022, lorsque la Russie a lancé son invasion à grande échelle de l'Ukraine, la Pologne a servi de refuge pour des centaines de milliers de réfugiés fuyant le pays.

Plus de 974.000 réfugiés ukrainiens résident en Pologne.

Varsovie est aussi devenue l'un des plus fidèles alliés de Kiev en termes d'aide militaire.

Elle a souvent appelé les pays de l'Otan à fournir des équipements militaires modernes à l'Ukraine, lui offrant ses propres chars Leopard 2 ainsi que ses chars et ses avions de combat datant de l'ère soviétique.

Avant les élections de dimanche, les relations entre les deux pays se sont détériorées, le PiS imposant un embargo sur les importations des céréales ukrainiennes, Kiev portant l'affaire devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

Liens détériorés avec l'Ukraine 

Dorota Dakowska, professeure de science politique à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, estime qu'il s'agira de "l'élection la plus importante" depuis le premier vote de la période post-communiste en 1989.

"Ce qui est en jeu, c'est l'avenir de la démocratie en Pologne et l'avenir de la Pologne en tant que démocratie et Etat de droit", déclare-t-elle.

Kiev aussi observe la situation avec circonspection, car un gouvernement polonais où la Confédération aurait son mot à dire risquerait de détourner Varsovie de sa voie pro-ukrainienne.

La Pologne a compté parmi les principaux soutiens de l'Ukraine au sein de l'UE et de l'Otan, et a accueilli un million de réfugiés ukrainiens, mais la lassitude grandit chez nombre de Polonais.

Le gouvernement s'est brouillé récemment avec l'Ukraine au sujet de l'interdiction d'importations de céréales, arguant de la nécessité de protéger les agriculteurs polonais.

Selon Marcin Zaborowski, expert au sein du groupe de réflexion Globsec, le parti au pouvoir avait adopté une position plus froide à l'égard de l'Ukraine dans le but d'obtenir des votes nationalistes.

"Après les élections, il risque d'être trop tard pour revenir sur cette position, car le mal aura été fait", prévient-il.


Nouvelle date pour la conférence sur l’État palestinien relancée par la France et l’Arabie saoudite

Un drapeau palestinien flotte face aux colonies israéliennes en Cisjordanie occupée. La conférence franco-saoudienne sur la création d'un État palestinien, qui avait été reportée, a été reprogrammée pour les 28 et 29 juillet. (AFP/File Photo)
Un drapeau palestinien flotte face aux colonies israéliennes en Cisjordanie occupée. La conférence franco-saoudienne sur la création d'un État palestinien, qui avait été reportée, a été reprogrammée pour les 28 et 29 juillet. (AFP/File Photo)
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  • Initialement prévue du 17 au 20 juin, la conférence a été reportée après le lancement par Israël, le 13 juin, d'une guerre de 12 jours contre l'Iran
  • L'objectif de la conférence, reprogrammée pour les 28 et 29 juillet, est l'adoption urgente de mesures concrètes conduisant à la mise en œuvre d'une solution à deux États

NEW YORK : Une conférence internationale organisée et coprésidée par l'Arabie saoudite et la France pour discuter de la création d'un État palestinien, qui avait été reportée le mois dernier, a été reprogrammée pour la fin du mois.

"La conférence ministérielle sur la solution des deux États reprendra les 28 et 29 juillet ; les détails seront communiqués sous peu", ont confirmé des diplomates à Arab News vendredi.

Initialement prévu du 17 au 20 juin, l'événement, officiellement intitulé "Conférence internationale de haut niveau pour le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États", a été reporté après le lancement par Israël, le 13 juin, de son opération militaire de 12 jours contre l'Iran.

L'événement, convoqué par l'Assemblée générale des Nations unies, aura lieu au siège des Nations unies à New York. L'objectif est l'adoption urgente de mesures concrètes qui conduiront à la mise en œuvre d'une solution à deux États et mettront fin à des décennies de conflit entre Israéliens et Palestiniens.

Au moment du report, le mois dernier, le président français Emmanuel Macron avait déclaré que la conférence était repoussée pour des raisons logistiques et de sécurité, mais avait insisté sur le fait qu'elle se tiendrait "dès que possible".

Ce report ne "remet pas en cause notre détermination à aller de l'avant dans la mise en œuvre de la solution des deux États", avait-il ajouté

M. Macron devrait annoncer officiellement la reconnaissance par la France d'un État palestinien lors de cet événement. Cette semaine, il a exhorté les autorités britanniques à faire de même.

La Palestine est officiellement reconnue par 147 des 193 États membres de l'ONU. Elle bénéficie du statut d'observateur au sein de l'organisation, mais n'en est pas membre à part entière.

Lors d'une réunion préparatoire des Nations unies en mai, Manal Radwan, conseillère au ministère saoudien des affaires étrangères, a déclaré que la conférence intervenait à un moment "d'urgence historique", alors que Gaza "endurait des souffrances inimaginables".

Elle a déclaré que l'Arabie saoudite était honorée de se tenir aux côtés des autres nations engagées dans des efforts diplomatiques pour apporter "un changement réel, irréversible et transformateur, afin d'assurer, une fois pour toutes, le règlement pacifique de la question de la Palestine".

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Russie: le suicide apparent d'un ministre sème la peur au sein de l'élite

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
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  • Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement
  • Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours

SAINT-PETERSBOURG: Le suicide probable du ministre russe des Transports, Roman Starovoït, annoncé peu après son limogeage lundi par Vladimir Poutine sur fond d'allégations de corruption, a profondément choqué l'élite politique, où chacun redoute de faire les frais de la chasse aux profiteurs.

Ses funérailles ont eu lieu vendredi dans un cimetière de Saint-Pétersbourg en présence de sa famille et de collègues, mais en l'absence de M. Poutine qui n'a pas non plus participé à la cérémonie d'adieu jeudi.

Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement.

Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours.

"C'est une grande perte pour nous, très inattendue. Nous sommes tous choqués", a déclaré à l'AFP Vassilissa, 42 ans, l'épouse d'un collègue de M. Starovoït, lors de la cérémonie de jeudi.

"Il était tellement actif, joyeux, il aimait énormément la vie. Je ne comprends pas comment cela a pu arriver", ajoute cette femme, les larmes aux yeux.

Après avoir déposé devant le cercueil de grands bouquets de roses rouges, des anciens collègues de M. Starovoït, en costumes sombres, sont repartis très vite dans leurs luxueuses voitures noires.

Dans une ambiance très lourde rappelant les funérailles dans le film culte "Le Parrain" de Francis Ford Coppola, d'autres personnes interrogées par les journalistes de l'AFP dans la foule ont refusé de parler.

"Bouc émissaire" 

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin.

Son successeur à la tête de cette région, Alexeï Smirnov, a lui été arrêté au printemps pour le détournement des fonds destinés à renforcer les fortifications à la frontière. Celle-là même que les Ukrainiens ont traversé facilement, pour n'être repoussés que neuf mois plus tard.

Les autorités "ont essayé de faire de lui (Roman Starovoït) un bouc émissaire", accuse auprès de l'AFP Andreï Pertsev, analyste du média indépendant Meduza, reconnu "indésirable" et interdit en Russie.

L'incursion ukrainienne "s'est principalement produite parce qu'il n'y avait pas assez de soldats pour protéger la frontière", mais c'était "plus facile de rejeter la faute sur un responsable civil", explique-t-il.

L'affaire Starovoït s'inscrit dans une vague récente de répression visant de hauts responsables soupçonnés de s'être enrichis illégalement pendant l'offensive russe en Ukraine. Et selon des analystes, si les scandales de corruption on toujours existé en Russie, la campagne militaire a changé les règles du jeu politique.

"Il existait des règles auparavant, selon lesquelles les gens savaient: une fois qu'ils montaient suffisamment haut, on ne les embêtait plus", estime M. Pertsev. "Mais elles ne fonctionnent plus."

"On ne vole pas" 

Alors que Vladimir Poutine promettait régulièrement de s'attaquer à la corruption - étant lui même accusé de s'être enrichi illégalement par ses détracteurs -, les rares arrestations médiatisées ont été davantage utilisées pour cibler des opposants ou résultaient de luttes internes entre les échelons inférieurs du pouvoir en Russie.

Depuis l'offensive en Ukraine lancée en février 2022, "quelque chose dans le système a commencé à fonctionner de manière complètement différente", souligne la politologue Tatiana Stanovaïa du Centre Carnegie Russie Eurasie, interdit en Russie en tant qu'organisation "indésirable".

"Toute action ou inaction qui, aux yeux des autorités, accroît la vulnérabilité de l'État face aux actions hostiles de l'ennemi doit être punie sans pitié et sans compromis", estime Mme Stanovaïa en définissant la nouvelle approche du pouvoir.

Pour le Kremlin, la campagne en Ukraine est une "guerre sainte" qui a réécrit les règles, confirme Nina Khrouchtcheva, professeure à The New School, une université de New York, et arrière-petite-fille du dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev.

"Pendant une guerre sainte, on ne vole pas (...) on se serre la ceinture et on travaille 24 heures sur 24", résume-t-elle.

Signe des temps, plusieurs généraux et responsables de la Défense ont été arrêtés pour des affaires de détournement de fonds ces dernières années. Début juillet, l'ancien vice-ministre de la Défense Timour Ivanov a été condamné à 13 ans de prison.

Cette ambiance, selon Mme Stanovaïa, a créé un "sentiment de désespoir" au sein de l'élite politique à Moscou, qui est peu susceptible de s'atténuer.

"À l'avenir, le système sera prêt à sacrifier des figures de plus en plus en vue," avertit-elle.

 


Un trafic de stupéfiants démantelé entre Espagne et France, 13 arrestations

reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
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  • 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations
  • Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN

LYON: Treize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police.

Onze suspects ont été interpellés entre décembre 2023 et juillet 2024, notamment grâce à l'interception par les policiers de deux poids-lourds et d'un convoi de voitures "entre la région lyonnaise et le Gard", "au moment où les stupéfiants étaient remis à des équipes locales", explique la Direction interdépartementale de la police (DIPN) du Rhône dans un communiqué.

Dans le même laps de temps, 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations.

Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN.

Puis l'enquête a permis l'interpellation, le 30 juin dernier, d'un homme "soupçonné d'être le donneur d'ordres" et, le lendemain, d'un autre suspect, "fugitif condamné en 2016" à sept ans de prison pour trafic de stupéfiants. A son domicile dans l'Ain, "54 kg de cocaïne et plusieurs dizaines de milliers d'euros" ont été saisis, précise le communiqué qui n'en dit pas plus sur le profil de ces hommes. Ils ont été mis en examen le 4 juillet et placés en détention provisoire.

La police considère ainsi avoir réussi le "démantèlement de ce groupe criminel organisé (...) réalisant des importations de stupéfiants depuis l'Espagne vers la région Auvergne-Rhône-Alpes" pour des "quantités importantes".