Pour Macron une offensive terrestre «massive» à Gaza serait une «erreur»

Le président français Emmanuel Macron et le président égyptien Abdel-Fattah al-Sisi posent avant leur entretien au Caire, le 25 octobre 2023. (Photo,  Christophe Ena / POOL / AFP))
Le président français Emmanuel Macron et le président égyptien Abdel-Fattah al-Sisi posent avant leur entretien au Caire, le 25 octobre 2023. (Photo, Christophe Ena / POOL / AFP))
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Publié le Jeudi 26 octobre 2023

Pour Macron une offensive terrestre «massive» à Gaza serait une «erreur»

  • L'Egypte est un médiateur incontournable entre Palestiniens et Israéliens et est partie des négociations pour la libération des plus de 200 otages enlevés en Israël par le Hamas
  • La France va envoyer un navire militaire pour soutenir les hôpitaux, a annoncé M. Macron et un avion français chargé de matériel médical doit aussi atterrir jeudi en Egypte à destination de la population gazaouie

BANDE DE GAZA / JÉRUSALEM: Engager une offensive terrestre "massive" dans la bande de Gaza, déjà assiégée et pilonnée sans répit par l'armée israélienne en riposte à l'attaque sanglante du Hamas, serait une "erreur" a jugé mercredi au Caire le président français Emmanuel Macron.

De nombreux pays réclament une pause humanitaire dans les bombardements incessants menés par Israël, qui s'est juré d'"exterminer" le Hamas palestinien après son attaque sans précédent perpétrée le 7 octobre sur son sol, et prépare son armée à une offensive terrestre pour y parvenir.

Tout en affirmant le droit d'Israël à se défendre, le président français a souligné, à l'issue d'une rencontre avec le président égyptien égyptien Abdel Fattah al-Sissi, qu'une telle opération, si elle devait être massive, serait alors une erreur parce qu'incompatible avec le droit des populations civiles et aussi parce qu'Israël n'en serait pas mieux protégé.

Lors de déclarations communes devant la presse, le président Sissi a lui appelé Israël à éviter une "invasion terrestre de Gaza" car elle fera "un grand nombre de victimes civiles".

Une offensive terrestre serait extrêmement périlleuse dans ce territoire très densément peuplé, truffé de tunnels où le Hamas cache armes et combattants, et en présence d'otages.

"Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, avait déjà appelé mardi à un "cessez-le-feu humanitaire immédiat" et condamné les "violations claires du droit humanitaire" dans le territoire palestinien, provoquant la colère d'Israël.

700 morts en une journée

L'attaque du Hamas et les représailles de l'armée israélienne dans la bande de Gaza ont fait plus de 1.400 morts en Israël, selon les autorités, et plus de 6.500 dans le territoire palestinien, selon le mouvement islamiste, majoritairement des civils des deux côtés.

Le Hamas au pouvoir à Gaza depuis 2007 a affirmé mercredi qu'au moins 700 personnes avaient été tuées en une seule journée.

En outre, 13 personnes ont été tuées en Israël par des tirs de roquettes depuis le 7 octobre, a déclaré mercredi à l'AFP le porte-parole du Magen David Adom, équivalent israélien de la Croix-Rouge.

L'armée israélienne a affirmé avoir mené "des frappes de grande ampleur", qui ont touché "plusieurs infrastructures terroristes du Hamas", dont des tunnels.

La situation humanitaire dramatique dans le petit territoire de 362 km2 préoccupe également la communauté internationale.

Selon l'Organisation mondiale de la santé, six hôpitaux ont déjà fermé, faute de carburant, dans la bande de Gaza où s'entassent 2,4 millions de Palestiniens dans des conditions désastreuses.

L'ONU réclame d'urgence la livraison de carburant pour faire fonctionner les générateurs dans les hôpitaux où affluent des milliers de blessés, pomper et purifier l'eau et faire circuler les camions.

Organisation "terroriste"

Mais Israël s'y refuse, affirmant que cela profiterait au Hamas qu'il considère avec les Etats-Unis et l'Union européenne comme une organisation "terroriste".

Le président français a annoncé l'envoi par la France d'un navire militaire pour "soutenir les hôpitaux". Ce dernier, un navire-hôpital, a appareillé mercredi pour Gaza.

Un avion français chargé de matériel médical doit aussi atterrir jeudi en Egypte à destination de la population gazaouie, a-t-il précisé.

"Nous avons opéré plusieurs blessés sans anesthésie", a raconté à l'AFP Ahmad Abdul Hadi, un chirurgien orthopédique de l'hôpital Nasser à Khan Younès, une ville du sud de la bande de Gaza.

Selon Mohammed Abu Selmeya, le directeur de l'hôpital Shifa dans la ville de Gaza, le plus grand du territoire, "dix hôpitaux sont déjà hors service" et "plus de 90% des médicaments et des produits sont épuisés".

Mais pour Washington, un cessez-le-feu "à ce stade ne bénéficierait qu'au Hamas". La Maison Blanche a suggéré plutôt des "pauses" pour faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, une position que devrait rallier les pays de l'Union européenne, réunis jeudi et vendredi en sommet, selon des sources diplomatiques.

La bande de Gaza, petit territoire pauvre s'étendant sur 40 kilomètres le long de la Méditerranée, est soumis à un blocus israélien terrestre, aérien et maritime depuis 2007. Le 9 octobre, Israël l'a placé en état de "siège complet" et y a coupé l'eau, l'électricité et l'approvisionnement en nourriture.

Le navire hôpital français "Tonnerre" a appareillé pour Gaza

Un navire hôpital français, le "Tonnerre", a appareillé mercredi en direction de Gaza où il doit participer à des opérations de secours pour les populations civiles du territoire palestinien, a-t-on appris auprès des armées françaises, confirmant une information de BFMTV.

Le navire a quitté le port de Toulon (sud) vers 16h00 (14h00 GMT) "pour renforcer notre dispositif en Méditerranée orientale, où il rejoindra les frégates Alsace et Surcouf", a indiqué un porte-parole de la Marine française.

Le Tonnerre est un grand bâtiment de la classe Mistral. Ces navires longs de 199 mètres sont des "porte-hélicoptères amphibies (PHA)" qui sont "capables de mener, sous faible préavis, des opérations de gestion de crise, de transport ou encore d'évacuation sanitaire et de soutien médical par des moyens amphibies et aéromobiles", selon le ministère français des Armées.

Rendre des comptes

Ce siège s'accompagne de bombardements sans relâche par Israël, qui a massé des dizaines de milliers de soldats aux abords de la bande de Gaza et intensifié ses frappes ces derniers jours.

Le 7 octobre, en plein Shabbat, le repos juif hebdomadaire, des centaines de combattants du Hamas avaient infiltré Israël depuis la bande de Gaza, semant la terreur lors de cette attaque d'une violence et d'une ampleur sans précédent depuis la création de l'Etat d'Israël en 1948.

Le Premier ministre israélien a reconnu mercredi qu'il devrait lui aussi "rendre des comptes" après cette attaque qui a sidéré le pays.

Mardi, un quatrième convoi de huit camions chargés d'eau, de nourriture et de médicaments, selon le Croissant-rouge palestinien, est arrivé en provenance d'Egypte via le poste-frontière de Rafah, seul point de passage vers la bande de Gaza qui ne soit pas sous contrôle israélien.

Au total, quelques dizaines de camions sont arrivés depuis le 21 octobre alors que, selon l'ONU, au moins cent camions par jour seraient nécessaires.

"Le temps presse. Nous avons un besoin urgent de carburant", a déclaré à l'AFP Juliette Touma, directrice de la communication de l'UNRWA, l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens, qui craint de devoir arrêter ses opérations dès mercredi soir.

Depuis le 15 octobre, l'armée israélienne appelle la population du nord de la bande de Gaza, où les bombardements sont les plus intenses, à évacuer vers le sud.

Mais les frappes continuent aussi de toucher cette partie du territoire, proche de la frontière égyptienne, où sont massés plusieurs centaines de milliers de civils. Mercredi, l'une d'entre elles a touché un supermarché de rafah dans le sud de la bande de Gaza.

Au moins 1,4 million de Palestiniens ont fui leur foyer depuis le début de la guerre, selon l'ONU.

Frappes contre la Syrie

Après une visite de soutien à Israël puis au président palestinien Mahmoud Abbas en Cisjordanie occupée, M. Macron a rencontré mercredi à Amman le roi Abdallah II de Jordanie, avant de se rendre au Caire.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a lui annulé mercredi tout projet de visite en Israël, dont il a accusé l'armée de se conduire avec "inhumanité".

L'armée israélienne a annoncé mercredi avoir frappé des infrastructures militaires en Syrie en réponse à des tirs vers son territoire. Huit soldats syriens ont été tués, selon les médias officiels syriens.

La tension est très vive aussi en Cisjordanie où plus de cent Palestiniens ont été tués dans des violences depuis le 7 octobre, selon le ministère palestinien de la Santé, ainsi qu'à la frontière d'Israël avec le Liban, où les échanges de tirs sont quotidiens entre l'armée israélienne et le Hezbollah libanais.


En Nouvelle-Calédonie, situation «plus calme» mais vie quotidienne difficile

Des personnes font la queue pour acheter des provisions dans un supermarché alors que des articles carbonisés précédemment incendiés sont visibles à la suite des troubles de la nuit dans le quartier de Magenta à Nouméa, territoire français de Nouvelle-Calédonie dans le Pacifique, le 18 mai 2024. (Photo Delphine Mayeur AFP)
Des personnes font la queue pour acheter des provisions dans un supermarché alors que des articles carbonisés précédemment incendiés sont visibles à la suite des troubles de la nuit dans le quartier de Magenta à Nouméa, territoire français de Nouvelle-Calédonie dans le Pacifique, le 18 mai 2024. (Photo Delphine Mayeur AFP)
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  • Vendredi en fin de soirée, l'arrivée de 1.000 renforts supplémentaires, en plus des 1.700 déjà déployés, a montré la détermination des autorités françaises pour reprendre le contrôle de la situation
  • Le gouvernement de Nouvelle-Calédonie a recensé 3.200 personnes bloquées en raison de l'absence de vols commerciaux au départ de et vers l'archipel

NOUMÉA, France : La vie quotidienne des Néo-Calédoniens devient de plus en plus difficile samedi, malgré une situation «plus calme» sur la majeure partie de l'archipel français du Pacifique Sud, au sixième jour des émeutes causées par une réforme électorale qui a provoqué la colère des indépendantistes.

Vendredi en fin de soirée, l'arrivée de 1.000 renforts supplémentaires, en plus des 1.700 déjà déployés, a montré la détermination des autorités françaises pour reprendre le contrôle de la situation.

Mais pour les habitants, les dégâts de plus en plus étendus compliquent le ravitaillement dans les commerces, ainsi que le fonctionnement des services publics, notamment de santé.

Le danger subsiste par ailleurs dans les quartiers où les émeutiers sont les plus nombreux et les mieux organisés.

Dans l'un d'eux, la Vallée du Tir à Nouméa, un motard s'est tué vendredi en fin d'après-midi dans un accident de la route en heurtant une épave de voiture, selon le procureur de la République de Nouméa, Yves Dupas.

Le gouvernement de Nouvelle-Calédonie a appelé lors d'une conférence de presse à cesser barrages et barricades.

«On est en train de s'entretuer et on ne peut pas continuer comme ça», a déclaré Vaimu'a Muliava, membre du gouvernement chargé de la fonction publique.

«Des gens meurent déjà non pas à cause des conflits armés, mais parce qu'ils n'ont pas accès aux soins, pas accès à l'alimentation», a-t-il ajouté.

Le gouvernement de Nouvelle-Calédonie a aussi recensé 3.200 personnes bloquées en raison de l'absence de vols commerciaux au départ de et vers l'archipel.

Les autorités françaises espèrent que l'état d'urgence en vigueur depuis jeudi va continuer à faire reculer les violences, qui ont débuté lundi après une mobilisation contre une réforme électorale contestée par les représentants du peuple autochtone kanak.

Depuis, la crise qui frappe ce territoire colonisé par la France au XIXe siècle a fait cinq morts, dont deux gendarmes et trois civils kanaks, et des centaines de blessés au cours de violentes nuit d'émeutes. En réponse, le gouvernement a envoyé des renforts policiers, interdit TikTok - réseau social prisé des émeutiers -, et déployé des militaires.

- Strict minimum -

Devant les rares magasins de Nouméa qui n'ont pas été ravagés par les flammes ou pillés, les files d'attente restaient très longues samedi.

«Cela fait plus de trois heures qu'on est là», soupirait Kenzo, 17 ans, en quête de riz et de pâtes.

Selon la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie, les violences ont «anéanti» 80% à 90% de la chaîne de distribution commerciale de la ville.

Le représentant de l'Etat français en Nouvelle-Calédonie, Louis Le Franc, a promis la mobilisation de l'Etat pour «organiser l'acheminement des produits de première nécessité» et un «pont aérien» entre la métropole et son archipel, séparés de plus de 16.000 km.

De son côté, un responsable de l'hôpital de Nouméa, Thierry de Greslan, s'est alarmé de la dégradation de la situation sanitaire. «Trois ou quatre personnes seraient décédées hier (jeudi) par manque d'accessibilité aux soins», en raison notamment de barrages érigés dans la ville, a-t-il avancé sur la radio France Info.

Face à la «gravité» de la situation et afin «de répondre aux besoins sanitaires de la population», l'Etablissement français du sang (EFS) a annoncé vendredi l'envoi de produits sanguins.

- «Grande fermeté» -

A Paris, le ministre de la Justice a demandé au parquet «la plus grande fermeté à l'encontre des auteurs des exactions». Eric Dupond-Moretti a aussi indiqué qu'il envisageait de transférer les «criminels» arrêtés sur le «Caillou» en métropole «pour ne pas qu'il y ait de contaminations (...) des esprits les plus fragiles».

Parallèlement, la justice française a ouvert une enquête sur «les commanditaires» des émeutes, ciblant notamment le collectif CCAT (Cellule de coordination des action de terrain), frange la plus radicale des indépendantistes, déjà mis en cause par le gouvernement.

«J'ai décidé d'ouvrir une enquête visant notamment des faits susceptibles de concerner des commanditaires», parmi lesquels «certains membres de la CCAT», a déclaré le procureur Yves Dupas, pointant «ceux qui ont instrumentalisé certains jeunes dans une spirale de radicalisation violente». Au total, depuis dimanche, 163 personnes ont été placées en garde à vue, dont 26 ont été déférées devant la justice, selon le parquet.

Jeudi, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait qualifié la CCAT d'organisation «mafieuse».

Vendredi, ce collectif a demandé «un temps d'apaisement pour enrayer l'escalade de la violence». Sur la radio RFI, un de ses membres, Rock Haocas, a assuré que son organisation «n'a pas appelé à la violence», attribuant ces émeutes à une «population majoritairement kanak marginalisée».

Sur le front politique, après l'annulation d'une visioconférence avec tous les élus calédoniens jeudi, le président français Emmanuel Macron a commencé vendredi à avoir des échanges avec certains d'entre eux mais son service de communication a refusé d'en dire plus.

Présentée par son gouvernement, la réforme constitutionnelle qui a mis le feu aux poudres vise à élargir le corps électoral aux élections provinciales, cruciales sur l'archipel. Les partisans de l'indépendance estiment que cette modification risque de réduire leur poids électoral.

Paris a par ailleurs détaillé ses accusations portées contre l'Azerbaïdjan «d'ingérences» en Nouvelle-Calédonie, archipel stratégique pour la France qui veut renforcer son influence en Asie Pacifique et de part ses riches ressources en nickel.

Paris a évoqué une «propagation massive et coordonnée» de contenus relayés par des comptes liés à Bakou et accusant la police française de tirer sur des manifestants indépendantistes.

 

 


Rouen: un homme armé tentant de mettre le feu à une synagogue tué par la police

"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", écrit M. Darmanin sur X. (Reuters).
"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", écrit M. Darmanin sur X. (Reuters).
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  • Selon une source proche du dossier, l'homme était armé «d'un couteau et d'une barre de fer»
  • «Il aurait menacé un policier d’un couteau et ce dernier a fait usage de son arme et l’individu est décédé», a précisé le procureur

ROUEN: Des policiers ont abattu vendredi matin un homme armé notamment d'un couteau qui tentait de mettre le feu à une synagogue à Rouen et les menaçait, a annoncé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

Vers 6h45, les policiers sont "intervenus sur un signalement de dégagement de fumée près de la synagogue", située rue des Bons enfants dans le centre historique de Rouen, a détaillé une source policière à l'AFP.

"Un individu a mis le feu à la synagogue de Rouen. Il aurait pris à partie les policiers et les pompiers", a pour sa part indiqué à l'AFP le procureur de Rouen, Frédéric Teillet.

Selon une source proche du dossier, l'homme était armé "d'un couteau et d'une barre de fer".

"Ensuite, il aurait menacé un policier d’un couteau et ce dernier a fait usage de son arme et l’individu est décédé", a précisé le procureur.

Une première enquête a été ouverte pour "incendie volontaire" visant un lieu de culte, "violences volontaires sur personnes dépositaires de l’autorité publique confiée à la DGPN, a fait savoir le parquet.

Un autre enquête a été ouverte sur les circonstances du décès de l'individu armé pour "violences volontaires avec armes ayant entrainé la mort sans intention de la donner", confiée à l'Inspection générale de la police nationale (IGPN).

"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", a écrit M. Darmanin sur X.

L'homme abattu par les forces de l'ordre n'a pas été immédiatement identifié, a-t-on précisé de source policière.

Sollicité par l'AFP, le Parquet national antiterroriste indique être en train d'évaluer s'il se saisit du dossier.

De nombreux pompiers et policiers étaient déployés sur place vendredi matin, a constaté un journaliste de l'AFP.

«Sous le choc»

Selon le maire de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol, les pompiers maîtrisaient vendredi matin le départ de feu et il n'y aurait "pas d'autres victimes que l'individu armé".

"A travers cette agression et cette tentative d'incendie de la synagogue de Rouen, ce n'est pas seulement la communauté israélite qui est touchée. C'est toute la ville de Rouen qui est meurtrie et sous le choc", a réagi  le maire sur X.

"Tenter de brûler une synagogue, c'est vouloir intimider tous les Juifs. Une nouvelle fois, on veut faire peser un climat de terreur sur les Juifs de notre pays. Combattre l'antisémitisme, c'est défendre la République", a affirmé sur X le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) Yonathan Arfi.

Gérald Darmanin avait demandé le 14 avril dernier aux préfets de renforcer la sécurité devant les lieux de culte juifs ainsi que devant les écoles confessionnelles, au lendemain de l'attaque menée par l'Iran contre Israël.

Les opérations militaires lancées par l'Etat hébreu contre la bande de Gaza, qui ont causé la mort de plus de 35.000 personnes, en représailles à l'attaque des combattants du Hamas contre Israël le 7 octobre dernier ont provoqué une forte hausse des actes d'antisémitisme en France.

Début mai, le Premier ministre Gabriel Attal avait annoncé que "366 faits antisémites" avaient été enregistrés au premier trimestre 2024, soit "une hausse de 300% par rapport aux trois premiers mois de l'année 2023".

Face à cette hausse, "pas un acte ne doit rester impuni, pas un antisémite ne doit avoir l'âme tranquille", avait affirmé le chef du gouvernement en promettant de "faire preuve d'une fermeté exemplaire à chaque acte".


Des Français musulmans s'exilent à l'étranger, fuyant la « morosité ambiante »

Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes". (AFP).
Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes". (AFP).
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  • Une étude de sociologie publiée le mois dernier rapporte que des Français de culture musulmane, hautement qualifiés, souvent issus de l'immigration, quittent la France pour un nouveau départ
  • Ses amis, sa famille, la culture française lui manquent, mais il raconte avoir fui "l'islamophobie" et le "racisme systémique" entraînant des contrôles policiers à répétition à son encontre

PARIS: Après avoir échoué à 50 entretiens d'embauche pour un job de consultant, en dépit de ses qualifications et diplômes, Adam, Français de confession musulmane, a fait ses valises pour commencer une nouvelle vie à Dubaï.

"Je me sens beaucoup mieux ici qu'en France", estime désormais ce trentenaire d'origine nord-africaine.

"Ici on est tous égaux. On peut avoir comme patron une personne indienne, une personne arabe, un Français", témoigne-t-il à l'AFP, ajoutant que sa religion est "plus acceptée".

Une étude de sociologie publiée le mois dernier rapporte que des Français de culture musulmane, hautement qualifiés, souvent issus de l'immigration, quittent la France pour un nouveau départ dans des villes telles que Londres, New York, Montréal ou Dubaï.

Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes".

En France, "vous devez faire deux fois plus d'efforts quand vous venez de certaines minorités", reprend Adam, qui ne donne pas son nom de famille, comme tous ceux interrogés par l'AFP.

Ses amis, sa famille, la culture française lui manquent, mais il raconte avoir fui "l'islamophobie" et le "racisme systémique" entraînant des contrôles policiers à répétition à son encontre.

'Plafond de verre'

La France, ancienne puissance coloniale et pays d'immigration, compte une importante population d'origine maghrébine et africaine.

Les enfants d'immigrés venus chercher une vie meilleure ou appelés à constituer une main d'oeuvre bon marché dans les années 60 sont Français. Mais nombre d'entre eux se sentent étrangers dans leur propre pays, considérés comme des "citoyens de seconde zone". En particulier depuis les attentats jihadistes de 2015 en France.

"Le climat en France s’est largement dégradé. En tant que musulman on est pointé du doigt", estime sous couvert de l'anonymat un banquier franco-algérien de trente ans, qui s'apprête à quitter son pays en juin, direction Dubaï.

Il évoque notamment certaines chaînes d'info et éditorialistes assimilant tous les musulmans à des extrémistes religieux ou des fauteurs de troubles.

Ce fils d'une femme de ménage algérienne, titulaire de deux masters, estime en outre s'être heurté à un "plafond de verre" dans son parcours professionnel en France.

En France, les statistiques ethniques et religieuses sont interdites. Mais de nombreuses enquêtes documentent depuis des années les discriminations frappant les personnes d'origine immigrée dans la recherche d'emploi, de logement, les contrôles policiers...

Un candidat au nom français a près de 50% de chances supplémentaires d’être rappelé par un employeur par rapport à un candidat au nom maghrébin, rappelle ainsi l'Observatoire des inégalités dans son rapport 2023.

'Morosité'

Le rapport très particulier de la France à la laïcité, les polémiques récurrentes sur le voile musulman, provoquent aussi le malaise chez certains.

"Il y a une vraie spécificité française sur cette question. Dans notre pays, une femme qui porte le voile est reléguée à la marge de la société et il lui est notamment très difficile de trouver un emploi. Des femmes portant le hidjab qui veulent travailler sont donc assez logiquement amenées à quitter la France", explique Olivier Esteves, l'un des auteurs de l'étude, au Monde.

"On étouffe en France", raconte à l'AFP un Français de 33 ans d'origine marocaine, qui s'apprête à émigrer en Asie du sud-est avec sa femme enceinte, "pour vivre dans une société plus apaisée et où les communautés savent vivre ensemble".

Cet employé dans la tech veut fuir "la morosité ambiante" et les "humiliations" du quotidien liées à son patronyme et ses origines.

"On me demande encore aujourd’hui ce que je fais dans ma résidence", où il vit depuis plusieurs années. "Et c’est pareil pour ma mère quand elle me visite. Mais ma femme qui est blanche de peau n’a jamais eu cette question", raconte-t-il.

"Cette humiliation constante est d’autant plus frustrante que je contribue net à cette société en faisant partie des hauts revenus qui paient plein pot", s'insurge-t-il.

Paradoxalement, la société française est pourtant "plus ouverte qu'il y a vingt ans" et "le racisme recule", souligne le dernier rapport annuel de l'Observatoire des inégalités, notant que 60% des Français déclarent n'être "pas du tout racistes", soit deux fois plus qu'il y a 20 ans.

Et la part de ceux qui pensent qu’il y a des "races supérieures à d’autres" a été divisée par trois, de 14% à 5%.