Israël-Hamas: Malgré des efforts diplomatiques intenses, Washington face à des résultats limités

Un partisan du religieux chiite Muqtada al-Sadr frappe une affiche du secrétaire d'État américain lors d'une manifestation de soutien aux Palestiniens sur la place Tahrir, à Bagdad, la capitale, le 5 novembre 2023 (Photo, AFP).
Un partisan du religieux chiite Muqtada al-Sadr frappe une affiche du secrétaire d'État américain lors d'une manifestation de soutien aux Palestiniens sur la place Tahrir, à Bagdad, la capitale, le 5 novembre 2023 (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 08 novembre 2023

Israël-Hamas: Malgré des efforts diplomatiques intenses, Washington face à des résultats limités

  • Pour l'analyste palestinienne Diana Buttu, il est naïf de penser que les Etats-Unis sont incapables de faire plier Israël sur les «pauses humanitaires»
  • Antony Blinken «essaie d'apaiser les pays arabes et le reste du monde tout en donnant le feu vert à Israël», selon elle

WASHINGTON: Un mois après le début de la guerre entre Israël et le Hamas, les résultats obtenus par la diplomatie américaine sont limités, mais ses partisans comme ses détracteurs jugent que c'est en partie à dessein.

"Chaque pays à qui j'ai parlé veut que nous jouions un rôle moteur grâce à notre diplomatie pour essayer d'obtenir des avancées sur tous les aspects de cette crise", a indiqué lundi le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken lors de son déplacement en Turquie.

Mais les dirigeants du monde arabe, et d'autres pays à travers le monde, appellent à un cessez-le-feu, une idée non soutenue par Washington qui pousse de son côté pour des "pauses humanitaires" tout en insistant sur le droit d'Israël à se défendre après l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre.

Selon les autorités israéliennes, au moins 1.400 personnes sont mortes côté israélien, essentiellement des civils tués le jour de l'attaque du mouvement islamiste palestinien.

En représailles, Israël pilonne sans relâche la bande de Gaza, sous contrôle du Hamas. Ces frappes ont tué plus de 10.000 personnes dont 4.000 enfants, selon un dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas.

Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou s'opposant aux "pauses humanitaires", Joe Biden a évoqué lundi lors d'un appel avec lui "la possibilité de pauses tactiques" de l'armée israélienne pour permettre à la population civile palestinienne de fuir les combats.

Dissuasion

Les Etats-Unis ont par ailleurs négocié avec Israël la réouverture du point de passage de Rafah, qui relie la bande de Gaza assiégée à l'Egypte, où ont transité au compte-goutte 400 camions d'aide humanitaire en deux semaines. Sachant que 500 camions entraient dans l'enclave chaque jour avant la guerre.

Selon James Jeffrey, diplomate américain chevronné et président du programme Moyen-Orient au cercle de réflexion Wilson Center, Antony Blinken a deux objectifs dans la région: éviter l'élargissement du conflit aux forces pro-Iran, notamment au Liban, et apaiser l'opinion publique.

Le discours la semaine dernière du chef du Hezbollah libanais pro-iranien, Hassan Nasrallah, qui n'a pas signé l'entrée du Liban de plain-pied dans le conflit, a été perçu par certains observateurs comme un moyen d'éviter une confrontation plus directe, soit un signe positif pour les Américains.

"Je dirais que Blinken a atteint son objectif lors de ce voyage", a affirmé M. Jeffrey.

La réponse militaire des Israéliens en elle-même constitue une forme de dissuasion pour le Hezbollah et l'Iran, laissant entendre "nous ferons la même chose ou pire contre vous", s'il y a un embrasement du conflit.

Mais les tactiques d'Israël compliquent aussi le deuxième objectif américain.

Blinken voulait souligner que "les Etats-Unis font tout pour que les victimes civiles soient épargnées et prennent la tête de l'aide humanitaire pour les habitants de Gaza", d'après James Jeffrey.

"Mais c'est une tâche difficile parce que franchement, les Israéliens ne sont pas aussi coopératifs qu'ils devraient l'être", d'après l'expert.

«Feu vert à Israël»

Pour l'analyste palestinienne Diana Buttu, il est naïf de penser que les Etats-Unis sont incapables de faire plier Israël sur les "pauses humanitaires".

Antony Blinken "essaie d'apaiser les pays arabes et le reste du monde tout en donnant le feu vert à Israël", selon elle.

"Dire que les Etats-Unis n'ont pas leur mot à dire sur les milliards de dollars qu'ils donnent, c'est minimiser le rôle de Washington", a pointé Mme Buttu.

Premiers soutiens d'Israël, les Etats-Unis ont toujours été critiqués par le monde arabe mais ce n'est pas quelque chose que les dirigeants américains voient comme irréversible, a expliqué de son côté Jon Alterman, expert sur la région au cercle de réflexion Center for Strategic and International Studies.

Avec son offensive contre le Hamas, Israël "s'écarte toujours davantage de ses voisins, et du reste du monde, mais Washington essaie très fort de réduire ce fossé", selon lui.

"C'est typique de la diplomatie. Cela prend toujours plus de temps et est plus partiel que ce qu'on ne voudrait", a-t-il poursuivi.


Israël dit avoir identifié les corps rendus dimanche par le Hamas comme ceux de trois otages

"Selon les informations fournies par la Croix-Rouge, trois cercueils de personnes décédées prises en otage ont été transférés sous leur garde et sont en route vers les troupes de Tsahal dans la bande de Gaza", indique un communiqué de l'armée israélienne. (AFP)
"Selon les informations fournies par la Croix-Rouge, trois cercueils de personnes décédées prises en otage ont été transférés sous leur garde et sont en route vers les troupes de Tsahal dans la bande de Gaza", indique un communiqué de l'armée israélienne. (AFP)
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  • "Selon les informations fournies par la Croix-Rouge, trois cercueils de personnes décédées prises en otage ont été transférés sous leur garde et sont en route vers les troupes de Tsahal dans la bande de Gaza"
  • L'armée israélienne a annoncé dimanche que le Hamas avait remis à la Croix-Rouge dans la bande de Gaza des cercueils contenant les corps de trois otages

JERUSALEM: Les autorités israéliennes ont annoncé lundi avoir identifié les dépouilles rendues par le Hamas la veille comme étant celles de trois soldats enlevés le 7 octobre 2023, ce qui porte à 20 le nombre d'otages morts rendus par le mouvement islamiste sur un total de 28 qu'il doit remettre.

"Après l’achèvement du processus d’identification par l’Institut national de médecine légale, en coopération avec la police israélienne et le rabbinat militaire", l'armée a "informé les familles des otages tombés au combat (...) que leurs proches ont été rapatriés en Israël et identifiés", a indiqué le bureau du Premier ministre, Benjamin Netanyahu, dans un communiqué.

Les défunts ont été identifiés comme le capitaine américano-israélien Omer Neutra, 21 ans lors de son enlèvement, le caporal Oz Daniel, 19 ans, et le colonel Assaf Hamami, 40 ans, l'officier le plus gradé tombé aux mains du Hamas.

Selon le Forum des familles d'otages, les trois ont été tués dans des combats lors de l'attaque du Hamas sur le sol israélien du 7-Octobre qui a déclenché la guerre à Gaza,  et leurs corps ensuite enlevés dans le territoire palestinien.

Israël avait annoncé dimanche soir avoir reçu les dépouilles de trois otages remises par la Croix-Rouge, dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas.

Malgré plusieurs moments de tension, une trêve fragile tient à Gaza depuis le 10 octobre, dans le cadre d'un accord négocié par les Etats-Unis, prévoyant le retour de tous les otages enlevés en Israël, vivants ou morts.

En application de l'accord de cessez-le-feu, le Hamas a libéré les derniers 20 otages vivants détenus à Gaza en échange de la libération de près de 2.000 prisonniers palestiniens, et doit encore restituer huit otages décédés.

Israël a à plusieurs reprises accusé le Hamas de ralentir le processus de restitution des corps, tandis que l'organisation islamiste affirme que la lenteur s'explique par le fait que de nombreuses dépouilles sont enfouies sous les décombres de Gaza.


A Gaza, des enfants reprennent les cours après deux ans de guerre

Malgré l'inconfort, elles ont répondu aux questions du professeur et ont copié la leçon du tableau noir dans leurs cahiers, visiblement heureuses d'être là. (AFP)
Malgré l'inconfort, elles ont répondu aux questions du professeur et ont copié la leçon du tableau noir dans leurs cahiers, visiblement heureuses d'être là. (AFP)
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  • Mettant à profit le fragile cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) a annoncé cette semaine cette réouverture progressive
  • Des déplacés sont toujours hébergées dans le bâtiment, sur la façade duquel des cordes à linge sont visibles

GAZA: Des élèves de l'école Al Hassaina à Nousseirat,  dans le centre de la bande de Gaza, viennent de reprendre les cours malgré les destructions dans le territoire palestinien, où l'ONU a annoncé rouvrir progressivement des établissements, a constaté samedi l'AFPTV.

Mettant à profit le fragile cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) a annoncé cette semaine cette réouverture progressive, après deux ans de guerre dévastatrice délenchée par l'attaque du Hamas en Israël du 7 octobre 2023.

Le patron de l'UNRWA, Philippe Lazzarini, a déclaré sur X mardi que plus de 25.000 écoliers avaient déjà rejoint les "espaces d'apprentissage temporaires" de l'agence, tandis qu'environ 300.000 d'entre eux suivraient des cours en ligne.

Dans l'école Al Hassaina, des images de l'AFPTV ont montré dans la matinée des jeunes filles se rassemblant dans la cour en rang pour pratiquer des exercices en clamant "Vive la Palestine!"

Environ 50 filles se sont ensuite entassées dans une salle de classe, assises à terre sans bureaux, ni chaises.

Malgré l'inconfort, elles ont répondu aux questions du professeur et ont copié la leçon du tableau noir dans leurs cahiers, visiblement heureuses d'être là.

Pendant la guerre entre Israël et le Hamas, cette école, comme de nombreuses autres installations de l'UNRWA, s'était transformée en refuge pour des dizaines de familles.

Des déplacés sont toujours hébergées dans le bâtiment, sur la façade duquel des cordes à linge sont visibles.

Une autre salle de classe accueillait un nombre similaire d'adolescentes, presque toutes portant des hijabs et également assises au sol, cahiers posés sur leurs genoux.

Warda Radoune, 11 ans, a déclaré avoir hâte de reprendre sa routine d'apprentissage. "Je suis en sixième maintenant, mais j'ai perdu deux années de scolarité à cause du déplacement et de la guerre", a-t-elle confié à l'AFP.

"Nous reprenons les cours lentement jusqu'à ce que l'école soit à nouveau vidée (des déplacés), et que nous puissions continuer à apprendre comme avant", a-t-elle ajouté.

"Alors que l'UNRWA travaille à ouvrir davantage d'espaces d'apprentissage temporaires dans les abris, certains enfants sont contraints d'apprendre sur des escaliers, sans bureaux ni chaises. Trop d'écoles sont en ruines", a pointé cette semaine l'UNRWA sur X.

Le directeur régional Moyen-Orient d'Unicef, Edouard Beigbeder, avait souligné fin octobre à l'AFP que la communauté humanitaire était engagée dans une "course contre la montre" pour "remettre l'éducation au centre des priorités" à Gaza, au risque sinon d'y laisser une "génération perdue".


Israël menace d'intensifier les attaques contre le Hezbollah dans le sud du Liban

L'Agence nationale libanaise de presse a rapporté que l'armée israélienne avait touché une voiture avec un missile guidé.  L'armée a confirmé la frappe, affirmant avoir visé un membre de la Force Radwan, unité d'élite du Hezbollah. (AFP)
L'Agence nationale libanaise de presse a rapporté que l'armée israélienne avait touché une voiture avec un missile guidé. L'armée a confirmé la frappe, affirmant avoir visé un membre de la Force Radwan, unité d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes qu'elle a présentées comme des membres d'une force d'élite du Hezbollah
  • A l'ouverture du conseil des ministres hebdomadaire dimanche, M. Netanyahu a ensuite affirmé que le Hezbollah tentait de se "réarmer"

JERUSALEM: Israël a menacé dimanche d'intensifier ses attaques au Liban contre le Hezbollah, que le Premier ministre Benjamin Netanyahu a accusé de tenter de se "réarmer", exhortant Beyrouth à tenir ses engagements de le désarmer.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le mouvement pro-iranien, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions libanais du Hezbollah et d'occuper cinq positions frontalières dans le sud du Liban.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes qu'elle a présentées comme des membres d'une force d'élite du Hezbollah.

"L'engagement du gouvernement libanais à désarmer le Hezbollah et le chasser du sud du Liban doit être pleinement tenu", a d'abord déclaré dans un communiqué le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, affirmant que le groupe "joue avec le feu" et que "le président libanais traîne des pieds".

"Nous ne tolèrerons aucune menace contre les habitants du nord" d'Israël, a-t-il ajouté.

A l'ouverture du conseil des ministres hebdomadaire dimanche, M. Netanyahu a ensuite affirmé que le Hezbollah tentait de se "réarmer".

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", a-t-il averti.

"Nous ne permettrons pas au Liban de redevenir un nouveau front contre nous et nous agirons comme il faudra".

Des milliers d'Israéliens vivant près de la frontière nord avaient dû évacuer leurs domiciles pendant des mois, après l'ouverture par le Hezbollah d'un front contre Israël à la suite de la guerre déclenchée à Gaza en octobre 2023.

Les tirs de roquette du mouvement chiite avaient provoqué un conflit de plus d'un an, culminant par deux mois de guerre ouverte avant la conclusion d'un cessez-le-feu fin 2024.

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Depuis, les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, un plan auquel le Hezbollah et ses alliés s'opposent, invoquant notamment la poursuite d'une présence israélienne sur le territoire libanais.

Raid meurtrier et nouvelle frappe 

L'armée israélienne a intensifié ses attaques contre des cibles du Hezbollah ces derniers jours.

Jeudi, elle a mené un raid meurtrier dans le sud du Liban, poussant le président libanais, Joseph Aoun, à ordonner à l'armée de faire face à de telles incursions.

M. Aoun avait appelé à des négociations avec Israël à la mi-octobre, après l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu à Gaza, parrainé par le président américain Donald Trump.

Il a accusé vendredi Israël de répondre à son offre de dialogue en intensifiant ses attaques, avant qu'une nouvelle frappe israélienne ne tue quatre personnes samedi dans le sud du pays, dans le district de Nabatiyeh.

L'Agence nationale libanaise de presse a rapporté que l'armée israélienne avait touché une voiture avec un missile guidé.

L'armée a confirmé la frappe, affirmant avoir visé un membre de la Force Radwan, unité d'élite du Hezbollah.

"Le terroriste était impliqué dans le transfert d'armes et dans les tentatives de reconstitution des infrastructures terroristes du Hezbollah dans le sud du Liban", a-t-elle indiqué, précisant que trois autres membres du groupe avaient été tués.

"Les activités de ces terroristes constituaient une menace pour l'Etat d'Israël et ses civils, ainsi qu'une violation des accords entre Israël et le Liban", a ajouté l'armée.

La veille, elle avait annoncé avoir tué un "responsable de la maintenance du Hezbollah", qui oeuvrait selon elle à rétablir des infrastructures du mouvement.

A Nabatiyeh, des centaines de personnes se sont rassemblées dimanche pour rendre hommage aux cinq membres du Hezbollah tués, a constaté un journaliste de l'AFP.

Les participants lançaient des pétales de fleurs sur les cercueils, recouverts du drapeau du Hezbollah, en scandant: "Mort à Israël, mort à l'Amérique".

"Voici le prix que le Sud (du Liban) paie chaque jour", a déclaré à l'AFP Rana Hamed, la mère de l'un des cinq hommes tués. "Nous savons qu'Israël est notre ennemi depuis des décennies."

L'émissaire américain, Tom Barrack, a exhorté samedi le Liban à engager des pourparlers directs avec Israël, affirmant que si Beyrouth franchissait le pas, les Etats-Unis pourraient faire "pression sur Israël pour qu'il se montre raisonnable".