Gaza: cauchemar pour les femmes enceintes et les nourrissons gazaouis

Des femmes pleurent les victimes tuées dans les bombardements israéliens devant l'hôpital Nasser à Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 14 novembre 2023. (AFP)
Des femmes pleurent les victimes tuées dans les bombardements israéliens devant l'hôpital Nasser à Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 14 novembre 2023. (AFP)
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Publié le Mardi 14 novembre 2023

Gaza: cauchemar pour les femmes enceintes et les nourrissons gazaouis

  • «Nous estimons qu'au moins 15% des naissances impliqueront des complications qui exigeront des soins obstétriques», indisponibles à Gaza en guerre, note le représentant du UNFPA
  • La poussière, omniprésente après les bombardements, est une autre menace, en particulier pour les enfants prématurés souffrant de difficultés respiratoires

RAFAH: Petits poings fermés, des yeux sombres écarquillés: Mohammed Koullab n'est âgé que de quelques jours. C'est le septième de la fratrie et il est né quelques semaines après le début de la guerre entre Israël et le Hamas, dans la bande de Gaza.

"On ne devrait pas naître dans ces circonstances", dit à l'AFP sa mère, Fadwa Koullab, qui a quitté sa maison à Rafah pour s'installer avec sa famille dans une école de l'ONU de cette ville du sud du territoire palestinien.

Elle espère ici échapper aux bombardements de l'armée israélienne qui pilonne le territoire palestinien depuis que le mouvement islamiste Hamas a attaqué Israël le 7 octobre, tuant dans le pays plus de 1.200 personnes, en grande majorité des civils, selon les autorités.

"Sa naissance a été l'expérience la plus difficile de ma vie", raconte Mme Koullab, qui se dit démunie et incapable de protéger ses enfants.

Plus de 11.000 personnes, en majorité des civils incluant plus de 4.500 enfants, ont été tuées dans les frappes israéliennes sur la bande de Gaza depuis le début de la guerre, selon le gouvernement du Hamas, au pouvoir à Gaza.

Selon lui, six bébés prématurés sont morts au cours des derniers jours faute d'électricité dans les hôpitaux du nord du territoire, la partie la plus touchée par les combats.

Jaunisse 

Comme plusieurs mères de nouveaux-nés interrogées par l'AFP à Gaza, la maman de Mohammed affirme que celui-ci refuse d'être allaité. "Je ne mange pas bien", concède Mme Kallab, qui cherche des explications, elle qui a nourri au sein "tous (ses) enfants".

Les femmes allaitantes sont censées boire environ trois litres d'eau par jour et augmenter leur rations alimentaires pour pouvoir produire du lait maternel, or l'accès à une eau propre et aux vivres est chaque jour plus difficile à Gaza.

Mme Koullab dit aussi peiner à trouver du lait maternisé et des couches.

A 37 ans, Najwa Salem tient dans ses bras son deuxième fils, enveloppé dans plusieurs couvertures épaisses.

Le nourrisson a la jaunisse, mais aujourd'hui à Gaza, plus de la moitié des hôpitaux sont hors service et les autres n'ont pas assez de carburant pour assurer toutes les séances de photothérapie.

Pour minimiser les risques d'atteinte neurologique, il faudrait l'exposer à la lumière du jour. Or, sa mère hésite à cause des "ordures qui s'entassent et des bombardements".

«Peur de le perdre»

Dans la salle de classe d'une école de Rafah où elle vit désormais avec environ 70 autres personnes, elle s'inquiète: la cicatrice de sa césarienne s'infecte.

L'hôpital où elle a accouché l'a forcée à partir après une nuit "parce qu'ils avaient trop de blessés à soigner", dit-elle.

La poussière, omniprésente après les bombardements, est une autre menace, en particulier pour les enfants prématurés souffrant de difficultés respiratoires.

Enceinte de huit mois, Oum Ibrahim Alayan tousse, comme le reste de sa famille, depuis qu'elle a fui son quartier sous les frappes aériennes. Ses quintes de toux pourraient avoir provoqué les contractions prématurées dont elle souffre depuis quelques jours.

Ses mains passent de son ventre à son visage épuisé. Elle finit par éclater en sanglots.

"Je suis terrorisée, tout ce que je veux, c'est serrer mon bébé dans mes bras, j'ai l'impression que je pourrais le perdre à chaque instant", raconte-t-elle.

Pénuries 

Dans la bande côtière, 50.000 femmes sont enceintes et plus de 180 accouchent quotidiennement sans "nulle part où aller", affirme Dominic Allen, représentant du Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA) dans les Territoires palestiniens.

"Nous estimons qu'au moins 15% des naissances impliqueront des complications qui exigeront des soins obstétriques", indisponibles à Gaza en guerre, note M. Allen.

L'UNFPA décrit une situation "cauchemardesque": une femme quittant l'hôpital trois heures après son accouchement, une pénurie de sang pour soigner celles atteintes d'hémorragie après l'accouchement, des soins de cicatrices de césarienne ou du cordon ombilical sans aucune solution antiseptique.

L'UNFPA a réussi à faire entrer 8.000 "kits d'hygiène pour les accouchements" contenant, entre autres, de quoi couper le cordon ombilical, une couverture pour réchauffer les nouveaux-nés et des draps jetables.

Une goutte d'eau dans l'océan des besoins des 2,4 millions de Gazaouis et surtout des femmes enceintes parfois contraintes d'accoucher dans des camps de fortune, ou sur la route.

"Ce cauchemar à Gaza est bien plus qu'une crise humanitaire, c'est une crise de notre humanité", lâche M. Allen.

Lors de l'attaque du 7 octobre, 239 personnes ont été prises en otage en Israël et sont retenues dans la bande de Gaza. Parmi elles 35 enfants dont un bébé de 10 mois et des femmes allaitantes.


Israël intensifie ses opérations près de Gaza-ville, réunion à la Maison Blanche

L'ONU estime à près d'un million de personnes la population actuelle du gouvernorat de Gaza qui comprend Gaza-ville et ses environs. (AFP)
L'ONU estime à près d'un million de personnes la population actuelle du gouvernorat de Gaza qui comprend Gaza-ville et ses environs. (AFP)
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  • Mercredi, l'armée israélienne qui contrôle environ 75% du territoire, a affirmé que ses troupes "opéraient à la périphérie de Gaza-ville pour localiser et démanteler les sites d'infrastructures terroristes en surface et souterrains"
  • Des habitants du quartier de Zeitoun à Gaza-ville ont fait état de tirs de drones et d'intenses bombardements nocturnes, alors que la Défense civile et des sources hospitalières ont annoncé quatre morts par des tirs israéliens dans le sud

GAZA: L'armée israélienne a intensifié mercredi ses opérations autour de la ville de Gaza, quelques heures avant une réunion à la Maison Blanche sous la présidence de Donald Trump consacrée à des plans d'après-guerre pour le territoire palestinien dévasté.

Elle a jugé "inévitable" l'évacuation de la population de cette ville, qu'elle présente comme le dernier grand bastion du mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza assiégée et d'où des milliers d'habitants ont déjà fui.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu est sous pression croissante, tant en Israël qu'à l'étranger, pour mettre fin à son offensive à Gaza, lancée en riposte à une attaque sans précédent du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023.

Son cabinet de sécurité a approuvé début août un plan pour s'emparer de Gaza-ville, située dans le nord du territoire palestinien où les quelque deux millions d'habitants ont été déplacés plusieurs fois par la guerre.

Mercredi, l'armée israélienne qui contrôle environ 75% du territoire, a affirmé que ses troupes "opéraient à la périphérie de Gaza-ville pour localiser et démanteler les sites d'infrastructures terroristes en surface et souterrains".

Des habitants du quartier de Zeitoun à Gaza-ville ont fait état de tirs de drones et d'intenses bombardements nocturnes, alors que la Défense civile et des sources hospitalières ont annoncé quatre morts par des tirs israéliens dans le sud du territoire palestinien frappé par la famine selon l'ONU.

"Les avions ont bombardé à plusieurs reprises et des drones ont tiré toute la nuit", a déclaré Tala al-Khatib, 29 ans, au téléphone à l'AFP. "Plusieurs maisons ont été détruites. Nous sommes toujours chez nous, certains voisins ont fui, d'autres sont restés. Mais où que vous fuyiez, la mort vous suit!"

"Ca suffit" 

Abdelhamid al-Sayfi, 62 ans, n'est pas sorti de chez lui à Zeitoun depuis mardi. "Nous n'avons ni nourriture ni eau. Quiconque sort est pris pour cible par les drones."

L'ONU estime à près d'un million de personnes la population actuelle du gouvernorat de Gaza qui comprend Gaza-ville et ses environs.

Le ministre de la Défense Israël Katz a menacé de détruire Gaza-ville si le Hamas n'acceptait pas d'être désarmé, de libérer tous les otages et de mettre fin à la guerre selon les conditions d'Israël.

Mardi, des dizaines de milliers d'Israéliens sont descendus dans la rue pour réclamer un accord pour libérer les otages et arrêter la guerre, au moment où était réuni le cabinet de sécurité.

"Ca suffit!", a hurlé Silvia Cunio dont les deux fils, Ariel et David, enlevés durant l'attaque du 7-Octobre, sont encore retenus à Gaza.

Après la réunion du cabinet, M. Netanyahu a affirmé: "(...) Nous ne laisserons pas ces monstres (le Hamas, ndlr) là-bas, nous libérerons tous nos otages et nous veillerons à ce que Gaza ne représente plus jamais une menace pour Israël".

Le 10 août, il a énuméré les objectifs d'Israël: "premièrement, désarmer le Hamas. Deuxièmement, tous les otages sont libérés. Troisièmement, Gaza est démilitarisée. Quatrièmement, Israël exerce un contrôle de sécurité prépondérant. Et cinquièmement, une administration civile pacifique non israélienne".

Alors qu'Israël poursuit son offensive à Gaza, Steve Witkoff, l'émissaire de Donald Trump, a annoncé "une grande réunion à la Maison Blanche" mercredi, sous la direction du président, sur l'après-guerre.

"Jour d'après" 

"Nous élaborons un plan très complet sur le jour d'après" dans le territoire palestinien, a dit M. Witkoff sans plus de détails.

Donald Trump avait créé la surprise en début d'année en suggérant que les Etats-Unis prennent le contrôle de la bande de Gaza, en évacuent ses habitants et y construisent des complexes immobiliers.

M. Netanyahu avait salué cette proposition, rejetée par plusieurs pays européens et arabes.

La semaine dernière, le Premier ministre israélien avait ordonné l'ouverture immédiate de pourparlers visant à obtenir la libération des otages, tout en persistant sur ses plans pour prendre Gaza-ville.

Il n'avait pas répondu explicitement à une nouvelle proposition de trêve des médiateurs, acceptée par le Hamas, qui prévoit la libération échelonnée des otages sur une période initiale de 60 jours en échange de prisonniers palestiniens.

L'attaque du Hamas du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles. Sur les 251 personnes enlevées ce jour-là, 49 sont encore retenues dans Gaza dont au moins 27 sont décédées selon l'armée.

L'offensive de représailles israélienne a fait au moins 62.819 morts à Gaza, en majorité des civils, selon les chiffres du ministère de la Santé du gouvernement du gouvernement du Hamas à Gaza, jugés fiables par l'ONU.


Liban: polémique après les propos de Barrack en conférence de presse

"S'il vous plaît, calmez-vous un peu (...) Dès que la situation devient chaotique, presque animale, on quitte la salle", avait-t-il lancé avant d'aborder le plan de désarmement du Hezbollah, appelant les journalistes à se comporter de "manière civilisée". (AFP)
"S'il vous plaît, calmez-vous un peu (...) Dès que la situation devient chaotique, presque animale, on quitte la salle", avait-t-il lancé avant d'aborder le plan de désarmement du Hezbollah, appelant les journalistes à se comporter de "manière civilisée". (AFP)
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  • "S'il vous plaît, calmez-vous un peu (...) Dès que la situation devient chaotique, presque animale, on quitte la salle", avait-t-il lancé avant d'aborder le plan de désarmement du Hezbollah, appelant les journalistes à se comporter de "manière civilisée"
  • La présidence libanaise a exprimé sur X ses "regrets pour des propos tenus par inadvertance par l'un de ses invités", réaffirmant son "respect absolu de la dignité humaine" et sa "considération particulière pour les journalistes

BEYROUTH: Des déclarations de l'émissaire américain Tom Barrack adressées à des journalistes au palais présidentiel de Beyrouth ont suscité une vive polémique mardi au Liban, qualifiées d'"insulte" par les syndicats de la presse.

"S'il vous plaît, calmez-vous un peu (...) Dès que la situation devient chaotique, presque animale, on quitte la salle", avait-t-il lancé avant d'aborder le plan de désarmement du Hezbollah, appelant les journalistes à se comporter de "manière civilisée".

La présidence libanaise a exprimé sur X ses "regrets pour des propos tenus par inadvertance par l'un de ses invités", réaffirmant son "respect absolu de la dignité humaine" et sa "considération particulière pour les journalistes et correspondants accrédités".

Le ministre de l'Information, Paul Morcos, a également "regretté" ces propos et souligné son "attachement à la dignité" des journalistes.

Le syndicat des photographes de presse a dénoncé une "insulte directe" aux journalistes et photographes présents et un "précédent dangereux et totalement inacceptable", réclamant des "excuses immédiates et publiques".

Le syndicat des rédacteurs a lui aussi réclamé "des excuses publiques", agitant la menace d'un "boycott de ses visites et de ses rencontres".

L'Union des journalistes du Liban a jugé que ces déclarations "traduisent une arrogance inacceptable et un mépris implicite pour la mission journalistique".

Le président de la commission de l'Information au Parlement, député du Hezbollah, Ibrahim Moussaoui, a appelé les autorités à "convoquer immédiatement l'ambassadrice américaine, la réprimander et protester contre l'insulte caractérisée infligée au Liban et aux Libanais".


Cisjordanie: la police israélienne saisit près de 400.000 euros, accusés de financer le «terrorisme»

La police israélienne a annoncé mercredi avoir confisqué "environ 1,5 million de shekels", plus de 385.000 euros, une somme qu'elle estime liée au "terrorisme", au cours d'une opération en Cisjordanie occupée.  "Les forces de police des frontières en Cisjordanie (Magav) et l'armée israélienne ont confisqué environ 1,5 million de shekels provenant du financement du terrorisme", a déclaré la police dans un communiqué. (AFP)
La police israélienne a annoncé mercredi avoir confisqué "environ 1,5 million de shekels", plus de 385.000 euros, une somme qu'elle estime liée au "terrorisme", au cours d'une opération en Cisjordanie occupée. "Les forces de police des frontières en Cisjordanie (Magav) et l'armée israélienne ont confisqué environ 1,5 million de shekels provenant du financement du terrorisme", a déclaré la police dans un communiqué. (AFP)
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  • Si l'armée israélienne opère souvent en Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1967, il est relativement rare qu'elle intervienne au coeur des villes, à fortiori à Ramallah, où siège l'Autorité palestinienne
  • Mardi, l'armée israélienne avait mené une opération dans le centre-ville de Ramallah, en Cisjordanie occupée, ciblant notamment un bureau de change, au cours de laquelle des dizaines de Palestiniens ont été blessés selon le Croissant-Rouge

JERUSALEM: La police israélienne a annoncé mercredi avoir confisqué "environ 1,5 million de shekels", plus de 385.000 euros, une somme qu'elle estime liée au "terrorisme", au cours d'une opération en Cisjordanie occupée.

"Les forces de police des frontières en Cisjordanie (Magav) et l'armée israélienne ont confisqué environ 1,5 million de shekels provenant du financement du terrorisme", a déclaré la police dans un communiqué.

Elle a précisé qu'une partie de la somme avait été saisie en devises étrangères, notamment des dollars américains et des dinars jordaniens.

Mardi, l'armée israélienne avait mené une opération dans le centre-ville de Ramallah, en Cisjordanie occupée, ciblant notamment un bureau de change, au cours de laquelle des dizaines de Palestiniens ont été blessés selon le Croissant-Rouge.

L'armée avait alors expliqué viser "une entreprise de change qui transférait des fonds destinés aux terroristes du Hamas afin de financer des activités terroristes contre l'Etat d'Israël et ses civils".

Si l'armée israélienne opère souvent en Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1967, il est relativement rare qu'elle intervienne au coeur des villes, à fortiori à Ramallah, où siège l'Autorité palestinienne.

Elle était déjà intervenue dans des bureaux de change palestiniens ces dernières années, au printemps 2025 ou encore en décembre 2023.

Les violences en Cisjordanie se sont intensifiées depuis le début de la guerre à Gaza, déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël le 7 octobre 2023.

Selon un décompte de l'AFP établi à partir de données de l'Autorité palestinienne, au moins 972 Palestiniens, dont de nombreux combattants mais aussi beaucoup de civils, ont été tués par des soldats ou des colons israéliens en Cisjordanie depuis cette date.

Au moins 36 Israéliens, parmi lesquels des civils et des soldats y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors d'opérations militaires israéliennes, selon les données officielles israéliennes.