Prisons: le nombre de détenus bat un nouveau record en France

Le ministre français de la Justice, Eric Dupond-Moretti (au centre), arrive au palais de justice de Paris pour le dernier jour de son procès pour conflits d'intérêts et abus de pouvoir, à Paris, le 29 novembre 2023. (AFP).
Le ministre français de la Justice, Eric Dupond-Moretti (au centre), arrive au palais de justice de Paris pour le dernier jour de son procès pour conflits d'intérêts et abus de pouvoir, à Paris, le 29 novembre 2023. (AFP).
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Publié le Jeudi 30 novembre 2023

Prisons: le nombre de détenus bat un nouveau record en France

  • Selon les données publiées jeudi par le ministère de la Justice il y avait au 1er novembre, 75 130 personnes détenues contre 74 342 en octobre et 72 809 il y a un an
  • Depuis la fin 2022, la population carcérale augmente de façon quasi constante, pour atteindre des niveaux inédits

PARIS : C'est du jamais vu dans les prisons françaises. Au 1er novembre, plus de 75 000 personnes étaient incarcérées pour seulement environ 61 000 places disponibles.

Selon les données publiées jeudi par le ministère de la Justice il y avait au 1er novembre, 75 130 personnes détenues contre 74 342 en octobre et 72 809 il y a un an.

Depuis la fin 2022, la population carcérale augmente de façon quasi constante, pour atteindre des niveaux inédits.

La crise sanitaire du Covid-19 avait fait chuter de façon drastique le nombre de détenus français. Mais, très vite, la courbe est repartie à la hausse. En avril, un seuil avait été franchi avec, pour la première fois, plus de 73 000 personnes incarcérées. En juillet, la barre des 74 000 a été à son tour dépassée.

La densité carcérale globale s'établit à 123,2% contre 120% il y a un an. Dans les maisons d'arrêt, où sont incarcérés les détenus en attente de jugement, et donc présumés innocents, et ceux condamnés à de courtes peines, le taux d'occupation est de 147,6%.

Il atteint ou dépasse même les 200% dans dix établissements.

Au total, 17 064 personnes détenues sont actuellement en surnombre par rapport aux places disponibles dans les prisons françaises, indiquent les statistiques de l'administration pénitentiaire.

En raison de cette surpopulation, 2 668 détenus sont contraints de dormir sur un matelas posé à même le sol. Ils étaient 2 225 dans ce cas il y a un an.

Parmi les personnes incarcérées, 19 885 sont des prévenus, incarcérés dans l'attente de leur jugement. Ils représentent 26,5% du nombre total de détenus.

Au total, 90 817 personnes étaient placées sous écrou au 1er novembre. Parmi elles, on compte 15 687 personnes non détenues faisant l'objet d'un placement sous bracelet électronique ou d'un placement à l'extérieur.

La surpopulation carcérale, problème persistant en France, pèse sur la politique d'exécution des peines d'incarcération qui coûte "environ 4 milliards d'euros" par an, pointait le mois dernier la Cour des comptes.

Le fonctionnement actuel du système carcéral "n’est pas satisfaisant", estimait la Cour.

Parmi les causes de la surpopulation carcérale, l'institution a relevé une "répression accrue" pour certains crimes et délits comme les "violences intrafamiliales, les délits routiers ou les violences envers les forces de l’ordre", l'"augmentation du recours aux comparutions immédiates et le maintien, à un niveau élevé, du taux de détention provisoire".

La France est régulièrement épinglée pour sa surpopulation carcérale. La dernière condamnation en date remonte au 6 juillet, émanant de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).

«Zéro délinquance»

Le phénomène ne semble pas sur le point de s'inverser.

A l'approche des Jeux olympiques (JO) de Paris 2024, les autorités affichent un objectif "zéro délinquance" et les juridictions se préparent à multiplier les audiences de comparution immédiate, à l'origine d'un nombre important d'incarcérations.

Plusieurs associations et institutions comme l'Observatoire international des prisons (OIP) ou le Conseil économique social et environnemental (CESE) plaident pour un dispositif contraignant de régulation de la population carcérale.

"La peine n'a pas de sens quand ses conditions d'exécution ne sont pas dignes", a ainsi estimé le CESE dans une récente recommandation.

Il faut "l'inscription dans la loi" d'un dispositif permettant de maîtriser la surpopulation carcérale, a prôné de son côté la contrôleure générale des prisons (CGLPL) Dominique Simonnot dans un avis publié mi-septembre au Journal officiel.

"Au-delà du caractère impersonnel des statistiques, les constats effectués par le CGLPL dès 2012 dans son avis sur la surpopulation carcérale, et plus encore après la fin de la crise sanitaire, montrent que les conditions de détention se dégradent dans toutes leurs dimensions, en même temps que les conditions de travail du personnel pénitentiaire", a mis en avant Mme Simonnot.

S'il est d'accord sur le constat d'une surpopulation carcérale, le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti a son avis sur les moyens d'y remédier. "La première solution pour lutter contre la surpopulation carcérale est de construire de nouvelles places opérationnelles de prison", a-t-il écrit dans des observations jointes à l'avis du CGLPL.

Le gouvernement table sur la construction de 15 000 nouvelles places de prison d'ici à 2027.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.