Le rapprochement turco-israélien: un rêve ou une réalité?

Des manifestants marchent à Istanbul pour célébrer l'anniversaire d'un raid israélien meurtrier sur Mavi Marmara (Photo, AFP/Archives).
Des manifestants marchent à Istanbul pour célébrer l'anniversaire d'un raid israélien meurtrier sur Mavi Marmara (Photo, AFP/Archives).
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Publié le Dimanche 27 décembre 2020

Le rapprochement turco-israélien: un rêve ou une réalité?

  • Erdogan a réitéré son engagement que la Palestine constituait toujours la ligne rouge de la Turquie
  • Israël accuse la Turquie d'avoir accordé des passeports aux membres du Hamas à Istanbul

ANKARA: Après des années de relations minimes et dégradées entre la Turquie et Israël, Ankara est sur le point de tendre un rameau d'olivier à Tel Aviv en vue de mettre en valeur les relations diplomatiques bilatérales entre les deux pays.

«Nos relations avec l’Israël dans le domaine du renseignement n'ont d’ailleurs pas cessé; ils existent encore», a affirmé le 25 décembre le président turc Recep Tayyip Erdogan, à la suite d'informations selon lesquelles le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev aurait proposé sa médiation.

Récemment, le conseiller d’Erdogan, Mesut Hakki Casin, a révélé que la Turquie pourrait de nouveau acheter des armes d’Israël afin de renforcer la coopération entre les industries de défense turques et israéliennes.

Les discussions de renseignement ont repris entre les deux parties. Même si les relations commerciales se poursuivent, les deux pays ont expulsé leurs ambassadeurs en mai 2018 en raison du meurtre de dizaines de Palestiniens par les forces israéliennes au long de la frontière de Gaza et la décision des États-Unis de déménager son ambassade à Jérusalem.

Erdogan a avoué que la Turquie avait des problèmes avec «les gens au plus haut niveau» en Israël tout en ajoutant que la Palestine constituait toujours la ligne rouge de la Turquie et qu'il est impossible pour Ankara de tolérer les politiques «impitoyables» d'Israël envers les territoires palestiniens.

L'incident de Mavi Marmara, qui impliquait le raid israélien sur une flottille à destination de Gaza transportant une aide humanitaire pour les Palestiniens en 2010, a entraîné une grave crise des relations turco-israéliennes qui a mis près d'une décennie à se rétablir malgré la médiation américaine.

Selon l’Israël, l’obstacle le plus grave qui fait obstruction à la normalisation des relations, est que Tel-Aviv accuse Ankara d’avoir octroyer des passeports aux membres du Hamas à Istanbul. De son côté, Ankara continue de critiquer le récent accord de normalisation des relations entre Israël et certains pays du Golfe.

Cependant, les experts ne s’attendent pas à une réelle amélioration des relations bilatérales avant le résultat des élections israéliennes de mars 2021.

La Dr Selin Nasi, chercheuse sur les relations Israélo-Turques de l'Université Bogazici d'Istanbul, pense que les deux pays pourraient échanger des ambassadeurs à l'avenir, peut-être suite aux élections israéliennes de mars.

«Cependant, il faut faire la distinction entre le rétablissement éventuel des relations diplomatiques et une véritable normalisation durable des relations bilatérales. Pour ces derniers, la restauration de la confiance mutuelle devient essentielle. Cela prend autant de temps qu'un repositionnement des politiques», a-t-elle déclaré à Arab News.

Selon Aydin Sezer, un expert du Moyen-Orient installé à Ankara, la Turquie a l’intention de réduire au maximum le nombre de ses «ennemis» sur la scène internationale.

«L'élection de Joe Biden à la présidence américaine est l'occasion de serrer à nouveau les liens. Avec cette initiative israélienne, la Turquie veut certainement tendre la main au lobby juif aux États-Unis en vue d’obtenir leur soutien inconditionnel», a-t-il dévoilé à Arab News.

«Une normalisation des relations turco-israéliennes enverrait également un message à Téhéran pour agir avec prudence et sagesse dans la région», a ajouté Sezer.

Ufuk Ulutas, le possible futur ambassadeur, n'est pas un diplomate de carrière. Il a travaillé comme directeur du groupe de réflexion pro-gouvernemental SETA en tant qu'expert sur l'Iran, a étudié à l'Université hébraïque de Jérusalem et il est connu comme une personnalité propalestinienne.

Les spéculations en Israël et en Turquie sont vives en ce qui concerne les graves problèmes auxquels Ulutas pourrait être confronté au cas où il obtiendrait l'approbation diplomatique du gouvernement israélien en raison de ses opinions anti-israéliennes, qu'il a exprimées dans le passé dans différentes interviews télévisées et rapports écrits.

Le choix de la Turquie d’Ulutas a été interprété par la presse israélienne comme une                                   «continuation de la politique de provocation d’Ankara».

La nomination d'un diplomate professionnel à ce poste a toujours été une tradition dans les relations bilatérales jusqu'à la crise de Mavi Marmara qui a été considérée comme un signe afin de montrer l'importance qui est accordée aux relations bilatérales entre les deux pays.

Soner Cagaptay, de l’Institut de Washington pour la politique au Proche-Orient, pense que les commentaires d’Erdogan du vendredi indiquent clairement que la Turquie veut mettre fin à son isolement total au Moyen-Orient et en Méditerranée orientale, car maintenant elle n’a pratiquement pas d’amis ou d’alliés dans la région.

«Il y a aussi un aspect de la Méditerranée orientale dans cette volonté de rapprochement», a-t-il signalé à Arab News.

La coopération en matière d'énergie et de défense entre l'Égypte, la Grèce et Israël pourrait créer une atmosphère compliquée pour les mouvements turcs dans la région.

« La Turquie ressent le besoin de faire reculer Israël de cette alliance qui exclut la Turquie », a confié Cagaptay.

« Il y a une perception à Ankara que l'offensive de charme d'Erdogan envers Biden est de fournir un cadeau aux États-Unis, car Israël est l'allié le plus proche de l'Amérique au Moyen-Orient. Ce moteur semble également être à l’origine de la volonté de normalisation d’Erdogan », a-t-il ajouté.

Nasi croit également que l’émergence du Forum EastMed Gas en Méditerranée ainsi que la normalisation des relations d’Israël avec les pays du Golfe prouvent une fois de plus les limites de la politique étrangère identitaire d’Ankara.

« En normalisant les relations avec Israël, Ankara espère avant tout diviser le bloc du pouvoir en Méditerranée, au mieux affaiblir ce qu'elle perçoit comme un axe hostile pour la forcer à faire des concessions.

Le rapprochement avec Israël pourrait également aider la Turquie à gagner à nouveau la confiance de Washington; cela va l’aider peut-être à neutraliser l’opposition », a-t-elle souligné.

Cependant, Cagaptay n'est pas du tout sûr qu'Israël rendra la pareille complètement et aussitôt.

«Aujourd'hui, l’Israël maintien des liens étroits dans ces rapports régionales, contrairement à ces relations il y a dix ans. Il a de nombreux amis. Il ne se précipitera à coup sûr immédiatement vers Erdogan. Les leaders israéliens resteront peu enthousiastes, et ils ne sauteront pas à la conclusion d’avoir bientôt des liens à part entière avec la Turquie », a-t-il indiqué. «Les liens de la Turquie avec le Hamas seront régulièrement un obstacle avant toute normalisation».

Nasi approuve cette idée mais elle est également sceptique quant à la volonté de la Turquie à ce stade de faire un compromis sur la question de son appui au Hamas et aux Frères musulmans, qui constitue l’une des principales contraintes à la réconciliation du point de vue d’Israël.

« Une normalisation durable entre la Turquie et Israël nécessite la redéfinition des relations bilatérales sur la base d'intérêts géopolitiques communs tout en minimisant l’importance des préférences idéologiques », a-t-elle assuré.

Pour Nasi, il n'y a toujours pas d'indicateur clair qu'Ankara change de cap.

« Les leaders turcs semblent vouloir une victoire facile, pour des gains plus importants au moindre coût minimum. Il est difficile de concilier les efforts de normalisation avec des rapports suggérant que la Turquie accorderait des passeports aux membres du Hamas ou publierait des vidéos avec un message incitant à la libération de Jérusalem », a-t-elle souligné.

«Au bout du compte, les messages adressés à un public national sont toujours surveillés par l’opinion publique internationale».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


«Des habitants meurent de froid»: Gaza frappé par de nouvelles intempéries

Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs. (AFP)
Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs. (AFP)
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  • "Avec les fortes pluies et le froid apportés par la tempête Byron, des habitants de la bande de Gaza meurent de froid", a écrit lundi sur X Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens (Unrwa)
  • "Nos aides attendent depuis des mois d'entrer à Gaza. Elles permettraient de couvrir les besoins de centaines de milliers de personnes en détresse", a-t-il déploré

GAZA: De nouvelles pluies hivernales se sont abattues cette semaine sur la bande de Gaza, déjà ravagée par la guerre, faisant au moins 18 morts depuis le début des intempéries.

Des Palestiniens poussant une voiture dans une rue inondée, une charrette tirée par un âne progressant difficilement à travers les eaux, des tentes et des abris de fortune de déplacés inondés: la situation s'aggrave dans un territoire palestinien en ruines.

"Avec les fortes pluies et le froid apportés par la tempête Byron, des habitants de la bande de Gaza meurent de froid", a écrit lundi sur X Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens (Unrwa).

"Nos aides attendent depuis des mois d'entrer à Gaza. Elles permettraient de couvrir les besoins de centaines de milliers de personnes en détresse", a-t-il déploré.

Si un cessez-le-feu est entré en vigueur en octobre après deux années de guerre entre Israël et le mouvement islamiste Hamas, l'ONU estime que l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante face à l'ampleur des besoins de la population démunie.

Nourrissons «en danger»

Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs.

Trois enfants étaient décédés dans des conditions similaires la semaine dernière, d'après la Défense civile, organisation de premiers secours opérant sous l'autorité du mouvement islamiste.

Si un cessez-le-feu est entré en vigueur en octobre, l'ONU estime que l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante face à l'ampleur des besoins de la population démunie.

Environ 1,3 million de personnes, sur une population de plus de deux millions d'habitants dans le territoire, ont actuellement besoin d'un hébergement d'urgence, selon les Nations unies, qui mettent en garde contre un risque croissant d'hypothermie.

Les nourrissons encourent particulièrement un "grand danger" avec les conditions hivernales, avertit l'organisation.

«Reconstruire le territoire»

La Défense civile de Gaza avait indiqué vendredi qu'au moins 16 personnes étaient mortes en 24 heures des suites de l'effondrement de bâtiments ou des effets du froid.

Outre le nourrisson, le porte-parole de l'organisation, Mahmoud Bassal, a fait état mardi d'un autre décès après l'effondrement du toit d'un bâtiment à la suite de fortes pluies dans le nord-ouest de la ville de Gaza.

Il a précisé que la maison avait déjà été endommagée par des frappes aériennes pendant la guerre.

Des images de l'AFP montrent des secouristes extraire le corps d'un Palestinien des décombres d'un bâtiment. Non loin, des proches en deuil pleurent.

"Nous appelons le monde à résoudre nos problèmes et à reconstruire le territoire afin que nous puissions avoir des maisons au lieu (...) de vivre dans la rue", a déclaré Ahmed al-Hossari, qui a perdu un membre de sa famille.

La bande de Gaza connaît généralement un épisode de fortes pluies à la fin de l'automne et en hiver, mais l'état de dévastation du territoire, des conséquences de la guerre, a rendu ses habitants plus vulnérables.

 


Négociations de paix au Soudan: le chef de l'armée prêt à «collaborer» avec Trump

Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
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  • Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)"
  • Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise

PORT-SOUDAN: Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt.

Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)", a déclaré le ministère des Affaires étrangères pro-armée dans un communiqué publié à l'issue d'un déplacement officiel à Ryad, à l'invitation du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane.

Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise.

Les négociations de paix menées par les Etats-Unis avec le groupe de médiateurs du Quad (réunissant Egypte, Arabe Saoudite et Emirats) sont à l'arrêt depuis que le général al-Burhane a affirmé que la dernière proposition de trêve transmise par M. Boulos était "inacceptable", sans préciser pourquoi.

Le militaire avait alors fustigé une médiation "partiale" et reproché à l'émissaire américain de reprendre les éléments de langage des Emirats, accusés d'armer les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Abou Dhabi nie régulièrement fournir des armes, des hommes et du carburant aux FSR, malgré des preuves fournies par des rapports internationaux et enquêtes indépendantes.

De leur côté, les FSR ont annoncé qu'ils acceptaient la proposition de trêve mais les attaques sur le terrain n'ont pas pour autant cessé au Kordofan, région au coeur de combats intenses.

Pour l'instant, aucune nouvelle date de négociations n'a été fixée, que ce soit au niveau des médiateurs du Quad ou de l'ONU qui essaie parallèlement d'organiser des discussions entre les deux camps.

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée, qui contrôle le nord et l'est du pays - aux FSR, dominantes dans l'ouest et certaines zones du sud.

Depuis la prise du dernier bastion de l'armée dans la vaste région voisine du Darfour, les combats se sont intensifiés dans le sud du pays, au Kordofan, région fertile, riche en pétrole et en or, charnière pour le ravitaillement et les mouvements de troupes.

Le conflit, entré dans sa troisième année, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, déraciné des millions de personnes et provoqué ce que l'ONU qualifie de "pire crise humanitaire au monde".

 


Le prince héritier saoudien rencontre le chef du conseil de transition soudanais pour discuter de la sécurité et de la stabilité

Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
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  • La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation
  • Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays

RIYADH : Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane a rencontré Abdel Fattah Al-Burhan à Riyad lundi pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à restaurer la sécurité et la stabilité dans le pays, a rapporté l'Agence de presse saoudienne.

La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation.

Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays, a ajouté SPA.

Le ministre saoudien de la défense, le prince Khalid ben Salmane, le ministre des affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, le ministre d'État et conseiller à la sécurité nationale, Musaed bin Mohammed Al-Aiban, le ministre des finances, Mohammed Al-Jadaan, et l'ambassadeur saoudien au Soudan, Ali Hassan Jaafar, ont également assisté à la réunion.