Gaza: Le conflit entre dans sa phase la plus meurtrière, le Hezbollah à la croisée des chemins

Une unité d'artillerie israélienne tire depuis une position en Haute Galilée dans le nord d'Israël vers le sud du Liban le 11 décembre 2023, dans un contexte de tensions transfrontalières croissantes avec les militants du Hezbollah (Photo, AFP).
Une unité d'artillerie israélienne tire depuis une position en Haute Galilée dans le nord d'Israël vers le sud du Liban le 11 décembre 2023, dans un contexte de tensions transfrontalières croissantes avec les militants du Hezbollah (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 14 décembre 2023

Gaza: Le conflit entre dans sa phase la plus meurtrière, le Hezbollah à la croisée des chemins

  • La milice libanaise est confrontée à un dilemme difficile: assister à la destruction du Hamas depuis les coulisses ou risquer de déclencher une guerre régionale
  • Les analystes sont divisés sur la question de savoir si Israël a les moyens ou le soutien international pour s'attaquer au Hezbollah une fois qu'il en aura fini avec le Hamas

DUBAI: Depuis que les combats entre Israël et le groupe militant palestinien Hamas ont éclaté le 7 octobre, Washington et ses alliés européens ont cherché à contenir le conflit et à éviter qu'il ne s'étende à l'ensemble de la région.

Dès qu'Israël a lancé son assaut militaire sur la bande de Gaza – d'où le Hamas a lancé une attaque sans précédent sur le sud d'Israël – le Hezbollah libanais a lancé sa propre campagne de frappes transfrontalières. Cela a contrarié les efforts des forces de maintien de la paix des Nations unies, stationnées le long de la Ligne bleue séparant Israël et le Liban, pour apaiser les tensions.

En tant que force beaucoup plus puissante que le Hamas, ayant accès à une technologie sophistiquée de drones et de missiles fournie par l'Iran, tout conflit à grande échelle impliquant le Hezbollah serait probablement beaucoup plus destructeur pour Israël.

De la fumée s'élève à l'horizon le long des collines du sud du Liban suite aux bombardements israéliens, le 10 décembre 2023 (Photo, AFP).

Les forces de défense israéliennes (FDI) ont répondu aux attaques du Hezbollah par des frappes aériennes, des drones et des tirs d'artillerie sur le Liban-Sud, faisant 120 morts, pour la plupart des combattants du Hezbollah. Israël a quant à lui déploré 10 victimes, dont six soldats.

Bien que les échanges soient les plus violents depuis la guerre de trente jours de 2006, les deux parties ont évité les affrontements directs et les incursions qui pourraient entraîner une grave escalade.

EN CHIFFRES

100 000 combattants à la disposition du Hezbollah en octobre 2021.

150 000 roquettes et missiles dans l'arsenal de guerre du Hezbollah.

100 000 soldats israéliens déployés à la frontière nord.

100 000 civils évacués du nord d'Israël.

Les députés du gouvernement intérimaire libanais et l'ensemble de la population n'ont guère envie d'une guerre avec Israël, d'autant plus que le pays est aux prises avec la pire crise économique de son histoire.

«Croyez-moi quand je vous dis que nos cœurs saignent pour Gaza, mais nous ne pouvons pas supporter une autre guerre sur notre propre sol», a déclaré à Arab News, Ali Abdallah, un citoyen libanais de 37 ans qui est sans emploi.

«Les nécessités sont devenues des luxes pour beaucoup d'entre nous. Entraîner le Liban, dans son état actuel, dans une nouvelle guerre serait insensible. Comment pouvons-nous répondre à un appel aux armes avec l'estomac vide?», a-t-il expliqué.

L'hésitation du Hezbollah à se lancer dans une guerre totale est aussi en partie le résultat de la pression militaire et diplomatique soutenue de l'Occident.

Depuis octobre, les États-Unis ont stationné deux porte-avions d'attaque et un sous-marin nucléaire en Méditerranée orientale et dans le Golfe afin de dissuader le Hezbollah et d'autres groupes sympathisants du Hamas.

Amos Hochstein, assistant adjoint du président américain, Joe Biden, et conseiller principal pour l'énergie et l'investissement, s'est rendu au Liban en novembre pour mettre en garde les autorités libanaises et le Hezbollah contre une escalade du conflit.

Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, a déclaré que le principal objectif des attaques de sa milice contre Israël était d’épuiser les ressources militaires des FDI qui auraient autrement été utilisées à Gaza.

Mais alors qu'il assiste à la destruction du Hamas en tant qu'organisation militaire, ses combattants doivent faire un choix difficile: rester les bras croisés et assister au démantèlement de la branche gazaouie de ce qu'on appelle l'axe de la résistance, soutenu par l'Iran, ou se ranger aux côtés du Hamas pour essayer de le sauver.

Des combattants du Hezbollah et des sympathisants du parti regardent Hassan Nasrallah, le chef du mouvement musulman chiite libanais, prononcer un discours télévisé sur un grand écran dans une salle à Beyrouth, le 11 novembre 2023 (Photo, AFP).

«Je pense qu'ils ne le feraient pas. Ils resteraient sur la touche», a déclaré précédemment à Arab News, Firas Maksad, chercheur principal à l'Institut du Moyen-Orient. «Le Hezbollah et l'Iran préfèrent tous deux éviter une confrontation directe plus importante avec Israël», a-t-il précisé.

Maksad et d'autres analystes estiment qu'en tant que première ligne de dissuasion et de défense du régime iranien et de son programme nucléaire si Israël décide de frapper, le Hezbollah ne va pas perdre son temps à sauver le Hamas.

Néanmoins, alors que les FDI encerclent les derniers bastions du Hamas à Gaza et continuent de frapper des cibles au Liban et en Syrie, la probabilité d'une flambée régionale reste forte.

Des soldats israéliens prennent position près de la frontière de la bande de Gaza, dans le sud d'Israël, le 11 décembre 2023, alors que la guerre avec les militants palestiniens se poursuit (Photo, AP).

Les analystes de la défense affirment que le Hezbollah a massé une grande partie de sa force de combat d'élite Radwan à la frontière et qu'il utilise de nouvelles armes. Il s'agit notamment des roquettes à courte portée dites Burkan, qui peuvent transporter plus de 453 kg de matières explosives et qui ont infligé de graves dommages à un avant-poste militaire israélien le mois dernier.

Selon un récent rapport du Wall Street Journal, le Hezbollah possède des armes guidées par GPS capables de frapper l'ensemble du territoire israélien, des missiles SCUD très précis et à charge lourde, ainsi qu'une version du missile mortel Tishreen fabriqué par la Syrie, et de nombreux missiles antichars Kornet équipés de munitions guidées par laser.

Tout cela s'ajoute à un arsenal élargi d'environ 150 000 roquettes.

Des combattants du Hezbollah défilent dans la banlieue sud de Beyrouth, le 14 avril 2023, à l'occasion de la Journée d'Al-Qods (Jérusalem), une commémoration en soutien au peuple palestinien célébrée chaque année le dernier vendredi du mois de jeûne musulman, le Ramadan (Photo, AFP).

La semaine dernière, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, a lancé un avertissement selon lequel Beyrouth et le Liban-Sud seraient transformés «en Gaza et Khan Younès» si les combats s'intensifiaient. Les troupes israéliennes et les militants du Hamas se livrent actuellement à des combats meurtriers pour le contrôle de Khan Younès, La deuxième plus grande ville de Gaza.

Selon Meir Javedanfar, conférencier à l'université Reichman de Tel-Aviv, la tolérance israélienne à l'égard des menaces du Hezbollah n'a jamais été aussi faible.

«Benny Gantz, le ministre israélien de la Défense, a informé les Américains qu'Israël voulait que le Hezbollah évacue les zones adjacentes à ses frontières», a révélé Javedanfar à Arab News.

«Cela est conforme à la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies, qui stipule qu'ils ne doivent pas se trouver là en premier lieu. C'est l'objectif d'Israël», a-t-il éclairci.

La résolution 1701 est l'accord qui a mis fin à la guerre de 2006. Elle prévoyait «des arrangements de sécurité pour empêcher la reprise des hostilités, notamment l'établissement d'une zone exempte de tous personnels armés, biens et armes autres que ceux du gouvernement libanais et de la Finul (Force intérimaire des Nations unies au Liban), entre la Ligne bleue et le fleuve Litani», a-t-il spécifié.

La présence continue du Hezbollah dans la région pourrait être suffisamment provocante pour que les FDI s'attaquent au groupe une fois qu'elles en auront fini avec le Hamas.

Israël a déployé jusqu'à 100 000 soldats le long de la frontière nord, évacué 60 000 résidents locaux et transformé certaines communautés frontalières en bases militaires en raison de la menace perçue d'une invasion du Hezbollah.

Des soldats israéliens patrouillent au sommet du mont Hermon, près de la frontière avec le Liban, sur le plateau du Golan annexé par Israël, alors que les tensions transfrontalières avec les militants du Hezbollah ne cessent de croître (Photo, AFP).

«Nous avons vu ce qui se passe lorsque le Hamas se trouve à notre frontière», a prévenu Javedanfar. «Cela a conduit à un tel désastre le 7 octobre.»

«Nous sommes face à une nouvelle situation. Le gouvernement israélien va faire pression sur les Américains et d'autres pays pour qu'ils comprennent qu'il ne peut plus s'accommoder d'une présence militaire du Hezbollah à ses frontières.

«Après le 7 octobre, la tolérance à l'égard des menaces du Hezbollah est devenue très faible. Cela pourrait être la semaine prochaine, cela pourrait être dans cinq ans. Qui sait? Mais Israël mettra fin à la menace du Hezbollah», a-t-il affirmé.

Des roquettes tirées depuis le sud du Liban sont interceptées au-dessus d'une position située de l'autre côté de la frontière, près du kibboutz Dan, dans le nord d'Israël, le 7 novembre 2023, alors que les tensions transfrontalières entre le Hezbollah et Israël ne cessent de s'aggraver (Photo, AFP).

Les analystes militaires estiment que les services de sécurité israéliens s'étaient convaincus que la menace posée par le Hamas avait été contenue, avant d'être pris au dépourvu par l'attaque du 7 octobre, qui a entraîné la mort de quelque 1 400 personnes, principalement des civils, et la prise de plus de 240 otages.

C'est une erreur que les israéliens ne voudront pas refaire, a indiqué Javedanfar.

«Nous pensons que le Hamas avait changé, qu'il était passé d'une organisation militaire extrémiste à une organisation désireuse de développer l'économie de Gaza et de devenir plus responsable», a-t-il signalé.

«On nous a prouvé que nous avions tort. Toutes ces hypothèses se sont avérées fausses. Nous avons vu les conséquences dévastatrices de notre erreur concernant le Hamas, et maintenant nous posons la même question concernant le Hezbollah. Voulons-nous vivre avec ses menaces à nos frontières? Et ses 150 000 missiles?», a-t-il averti.

«Israël dispose de plus de 300 000 militaires en réserve et est prêt à les utiliser pour dissuader le Hezbollah de s'éloigner de ses frontières», a souligné Javedanfar.

Tzachi Hanegbi, chef du Conseil national de sécurité d'Israël, a récemment déclaré qu'une fois le Hamas vaincu, Israël pourrait devoir entrer en guerre contre le Hezbollah, faute de quoi les citoyens pourraient ne pas vouloir retourner dans les régions du nord.

Bien qu'Israël préfère ne pas mener une guerre sur deux fronts, Hanegbi a déclaré qu'il pourrait devoir «imposer une nouvelle réalité» en ce qui concerne le Hezbollah.

Cependant, tous les analystes ne sont pas convaincus qu'Israël ait les moyens, la volonté ou le soutien international nécessaires pour mener à bien une campagne militaire contre le redoutable Hezbollah.

«Une guerre totale avec le Liban serait un fardeau pour Israël», a indiqué à Arab News, Nadim Shehadi, économiste et chroniqueur libanais. «Ce serait trop coûteux économiquement et psychologiquement pour Israël.»

En fait, Shehadi estime que même la défaite totale du Hamas est hors de portée d'Israël, surtout maintenant que l'opinion publique mondiale se retourne contre les Israéliens. «Ce que le Hamas a réalisé en termes de victoire est en train de détruire même la perception des Israéliens d'eux-mêmes», a-t-il expliqué.

Des soldats israéliens se rassemblent près de la frontière avec la bande de Gaza, dans le sud d'Israël, le vendredi 8 décembre 2023 (Photo, AP).

«Deux croyances fondamentales ont été ébranlées. La première était que le gouvernement israélien avait créé un lieu sûr où les Juifs pouvaient être protégés par leur État. Cette croyance s'est effondrée car les citoyens ne se sentent pas en sécurité et fuient la Galilée», a-t-il mentionné.

«La deuxième est que l'armée israélienne est morale, qu'elle respecte le droit international et les règles humanitaires. Ce point s'est également effondré. Le monde et les Israéliens n'y croient plus. Ils sont devenus fous à Gaza», a-t-il ajouté.

Plus de 18 000 personnes ont été tuées à Gaza depuis le 7 octobre, la plupart étant des femmes et des enfants, selon le ministère de la Santé dirigé par le Hamas.

«Il s'agit également de gains pour le Hezbollah», a déclaré Shehadi. «Le Hezbollah observe ce qui se passe actuellement à Gaza.»

Toutefois, Shehadi ne croit pas non plus que le Hezbollah veuille une guerre avec Israël, du moins pas pour le moment.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com 


Comment l’initiative diplomatique saoudo-française a rapproché la Palestine d’un pas vers la reconnaissance d’un État

Le résultat du vote sur une résolution approuvant la Déclaration de New York est affiché à l'écran lors de la deuxième séance plénière de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la question de la Palestine au siège de l'ONU à New York, le 12 septembre 2025. (Photo de l'ONU)
Le résultat du vote sur une résolution approuvant la Déclaration de New York est affiché à l'écran lors de la deuxième séance plénière de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la question de la Palestine au siège de l'ONU à New York, le 12 septembre 2025. (Photo de l'ONU)
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  • Les deux pays ont obtenu un large soutien à l’Assemblée générale de l’ONU : 142 nations ont approuvé leur déclaration en faveur de la solution à deux États
  • La Déclaration de New York, issue d’une conférence saoudo-française en juillet, exige un cessez-le-feu à Gaza, le désarmement du Hamas et la reconnaissance d’un État palestinien

DUBAÏ : Lors d’un vote historique vendredi, 142 pays ont soutenu une déclaration saoudo-française à l’Assemblée générale de l’ONU appelant à la création d’un État palestinien indépendant, signalant que l’offensive diplomatique menée par Riyad mobilise un consensus mondial sans précédent en faveur d’une solution à deux États pour résoudre un conflit vieux de plusieurs décennies.

Le vote en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », qui appelle à une solution à deux États sans implication du Hamas, représente une nouvelle étape dans la pression internationale croissante sur Israël pour qu’il mette fin à sa guerre à Gaza. Ce conflit a fait plus de 64 000 morts, selon les autorités sanitaires locales, des dizaines de milliers de blessés, et provoqué des conditions de famine dans un contexte de catastrophe humanitaire croissante.

Le président français Emmanuel Macron a déclaré que l’adoption de la déclaration par l’Assemblée générale de l’ONU montre que la communauté internationale est en train de « tracer une voie irréversible vers la paix au Moyen-Orient ».

« Un autre avenir est possible. Deux peuples, deux États : Israël et Palestine, vivant côte à côte en paix et en sécurité », a-t-il écrit vendredi dans un post sur X.

Le ministère saoudien des Affaires étrangères a salué l’adoption de la déclaration, affirmant qu’elle « confirme le consensus international pour avancer vers un avenir pacifique dans lequel le peuple palestinien obtient son droit légitime à établir un État indépendant sur la base des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale ».

La « Déclaration de New York », issue d’une conférence internationale organisée par l’Arabie saoudite et la France en juillet au siège de l’ONU, appelle à un cessez-le-feu à Gaza, à la libération de tous les otages, au désarmement du Hamas et au transfert de ses armes à l’Autorité palestinienne sous supervision internationale, ainsi qu’à la création d’un État palestinien indépendant.

Elle aborde également la normalisation des relations entre Israël et les pays arabes, et propose le déploiement d’une « mission internationale temporaire de stabilisation » en Palestine, sous mandat du Conseil de sécurité de l’ONU, afin de soutenir la population civile palestinienne et de transférer les responsabilités sécuritaires à l’Autorité palestinienne.

Ce vote ouvre désormais la voie à une conférence d’une journée à l’ONU sur la solution à deux États, coprésidée par Riyad et Paris, prévue pour le 22 septembre, au cours de laquelle plusieurs pays — dont la France, le Royaume-Uni, le Canada, la Belgique et l’Australie — se sont engagés à reconnaître formellement l’État de Palestine.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été adoptée vendredi avec un soutien massif : 142 pays ont voté pour, seuls 10, dont Israël et son principal allié, les États-Unis, ont voté contre, tandis que 12 nations se sont abstenues.

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La liste des nations qui ont voté en faveur de la résolution approuvant la Déclaration de New York est affichée à l'écran lors de la deuxième séance plénière de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la question de la Palestine au siège de l'ONU à New York, le 12 septembre 2025. (Photo de l'ONU)

La déclaration, qui incarne les efforts diplomatiques croissants de l’Arabie saoudite en faveur d’un État palestinien, avait déjà été approuvée par la Ligue arabe et cosignée en juillet par 17 États membres de l’ONU, dont plusieurs pays arabes.

Le résultat du vote de vendredi a été fermement condamné par les États-Unis et Israël. Le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Oren Marmorstein, a qualifié l’adoption de la déclaration de « honteuse », affirmant que son pays la « rejette catégoriquement » et qualifiant l’Assemblée générale de l’ONU de « cirque politique déconnecté de la réalité ».

De même, Morgan Ortagus, vice-envoyée spéciale américaine pour le Moyen-Orient, a dénoncé l’action de l’Assemblée générale comme « une nouvelle opération de communication malavisée et mal chronométrée », accusant l’ONU de récompenser le Hamas et de saper les efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre à Gaza. Elle a ajouté que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé pour mettre un terme au conflit.

Le Hamas, de son côté, a déclaré qu’il refusait de déposer les armes tant qu’un État palestinien souverain ne serait pas établi.

Ces appels croissants en faveur d’un État palestinien interviennent alors que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou continue d’intensifier le conflit. Mardi, il a autorisé des frappes aériennes contre des cibles du Hamas au Qatar, lors d’une réunion examinant une proposition de cessez-le-feu américaine — une décision largement condamnée au Moyen-Orient et au-delà, pour avoir sapé les efforts de paix et violé la souveraineté du Qatar.

Sous son autorité, Israël poursuit une offensive militaire majeure à Gaza-ville, malgré l’indignation internationale. Jeudi, la veille du vote à l’ONU, Netanyahou a déclaré qu’« il n’y aura pas d’État palestinien », en signant un accord pour avancer sur le projet controversé d’expansion des colonies dans la zone E1, qui diviserait la Cisjordanie et compromettrait davantage la possibilité d’un État palestinien.

Des analystes ont averti que, bien que symbolique sans mesures concrètes immédiates, l’adoption de la déclaration à l’ONU représente une défaite diplomatique stratégique pour Israël, même si ce dernier revendique des victoires militaires.

Hani Nasira, écrivain, universitaire et analyste politique égyptien, estime que le large soutien à la déclaration reflète le rejet international croissant des pratiques du gouvernement d’extrême droite de Netanyahou, ainsi que l’embarras grandissant pour les États-Unis, son principal allié.

« Israël a perdu son image sur la scène internationale, et l’opposition au gouvernement Netanyahou s’est intensifiée tant à l’échelle mondiale qu’au sein même du pays. Ceux qui le soutiennent aujourd’hui se retrouvent dans une position profondément embarrassante », a déclaré Nasira à Arab News.

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Des Palestiniens déplacés évacuant la ville de Gaza vers le sud se déplacent à pied et en véhicule le long de la route côtière à Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 13 septembre 2025. (AFP)

Il a déclaré que la décision de Netanyahou de persister dans cette voie semble intenable pour les citoyens israéliens, la région et le monde dans son ensemble.

« L’inquiétude aujourd’hui ne concerne pas seulement la Palestine, mais la menace s’est étendue à la sécurité du Golfe. Les dernières attaques ont compromis le rôle du Qatar comme médiateur et ébranlé l’image de Washington en tant qu’allié fiable » », a affirmé Nasira, avertissant que les actions d’Israël sont facteurs de déstabilisation régionale.

Si la création d’un État palestinien est considérée comme la solution, cette perspective reste hors de portée à court terme.

Nasira a souligné que l’agression continue d’Israël dans la région, le discours provocateur de Netanyahou, y compris sa vision d’un « Grand Israël », ainsi que les profondes divisions internes au sein des factions palestiniennes, constituent des obstacles majeurs au plan de paix.

Il a averti que la région se trouve à un « tournant » nécessitant l’exploration d’alternatives réalistes, « sans se laisser entraîner par l’extrémisme de Netanyahou, qui menace non seulement le processus de paix, mais toute la région ».

Nasira a conclu en affirmant que les violations commises par Israël à Gaza mettent en lumière la nécessité d’un ordre mondial multipolaire, plutôt qu’un ordre dominé par les États-Unis — en particulier sous une seconde présidence de Donald Trump.

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Des manifestants participent à une manifestation sur la "place des otages" à Tel Aviv le 13 septembre 2025, appelant Israël à un cessez-le-feu dans sa guerre contre Gaza afin de ne pas mettre en danger la vie des captifs encore aux mains des militants palestiniens. (AFP)

La lourde défaite diplomatique d’Israël à l’Assemblée générale de l’ONU reflète un net changement de ton de plusieurs pays européens à l’égard de sa conduite à Gaza et dans les territoires occupés.

Cinq pays européens, dont l’Espagne, les Pays-Bas et l’Irlande, ont désormais interdit toutes les importations en provenance des colonies israéliennes illégales, tandis que les institutions de l’UE appellent à la suspension de certaines parties de l’accord d’association UE-Israël et envisagent des sanctions.

La Slovénie, l’Allemagne et l’Espagne ont commencé à imposer un embargo sur les armes à destination d’Israël. Cette vague de soutien en faveur de la reconnaissance de la Palestine est également perçue comme un moyen d’accroître la pression sur Israël pour qu’il mette fin à sa guerre à Gaza, déclenchée par l’attaque menée par le Hamas le 7 octobre 2023.

Nasira a déclaré que ce vote historique reflète aussi l’influence diplomatique croissante de l’Arabie saoudite, tant sur le plan régional qu’international, en particulier concernant la cause palestinienne.

« L’influence de l’Arabie saoudite repose sur son statut mondial, sa puissance économique, son symbolisme islamique, la notoriété du prince héritier Mohammed ben Salmane sur la scène internationale, ainsi que sur une diplomatie équilibrée et efficace du Royaume, qui résonne au niveau régional et international », a déclaré Nasira à Arab News.

Les efforts diplomatiques du Royaume ont été salués par les observateurs et analystes pour avoir relancé l’élan mondial en faveur de la solution à deux États, après des années de moindre attention avant la guerre à Gaza.

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Cette photo prise le 16 octobre 2024 montre le président français Emmanuel Macron (G) et le prince héritier saoudien Mohammed bin Salman à Bruxelles. La France et l'Arabie saoudite ont initié ce qui est désormais connu comme la Déclaration de New York, appelant à un État palestinien indépendant, que l'Assemblée générale de l'ONU a adopté vendredi. (AFP)

L’élan s’appuie sur l’Initiative de paix arabe menée par l’Arabie saoudite, adoptée lors du sommet de la Ligue arabe à Beyrouth en 2002, qui proposait la normalisation entre les États arabes et Israël en échange d’un retrait complet d’Israël des territoires occupés — notamment la Cisjordanie, Gaza et le plateau du Golan — la création d’un État palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale, ainsi qu’une résolution juste de la question des réfugiés palestiniens.

La « Déclaration de New York » est perçue comme un consensus mondial autour de cette initiative, la positionnant efficacement comme la base d’un dialogue international renouvelé sur la solution à deux États.

Depuis le déclenchement de la guerre à Gaza, le Royaume a mené une action internationale pour obtenir un cessez-le-feu et jeter les bases d’une paix durable et stable en Palestine.

Au cours des deux dernières années, le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal, a porté l’engagement diplomatique du Royaume en parrainant des conférences internationales, en construisant de larges alliances avec des nations partenaires, et en fournissant un financement crucial pour l’aide alimentaire et médicale aux Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie.

En septembre 2024, le prince Faisal a annoncé la création de l’Alliance mondiale pour la mise en œuvre de la solution à deux États, mobilisant 90 États dans le but de mettre fin au conflit israélo-palestinien de longue date.

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Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Faisal bin Farhan Al-Saud, (G) et le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, président une conférence sur la Palestine et la solution à deux États à l'ONU, le 29 juillet 2025 à New York. (AFP)

Le Royaume a tenu des réunions de suivi à Riyad, Bruxelles et Oslo dans les mois suivants, se concentrant sur des points d’action concrets identifiés par les participants.

Ce même mois, le prince héritier Mohammed ben Salmane a exclu tout accord de normalisation saoudien avec Israël sans la création d’un « État palestinien indépendant ».

Ces efforts diplomatiques ont culminé lors de la conférence saoudo-française à l’ONU en juillet, qui visait à établir un cadre politique clair, au-delà des simples déclarations, pour mettre fin à la guerre à Gaza et faire pression en faveur de la reconnaissance d’un État palestinien conformément aux résolutions de l’ONU.

Le succès de cette initiative a été souligné par le prince héritier Mohammed ben Salmane lors de son allocution mercredi devant le Conseil consultatif saoudien (Shoura), où il a déclaré que « la conférence internationale sur la mise en œuvre de la solution à deux États, tenue à New York, a permis une mobilisation sans précédent et renforcé le consensus mondial » autour de l’Initiative de paix arabe.

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Des manifestants brandissent des drapeaux palestiniens et tiennent une banderole sur laquelle on peut lire "Arrêtez d'affamer Gaza" au Palais de Westminster, qui abrite les Chambres du Parlement, dans le centre de Londres, le 4 juin 2025, lors d'une manifestation de soutien à Gaza. (AFP)

Il a déclaré que les efforts du Royaume ont porté leurs fruits en incitant davantage de pays à reconnaître la Palestine et en recueillant un soutien international accru en faveur de la mise en œuvre d'une solution à deux États, appelant d'autres pays à suivre cet exemple.

Condamnant les « crimes de famine et de déplacement forcé » d’Israël à Gaza, il a réitéré la position du Royaume selon laquelle « la terre de Gaza est palestinienne, et les droits de son peuple sont inébranlables, ne pouvant être ni ôtés par l’agression ni annulés par les menaces », tout en soulignant un soutien indéfectible au Qatar suite aux attaques israéliennes.

La région attend désormais les résultats du sommet d’urgence arabo-islamique, organisé par le Qatar dimanche, pour discuter d’une réponse collective à l’attaque israélienne contre Doha.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Sommet à Doha pour discuter de la riposte arabo-islamique à l’attaque israélienne contre le Qatar

Une photo prise le 15 octobre 2022 montre une vue de la ligne d'horizon de la capitale qatarie Doha. (AFP)
Une photo prise le 15 octobre 2022 montre une vue de la ligne d'horizon de la capitale qatarie Doha. (AFP)
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  • Un sommet arabo-islamique extraordinaire discutera de l’attaque israélienne contre l’État du Qatar ciblant des hauts responsables du Hamas

DUBAÏ : Le ministère des Affaires étrangères du Qatar a déclaré samedi qu’un sommet arabo-islamique d’urgence, qui se tiendra dans la capitale Doha, discutera d’un projet de résolution concernant l’attaque israélienne contre l’État du Golfe, selon l’Agence de presse du Qatar (QNA).

« Le sommet examinera un projet de résolution sur l’attaque israélienne contre l’État du Qatar, présenté par la réunion préparatoire des ministres des Affaires étrangères arabes et islamiques, prévue demain dimanche », a déclaré à la QNA le porte-parole du ministère, Majid ben Mohammed Al Ansari.

Le ministère avait annoncé plus tôt que Doha accueillerait un sommet arabo-islamique extraordinaire pour débattre de l’attaque israélienne contre l’État du Qatar visant des dirigeants de haut rang du Hamas.

Al Ansari a souligné que « la tenue de ce sommet arabo-islamique à ce moment précis revêt une importance particulière, car elle reflète la large solidarité arabe et islamique avec l’État du Qatar face à l’agression israélienne lâche ».

La réunion préparatoire des ministres des Affaires étrangères se tiendra dimanche. Le sommet débutera lundi.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Gaza : Israël affirme que 250 000 habitants ont fui la ville, 32 morts dans de nouvelles frappes

Les habitants de Gaza ont déclaré que le coût du voyage vers le sud était prohibitif et qu'il n'y avait plus d'espace pour planter des tentes dans les zones désignées. (AFP)
Les habitants de Gaza ont déclaré que le coût du voyage vers le sud était prohibitif et qu'il n'y avait plus d'espace pour planter des tentes dans les zones désignées. (AFP)
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  • Plus de 250 000 habitants auraient fui Gaza-ville ces dernières semaines, selon l'armée israélienne qui multiplie les frappes et ordonne des évacuations massives, malgré les risques humanitaires
  • La guerre, déclenchée après l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, a causé plus de 64 000 morts à Gaza selon le ministère de la Santé local

Jérusalem: L'armée israélienne a affirmé samedi que plus de 250.000 habitants avaient quitté ces dernières semaines la ville de Gaza vers d'autres secteurs du territoire palestinien, après une intensification des bombardements et raids israéliens.

De son côté, la Défense civile dans la bande de Gaza a fait état de cinq Palestiniens tués depuis l'aube dans les bombardements israéliens, au lendemain de la mort selon elle d'au moins 50 personnes à travers le territoire assiégé et dévasté par 23 mois de guerre.

"Selon les estimations de l'armée, plus d'un quart du million d'habitants de la ville de Gaza l'ont quittée pour leur propre sécurité", a déclaré le porte-parole arabophone de l'armée israélienne, Avichay Adraee, sur X.

Selon des estimations récentes de l'ONU, environ un million de Palestiniens vivent dans et autour de la ville de Gaza, la plus grande du territoire.

Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

L'armée dit vouloir prendre le contrôle de Gaza-ville, qu'elle présente comme l'un des derniers bastions du mouvement islamiste palestinien Hamas.

Samedi, l'armée de l'air israélienne a largué des tracts exhortant les habitants des quartiers ouest de la ville à les évacuer, alors que la Défense civile locale a fait état de frappes aériennes continues.

"L'armée agit avec force dans votre secteur et est déterminée à démanteler et à vaincre le Hamas", pouvait-on lire dans le tract. "Pour votre sécurité, évacuez immédiatement via la rue al-Rachid vers le sud (du territoire). Vous avez été prévenus."

Les forces israéliennes ont détruit plusieurs tours d'habitation à Gaza-ville ces derniers jours, l'armée affirmant son intention d'"intensifier le rythme (de ses) frappes ciblées (...) afin de nuire aux infrastructures terroristes du Hamas (...) et réduire la menace pour (ses) troupes".

De nombreux acteurs humanitaires jugent que le déplacement une nouvelle fois de la population du nord vers le sud du territoire est impossible et dangereux.

La guerre à Gaza a été déclenchée par une attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre 2023 en Israël, qui a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des sources officielles israéliennes.

L'offensive israélienne menée en riposte à fait au moins 64.756 morts dans la bande de Gaza, selon des données du ministère de la Santé de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas. Elle a aussi dévasté le territoire palestinien et provoqué un désastre humanitaire.

L'ONU a déclaré la famine à Gaza. Israël, qui assiège le territoire, dément.