Les cosmétiques Caudalie dans le collimateur du fisc

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Publié le Vendredi 22 décembre 2023

Les cosmétiques Caudalie dans le collimateur du fisc

  • En six ans d'existence au Royaume-Uni, la société Tomcat International a épuisé deux cabinets d'audit, en désaccord avec ses pratiques comptables
  • En France, c'est le fisc que la holding des cosmétiques Caudalie rend soupçonneux

BORDEAUX: En six ans d'existence au Royaume-Uni, la société Tomcat International a épuisé deux cabinets d'audit, en désaccord avec ses pratiques comptables. En France, c'est le fisc que la holding des cosmétiques Caudalie rend soupçonneux.

Le cabinet Cameron Baum Davis, chargé d'examiner les comptes de Tomcat depuis 2020, a démissionné mi-novembre d'après le registre du commerce britannique. Son prédécesseur, EHK Consulting, avait été remercié quatre ans plus tôt.

Depuis 2018, les deux commissaires aux comptes se sont refusés à certifier --quand ils ne les ont pas désapprouvés-- des états financiers jugés potentiellement "trompeurs", faute de consolidation des filiales de Caudalie à l'étranger (une trentaine, du Canada à la Chine en passant par le Brésil ou Dubaï).

Bertrand et Mathilde Thomas, créateurs de la marque et dirigeants de Tomcat, justifient ce choix par les "dépenses disproportionnées" et les "retards excessifs" qu'engendrerait la collecte des informations nécessaires.

En France, ces "anomalies significatives" n'ont pas échappé aux inspecteurs de la Direction nationale des enquêtes fiscales (DNEF) dans le cadre de leur contrôle de la SAS Caudalie, basée à Paris.

La procédure a donné lieu à la saisie de milliers de documents, en septembre 2022, dans plusieurs locaux de la capitale "susceptibles d'être occupés" par des entités du groupe de cosmétiques, dont Tomcat International, ainsi qu'au domicile de ses dirigeants.

« Régulièrement l'objet de vérifications »

Ceux-ci ont contesté les perquisitions de la DNEF, mais la cour d'appel de Paris les a déboutés dans deux arrêts rendus le 28 juin, dont la revue en ligne suisse Gotham City s'était fait l'écho.

Les fondateurs de Caudalie ont renoncé à se pourvoir en cassation, selon leur avocate.

"Le groupe fait régulièrement l'objet de vérifications de la part des administrations, dont les autorités fiscales, et ce comme toutes les entreprises. Certaines sont en cours et d'autres ont été très récemment clôturées, l'administration fiscale n'ayant rien eu à reprocher à la société", a déclaré Me Agnès Angotti à l'AFP.

"Nous collaborons avec l'administration fiscale comme nous l'avons toujours fait, en toute transparence, et sommes confiants quant aux suites qui pourraient être données à ce dossier", a-t-elle ajouté cette semaine, sans autres commentaires.

Sollicités, la Direction générale des finances publiques et ses avocats n'ont rien dit du dossier, soumis au secret fiscal. Mais la cour d'appel a détaillé l'argumentaire de la DNEF.

Elle soupçonne Tomcat International et d'autres holdings étrangères de "s'être soustraites (...) au paiement de l'impôt sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d'affaires" en France. Pays où elles auraient pourtant exercé leur activité commerciale ou financière.

Paradis fiscaux

La marque de cosmétiques, mère de la vinothérapie, est née au Château Smith Haut Lafitte, célèbre grand cru bordelais. Le roi Charles III d'Angleterre l'a visité en septembre durant son voyage en France; début décembre, le rappeur américain Jay-Z y fêtait son anniversaire avec sa compagne Beyoncé.

Mathilde Thomas est une fille des propriétaires. En 1993, lors des vendanges, elle et son futur mari apprennent d'un scientifique que les polyphénols --des molécules complexes-- de pépins de raisin sont "les antioxydants les plus puissants du monde végétal".

Le site internet de Caudalie raconte la suite: une première crème anti-rides, une "eau de beauté" qui séduit Victoria Beckham, des succès commerciaux qui s'enchaînent. En 2012, une boutique-spa ouvre à New York, plus de 50 suivent à travers le monde.

La cour d'appel, elle, relate que dès 2004, le couple fondateur a créé une holding au Luxembourg. Trois ans plus tard, elle intègre la SAS Caudalie, dont les époux détiennent 99% des parts.

En 2010, ils s'installent à l'étranger et transfèrent le capital du Grand-Duché à Jersey, via une firme "spécialisée notamment dans l'optimisation fiscale"; puis, en 2015, à Gibraltar dans une société qui détient les droits de propriété intellectuelle du groupe et perçoit les dividendes afférents.

Ces deux derniers territoires sont "considérés par la communauté internationale comme des paradis fiscaux", indique l'un des arrêts rendus en juin.

Hôtel particulier

En 2017, enfin, voit le jour Tomcat International qui récupère les droits sur les marques et brevets des cosmétiques vendus dans le monde entier, peu avant que la famille Thomas ne rentre à Paris.

La "présomption de fraude" porte sur l'activité de ces différentes holdings, qui s'exercerait "à partir de la France" sans y être déclarée. Pour la DNEF, les entités créées au Luxembourg, à Gibraltar ou au Royaume-Uni, faute "de moyens humains et matériels adaptés", utilisent en réalité ceux de la SAS Caudalie, véritable "centre décisionnel".

Dans le cadre de son contrôle, le fisc a d'ailleurs rejeté une déduction de frais de gestion facturés en 2018 et 2019 par la holding Tomcat à la filiale française, "insuffisamment justifiés" à ses yeux.

Ces "management fees" atteignaient un million d'euros par an, en vertu d'une convention prévoyant le versement forfaitaire de 6.000 euros par jour à chaque conjoint, en rémunération de leurs conseils. Réellement prodigués depuis Londres?

L'an dernier, Paris Match a rencontré les époux Thomas au siège de la SAS Caudalie dans le 8e arrondissement parisien. "D'où ils pilotent un groupe employant 1.000 personnes", écrivait le magazine. Chacun "à des étages différents", précisait Bertrand Thomas dans ce vaste hôtel particulier: les agents du fisc ont dû constituer neuf équipes pour visiter les lieux.

 


Liban: l'Union européenne annonce une aide d'un milliard d'euros pour soutenir l'économie

Le Premier ministre libanais Najib Mikati (au centre) pose pour une photo avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président chypriote Nikos Christodoulides lors de leur rencontre au siège du gouvernement du Grand Sérail à Beyrouth (Photo, AFP).
Le Premier ministre libanais Najib Mikati (au centre) pose pour une photo avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président chypriote Nikos Christodoulides lors de leur rencontre au siège du gouvernement du Grand Sérail à Beyrouth (Photo, AFP).
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  • Le président chypriote s'était déjà rendu au Liban le 8 avril pour discuter avec M. Mikati de la question des réfugiés
  • Le Liban, frappé par une crise économique depuis 2019 dit accueillir près de deux millions de réfugiés syriens

BEYROUTH: La cheffe de la Commission européenne a annoncé jeudi à Beyrouth une aide d'un milliard d'euros pour soutenir la "stabilité socio-économique" du Liban et appelé ce pays à bien coopérer dans la lutte contre l'immigration clandestine.

Les fonds seront "disponibles à partir de cette année jusqu’en 2027. Nous voulons contribuer à la stabilité socio-économique du Liban", a déclaré Ursula von der Leyen, ajoutant "compter sur une bonne coopération" des autorités libanaises dans la lutte contre l'immigration clandestine vers l'Europe.

Le Liban, frappé par une crise économique depuis 2019 dit accueillir près de deux millions de réfugiés syriens, soit le plus grand ratio par habitant au monde.

Le petit pays méditerranéen, frontalier de la Syrie, n'a de cesse d'exhorter la communauté internationale de les rapatrier, les armes s'étant tues dans plusieurs régions syriennes.

Les migrants, demandeurs d'asile et réfugiés qui quittent le Liban par bateau à la recherche d'une vie meilleure en Europe se dirigent souvent vers Chypre qui affirme être en première ligne face aux flux migratoires au sein de l'UE.

"La réalité actuelle de cette question est devenue plus grande que la capacité du Liban à la traiter", a déclaré le Premier ministre libanais Najib Mikati, lors d'une conférence de presse en présence de Mme. von der Leyen et du président chypriote Nikos Christodoulides.

Augmentation des ressortissants syriens à Chypre 

"Nous renouvelons notre demande à l'UE, (...) d’aider les personnes déplacées dans leur pays (d'origine et non au Liban), pour les encourager à rentrer volontairement", a-t-il poursuivi.

De son côté, Chypre, qui fait état d'une augmentation des arrivées de ressortissants syriens, estime que la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza, qui a déclenché des violences à la frontière israélo-libanaise, a affaibli les efforts de Beyrouth pour empêcher les départs.

De janvier à avril 2024, plus de 40 bateaux transportant environ 2.500 personnes ont accosté à Chypre, a indiqué à l'AFP l'agence de l'ONU pour les réfugiés (HCR).

Chypre avait conclu il y a des années avec le Liban un accord pour le retour de migrants en situation irrégulière.

Le président chypriote s'était déjà rendu au Liban le 8 avril pour discuter avec M. Mikati de la question des réfugiés et de la manière de contrôler le flux migratoire vers son pays.


TotalEnergies: le gouvernement remonté contre un possible transfert de sa cotation à New York

Le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire (Photo, AFP).
Le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire (Photo, AFP).
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  • Aujourd'hui, TotalEnergies a déjà des titres inscrits à Londres et à New York, mais de manière secondaire
  • M. Pouyanné avait notamment évoqué la frilosité de l'Europe vis-à-vis de sa stratégie qui consiste à continuer d'investir dans les énergies fossiles

PARIS: Confronté à la réflexion de TotalEnergies quant au transfert de la cotation principale du groupe à New York, le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire a affirmé jeudi qu'il comptait se battre pour que ce déménagement de la Bourse de Paris "n'ait pas lieu".

 

"Je suis là pour faire en sorte que ça n'ait pas lieu, parce que je pense que c'est une décision qui est grave", a déclaré M. Le Maire sur BFMTV/RMC.

"Est-ce que l'intérêt suprême de la nation est de garder le siège social de Total en France et la cotation principale de Total en France? Oui, et donc je me battrai pour ça", a-t-il ajouté.

"Nous avons besoin de Total", a-t-il souligné, mentionnant le plafonnement à moins de 2 euros du litre du carburant dans ses stations françaises.

L'affaire est partie des déclarations surprises de Patrick Pouyanné à l'agence Bloomberg. Dans un entretien publié le 26 avril, Patrick Pouyanné avait dit réfléchir à une cotation principale à la Bourse de New York. Près de la moitié de l'actionnariat de TotalEnergies est désormais constituée d'actionnaires institutionnels (fonds de pension, gestionnaires d'actifs, assureurs...) nord-américains.

"Ce n'est pas une question d'émotion. C'est une question d'affaires", avait ajouté le dirigeant de l'entreprise, tout en assurant que le siège social de ce fleuron du CAC 40 resterait bien à Paris.

Son argument principal: "une base d'actionnaires américains qui grossit", ce qui amène l'entreprise à s'interroger sur la façon de "donner accès plus facilement aux actions pour les investisseurs américains", a-t-il expliqué aux analystes, le 26 avril.

Appétit américain pour les fossiles 

Las du manque d'appétit des investisseurs européens pour le secteur pétrogazier, alors que le groupe estime investir beaucoup dans les énergies vertes, le PDG chercherait à se rapprocher des investisseurs américains moins contraints par des règles d'investissement durable.

"Les politiques au sens large ESG (environnement, social et de gouvernance, NDLR) en Europe ont plus de poids", a ainsi justifié M. Pouyanné lundi devant des sénateurs français.

Le PDG observe que "la base d'actionnaires européens de TotalEnergies diminue, notamment la base française" qui a reculé de "7% au cours des quatre dernières années, largement à cause des réglementations, de la pression qui est faite sur eux".

En filigrane, le patron pointe du doigt le changement en France du label Investissement socialement responsable (ISR), qui exclut désormais les entreprises exploitant du charbon ou des hydrocarbures non conventionnels, une mesure décidée par Bercy lui-même fin 2023. Ahmed Ben Salem, analyste du groupe financier Oddo BHF, nuance ce point en indiquant que les fonds labellisés ISR représentaient 1,7% de l'actionnariat de TotalEnergies.

Pendant que l'UE muscle sa réglementation pour flécher les investissements vers la transition écologique, aux Etats-Unis la pression de certains Etats, comme le Texas, pour ne pas délaisser les entreprises d'énergies fossiles a poussé de grands gérants d'actifs à abaisser leurs ambitions climatiques.

"Nous observons clairement plus d'appétit pour les actions d'entreprises des secteurs énergétique, pétrole et gaz du côté de l'Amérique du Nord qu'en Europe", a dit M. Pouyanné aux analystes.

Conséquence de ce manque d'appétit: une valorisation moins importante. TotalEnergies avance "exactement les mêmes résultats trimestriels qu'une entreprise comme Chevron". Le groupe énergétique américain est valorisé 300 milliards de dollars en Bourse, contre 175 milliards pour TotalEnergies.

Le mirage d'un marché européen 

La faute au cloisonnement des marchés financiers en Europe, selon M. Le Maire, qui avait dans un premier temps estimé dimanche sur LCI qu'il fallait offrir à TotalEnergies "les moyens de se développer" en accélérant sur l'union des marchés de capitaux (UMC) dans l'UE.

L'UMC permettrait d'augmenter la taille du marché boursier européen pour que les entreprises s'y financent davantage. Ahmed Ben Salem n'est cependant pas convaincu des changements éventuels pour TotalEnergies: "Il faut des acheteurs sur le secteur, pas seulement des liquidités."

La moindre valorisation de TotalEnergies "est aussi subie par les autres majors européennes", explique-t-il à l'AFP, citant l'exemple du britannique Shell qui "est dans la même réflexion" concernant une cotation principale à New York.

Au Sénat, le patron n'a pas exclu de reconsidérer la question si "plus d'actionnaires européens (...) rachètent du TotalEnergies".


Microsoft signe un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable Brookfield

Le géant du numérique Microsoft a annoncé mercredi avoir signé un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable canadien Brookfield Asset Management, qui en ferait le plus important accord d'entreprise de fourniture d'énergie verte, selon le groupe. (AFP)
Le géant du numérique Microsoft a annoncé mercredi avoir signé un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable canadien Brookfield Asset Management, qui en ferait le plus important accord d'entreprise de fourniture d'énergie verte, selon le groupe. (AFP)
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  • L'accord prévoit le développement d'un champ d'éoliennes et de panneaux solaires de 10,5 GigaWatt (GWt) afin d'alimenter les centres de données du groupe numérique, qui vise la neutralité carbone d'ici à 2030
  • L'IA, et plus largement l'informatique dématérialisé, va entraîner une hausse exponentielle de la consommation énergétique des groupes numériques

SAN FRANCISCO: Le géant du numérique Microsoft a annoncé mercredi avoir signé un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable canadien Brookfield Asset Management, qui en ferait le plus important accord d'entreprise de fourniture d'énergie verte, selon le groupe.

Cet accord qualifié de "première" prévoit, selon Brookfield, le développement d'un champ d'éoliennes et de panneaux solaires de 10,5 GigaWatt (GWt) afin d'alimenter les centres de données du groupe numérique, qui vise la neutralité carbone d'ici à 2030.

Il met également en lumière les importants investissements réalisés par les plus grands groupes mondiaux afin d'atteindre leur objectifs en terme d'énergie propre tout en restant compétitif dans la course au développement de l'intelligence artificielle (IA).

Car l'IA, et plus largement l'informatique dématérialisé (cloud), va entraîner une hausse exponentielle de la consommation énergétique des groupes numériques, alors qu'ils multiplient les centres de données, particulièrement énergivores, augmentant leur dépendance vis-à-vis des fournisseurs d'énergie traditionnels.

"Cette collaboration avec Brookfield vient soutenir le développement innovant de réseaux d'énergies plus variées au niveau mondial et va contribuer à atteindre notre objectif de 100% de notre consommation d'électricité décarbonnée, 100% du temps, d'ici à 2030", a assuré le directeur des énergies renouvelables chez Microsoft, Adrian Anderson.

Les conditions financières de l'accord n'ont pas été précisées, alors que la puissance prévue pour le parc pourrait potentiellement fournir en énergie l'équivalent de millions de foyers.

L'accord devrait également permettre à Brookfield d'augmenter ses actifs en projets éoliens et solaires aux Etats-Unis, en Europe et dans d'autres régions dans les prochaines années.

L'entreprise s'est dite "ravie de collaborer avec Microsoft pour répondre à la demande de leurs clients avec la construction d'une capacité dépassant 10,5 GWt en énergie renouvelable", a déclaré Connor Teskey, directeur général de l'unité des énergies renouvelables de Brookfield.

L'échelle de l'accord, près de huit fois plus gros que le plus important accord entreprise signé jusqu'ici en terme d'achat d'énergie renouvelable, vient souligner la montée en puissance de Brookfield ainsi que la capacité d'achat de Microsoft.

Le cadre de l'accord se fonde sur les échanges déjà existants entre les deux groupes, qui vont être étendus plus de 10 fois plus en termes de capacité renouvelable entre 2026 et 2030.

Si l'accord prévoit dans un premier lieu du solaire et de l'éolien, il sera étendu à d'autres technologies permettant de fournir de l'électricité décarbonnée, en particulier lorsque le vent ou le soleil n'en fournira pas suffisamment.

Comme Microsoft, Google, Amazon et Meta figurent désormais parmi les plus grosses entreprises acheteuses d'énergie propre, afin d'atteindre leurs engagements de neutralité carbone.