Le tournant du Moyen-Orient en 2023: d’une tendance à la pacification à un revirement géopolitique majeur

L'attaque du 7 octobre et ses conséquences ont secoué le Moyen-Orient et le monde en provoquant un revirement géopolitique. (AFP)
L'attaque du 7 octobre et ses conséquences ont secoué le Moyen-Orient et le monde en provoquant un revirement géopolitique. (AFP)
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Publié le Vendredi 29 décembre 2023

Le tournant du Moyen-Orient en 2023: d’une tendance à la pacification à un revirement géopolitique majeur

  • L’année 2023 a été écrite à partir de son dixième mois; la reprise du conflit israélo-palestinien change le contexte du Moyen-Orient et elle pourrait constituer un test pour évaluer l’ampleur des mutations concernant le leadership mondial
  • Les événements en cours prouvent l’impossibilité de surmonter la question palestinienne pour établir une paix régionale et revenir à la normalisation

PARIS: Au Moyen-Orient, l’année 2023 a démarré sous de bons auspices, avec un paysage régional apaisé et moins conflictuel. Cependant, le premier trimestre marqué par une tendance à la pacification a été affecté par le tournant du 7 octobre et l’embrasement qui l’a suivi.

Ainsi, 2023 a été écrit à partir de son dixième mois. La reprise du conflit israélo-palestinien change le contexte du Moyen-Orient et elle pourrait constituer un test pour évaluer l’ampleur des mutations concernant le leadership mondial, sans pouvoir trancher sur les conclusions.

 

Recomposition régionale inachevée

Durant l’année 2022, la résolution de problèmes et la gestion de différends ont abouti à un début de normalisation malgré les conséquences des guerres et des crises présentes depuis plusieurs années. Le train saoudien du changement et du développement économique, et les deux sommets régionaux organisés en Arabie saoudite avec les présidents des deux pays les plus puissants – les États-Unis et la Chine – ont ouvert la voie en 2023 au leadership dynamique de l'Arabie saoudite à plusieurs niveaux. Un leadership saoudien qui s’est imposé sur les questions régionales majeures affectant l'ensemble de la situation de la région, du Soudan à Gaza, en passant par la relation avec l'Iran et dernièrement dans le conflit israélien avec le Hamas.

Le premier semestre de l’année fut marqué par une reconfiguration géopolitique traversant le Moyen-Orient: de la réconciliation entre l’Arabie saoudite et l’Iran sous le parrainage de la Chine à la réintégration de la Syrie au sein de la Ligue des États arabes, et les discussions intenses entre Riyad et Washington pour l’établissement d’un accord stratégique prévoyant la normalisation avec Israël après le début concret d’un règlement de la cause palestinienne.

Le premier semestre de l’année fut marqué par une reconfiguration géopolitique traversant le Moyen-Orient: de la réconciliation entre l’Arabie saoudite et l’Iran sous le parrainage de la Chine à la réintégration de la Syrie au sein de la Ligue des États arabes, et les discussions intenses entre Riyad et Washington pour l’établissement d’un accord stratégique prévoyant la normalisation avec Israël après le début concret d’un règlement de la cause palestinienne.

En 2023, l’organisation des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), le club ambitionnant d'offrir une alternative à un ordre international encore dominé par les États-Unis et l'Occident, admet dans ses rangs quatre pays de la zone: l'Égypte, l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l'Iran. En réponse aux percées chinoises et russes, au sommet du G20 tenu à New Delhi, les États-Unis appuient «le nouveau corridor ferroviaire et maritime entre l’Inde et l’Europe» qui vise à stimuler les relations commerciales entre l’Inde, le Moyen-Orient et l’Europe, et à contrer l’influence chinoise. Il s’agit également de rapprocher les pays du Moyen-Orient, notamment Israël et l’Arabie saoudite.

Le choc du 7 octobre

L'attaque du 7 octobre et ses conséquences ont secoué le Moyen-Orient et le monde en provoquant un revirement géopolitique. Ce développement risque de réduire, voire d’anéantir les acquis, les changements et les résultats de discussions durant les neuf premiers mois de l’année 2023.

En effet, la surprise de l’offensive du 7 octobre (après cinquante ans du franchissement de la fameuse ligne de Bar-Lev lors de la guerre du Kippour) a représenté un tournant dans l’Histoire du conflit palestino-israélien et une démonstration de la fragilité des tentatives de stabilisation.

Les dures réalités des conflits sans solutions pèsent sur tout enjeu de pacification, alors que le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, estime que la riposte israélienne contre le Hamas «changera tout le Moyen-Orient». Il s’agit d’un pari exagéré qui intervient après un échec stratégique israélien. Toutefois, sur le plan pratique, les récents développements ont conduit à remettre la question palestinienne à l’ordre du jour international.

Les événements en cours prouvent l’impossibilité de surmonter la question palestinienne pour établir une paix régionale et revenir à la normalisation. Tout cela met en œuvre une nouvelle équation de sécurité régionale. Au moment où Washington déploie des forces et exerce des pressions pour éviter le scénario de la guerre élargie, les attaques des Houthis (appuyés par Téhéran) dans les eaux internationales troublent le jeu.

L’alignement américain en faveur d’Israël et la stratégie iranienne de riposte limitée risquent de faire durer le conflit et de dépasser les frontières de Gaza. De même, le grand flou autour de la réalisation de la solution des deux États comme alternative à moyen terme démontre incontestablement que l’insoluble conflit israélo-palestinien pourrait perturber pour longtemps le Moyen-Orient et altérer les changements promis. En revanche, la conclusion de la guerre de Gaza par une solution relativement équitable pourrait offrir une nouvelle chance aux efforts de stabilité et de développement.


Cisjordanie: la police israélienne saisit près de 400.000 euros, accusés de financer le «terrorisme»

La police israélienne a annoncé mercredi avoir confisqué "environ 1,5 million de shekels", plus de 385.000 euros, une somme qu'elle estime liée au "terrorisme", au cours d'une opération en Cisjordanie occupée.  "Les forces de police des frontières en Cisjordanie (Magav) et l'armée israélienne ont confisqué environ 1,5 million de shekels provenant du financement du terrorisme", a déclaré la police dans un communiqué. (AFP)
La police israélienne a annoncé mercredi avoir confisqué "environ 1,5 million de shekels", plus de 385.000 euros, une somme qu'elle estime liée au "terrorisme", au cours d'une opération en Cisjordanie occupée. "Les forces de police des frontières en Cisjordanie (Magav) et l'armée israélienne ont confisqué environ 1,5 million de shekels provenant du financement du terrorisme", a déclaré la police dans un communiqué. (AFP)
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  • Si l'armée israélienne opère souvent en Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1967, il est relativement rare qu'elle intervienne au coeur des villes, à fortiori à Ramallah, où siège l'Autorité palestinienne
  • Mardi, l'armée israélienne avait mené une opération dans le centre-ville de Ramallah, en Cisjordanie occupée, ciblant notamment un bureau de change, au cours de laquelle des dizaines de Palestiniens ont été blessés selon le Croissant-Rouge

JERUSALEM: La police israélienne a annoncé mercredi avoir confisqué "environ 1,5 million de shekels", plus de 385.000 euros, une somme qu'elle estime liée au "terrorisme", au cours d'une opération en Cisjordanie occupée.

"Les forces de police des frontières en Cisjordanie (Magav) et l'armée israélienne ont confisqué environ 1,5 million de shekels provenant du financement du terrorisme", a déclaré la police dans un communiqué.

Elle a précisé qu'une partie de la somme avait été saisie en devises étrangères, notamment des dollars américains et des dinars jordaniens.

Mardi, l'armée israélienne avait mené une opération dans le centre-ville de Ramallah, en Cisjordanie occupée, ciblant notamment un bureau de change, au cours de laquelle des dizaines de Palestiniens ont été blessés selon le Croissant-Rouge.

L'armée avait alors expliqué viser "une entreprise de change qui transférait des fonds destinés aux terroristes du Hamas afin de financer des activités terroristes contre l'Etat d'Israël et ses civils".

Si l'armée israélienne opère souvent en Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1967, il est relativement rare qu'elle intervienne au coeur des villes, à fortiori à Ramallah, où siège l'Autorité palestinienne.

Elle était déjà intervenue dans des bureaux de change palestiniens ces dernières années, au printemps 2025 ou encore en décembre 2023.

Les violences en Cisjordanie se sont intensifiées depuis le début de la guerre à Gaza, déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël le 7 octobre 2023.

Selon un décompte de l'AFP établi à partir de données de l'Autorité palestinienne, au moins 972 Palestiniens, dont de nombreux combattants mais aussi beaucoup de civils, ont été tués par des soldats ou des colons israéliens en Cisjordanie depuis cette date.

Au moins 36 Israéliens, parmi lesquels des civils et des soldats y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors d'opérations militaires israéliennes, selon les données officielles israéliennes.


Liban: la justice décide de libérer sous caution l'ex-gouverneur de la Banque centrale

 La justice libanaise a décidé mardi de libérer l'ancien gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, accusé de corruption, moyennant une importante caution de plus de 20 millions de dollars. (AFP)
La justice libanaise a décidé mardi de libérer l'ancien gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, accusé de corruption, moyennant une importante caution de plus de 20 millions de dollars. (AFP)
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  • L'ex-gouverneur, détenteur de la double nationalité française et libanaise, avait été arrêté en septembre 2024 et accusé de détournement massif de fonds publics dans le pays, qui a connu un effondrement économique sans précédent
  • Il était notamment accusé d'avoir détourné 44 millions de dollars de la Banque centrale. M. Salamé avait déjà obtenu le mois dernier une remise en liberté dans deux autres dossiers dans lesquels il était impliqué

BEYROUTH: La justice libanaise a décidé mardi de libérer l'ancien gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, accusé de corruption, moyennant une importante caution de plus de 20 millions de dollars, a indiqué une source judiciaire à l'AFP.

La source a précisé que cette décision était assortie d'une interdiction de quitter le territoire libanais pendant un an.

L'ex-gouverneur, détenteur de la double nationalité française et libanaise, avait été arrêté en septembre 2024 et accusé de détournement massif de fonds publics dans le pays, qui a connu un effondrement économique sans précédent.

Il était notamment accusé d'avoir détourné 44 millions de dollars de la Banque centrale. M. Salamé avait déjà obtenu le mois dernier une remise en liberté dans deux autres dossiers dans lesquels il était impliqué.

Selon une autre source judiciaire, il s’agit de "la caution la plus élevée jamais fixée au Liban".

L'avocat de Riad Salamé, Marc Habqa, a dénoncé auprès de l’AFP une décision "illégale". "La caution est exorbitante et dépourvue de base légale. J’examinerai avec mon client les recours possibles", a-t-il dit.

La source judiciaire a indiqué que la décision avait été prise "au regard de l’état de santé de Salamé", âgé de 75 ans.

Mais elle a précisé qu’il "aurait de toute façon pu être libéré le 4 septembre à l’expiration de sa détention préventive" qui peut durer un an au maximum.

L'ancien gouverneur de la BdL, qui était étroitement lié à la classe politique, était la première personnalité de premier plan arrêtée depuis le début de l'effondrement économique du Liban il y a près de six ans.

Gouverneur de la Banque centrale de 1993 à juillet 2023, il est accusé par ses détracteurs d'être l'un des principaux responsables de la déroute financière du Liban.

M. Salamé est en outre suspecté de s'être constitué un riche patrimoine immobilier et financier. Il n'a pas répondu à une convocation d'un juge français en mai 2023, et fait depuis l'objet d'un mandat d'arrêt international. Le Liban refuse néanmoins d'extrader ses ressortissants.

Les Etats-Unis, le Canada et le Royaume-Uni ont imposé des sanctions économiques pour corruption contre M. Salamé, Washington estimant que ses "actions corrompues et illégales ont contribué à l'effondrement de l'Etat de droit au Liban".


Désarmement du Hezbollah: les Etats-Unis veulent des actes, selon une émissaire

Tom Barrack et Morgan Ortagus à Beyrouth le 26 août 2025. (AFP)
Tom Barrack et Morgan Ortagus à Beyrouth le 26 août 2025. (AFP)
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  • Une émissaire américaine, Morgan Ortagus, a affirmé mardi à Beyrouth que les autorités libanaises devaient à présent traduire "en actes" leur décision de désarmer le Hezbollah pro-iranien
  • "Nous avons tous été fortement encouragés par la décision historique du gouvernement il y a quelques semaines, mais maintenant il ne s'agit plus de mots, il s'agit d'actes", a déclaré Mme Ortagus

BEYROUTH: Une émissaire américaine, Morgan Ortagus, a affirmé mardi à Beyrouth que les autorités libanaises devaient à présent traduire "en actes" leur décision de désarmer le Hezbollah pro-iranien.

"Nous avons tous été fortement encouragés par la décision historique du gouvernement il y a quelques semaines, mais maintenant il ne s'agit plus de mots, il s'agit d'actes", a déclaré Mme Ortagus.

Elle s'exprimait à l'issue d'une réunion entre une délégation américaine et le président libanais, Joseph Aoun.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'est dit prêt lundi à une réduction "progressive" des troupes israéliennes au Liban si le gouvernement concrétisait son plan de désarmer le Hezbollah.

"Israël est prêt à avancer pas à pas, cela pourrait être de petits pas (..) , des pas de bébé, mais ils sont prêts à avancer étape par étape avec ce gouvernement", a ajouté Mme Ortagus.

"Donc, à chaque pas que fera le gouvernement libanais, nous encouragerons le gouvernement israélien à faire de même".

L'émissaire américain Tom Barrack, qui faisait partie de la délégation, a souligné pour sa part que l'armée libanaise et le gouvernement devaient présenter à la fin du mois un plan concret pour le désarmement de la formation chiite, qui est sortie affaiblie fin novembre de sa dernière guerre avec Israël.

"Lorsqu'ils (les Israéliens) verront cela, ils feront leur contre-proposition concernant les retraits, les garanties de sécurité à leurs frontières", a-t-il expliqué.

"Ce qu'Israël a dit, ce qui est historique, c'est que nous ne voulons pas occuper le Liban", a-t-il ajouté, expliquant que les responsables israéliens attendaient de "voir quel est le plan pour réellement désarmer le Hezbollah".

Le chef du Hezbollah, Naïm Qassem, a réaffirmé lundi le refus de son parti d'abandonner ses armes.

"Zone économique" 

Sous pression des Etats-Unis et face aux craintes d'une intensification des attaques israéliennes, le gouvernement a chargé le 5 août l'armée de préparer un plan visant à désarmer d'ici fin 2025 ce mouvement, fondé et financé par l'Iran, ennemi juré d'Israël.

Cette décision s'inscrit dans le cadre du cessez-le-feu conclu sous médiation américaine, qui a mis fin le 27 novembre 2024 à plus d'un an de conflit entre le Hezbollah et Israël.

En réponse à une question concernant un plan américain prévoyant la création d’une "zone économique Trump" dans le sud du Liban, près de la frontière israélienne, comme rapporté par le site américain Axios, M. Barrack a fait miroiter cette possibilité pour "écarter la tutelle iranienne".

"Quand on dit désarmer le Hezbollah, il faut se souvenir qu’il y a 40.000 personnes qui sont payées par l’Iran pour combattre. Qu’est-ce qu’on va faire d’eux ?", s'est interrogé M. Barrack.

"Nous devons les aider. Et la manière de les aider, c’est de dire que nous, tous ensemble - le Golfe, les États-Unis, les Libanais - allons agir conjointement pour créer un forum économique qui offrira un autre moyen de subsistance", a-t-il ajouté, avant de faire référence à "une nouvelle zone économique".

Selon Axios, l’Arabie saoudite et le Qatar auraient déjà accepté d’y investir après le retrait israélien, afin de limiter le retour du Hezbollah dans la zone tout en répondant aux préoccupations sécuritaires d’Israël sans occupation.