Gouvernement Attal: Pour une partie de la majorité, le fond de LR effraie

Le gouvernement de Gabriel Attal est nommé mais la difficulté demeure à l'Assemblée faute de majorité, et pourrait même s'être aggravée avec une partie des troupes macronistes (Photo d'illustration, AFP).
Le gouvernement de Gabriel Attal est nommé mais la difficulté demeure à l'Assemblée faute de majorité, et pourrait même s'être aggravée avec une partie des troupes macronistes (Photo d'illustration, AFP).
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Publié le Samedi 13 janvier 2024

Gouvernement Attal: Pour une partie de la majorité, le fond de LR effraie

  • Le gouvernement Attal fait la part belle à la droite: Rachida Dati et Catherine Vautrin sont venues s'ajouter aux ex-LR passés chez Macron
  • «D’aucuns vivent avec la conviction profondément ancrée que la France penche à droite» explique un cadre du MoDem

PARIS: Le gouvernement de Gabriel Attal est nommé mais la difficulté demeure à l'Assemblée faute de majorité, et pourrait même s'être aggravée avec une partie des troupes macronistes et des alliés remontée contre une droitisation assumée.

L'équipe Attal, un "nouveau cap", comme l'avait promis Emmanuel Macron ? "Le sens politique de tout ça, pour l'instant, on ne le perçoit pas. Pour quelles réformes, quelle stratégie politique et quelle suite à donner à cette législature ? On ne le saura éventuellement qu'avec la prise de parole du président et le discours de politique générale" de son Premier ministre, réagit auprès de l'AFP le député Horizons Frédéric Valletoux.

Le gouvernement Attal fait la part belle à la droite: Rachida Dati et Catherine Vautrin sont venues s'ajouter aux ex-LR passés chez Macron depuis 2017, Bruno Le Maire, Sébastien Lecornu et Gérald Darmanin.

De quoi réjouir l'aile droite du groupe Renaissance. "Le gouvernement, le ton qu’a employé Gabriel Attal et cette première composition ministérielle répondent non seulement beaucoup plus aux attentes des sympathisants du président, mais rejoignent aussi ses premières décisions, qui sont sur les attentes majoritaires des Français", estime auprès de l'AFP le député Renaissance et ex-LR Robin Reda.

"L'électorat du président en 2022 n'était pas l'électorat de 2017, et la France de 2022 n'était pas celle de 2017", insiste le député de l'Essonne, qui siégeait au groupe LR lors de la précédente législature.

Un avis cependant loin d'être partagé par l'ensemble du groupe Renaissance. "C'est une bombe à fragmentation que le président a décidé de jeter", fulmine un député macroniste de la première heure, particulièrement remonté contre la nomination de Rachida Dati, "une personne éthiquement et moralement radioactive".

Cette droitisation assumée "déséquilibre fortement notre majorité", poursuit cette source pour qui "la question d'un groupe séparé de (l'aile gauche) de Renaissance est maintenant posée", alors même qu'elle ne l'avait pas été, selon lui, après la loi immigration, sur laquelle 20 députés du parti présidentiel avaient voté contre et 17 s'étaient abstenus.

Mais "je pense que c'est le pari du président de la République que personne n'aura le courage d'aller jusqu'au bout", ajoute cet élu. Ce qu'une députée de l'aile gauche sollicitée par l'AFP semble confirmer: la création d'un groupe "n'est pas du tout à l'ordre du jour. On attend de voir la photographie finale du gouvernement".

Clash aux européennes?

Du côté des alliés, ça tangue également. Le MoDem ne compte qu'un seul ministre dans l'équipe resserrée: Marc Fesneau, reconduit in extremis à l'Agriculture. Comme Horizons, avec Christophe Béchu. "On a le sentiment que la loyauté n'est pas forcément récompensée", glisse un député du parti d’Édouard Philippe.

Mais si Horizons assume son orientation à droite, il en va différemment du parti de François Bayrou, lequel avait déjà fait part de ses "interrogations" sur le profil de Gabriel Attal, invoquant "l'expérience nécessaire" pour Matignon. Une analyse que le parti centriste juge confortée par la composition du gouvernement annoncée jeudi.

"D’aucuns vivent avec la conviction profondément ancrée que la France penche à droite. Ce n’est pas ce que nous pensons", explique un cadre du MoDem.

"Je vois bien le bon coup politique qui a été fait" en tentant d'affaiblir un peu plus Les Républicains (LR), poursuit cette source. Mais en majorité relative, l'exécutif "aurait pu se préoccuper de ce qui pouvait rapporter des voix à l'Assemblée. Or Dati et Vautrin ne rapportent pas des voix des députés LR".

"Il est certain qu'à chaque débauchage, il y a une crispation du groupe LR. On peut donc s'attendre à un groupe LR plus réfractaire qu'il ne l'est habituellement", confirme un stratège du parti de droite.

Motif de rupture au sein de la majorité ? Le député MoDem Richard Ramos a plaidé vendredi pour une liste autonome aux élections européennes. Pour "que l'on marque clairement notre différence", explique le député du Loiret, alors qu'avec son gouvernement remanié, "le président de la République a réinventé l'UMP".

"Il ne faut pas prendre trop au sérieux les colères du MoDem", modère un député Renaissance, qui conseille d'"attendre la liste des secrétaires d’État".


France : l'ancien Premier ministre Philippe demande encore le départ anticipé de Macron

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  • Allié de M. Macron dont il fut le premier chef de gouvernement de mai 2017 à juillet 2020, Edouard Philippe avait lancé un pavé dans la mare la semaine dernière, après la démission éclair du premier gouvernement de Sébastien Lecornu
  • "Je n'ai pas pris cette position parce que je pensais que je serais populaire ou parce que j'espérais convaincre le président (Macron). Le président, il a envie d'aller au terme de son mandat, et je peux le comprendre"

PARIS: L'ancien Premier ministre français Edouard Philippe a à nouveau réclamé jeudi le départ anticipé du président Emmanuel Macron, pour lui "la seule décision digne qui permet d'éviter 18 mois" de "crise" politique avant la prochaine élection présidentielle prévue pour le printemps 2027.

Allié de M. Macron dont il fut le premier chef de gouvernement de mai 2017 à juillet 2020, Edouard Philippe avait lancé un pavé dans la mare la semaine dernière, après la démission éclair du premier gouvernement de Sébastien Lecornu - reconduit depuis -, en suggérant un départ anticipé et "ordonné" du chef de l'Etat, qui peine à trouver une majorité.

"Je n'ai pas pris cette position parce que je pensais que je serais populaire ou parce que j'espérais convaincre le président (Macron). Le président, il a envie d'aller au terme de son mandat, et je peux le comprendre. Je l'ai dit parce que c'est la seule décision digne qui permet d'éviter 18 mois d'indétermination et de crise, qui se terminera mal, je le crains", a déclaré l'ancien Premier ministre sur la chaîne de télévision France 2.

"Ca n'est pas simplement une crise politique à l'Assemblée nationale à laquelle nous assistons. C'est une crise très profonde sur l'autorité de l'Etat, sur la légitimité des institutions", a insisté M. Philippe.

"J'entends le président de la République dire qu'il est le garant de la stabilité. Mais, objectivement, qui a créé cette situation de très grande instabilité et pourquoi ? Il se trouve que c'est lui", a-t-il ajouté, déplorant "une Assemblée ingouvernable" depuis la dissolution de 2024, "des politiques publiques qui n'avancent plus, des réformes nécessaires qui ne sont pas faites".

"Je ne suis pas du tout pour qu'il démissionne demain matin, ce serait désastreux". Mais Emmanuel Macron "devrait peut-être, en prenant exemple sur des prédécesseurs et notamment le général De Gaulle, essayer d'organiser un départ qui nous évite pendant 18 mois de continuer à vivre dans cette situation de blocage, d'instabilité, d'indétermination", a-t-il poursuivi.

Edouard Philippe, qui s'est déclaré candidat à la prochaine présidentielle, assure ne pas avoir de "querelle" avec Emmanuel Macron. "Il est venu me chercher (en 2017), je ne me suis pas roulé par terre pour qu'il me nomme" à la tête du gouvernement et après avoir été "congédié" en 2020, "je ne me suis pas roulé par terre pour rester".


Motion de censure: Le Pen attend la dissolution avec une «impatience croissante»

 Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
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  • Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu
  • Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver"

PARIS: Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante".

Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu. Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver".

"Poursuite du matraquage fiscal" avec 19 milliards d'impôts supplémentaires, "gel du barème" de l'impôt sur le revenu qui va rendre imposables "200.000 foyers" supplémentaires, "poursuite de la gabegie des dépenses publiques", "absence totale d'efforts sur l'immigration" ou sur "l'aide médicale d'Etat", ce budget "est un véritable musée de toutes les horreurs coincées depuis des années dans les tiroirs de Bercy", a-t-elle estimé.

Raillant le premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui a accepté d'épargner le gouvernement en échange de la suspension de la réforme des retraites sans savoir par "quel véhicule juridique" et sans assurance que cela aboutisse, elle s'en est pris aussi à Laurent Wauquiez, le chef des députés LR, qui préfère "se dissoudre dans le socialisme" plutôt que de censurer.

"Désormais, ils sont tous d'accord pour concourir à éviter la tenue d'élections", "unis par la terreur de l'élection", a-t-elle dit.


A peine installé, Lecornu affronte deux motions de censure

Si le gouvernement de Sébastien Lecornu survit, les débats autour du budget, dont le texte a été présenté en Conseil des ministres mardi, pourront enfin commencer à l'Assemblée. (AFP)
Si le gouvernement de Sébastien Lecornu survit, les débats autour du budget, dont le texte a été présenté en Conseil des ministres mardi, pourront enfin commencer à l'Assemblée. (AFP)
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  • Sans recours au 49.3, que M. Lecornu s'est engagé à ne pas utiliser, la bataille entre une gauche désunie, un socle commun fracturé et l'extrême droite s'annonce dantesque, dans des délais très contraints
  • Les socialistes se réservent d'ailleurs la possibilité de censurer le gouvernement au cours des discussions

PARIS: Un dernier obstacle avant d'entamer l'examen du budget: deux motions de censure contre le gouvernement de Sébastien Lecornu, l'une de LFI et l'autre du RN, seront débattues par les députés jeudi matin, et devraient être rejetées, dans un scrutin serré, faute de soutien du PS.

Le Parti socialiste a pris sa décision après avoir obtenu mardi satisfaction sur plusieurs revendications clés, dont l'annonce par le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, de la suspension de la réforme des retraites.

Un débat commun aux deux motions débutera à 09H00 dans l'hémicycle jeudi, et devrait durer environ deux heures trente. Le scrutin sera ensuite ouvert pour trente minutes sur une motion, puis l'autre.

Si la gauche ne soutiendra pas la motion du RN, la motion insoumise devrait elle recueillir les voix de l'extrême droite ainsi que des députés écologistes et communistes.

Manqueraient alors environ une vingtaine de députés pour atteindre la majorité (289 voix) qui ferait tomber le gouvernement, tout juste nommé dimanche.

"Je pense qu'il manque une poignée de voix et que la sagesse peut revenir à certains", a estimé mardi Marine Le Pen, qui défendra la motion de son groupe et de ses alliés ciottistes. Leur texte défend la nécessité d'une dissolution pour "sortir" le pays "de l'impasse".

Combien de députés franchiront le pas en s'affranchissant de la consigne de leur parti?

Chez les LR "deux ou trois" devraient voter la censure, selon une source au groupe.

"Quelques votes pour" sont également possibles chez les indépendants Liot, selon une source au sein du groupe centriste.

Chez les socialistes, le patron du parti Olivier Faure et le chef des députés Boris Vallaud ont appelé leurs troupes à s'en tenir à la ligne décidée de façon "quasi-unanime".

Mais le député Paul Christophe a fait savoir qu'il censurerait malgré tout: "mon sujet c'est la justice fiscale et le pouvoir d'achat, il n'y a pas d'engagement du gouvernement sur ces sujets", a-t-il dit à l'AFP.

Cinq autres députés ultramarins du groupe PS ont également annoncé censurer.

"Un leurre" 

Le socialiste Pierrick Courbon dit lui hésiter. Il s'inquiète que la suspension de la réforme des retraites, qui passera selon M. Lecornu par un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale, implique que les socialistes soutiennent ce texte pour qu'il soit adopté. Or "le PLFSS du budget Macron" n'obtiendra "jamais ma voix", confie-t-il à l'AFP.

Un argument d'ailleurs repris en choeur par La France insoumise. "Vous vous apprêtez à commettre une monumentale erreur", a lancé lundi dans l'hémicycle le député Louis Boyard à l'adresse des socialistes.

"Le débat ouvert sur un éventuel décalage de la réforme des retraites est un leurre, comme l'a été avant lui le +conclave+ de François Bayrou", soutient la motion de censure insoumise, qui sera défendue jeudi par Aurélie Trouvé.

Lors de la première motion de censure contre le gouvernement Bayrou, qui n'avait pas abouti, huit socialistes avaient voté pour malgré la consigne de leur parti.

M. Bayrou avait finalement perdu un vote de confiance début septembre, devenant le deuxième Premier ministre à tomber depuis la dissolution de l'Assemblée en 2024, après la censure de Michel Barnier en décembre.

Si le gouvernement de Sébastien Lecornu survit, les débats autour du budget, dont le texte a été présenté en Conseil des ministres mardi, pourront enfin commencer à l'Assemblée.

La commission des Finances s'en emparera lundi, et il devrait arriver dans l'hémicycle vendredi.

Sans recours au 49.3, que M. Lecornu s'est engagé à ne pas utiliser, la bataille entre une gauche désunie, un socle commun fracturé et l'extrême droite s'annonce dantesque, dans des délais très contraints.

Les socialistes se réservent d'ailleurs la possibilité de censurer le gouvernement au cours des discussions.

Un député Horizons résume: "Je ne pense pas que le gouvernement sera censuré demain, mais il sera très fragile."