En Syrie, quand le régime vend les terres des déplacés... aux enchères

(Photo, AFP/Archives).
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Publié le Jeudi 31 décembre 2020

En Syrie, quand le régime vend les terres des déplacés... aux enchères

  • Dénoncées comme confiscations ou représailles, ces enchères sont organisées par des entités liées au régime de Bachar al-Assad
  • La Syrie lutte pour de nouveau atteindre l'autosuffisance alimentaire et surveille étroitement des récoltes jugées stratégiques

BEYROUTH: Salmane, un réfugié syrien, n'en est pas à sa première mésaventure: il a toutefois été récemment dévasté en apprenant que ses terres familiales appartenaient désormais à un inconnu, après de surprenantes enchères.

Dénoncées par certains observateurs comme des «confiscations» ou des «représailles», ces enchères sont organisées par des entités liées au régime de Bachar al-Assad, qui s'est emparé de vastes zones agricoles dans le nord-ouest de la Syrie à la faveur d'offensives successives.

Ces terres, des «concessions» généralement allouées pour un an, vont souvent à des individus liés aux appareils sécuritaires.

Ravagée par bientôt dix ans de guerre et frappée par des sanctions, la Syrie lutte pour de nouveau atteindre l'autosuffisance alimentaire et surveille étroitement des récoltes jugées stratégiques.

«Nous avons perdu nos terres le jour où nous avons été exilés», déplore Salmane, qui a dû fuir son village du sud de la province d'Idleb il y a un an, en pleine campagne militaire du régime soutenu par la Russie contre cette enclave djihadiste et rebelle.

Dans un arrière-pays renommé pour ses oliveraies et ses pistachiers, plusieurs réfugiés ou déplacés craignent d'avoir perdu, via ces enchères, leurs propriétés à Idleb et dans les régions voisines de Hama et d'Alep.

Le Syndicat des paysans d'Idleb, lié au régime, publie sur Facebook des listes de villages concernés par ces enchères qui portent sur des terrains «dont les propriétaires ne se trouvent pas dans les zones» gouvernementales, et qui seraient endettés auprès du Crédit agricole syrien.

Mais Salmane, comme les autres fermiers interrogés, assure ne pas être endetté. «C'est un prétexte», dénonce-t-il.

Rattachés au régime, des comités sécuritaires locaux orchestrent eux aussi de telles enchères, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) et une organisation de l'opposition, Al-Youm al-Tali.

De quel droit?

Réfugié en Grèce, Salmane s'est reconverti dans le BTP. Sans jamais oublier les 15 hectares qu'il possède en syrie avec ses quatre frères.

La famille cultivait de l'orge, des lentilles et des nigelles. Chaque année, ces récoltes rapportaient entre 10 000 et 12 000 dollars (1 dollar = 0,81 euro).

«Fin octobre, on a découvert par surprise les enchères», raconte le trentenaire s'exprimant sous pseudonyme. «Des terrains légués par nos grands-pères, que nous allions transmettre à nos enfants, de quel droit un inconnu peut-il les prendre?»

Ces trois dernières années, les forces gouvernementales ont grignoté les territoires rebelles et djihadistes du nord-ouest.

La dernière offensive, début 2020, a poussé à l'exode près d'un million de personnes. Selon l'ONU, seuls 235 000 de ces déplacés sont rentrés depuis un cessez-le-feu en mars.

Dans les bastions repris, le régime est souvent accusé par des ONG d'expropriations, d'atteintes aux droits humains. Voire, à Idleb, de «crimes contre l'humanité», rappelle Diana Semaan, d'Amnesty International.

«Une fois les bombardements finis, les violations contre les civils se sont poursuivies, sous d'autres formes», explique-t-elle. «Ces enchères, c'est une confiscation illégale des terres, on tire un profit économique des déplacements.»

Opération de façade

Amir, âgé de 38 ans, qui exploitait autrefois sa petite propriété à Alep, fait vivre sa famille avec un maigre salaire de journalier à Idleb.

Un jour, il a appris par un voisin que sa parcelle allait être mise aux enchères. Pour la sauver, Amir lui a demandé de participer à la vente. Mais, par peur, le voisin a décliné.

Elle a finalement été remportée par «quelqu'un ayant des proches au sein des services de renseignements», déplore Amir.

Un texte officiel obtenu par l'ONG Al-Youm al-Tali montre que le comité sécuritaire d'Alep a organisé en novembre des enchères pour cultiver des terres du sud-ouest de la province.

Expert juridique de cette organisation et membre d'un comité constitutionnel parrainé par l'ONU dans le cadre des négociations pour un règlement en Syrie, le juge Anwar Mejni dénonce aussi des procédures «illégales».

«C'est une violation du droit d'exploitation», affirme-t-il, qualifiant ces procédures d'actes de «vengeance contre l'opposition». «Ce sont des représailles contre les Syriens qui sont partis de leurs régions», résume-t-il.

Selon lui, la procédure pourrait se justifier si le Crédit agricole organisait lui-même ces enchères pour éponger les dettes. «Mais cela devrait se faire sous la supervision de la justice. Il y a des lois qui régissent ces questions.»

De son exil forcé à Idleb, Abou Adel est dépité.

En 2012, il a quitté son village situé près de la ligne de front à Hama. Mais le quinquagénaire a continué un temps de se rendre sur ses terres pour cultiver ses pistachiers. Chaque récolte lui rapportait entre 18 800 et 22 900 euros.

Après la conquête de son village par le régime en 2019, il a confié l'exploitation des terres contre rémunération à des connaissances. Mais elles ont été mises aux enchères en juillet et sa récolte va désormais à un «partisan» du comité local de sécurité, accuse-t-il.

Les enchères, fustige-t-il, «c'est une opération de façade. Ils font tous partie de la même clique.»


Le président libanais accuse Israël de répondre à son offre de négociations en intensifiant ses attaques

Le président libanais Joseph Aoun a accusé vendredi Israël de répondre à son offre de négociation en intensifiant ses frappes aériennes, dont la dernière a tué un homme à moto dans le sud du Liban. (Reuters/File)
Le président libanais Joseph Aoun a accusé vendredi Israël de répondre à son offre de négociation en intensifiant ses frappes aériennes, dont la dernière a tué un homme à moto dans le sud du Liban. (Reuters/File)
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  • Le président libanais Joseph Aoun accuse Israël d’avoir répondu à son offre de négociations par une intensification des frappes, qui ont tué deux personnes dans le sud du Liban
  • En visite à Beyrouth, le ministre allemand Johann Wadephul appelle à un retrait israélien du sud du Liban et à un désarmement du Hezbollah, condition jugée essentielle pour la reprise du dialogue

BEYROUTH: Le président libanais, Joseph Aoun, a accusé Israël de répondre à l'offre de négociations du Liban par une intensification de ses frappes, les dernières ayant tué vendredi deux hommes dans le sud du pays selon Beyrouth.

"Le Liban est prêt à des négociations pour mettre fin à l'occupation israélienne, mais toute négociation (...) a besoin d'une volonté réciproque, ce qui n'est pas le cas", a affirmé M. Aoun à l'issue d'un entretien avec le ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul.

Le chef de l'Etat s'était déjà prononcé le 13 octobre pour des négociations entre les deux pays voisins, toujours formellement en état de guerre, et qui ont émergé en novembre dernier d'un an de conflit meurtrier entre Israël et le Hezbollah libanais.

Israël "répond à cette option en menant davantage d'attaques contre le Liban (...) et en intensifiant la tension", a déploré M. Aoun

Selon le ministère de la Santé libanais, deux personnes ont été tuées vendredi lors de deux frappes israéliennes dans le sud du pays.

L'Agence nationale d'information libanaise (Ani, officielle) a indiqué qu'un drone avait notamment visé un homme à moto dans le village de Kounine.

L'armée israélienne a affirmé avoir tué un "responsable de la maintenance du Hezbollah", qui oeuvrait selon elle à rétablir des infrastructures du mouvement pro-iranien.

La veille, une unité israélienne s'était introduite dans le village frontalier de Blida, où les soldats ont tué un employé municipal.

M. Aoun a demandé à l'armée de "faire face" à toute nouvelle incursion israélienne en territoire libanais.

- "Condition sine qua non" -

Malgré le cessez-le-feu ayant mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce dernier continue de mener des frappes régulières au Liban disant viser des cibles du mouvement chiite, et a intensifié ses raids ces derniers jours.

L'armée israélienne se maintient aussi dans cinq positions dans le sud du Liban.

Selon un bilan de l'AFP basé sur des données du ministère de la Santé, au moins 25 personnes, dont un Syrien, ont été tuées en octobre.

L'ONU avait indiqué mardi que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Le chef de la diplomatie allemande a apporté son soutien au président libanais, affirmant qu'il exhorterait son homologue israélien, Gideon Saar, à retirer l'armée israélienne du sud du Liban.

"Il doit y avoir un retrait des troupes israéliennes. Je comprends qu'Israël ait besoin de sécurité (...) Mais nous avons maintenant besoin d'un processus de confiance mutuelle. Et je m'engage à ce que les deux parties se parlent", a dit le ministre allemand.

Il a également "encouragé le gouvernement libanais à veiller à ce qu'un processus crédible, compréhensible et rapide de désarmement du Hezbollah soit mis en place", une "tâche colossale" mais, a-t-il estimé, "la condition sine qua non" pour régler les relations avec Israël.

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour que le mouvement chiite livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.


Israël a rendu à Gaza 30 corps de Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages 

Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza. (AFP)
Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza. (AFP)
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  • "Les corps de 30 prisonniers palestiniens ont été reçus de la partie israélienne dans le cadre de l'accord d'échange", a précisé l'hôpital, situé à Khan Younès
  • Au total, en échange de 15 dépouilles d'Israéliens, 225 dépouilles de Palestiniens ont été rendues conformément aux termes de l'accord de cessez-le feu en vigueur depuis le 10 octobre

GAZA: Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza.

"Les corps de 30 prisonniers palestiniens ont été reçus de la partie israélienne dans le cadre de l'accord d'échange", a précisé l'hôpital, situé à Khan Younès.

Les otages avaient été enlevés lors de l'attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, qui avait déclenché la guerre dans la bande Gaza.

Au total, en échange de 15 dépouilles d'Israéliens, 225 dépouilles de Palestiniens ont été rendues conformément aux termes de l'accord de cessez-le feu en vigueur depuis le 10 octobre.

Depuis cette date, le Hamas a également rendu deux dépouilles d'otages non-israéliens, un Thaïlandais et un Népalais.

Le mouvement islamiste a jusqu'à présent restitué les restes de 17 des 28 corps qui se trouvaient encore à Gaza et auraient dû être rendus au début de la trêve, assurant que localiser les autres dépouilles est "complexe" dans le territoire dévasté par deux ans de guerre.

Des équipes égyptiennes autorisées à entrer dans le territoire palestinien par Israël participent aux recherches avec des engins de chantiers.

Lundi soir, le Hamas avait rendu à Israël les restes d'un otage, identifié comme étant ceux d'Ofir Tzarfati, dont une partie de la dépouille avait déjà été récupérée en deux fois.

Les retards successifs dans la remise des corps des otages ont provoqué la colère du gouvernement israélien, qui a accusé le Hamas de violer l'accord de trêve. Et les familles des otages ont exigé des mesures plus sévères pour contraindre le groupe palestinien à se conformer à l'accord.

Dix corps d'otages du 7-Octobre seraient encore à Gaza, ainsi que celui d'un soldat mort durant une guerre en 2014. Tous sont israéliens sauf un Tanzanien et un Thaïlandais.

Par ailleurs, à deux reprises depuis le 10 octobre, Israël a mené des bombardements massifs sur Gaza en représailles à des tirs qui ont tué trois de ses soldats. Le 19 octobre, les bombardements israéliens avaient fait au moins 45 morts et mardi 104.

Le Hamas, qui dément avoir tiré sur les soldats israéliens, a accusé Israël de violer le cessez-le-feu.


Frappe israélienne sur le sud du Liban: un mort 

Une frappe israélienne a tué vendredi un homme qui circulait à moto dans le sud du Liban, a annoncé le ministère de la Santé, ce qui porte à au moins 25 le nombre de morts dans des raids israéliens au cours du mois d'octobre. (AFP)
Une frappe israélienne a tué vendredi un homme qui circulait à moto dans le sud du Liban, a annoncé le ministère de la Santé, ce qui porte à au moins 25 le nombre de morts dans des raids israéliens au cours du mois d'octobre. (AFP)
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  • Vendredi, un drone a visé un homme à moto dans le village de Kounine, selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle). Le ministère de la Santé a fait état d'un mort et d'un blessé
  • Cette frappe intervient au lendemain de l'incursion d'une unité israélienne dans le village frontalier de Blida, où les soldats ont tué un employé municipal

BEYROUTH: Une frappe israélienne a tué vendredi un homme qui circulait à moto dans le sud du Liban, a annoncé le ministère de la Santé, ce qui porte à au moins 25 le nombre de morts dans des raids israéliens au cours du mois d'octobre.

Malgré le cessez-le-feu ayant mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce dernier continue de mener des frappes régulières au Liban, affirmer viser la formation pro-iranienne.

Vendredi, un drone a visé un homme à moto dans le village de Kounine, selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle). Le ministère de la Santé a fait état d'un mort et d'un blessé.

Israël n'a pas réagi dans l'immédiat.

Cette frappe intervient au lendemain de l'incursion d'une unité israélienne dans le village frontalier de Blida, où les soldats ont tué un employé municipal.

Le président Joseph Aoun a demandé à l'armée de "faire face" à toute nouvelle incursion israélienne en territoire libanais.

Ces derniers jours, l'aviation israélienne a intensifié ses frappes au Liban, affirmant viser des membres ou des infrastructures du Hezbollah.

Selon un bilan compilé par l'AFP à partir des données du ministère de la Santé, au moins 25 personnes, dont un Syrien, ont été tuées depuis le début du mois.

L'ONU avait indiqué mardi que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Lors d'un entretien vendredi avec son homologue allemand Johann Wadephul, en visite à Beyrouth, le ministre libanais des Affaires étrangères Youssef Rajji lui a demandé "d'aider à faire pression sur Israël pour qu'il cesse ses agressions".

"Seule une solution diplomatique, et non militaire, peut assurer la stabilité et garantir le calme dans le sud", a assuré le ministre libanais, selon ses propos rapportés par l'Ani.

Il a assuré que "le gouvernement libanais poursuit la mise en œuvre progressive de sa décision de placer toutes les armes sous son contrôle".

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour que le mouvement chiite livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.