Un gouvernement Attal au complet mais déjà affaibli

Le Premier ministre français Gabriel Attal réagit lors d'une séance à l'Assemblée nationale à Paris, le 5 février 2024 (Photo, AFP).
Le Premier ministre français Gabriel Attal réagit lors d'une séance à l'Assemblée nationale à Paris, le 5 février 2024 (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 09 février 2024

Un gouvernement Attal au complet mais déjà affaibli

  • Le gouvernement de Gabriel Attal est déjà fragilisé par les divergences politiques exprimées par François Bayrou
  • Depuis mercredi soir, le président du MoDem multiplie les mots tonitruants à l'encontre du duo exécutif

PARIS: Moins d'un mois après sa naissance, le gouvernement de Gabriel Attal est déjà fragilisé par les divergences politiques exprimées par François Bayrou, l'allié historique d'Emmanuel Macron, qui prend ses distances de manière inédite avec le président et égratigne le Premier ministre.

"Dérive", "technocratie gestionnaire", "crise", absence d'"accord profond": depuis mercredi soir, le président du MoDem multiplie les mots tonitruants à l'encontre du duo exécutif. Après 48 heures d'intenses tractations, il marque ainsi son refus d'entrer au gouvernement, dont la composition complète a été annoncée jeudi soir.

"Il y a beaucoup d'incompréhension à l'Elysée et à Matignon. On ne s'y attendait pas", reconnaît un conseiller de l'exécutif, assurant qu'une "place lui était réservée" après sa relaxe judiciaire prononcée lundi.

Pour Benjamin Morel, maître de conférences en droit public, "ça fragilise le gouvernement parce que les lignes de fracture au sein de la majorité vont se creuser". Même si le MoDem reste au gouvernement, il donne le sentiment d'avoir "très envie d'en sortir", au risque de saper "l'autorité" du Premier ministre, dit-il à l'AFP.

François Bayrou avait d'emblée mis en doute "l'expérience" du plus jeune chef du gouvernement de l'histoire de la République, et critiqué la droitisation de l'exécutif. Désormais, il critique la vision "technocratique" de Gabriel Attal, notamment sur l'éducation, censée être son chantier prioritaire et où il se vante d'avoir forgé sa "méthode".

Procès en déconnexion

A quatre mois d'élections européennes où le Rassemblement national est donné favori dans les sondages, le leader centriste met un grain de sable dans l'enthousiasme qui entourait jusqu'ici, en interne, les premiers pas du Premier ministre.

Pire, celui qui reste haut-commissaire au Plan accuse Emmanuel Macron de n'avoir pas tenu la promesse de "gouverner autrement", et dresse en creux un procès en déconnexion entre "la France qui décide en haut" et celle "qui se bat en bas". Comme un slogan en vue d'une possible candidature à l'Elysée en 2027.

"François Bayrou fait comme Edouard Philippe, il veut se démarquer pour la présidentielle!", résume un soutien du chef de l'Etat.

Après son ex-Premier ministre, autoproclamé "loyal mais libre", voilà donc le président aux prises avec son principal allié mué en frondeur.

"Cela dit beaucoup du second mandat d'Emmanuel Macron qui est très affaibli par le fait que son camp n'a pas de majorité absolue et surtout qu'il n'a plus la capacité de se représenter" en raison des limites constitutionnelles, estime le politologue Pascal Perrineau. "Son pouvoir est sans cesse contesté à l'extérieur, on le voit dans l'opinion publique" avec une cote de popularité au plus bas, "mais aussi à l'intérieur de son camp où chacun y va de sa stratégie de différenciation pour préparer l'après".

Pour autant, la Macronie faisait tout jeudi pour minimiser les dégâts. Un conseiller ministériel raille "une petite crise d'ego" de François Bayrou, qui aurait "un peu craqué" et ferait "cavalier seul".

«Théâtre d'ombres»

Gabriel Attal a nié tout "incident", tout juste un "débat" ou un "désaccord" ponctuel", tandis qu'un proche du chef de l'Etat faisait mine de vouloir laisser "s'exprimer" les différentes "sensibilités".

François Bayrou est pourtant bien plus qu'une "sensibilité".

Le maire de Pau avait mis ses ambitions présidentielles entre parenthèses en 2017 pour soutenir Emmanuel Macron, apportant un surcroît de crédibilité au jeune candidat dont il partageait la volonté d'imposer un "bloc central" dépassant le clivage droite-gauche. Depuis, même dans les moments difficiles, le président a toujours veillé à bien "traiter" son aîné béarnais.

"On sait bien ce qu'on doit à Bayrou", glisse un macroniste de la première heure, en citant ce ralliement initial et "le poids du groupe MoDem à l'Assemblée nationale", où chaque député compte.

"Le pays va suffisamment mal pour qu'on n'ait pas en plus ce théâtre d'ombres que les Français vomissent", souffle un autre cadre du camp présidentiel, "complètement sidéré" par la séquence.

Mais le même se dit "d'accord" sur l'existence d'une "forme d'élitisme perçu par la population", et reproche aussi à Emmanuel Macron et Gabriel Attal un remaniement qui a traîné en longueur pendant près d'un mois, ouvrant la porte à ce psychodrame.


Budget, rentrée politique: Bayrou tiendra une conférence de presse lundi

Le Premier ministre français, François Bayrou, visite un poste de commandement de terrain à Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse, dans le sud de la France, où un incendie de forêt a ravagé une vaste zone, le 6 août 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, visite un poste de commandement de terrain à Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse, dans le sud de la France, où un incendie de forêt a ravagé une vaste zone, le 6 août 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre François Bayrou fait face à une rentrée politique tendue : un budget 2026 très critiqué et une opposition menaçant de renverser son gouvernement via une motion de censure
  • Malgré les tensions, Emmanuel Macron lui réaffirme son soutien, tandis que le gouvernement entame une série de concertations sociales et politiques pour tenter d’apaiser la situation

PARIS: Le premier ministre François Bayrou tiendra une conférence de presse lundi à 16H00, a annoncé samedi Matignon, alors que le chef du gouvernement aborde une rentrée politique très délicate, marquée par la préparation du budget 2026 et les appels à bloquer le pays le 10 septembre.

François Bayrou est notamment menacé d'une motion de censure depuis la présentation à la mi-juillet d'orientations budgétaires prévoyant près de 44 milliards d'euros d'économies l'an prochain.

"A la rentrée, il y aura forcément une confrontation entre le réel et les idéologies", a-t-il déclaré cette semaine à l'AFP après avoir passé un été studieux à Paris.

Le Premier ministre a préparé cette rentrée politique lors d'un dîner avec Emmanuel Macron, jeudi dernier dans la résidence présidentielle de vacances du fort de Brégançon.

Le chef de l'Etat lui a publiquement exprimé son soutien, dans une interview publiée par Paris Match.

François Bayrou "est mon ami... mon compagnon de route. Il a les capacités pour tenir ce gouvernement qui n'est pas habituel", a-t-il expliqué, jugeant son plan d'économies budgétaires "lucide et courageux".

Mais la France insoumise (LFI) a fait savoir qu'elle déposerait une motion de censure dès le 23 septembre, à reprise des débats à l'Asemblée nationale. Les autres partis de gauche, en particulier les socialistes, semblent prêt à la voter si les propositions de François Bayrou n'évoluent pas, et le Rassemblement national en fait aussi planer la menace.

Le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon a appelé vendredi à transformer en "grève générale" les appels à bloquer le pays le 10 septembre, lancés au départ sur les réseaux sociaux.

"Il nous faut la grève générale le 10 septembre parce que le 23 septembre, nous déposerons la motion de censure pour faire tomber le gouvernement de M.Bayrou", a-t-il lancé.

Le gouvernement de son côté va relancer les concertations lundi avec les partenaires sociaux, dans un premier temps, puis avec les forces politiques représentées au Parlement.

La ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet recevra à partir de lundi les organisations syndicales et patronales avant l'ouverture d'une négociation sur la "modernisation du marché du travail" et la "qualité du travail", selon son ministère.

Cette négociation est la troisième à laquelle François Bayrou veut inviter les partenaires sociaux, après celle sur une nouvelle réforme de l'assurance chômage et une autre sur la suppression de deux jours fériés, l'une de ses propositions budgétaires les plus contestées.

Par ailleurs, plusieurs ministres reprendront les discussions avec les groupes parlementaires de la coalition soutenant le gouvernement et ceux de l'opposition "au cours des deux semaines qui viennent", a indiqué à l’AFP le ministre des Relations avec le Parlement Patrick Mignola.


La rentrée de Radio France lundi menacée par une grève illimitée

Vue du siège de Radio France à Paris, le 8 juillet 2025. (AFP)
Vue du siège de Radio France à Paris, le 8 juillet 2025. (AFP)
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  • Les syndicats de Radio France ont déposé un préavis de grève illimitée à partir de lundi, protestant contre plusieurs réformes
  • Malgré des négociations, aucune concession majeure n’a été faite, mais la direction et les syndicats souhaitent trouver un accord rapidement pour préserver les programmes

PARIS: A Radio France, la rentrée s'annonce agitée: vent debout contre des projets de réorganisation, les syndicats appellent à une grève illimitée à partir de lundi, qui pourrait perturber les antennes du groupe public, dont la matinale de France Inter, la première du pays.

A la radio, les grilles de rentrée reprennent dès lundi, après la parenthèse estivale et avant celles des télévisions. La matinale d'Inter doit accueillir ce jour-là les premiers pas de sa recrue vedette, Benjamin Duhamel.

Le transfuge de BFMTV rejoint la voix principale de la matinale, Nicolas Demorand, après le départ de Léa Salamé pour le 20h00 de France 2.

Le préavis de grève illimitée a été déposé le 11 juillet par les syndicats CFDT, CGT, FO, SNJ, SUD et UNSA.

Ils rejettent plusieurs réformes voulues par la patronne du groupe, Sibyle Veil. Parmi elles, l'arrêt de la radio Mouv' sur la FM, des changements éditoriaux au sein d'Ici (ex-France Bleu, le réseau des radios locales publiques) et l'arrêt d'émissions d'investigation et de reportage.

"Madame la présidente (...), pour la première fois de notre histoire récente, la rentrée radiophonique pourrait ne pas avoir lieu", ont menacé les syndicats dans un communiqué commun jeudi.

Des discussions menées vendredi avec la direction n'ont pas abouti à la levée du préavis.

"Pour l'heure, la direction refuse la moindre concession ou de revenir sur les projets les plus néfastes pour les équipes et les antennes", ont déploré les syndicats dans un communiqué vendredi soir.

La direction du groupe a de son côté assuré samedi avoir "fait des propositions sur les différents sujets en cours de discussion, dans l'objectif d'une levée du préavis".

"Ceci n'ayant pas abouti ce jour, la direction se tient prête à la poursuite des négociations au plus vite: rendez-vous a été conjointement fixé lundi. Il y a, des deux côtés, une volonté de sortir de la situation au plus vite, dans l'intérêt des auditeurs", a-t-elle poursuivi.

Une première grève, très suivie, avait eu lieu du 26 au 29 juin.

Elle avait immédiatement été suivie d'une deuxième, mais pour un motif différent. Il s'agissait de protester contre le projet de réforme de l'audiovisuel public porté par la ministre de la Culture, Rachida Dati. Il prévoit de créer une holding, France Médias, qui chapeauterait France Télévisions, Radio France et l'INA (Institut national de l'audiovisuel).

Après un parcours parlementaire heurté, ce texte devrait revenir à l'Assemblée nationale à l'automne. Il a été adopté en juillet par le Sénat, où les débats ont été écourtés par le choix de la ministre d'employer l'arme constitutionnelle du vote bloqué.

Selon les dernières mesures d'audience de Médiamétrie, publiées début juillet, Radio France a enregistré une saison 2024-2025 record sur plusieurs antennes et France Inter a augmenté son avance comme première radio du pays.


Paris convoque l'ambassadrice d'Italie après des propos "inacceptables" de Matteo Salvini

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  • La France a convoqué l’ambassadrice d’Italie, Emanuela D’Alessandro, pour dénoncer les propos du vice-Premier ministre italien Matteo Salvini, jugés contraires au climat de confiance entre les deux pays
  • Salvini avait suggéré qu’Emmanuel Macron "y aille lui-même" en Ukraine, casque et fusil, provoquant un tollé diplomatique

PARIS: La France a convoqué l'ambassadrice d'Italie en France, Emanuela D'Alessandro, "à la suite des propos inacceptables" tenus par le vice-Premier ministre italien Matteo Salvini à l'encontre du président Emmanuel Macron pour son soutien à l'envoi de troupes en Ukraine, a-t-on appris vendredi de source diplomatique.

"Il a été rappelé à l’ambassadrice [convoquée jeudi, NDLR] que ces propos allaient à l’encontre du climat de confiance et de la relation historique entre nos deux pays mais aussi des récents développements bilatéraux, qui ont mis en évidence des convergences fortes entre les deux pays, notamment s’agissant du soutien sans faille à l’Ukraine", a-t-on précisé de source diplomatique, confirmant une information de la radio France Inter.

Interrogé lors d'un déplacement à Milan sur un éventuel déploiement de soldats italiens en Ukraine après un arrêt des hostilités, comme la France et le Royaume-Uni envisagent de le faire, Matteo Salvini avait suggéré qu'Emmanuel Macron "y aille lui-même" en mettant un casque et prenant un fusil.

Le chef du parti antimigrants Lega, proche de la cheffe de l'extrême droite française Marine Le Pen, avait déjà qualifié en mars le président français de "fou", l'accusant de pousser l'Europe à la guerre avec la Russie.

La France et le Royaume-Uni, qui ont pris la tête d'une "coalition des volontaires", envisagent de déployer des contingents en Ukraine comme garantie de sécurité pour prévenir une reprise des hostilités une fois qu'un cessez-le-feu ou un accord de paix aura été conclu entre Kiev et Moscou.

La Première ministre italienne Giorgia Meloni de son côté s'y refuse.