Pour Gaza, des Américains d'origine arabe jurent de «punir» Biden dans les urnes

Devant une mosquée de cette banlieue de Detroit à la population en grande partie musulmane et d'origine arabe, Samra'a Luqman distribue des prospectus. (AFP)
Devant une mosquée de cette banlieue de Detroit à la population en grande partie musulmane et d'origine arabe, Samra'a Luqman distribue des prospectus. (AFP)
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Publié le Jeudi 22 février 2024

Pour Gaza, des Américains d'origine arabe jurent de «punir» Biden dans les urnes

  • «Votez pour la Palestine. Pas pour Biden», lance une responsable de la campagne «Abandon Biden» aux fidèles sortant de la grande prière hebdomadaire du vendredi
  • En 2020, face au républicain Donald Trump, M. Biden l'avait emporté dans le Michigan. Mais un récent sondage le place derrière son rival cette année

DEARBORN: A Dearborn, dans le nord des Etats-Unis, il n'est pas rare d'être accueilli en arabe dans les magasins aux enseignes bilingues. Ici de nombreux habitants disent ressentir la guerre à Gaza dans leur chair, et ils comptent bien sanctionner dans les urnes le président Joe Biden pour son soutien à Israël.

Devant une mosquée de cette banlieue de Detroit à la population en grande partie musulmane et d'origine arabe, Samra'a Luqman distribue des prospectus.

"Votez pour la Palestine. Pas pour Biden", lance la jeune femme aux fidèles sortant de la grande prière hebdomadaire du vendredi.

"Bien sûr", répondent plusieurs d'entre eux.

Samra'a Luqman est l'une des responsables de la campagne "Abandon Biden" pour le Michigan, l'un de ces Etats-clés qui peuvent faire basculer les présidentielles et où chaque voix compte. Son objectif est simple: faire perdre Joe Biden, qui brigue un second mandat le 5 novembre.

Le démocrate "n'est pas (seulement) complice du génocide, il commet le génocide. Il le finance" en fournissant de l'aide à Israël, assène la militante d'origine yéménite.

En 2020, face au républicain Donald Trump, M. Biden l'avait emporté dans le Michigan. Mais un récent sondage le place derrière son rival cette année.

"Le seul moyen pour que je vote Biden, ce serait qu'il ressuscite les 30 000 personnes mortes" à Gaza, lâche Mme Luqman.

La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent du Hamas en Israël qui a fait plus de 1.160 morts, majoritairement des civils. L'offensive israélienne menée en représailles a fait 29.313 morts, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé à Gaza.

«Jamais» Biden

En cette froide après-midi, Samra'a Luqman exhorte les électeurs à ne surtout pas cocher la case "Biden" lors de la primaire démocrate du 27 février dans le Michigan, mais à voter blanc ou à écrire "Libérez la Palestine" sur le bulletin.

Il s'agit de "faire pression" sur le président pour qu'il réclame un "cessez-le-feu permanent", et de lui montrer qu'un électorat qui a contribué à le porter au pouvoir peut aussi lui retirer son soutien, affirme Abbas Alawieh, porte-parole de "Listen to Michigan" (Ecoutez le Michigan).

Cette initiative, qui a lancé l'appel à boycotter M. Biden lors de la primaire, a été formée, entre autres, par Layla Elabed, une soeur de l'élue démocrate d'origine palestinienne Rashida Tlaib.

"Dans cette communauté, beaucoup de personnes sont directement affectées par la guerre, lorsqu'un conflit financé par notre pays se produit au Moyen-Orient", explique le stratège démocrate né au Liban, qui a été directeur de cabinet d'élus de gauche à Washington pendant plusieurs années.

Aujourd'hui les démocrates risquent "de perdre cette communauté. Pas seulement en novembre, mais peut-être pour une génération", avertit Abbas Alawieh.

Mohamed Alemara, étudiant en médecine de 23 ans d'origine irakienne, est venu assister à une réunion mi-religieuse mi-spirituelle dans une école.

En 2020, il a voté Biden. "La pire erreur de ma vie", dit-il, affirmant se sentir "coupable par association" de ce qui se passe à Gaza. Pour le 5 novembre, "c'est tout vu". "Jamais" il ne votera de nouveau Biden, déclare-t-il.

Bien qu'elle ait voté démocrate la dernière fois, Fatima Elzaghir, infirmière de 27 ans, se dit prête à donner sa voix à Trump.

"Je crois que je vais choisir le moindre mal et pour l'instant, le moindre mal c'est Trump", affirme-t-elle.

«Appelez vos élus»

Face à l'incompréhension que suscite souvent le choix de se reporter sur ou de laisser gagner celui qui a mis en place, pendant son mandat, un décret migratoire controversé ciblant des pays musulmans (le fameux "Muslim ban"), Samra'a Luqman répond être très consciente des enjeux.

"Nous ne sommes pas stupides", dit-elle. "Mon intention est de punir Biden. J'ai survécu à un +Muslim ban+, mais ces enfants à Gaza n'ont pas survécu à Joe Biden".

Abbas Alawieh prend une longue inspiration avant de s'adresser à ceux qui s'interrogent.

"Comment osez-vous me dire +Oh, plus tard, Trump ce sera de votre faute+? Ne venez pas me voir. Appelez vos élus. Dites-leur que vous voulez un cessez-le-feu (...). Une fois que nous aurons mis fin au carnage, nous pourrons parler des conséquences politiques", dit-il fermement.

Dans cette région berceau de l'industrie automobile, de nombreux ouvriers, souvent syndiqués et marqués à gauche, font aussi part de leur colère.

Merwan Beydoun travaille dans une aciérie et fait partie du grand syndicat UAW, qui a annoncé appuyer le chef de l'Etat. "Furieux" du soutien de M. Biden à Israël, M. Beydoun a publiquement annoncé qu'il cesserait de contribuer au fonds d'action politique de l'UAW, mais reste syndiqué.

Longtemps "très pro-démocrate", fervent partisan du mouvement syndical, il préfère ne pas encore dire ce qu'il fera le jour de la présidentielle. Mais Joe Biden "doit se réveiller" et changer de politique s'il veut son vote, dit-il.

Mardi, l'administration Biden a encore opposé un veto à une résolution onusienne réclamant un cessez-le-feu immédiat.


Russie: le suicide apparent d'un ministre sème la peur au sein de l'élite

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
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  • Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement
  • Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours

SAINT-PETERSBOURG: Le suicide probable du ministre russe des Transports, Roman Starovoït, annoncé peu après son limogeage lundi par Vladimir Poutine sur fond d'allégations de corruption, a profondément choqué l'élite politique, où chacun redoute de faire les frais de la chasse aux profiteurs.

Ses funérailles ont eu lieu vendredi dans un cimetière de Saint-Pétersbourg en présence de sa famille et de collègues, mais en l'absence de M. Poutine qui n'a pas non plus participé à la cérémonie d'adieu jeudi.

Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement.

Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours.

"C'est une grande perte pour nous, très inattendue. Nous sommes tous choqués", a déclaré à l'AFP Vassilissa, 42 ans, l'épouse d'un collègue de M. Starovoït, lors de la cérémonie de jeudi.

"Il était tellement actif, joyeux, il aimait énormément la vie. Je ne comprends pas comment cela a pu arriver", ajoute cette femme, les larmes aux yeux.

Après avoir déposé devant le cercueil de grands bouquets de roses rouges, des anciens collègues de M. Starovoït, en costumes sombres, sont repartis très vite dans leurs luxueuses voitures noires.

Dans une ambiance très lourde rappelant les funérailles dans le film culte "Le Parrain" de Francis Ford Coppola, d'autres personnes interrogées par les journalistes de l'AFP dans la foule ont refusé de parler.

"Bouc émissaire" 

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin.

Son successeur à la tête de cette région, Alexeï Smirnov, a lui été arrêté au printemps pour le détournement des fonds destinés à renforcer les fortifications à la frontière. Celle-là même que les Ukrainiens ont traversé facilement, pour n'être repoussés que neuf mois plus tard.

Les autorités "ont essayé de faire de lui (Roman Starovoït) un bouc émissaire", accuse auprès de l'AFP Andreï Pertsev, analyste du média indépendant Meduza, reconnu "indésirable" et interdit en Russie.

L'incursion ukrainienne "s'est principalement produite parce qu'il n'y avait pas assez de soldats pour protéger la frontière", mais c'était "plus facile de rejeter la faute sur un responsable civil", explique-t-il.

L'affaire Starovoït s'inscrit dans une vague récente de répression visant de hauts responsables soupçonnés de s'être enrichis illégalement pendant l'offensive russe en Ukraine. Et selon des analystes, si les scandales de corruption on toujours existé en Russie, la campagne militaire a changé les règles du jeu politique.

"Il existait des règles auparavant, selon lesquelles les gens savaient: une fois qu'ils montaient suffisamment haut, on ne les embêtait plus", estime M. Pertsev. "Mais elles ne fonctionnent plus."

"On ne vole pas" 

Alors que Vladimir Poutine promettait régulièrement de s'attaquer à la corruption - étant lui même accusé de s'être enrichi illégalement par ses détracteurs -, les rares arrestations médiatisées ont été davantage utilisées pour cibler des opposants ou résultaient de luttes internes entre les échelons inférieurs du pouvoir en Russie.

Depuis l'offensive en Ukraine lancée en février 2022, "quelque chose dans le système a commencé à fonctionner de manière complètement différente", souligne la politologue Tatiana Stanovaïa du Centre Carnegie Russie Eurasie, interdit en Russie en tant qu'organisation "indésirable".

"Toute action ou inaction qui, aux yeux des autorités, accroît la vulnérabilité de l'État face aux actions hostiles de l'ennemi doit être punie sans pitié et sans compromis", estime Mme Stanovaïa en définissant la nouvelle approche du pouvoir.

Pour le Kremlin, la campagne en Ukraine est une "guerre sainte" qui a réécrit les règles, confirme Nina Khrouchtcheva, professeure à The New School, une université de New York, et arrière-petite-fille du dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev.

"Pendant une guerre sainte, on ne vole pas (...) on se serre la ceinture et on travaille 24 heures sur 24", résume-t-elle.

Signe des temps, plusieurs généraux et responsables de la Défense ont été arrêtés pour des affaires de détournement de fonds ces dernières années. Début juillet, l'ancien vice-ministre de la Défense Timour Ivanov a été condamné à 13 ans de prison.

Cette ambiance, selon Mme Stanovaïa, a créé un "sentiment de désespoir" au sein de l'élite politique à Moscou, qui est peu susceptible de s'atténuer.

"À l'avenir, le système sera prêt à sacrifier des figures de plus en plus en vue," avertit-elle.

 


Un trafic de stupéfiants démantelé entre Espagne et France, 13 arrestations

reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
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  • 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations
  • Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN

LYON: Treize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police.

Onze suspects ont été interpellés entre décembre 2023 et juillet 2024, notamment grâce à l'interception par les policiers de deux poids-lourds et d'un convoi de voitures "entre la région lyonnaise et le Gard", "au moment où les stupéfiants étaient remis à des équipes locales", explique la Direction interdépartementale de la police (DIPN) du Rhône dans un communiqué.

Dans le même laps de temps, 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations.

Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN.

Puis l'enquête a permis l'interpellation, le 30 juin dernier, d'un homme "soupçonné d'être le donneur d'ordres" et, le lendemain, d'un autre suspect, "fugitif condamné en 2016" à sept ans de prison pour trafic de stupéfiants. A son domicile dans l'Ain, "54 kg de cocaïne et plusieurs dizaines de milliers d'euros" ont été saisis, précise le communiqué qui n'en dit pas plus sur le profil de ces hommes. Ils ont été mis en examen le 4 juillet et placés en détention provisoire.

La police considère ainsi avoir réussi le "démantèlement de ce groupe criminel organisé (...) réalisant des importations de stupéfiants depuis l'Espagne vers la région Auvergne-Rhône-Alpes" pour des "quantités importantes".

 


Iran: la lauréate du prix Nobel de la Paix Mohammadi se dit «menacée d'élimination physique», selon le comité Nobel

La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone. (AFP)
La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone. (AFP)
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  • La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique"
  • Ces menaces "montrent clairement que sa sécurité est en jeu, à moins qu'elle ne s'engage à mettre fin à tout engagement public en Iran"

OSLO: La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone.

Ces menaces "montrent clairement que sa sécurité est en jeu, à moins qu'elle ne s'engage à mettre fin à tout engagement public en Iran" ainsi qu'à "toute apparition dans les médias", ajoute le comité Nobel dans un communiqué. Mme Mohammadi a été récompensée en 2023 pour "son combat contre l'oppression des femmes en Iran et pour la promotion des droits de l'homme".