«Les attaques israéliennes contre les hôpitaux sont soit intentionnelles, soit un signe d’incompétence», déclare le chef de MSF au CSNU

Cette photo montre l’hôpital endommagé de Hamad dans la ville de Gaza, le 3 février 2024, après des bombardements israéliens. (AFP)
Cette photo montre l’hôpital endommagé de Hamad dans la ville de Gaza, le 3 février 2024, après des bombardements israéliens. (AFP)
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Publié le Vendredi 23 février 2024

«Les attaques israéliennes contre les hôpitaux sont soit intentionnelles, soit un signe d’incompétence», déclare le chef de MSF au CSNU

  • «Un cessez-le-feu est nécessaire pour les habitants de Gaza, non pas lorsque cela est réalisable, mais tout de suite», dit Christopher Lockyear
  • M. Lockyear précise que les attaques israéliennes contre le personnel et les établissements médicaux sont désormais devenues «trop familières»

NEW YORK: Dans l’un des discours les plus forts prononcés devant le Conseil de sécurité de l’ONU depuis le début de la guerre à Gaza, le secrétaire général de l’association humanitaire internationale d’aide médicale Médecins sans frontières (MSF) a appelé jeudi l’organe exécutif à exiger un cessez-le-feu immédiat à Gaza et à garantir la protection des établissements de santé, des travailleurs et des patients.

«Le monde a vu les membres de ce conseil débattre et tergiverser pendant que des civils meurent», affirme-t-il, exprimant par ailleurs son indignation face au récent veto américain, qui a empêché l’adoption de «la plus évidente des résolutions, celle qui exige un cessez-le-feu immédiat et durable».

«À trois reprises, ce conseil a eu l’occasion de voter en faveur du cessez-le-feu, qui est absolument indispensable. À trois reprises, les États-Unis ont utilisé leur droit de veto», déclare Christopher Lockyear.

Le secrétaire général de MSF souligne que le projet de résolution déposé par les États-Unis la semaine dernière pour rivaliser avec le projet algérien contre lequel ils ont exercé leur veto et appelant «prétendument» à un cessez-le-feu est «au mieux trompeur».

Bien que le projet en question soutienne un appel à un cessez-le-feu, M. Lockyear y fait allusion comme à une mesure temporaire qui doit être adoptée «dès que possible», ce que beaucoup ont interprété comme le fait de laisser aux Israéliens la décision de sa mise en œuvre.

M. Lockyear appelle le conseil à rejeter «toute résolution qui entrave davantage les efforts humanitaires sur le terrain et conduit ce conseil à approuver tacitement la poursuite de la violence et des atrocités massives à Gaza».

Il ajoute: «Un cessez-le-feu est nécessaire pour les habitants de Gaza, non pas lorsque cela est réalisable, mais tout de suite. Ils ont besoin d’un cessez-le-feu durable, et non d’une période de calme temporaire. Toute autre démarche serait une négligence grave. La protection des civils à Gaza ne peut pas dépendre des résolutions de ce conseil, qui instrumentalisent l’humanitarisme pour brouiller les objectifs politiques.»

M. Lockyear a dressé un tableau apocalyptique de la situation à Rafah, le dernier abri des Gazaouis, où plus d’un million de Palestiniens déplacés ont trouvé refuge, et qui redoute désormais une invasion terrestre.

Près de 30 000 Palestiniens ont été tués au cours de ces quatre mois de guerre après les attaques et les bombardements incessants d’Israël, selon MSF.

On estime à 1,7 million le nombre de personnes déplacées de force et confrontées à des blessures infectées ainsi qu’à des maladies. En effet, selon l’organisation, fournir des soins de santé devient «pratiquement impossible» à Gaza, où les installations médicales ne sont pas à l’abri des attaques militaires.

«Nos patients souffrent de blessures catastrophiques, d’amputations, de membres broyés et de brûlures graves», précise M. Lockyear.

«Ils ont besoin de soins spécialisés. Ils ont besoin d’une rééducation longue et intensive. Les médecins ne peuvent pas soigner ces blessures sur un champ de bataille ou sur les ruines des hôpitaux détruits. Nos chirurgiens n’ont même pas suffisamment de compresses pour empêcher leurs patients de saigner. Ils les utilisent une fois, extraient le sang, les lavent, les stérilisent et les réutilisent pour le patient suivant.»

«En raison de la crise humanitaire à Gaza, les femmes enceintes ne reçoivent plus de soins médicaux depuis des mois. Celles qui sont sur le point d’accoucher ne peuvent pas accéder aux salles fonctionnelles. Elles donnent naissance dans des tentes en plastique et des bâtiments publics.»

«Les équipes médicales utilisent désormais un nouveau sigle, WCNSF, qui signifie “Wounded Child, No Survivant Family” (“enfant blessé, sans famille survivante”).»

«Les enfants qui survivront à cette guerre porteront non seulement les blessures et les traumatismes apparents, mais aussi ceux, invisibles, des déplacements répétés, de la peur permanente et de la possibilité de voir leurs proches littéralement démembrés sous leurs yeux. Ces blessures psychologiques incitent des enfants à nous avouer, dès l’âge de 5 ans, qu’ils préféreraient mourir.»

Le 20 février, l’épouse et la belle-fille d’un membre du personnel de MSF ont été tuées et six autres personnes blessées lorsqu’un char israélien a tiré sur un abri du personnel de l’ONG clairement identifié dans le village d’Al-Mawasi, à Khan Younès.

Depuis le début de la guerre à Gaza, les équipes médicales et les patients de MSF ont été contraints d’évacuer neuf établissements de santé différents dans la bande de Gaza. Cinq employés de l’ONG ont été tués. Les efforts d’aide déployés aujourd’hui par MSF sont «totalement insuffisants», s’alarme M. Lockyear.

Ce dernier ajoute: «Depuis cent trente-huit jours, nous sommes témoins des souffrances inimaginables de la population de Gaza. Depuis cent trente-huit jours, nous assistons à l’anéantissement systématique d’un système de santé que nous soutenons depuis des décennies. Nous avons vu nos patients et nos collègues tués et mutilés. Il s’agit d’une guerre qu’Israël mène contre l’ensemble de la population de la bande de Gaza; un châtiment collectif, une guerre sans règles, une guerre à tout prix.»

«Les lois et les principes dont nous dépendons collectivement pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire sont désormais érodés au point qu’ils perdent tout leur sens.»

«Aujourd’hui, la réponse humanitaire à Gaza est une illusion, une illusion commode qui perpétue le récit selon lequel cette guerre est menée conformément aux lois internationales. Les appels à l’aide humanitaire ont résonné tant de fois dans cette salle. Pourtant, à Gaza, nous en avons de moins en moins: moins d’espace, moins de médicaments, moins de nourriture, moins d’eau, moins de sécurité. Il est question de survie alors que nous sommes dépourvus du strict minimum.»

M. Lockyear précise que les attaques israéliennes contre le personnel et les établissements médicaux sont désormais devenues «trop familières».

«Les forces israéliennes ont attaqué nos convois, arrêté notre personnel, détruit nos véhicules au bulldozer. Les hôpitaux ont été bombardés», souligne-t-il.

«Ce type d’attaques est soit intentionnel, soit un signe d’incompétence irresponsable. Au moment où je vous parle, nos collègues de Gaza redoutent d’être punis à leur tour.»

M. Lockyear craint que le droit humanitaire international soit jeté aux oubliettes, ce qui «entraînerait des répercussions bien au-delà de Gaza. Ce sera un fardeau permanent pour notre conscience collective. Il ne s’agit pas simplement d’inaction politique, mais de complicité politique».

Le responsable humanitaire a exigé du Conseil de sécurité «les protections promises par le droit international humanitaire» et un cessez-le-feu des deux côtés.

M. Lockyear demande aux membres du conseil: «Nous exigeons l’espace nécessaire pour transformer l’illusion du soutien en une aide significative. Que feriez-vous pour que cela se produise?»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le président syrien à la Maison Blanche le 10 novembre

Le président syrien Ahmad al-Chareh rencontrera le président Trump à la Maison Blanche lundi. (Reuters/Archives)
Le président syrien Ahmad al-Chareh rencontrera le président Trump à la Maison Blanche lundi. (Reuters/Archives)
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  • Le président syrien Ahmad al-Chareh sera reçu lundi à la Maison-Blanche par Donald Trump, une première historique qui s’inscrit dans les efforts américains pour la paix mondiale
  • Les discussions porteront sur la levée des sanctions, la lutte contre l’État islamique et la reconstruction de la Syrie, après plus de 14 ans de guerre

WASHINGTON: La porte-parole de la Maison Blanche Karoline Leavitt a indiqué mardi que le président syrien Ahmad al-Chareh serait reçu lundi à la Maison Blanche par Donald Trump.

Il sera le premier chef d'Etat syrien à faire cette visite, qui "fait partie des efforts" du président américain "pour la paix dans le monde", a déclaré la porte-parole pendant une conférence de presse.

Elle a rappelé que Donald Trump, pendant un voyage dans le Golfe en mai, avait annoncé la levée des sanctions américaines contre la Syrie, un sujet qui figurera très haut sur l'ordre du jour de la réunion lundi.

Karoline Leavitt a par ailleurs jugé que la Syrie avait fait "des progrès" sur la voie de la paix avec ce nouveau dirigeant.

Ce sera la deuxième visite aux Etats-Unis d'Ahmad al-Chareh après son passage en septembre à l'ONU à New York, où cet ancien jihadiste est devenu le premier président syrien depuis 1967 à s'adresser à l'Assemblée générale.

Selon le ministre syrien des Affaires étrangères Assaad al-Chaibani, la discussion avec Donald Trump portera aussi sur la lutte contre le groupe Etat islamique et sur la reconstruction en Syrie, après plus de 14 ans de guerre.

Le président américain avait dressé en mai un portrait élogieux d'Ahmad al-Chareh, parlant d'un "gars costaud" et assurant que leur première rencontre, qui a eu lieu en Arabie saoudite, s'était "très bien passée".

Il l'avait pressé à l'époque de rejoindre les accords d'Abraham, une initiative diplomatique dont Donald Trump est particulièrement fier, et qui avait vu plusieurs pays arabes reconnaître Israël en 2020.


Soudan: le ministre de la Défense affirme que la guerre va continuer

Des Soudanais déplacés blessés qui ont fui les violences à El-Fasher sont soignés dans une clinique de fortune gérée par Médecins Sans Frontières (MSF), alors que les affrontements entre la RSF et l'armée soudanaise se poursuivent à Tawila, dans le nord du Darfour. (Reurters)
Des Soudanais déplacés blessés qui ont fui les violences à El-Fasher sont soignés dans une clinique de fortune gérée par Médecins Sans Frontières (MSF), alors que les affrontements entre la RSF et l'armée soudanaise se poursuivent à Tawila, dans le nord du Darfour. (Reurters)
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  • Le ministre soudanais de la Défense, Hassan Kabroun, a annoncé la poursuite de la guerre contre les paramilitaires des FSR, malgré une proposition américaine de cessez-le-feu
  • Depuis la chute d’El-Facher, des exactions massives sont rapportées, tandis que l’aide humanitaire reste bloquée

PORT-SOUDAN: Le ministre soudanais de la Défense a affirmé mardi que la guerre contre les paramilitaires allait continuer, après une réunion gouvernementale qui a discuté d'une proposition américaine de cessez-le-feu.

"Les préparatifs pour la bataille du peuple soudanais sont en cours", a déclaré le ministre, Hassan Kabroun, dans un discours télévisé.

"Nous remercions l'administration Trump pour ses efforts et ses propositions afin de parvenir à la paix", a-t-il dit, tous en affirmant que la guerre était "un droit national légitime".

Aucun détail sur la proposition américaine n'a été rendu public.

Le gouvernement américain "est tout à fait impliqué" pour tenter de trouver une issue "pacifique" au conflit qui ravage le Soudan, a assuré mardi la porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt, tout en reconnaissant que "la situation sur le terrain est très compliquée".

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée du général Abdel Fattah Al-Burhane à son ancien allié Mohamed Hamdane Daglo, chef des Forces de soutien rapide (FSR) qui ont pris le 26 octobre El-Facher, dernière ville de la vaste région du Darfour, dans l'ouest, qui échappait à leur contrôle.

Les combats se concentrent désormais sur la région voisine du Kordofan, dans le centre du Soudan, où l'ONU a fait état d'exactions et de déplacements massifs de population ces derniers jours.

- "Incontrôlable" -

Mardi, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a exhorté les belligérants à "venir à la table des négociations" et "mettre fin à ce cauchemar de violence, dès maintenant".

"La crise terrifiante au Soudan (...) est en train de devenir incontrôlable", a-t-il prévenu, alors que le Conseil de défense et de sécurité présidé par le général Burhane s'est réuni dans la journée pour étudier une proposition américaine de trêve.

L'émissaire américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a mené ces derniers jours des entretiens au Caire dans le but de finaliser une proposition de trêve humanitaire formulée mi-septembre sous son égide par un groupe de médiateurs incluant l'Egypte, l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis.

Le groupe de médiation, dit du Quad, travaille sur un plan global de paix pour le Soudan, mais ses dernières propositions, présentées mi-septembre à Washington, sont restées lettre morte. Jusqu'à présent, le général Burhane a accueilli négativement ce plan prévoyant à la fois son exclusion et celle des FSR de la transition politique post-conflit.

- "Ne tuez pas les enfants" -

Depuis la chute d'El-Facher, après 18 mois de siège par les paramilitaires, les informations et les témoignages se multiplient sur les exécutions, les pillages, les viols, les attaques contre des humanitaires, documentés par des images satellite et par des vidéos publiées par les combattants eux-mêmes.

Le général Burhane a affirmé sa volonté de "se venger" de la prise de cette grande ville, tandis que le chef des FSR s'est dit déterminé à poursuivre les conquêtes sur le terrain.

Mardi, la représentante de l'ONU en charge des questions humanitaires, Denise Brown, a déploré que la ville d'El-Facher reste "barricadée" et fermée à l'aide humanitaire.

"La livraison d'aide de survie cruciale reste bloquée par les FSR contrairement à leurs obligations à l'égard des lois internationales", a-t-elle déclaré.

Près de 71.000 civils ont fui la ville depuis sa prise par les FSR, certains ayant trouvé refuge à Tawila, à environ 70 km à l'ouest.

"Ne tuez pas les enfants, ne tuez pas les femmes", pouvait-on lire en arabe sur une pancarte écrite à la main lors d'une manifestation lundi d'enfants à Khartoum, la capitale du pays sous contrôle de l'armée.

Le conflit, qui a fait des dizaines de milliers de morts et près de 12 millions de déplacés, selon l'ONU, se joue sur fond de rivalités régionales.

Les FSR ont reçu armes et drones des Emirats arabes unis, d'après des rapports de l'ONU, tandis que l'armée bénéficie de l'appui de l'Egypte, de l'Arabie saoudite, de l'Iran et de la Turquie, selon des observateurs. Tous nient leur implication.


Le chef de l'ONU appelle à mettre fin au «cauchemar de la violence» au Soudan

Des abris érigés par des Soudanais déplacés qui ont fui El-Fasher après la chute de la ville aux mains des Forces de soutien rapide (RSF) composent le camp d'Um Yanqur, situé à la limite sud-ouest de Tawila, dans la région du Darfour occidental, déchirée par la guerre, au Soudan, le 3 novembre 2025. (AFP)
Des abris érigés par des Soudanais déplacés qui ont fui El-Fasher après la chute de la ville aux mains des Forces de soutien rapide (RSF) composent le camp d'Um Yanqur, situé à la limite sud-ouest de Tawila, dans la région du Darfour occidental, déchirée par la guerre, au Soudan, le 3 novembre 2025. (AFP)
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  • Antonio Guterres appelle à des négociations immédiates pour mettre fin au conflit au Soudan, avertissant que la crise humanitaire et sécuritaire devient « incontrôlable » après deux ans de guerre entre l’armée et les Forces de soutien rapide (FSR)
  • La situation à El-Facher, au Darfour, illustre la gravité du drame, avec des civils pris au piège, des milliers de morts, des violations massives des droits humains et près de 12 millions de déplacés selon l’ONU

DOHA: Le patron de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé mardi à des "négociations" pour un arrêt immédiat du conflit au Soudan, mettant en garde contre une crise "en train de devenir incontrôlable".

Le secrétaire général des Nations unies a exhorté les parties au conflit à "venir à la table des négociations, (et) mettre fin à ce cauchemar de violence, maintenant".

"La crise horrifiante au Soudan (...) est en train de devenir incontrôlable", a-t-il dit lors d'une conférence de presse en marge du deuxième sommet mondial pour le développement social à Doha.

Le conflit entre l'armée et les paramilitaires dure depuis deux ans et a fait des dizaines de milliers de morts, déplacé près de 12 millions de personnes et provoqué la pire crise humanitaire au monde, selon l'ONU.

Le 26 octobre, après 18 mois de siège, les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) ont pris la ville d'El-Facher, dernier verrou stratégique de l'armée au Darfour (ouest du Soudan).

Depuis, les informations et témoignages se multiplient sur les cas d'exécutions, viols, attaques contre des humanitaires et pillages qui y sont commis, documentés par des images satellites et par des vidéos d'exactions publiées par les combattants eux-même.

"El-Facher et les zones environnantes du Nord-Darfour ont été un épicentre de souffrance, de faim, de violence et de déplacements" a souligné M.Guterres, ajoutant que depuis l'entrée des FSR dans la ville, "la situation s'aggrave de jour en jour".

"Des centaines de milliers de civils sont pris au piège par ce siège. Les gens meurent de malnutrition, de maladie et de violence. Et nous continuons à entendre des rapports sur des violations du droit international humanitaire et des droits de l'homme", a affirmé M.Guterres.