Frankly Speaking: quel espoir pour les enfants de Gaza?

Lors de son passage – par liaison vidéo de Rafah, à la frontière entre Gaza et l'Égypte – à Frankly Speaking, l'émission d'actualité d’Arab News, M. Elder a déclaré que l'ouverture de plusieurs points d'entrée et l'acheminement d'une aide suffisante permettraient de sauver les plus vulnérables. Un enfant de moins de 2 ans sur trois souffre de malnutrition aiguë dans le nord de la bande de Gaza. (Photo, AN)
Lors de son passage – par liaison vidéo de Rafah, à la frontière entre Gaza et l'Égypte – à Frankly Speaking, l'émission d'actualité d’Arab News, M. Elder a déclaré que l'ouverture de plusieurs points d'entrée et l'acheminement d'une aide suffisante permettraient de sauver les plus vulnérables. Un enfant de moins de 2 ans sur trois souffre de malnutrition aiguë dans le nord de la bande de Gaza. (Photo, AN)
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Publié le Mardi 02 avril 2024

Frankly Speaking: quel espoir pour les enfants de Gaza?

  • Le porte-parole de l'Unicef a déclaré que la prévention de la famine à Gaza dépendait d'un cessez-le-feu immédiat et d'un accès illimité à l'aide humanitaire
  • James Elder a qualifié l'Unrwa de «colonne vertébrale» de l'aide humanitaire à Gaza et il a affirmé qu'aucune autre agence ne pouvait la remplacer

DUBAÏ: Y a-t-il un espoir pour les enfants de Gaza avec le conflit actuel entre Israël et le Hamas, les restrictions d'accès à l'aide et la famine qui menace le nord de l'enclave?

Selon James Elder, porte-parole du Fonds des nations unies pour l'enfance (Unicef), qui a récemment parcouru la bande de Gaza, seul un cessez-le-feu immédiat peut redresser la situation humanitaire.

Lors de son passage – par liaison vidéo de Rafah, à la frontière entre Gaza et l'Égypte – à Frankly Speaking, l'émission d'actualité d’Arab News, M. Elder a déclaré que l'ouverture de plusieurs points d'entrée et l'acheminement d'une aide suffisante permettraient de sauver les plus vulnérables. Un enfant de moins de 2 ans sur trois souffre de malnutrition aiguë dans le nord de la bande de Gaza.

«L'Unicef a la capacité d'étendre son action, d'acheminer de l'aide dans une zone donnée», a indiqué M. Elder à Katie Jensen, animatrice de l'émission Frankly Speaking.

«Nous disposons au Danemark de la plus grande plate-forme d'approvisionnement humanitaire du monde. Nous effectuons des transports par avion, par bateau; nous faisons tout. Nous disposons également d’entrepôts dans la région. De nombreux entrepôts sont constamment prêts à acheminer l'aide.»

Cependant, tant qu'Israël ne lèvera pas ses restrictions sur la quantité d'aide autorisée à entrer dans l'enclave assiégée, permettant ainsi à l'Unicef et à d'autres agences humanitaires d'apporter une aide indispensable, beaucoup craignent que l'extrême insécurité alimentaire déjà endurée par les Palestiniens ne dégénère en une véritable famine.

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Lors de son passage – par liaison vidéo de Rafah, à la frontière entre Gaza et l'Égypte – à Frankly Speaking, l'émission d'actualité d’Arab News, M. Elder a déclaré que l'ouverture de plusieurs points d'entrée et l'acheminement d'une aide suffisante permettraient de sauver les plus vulnérables. Un enfant de moins de 2 ans sur trois souffre de malnutrition aiguë dans le nord de la bande de Gaza. (Photo, AN)

Dans ce long entretien, M. Elder a décrit le rôle irremplaçable joué dans la réponse humanitaire par l'Office de secours et de travaux des nations unies (Unrwa), à court d'argent. Il a en outre souligné les obligations non respectées d'Israël en vertu du droit international pour permettre l'entrée d'une aide suffisante à Gaza.

M. Elder a également évoqué «l'anéantissement» des villes de Gaza et les menaces qui pèsent sur les travailleurs de l'ONU ainsi que sur les bénéficiaires de l'aide dans le cadre des combats. Ces derniers ont fait du territoire palestinien «l'endroit potentiellement le plus dangereux de la planète».

Un rapport soutenu par les Nations unies et publié au mois de mars a averti que si les hostilités ne cessaient pas et que si l'aide n'était pas autorisée à entrer sans restriction dans la bande de Gaza, la famine pourrait survenir d'ici à la fin du mois de mai. Le rapport indique que 70% des 2,3 millions d'habitants de Gaza connaissent des niveaux catastrophiques de faim et d'insécurité alimentaire.

La Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye a prévenu jeudi que «la famine est en train de s'installer» en raison des restrictions continues imposées par Israël à l'acheminement de l'aide.

Dans un arrêt unanime, la plus haute juridiction des Nations unies a ordonné à Israël de prendre «toutes les mesures nécessaires et efficaces» pour garantir que les denrées alimentaires de base parviennent sans délai au peuple palestinien.

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Des travailleurs de l'ONU préparent une aide alimentaire humanitaire dans un entrepôt/centre de distribution de l'UNRWA à Rafah pour la distribution aux réfugiés palestiniens, dans un contexte de combats incessants entre Israël et le groupe militant palestinien Hamas. L’entrepôt a été partiellement touché par une frappe israélienne le 13 mars 2024. (AFP)

S'il est possible de sauver la population de Gaza de la famine, il faudra plus de temps pour s'attaquer à des problèmes tels que les maladies, la dévastation du système de santé, des hôpitaux, des systèmes d'approvisionnement en eau et des égouts, a fait savoir M. Elder.

Depuis qu'Israël a lancé son opération à Gaza en représailles à l'attaque menée par le Hamas le 7 octobre, l'enclave est devenue un cimetière pour au moins 13 000 enfants, selon les chiffres de l'ONU.

La malnutrition aiguë touche désormais 31% des enfants de moins de 2 ans dans les gouvernorats du nord, tandis qu'au moins 23 enfants sont déjà morts de faim et de déshydratation.

La création de ces conditions pourrait constituer un crime de guerre, a déclaré jeudi à la BBC Volker Türk, le responsable des droits de l'homme des Nations unies, ajoutant qu'il était «plausible» qu'Israël utilise la famine comme arme de guerre dans la bande de Gaza.

«Le droit humanitaire international est très clair sur les proportions et sur ce que les factions en guerre peuvent faire. Nous avons vu tant de violations dans cette guerre, et le sujet des enfants ne semble pas faire de différence à l'heure actuelle. Les enfants ne comprennent pas si le droit international est respecté ou non», a affirmé M. Volker.

«Pour l'instant, tout ce qu'ils font, c'est affronter la gravité d'une situation qu'aucun enfant ne devrait jamais, au grand jamais, avoir à subir.»

Au cours des premiers mois du conflit, l'essentiel de la distribution de l'aide et du travail de secours a été effectué par l'Unrwa, qui soutient les réfugiés palestiniens à Gaza, en Cisjordanie, en Jordanie, en Syrie et au Liban depuis 1949.

En janvier, plus d'une douzaine de pays ont suspendu le financement de l'Unrwa après qu'Israël a affirmé que 12 membres du personnel de l'agence des Nations unies avaient participé à l'attaque du 7 octobre, tandis que 450 autres étaient des «agents militaires de groupes terroristes».

Bien qu'une enquête interne et une autre, indépendante, aient été lancées pour examiner ces allégations, la plus grande partie du financement de l'Unrwa n'a toujours pas été rétablie, ce qui met ses opérations à Gaza au bord de l'effondrement.

M. Elder a précisé que l'Unicef et d'autres agences d'aide n'étaient pas en mesure d'assumer les responsabilités de l'Unrwa en cas de faillite.

«L'Unrwa est l'épine dorsale de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza», a-t-il précisé. «Il compte des milliers et des milliers de travailleurs très courageux, d'enseignants, de médecins, de pharmaciens, d'infirmières, entre autres.»

«L'Unicef s'est spécialisé dans la protection de l'enfance, la nutrition, etc., mais la population de Gaza a besoin de l'Unrwa pour disposer d'une main-d'œuvre complète dans toute la bande de Gaza.»

«Cinquante pour cent de l'aide alimentaire apportée aux civils dans le nord était fournie par l'Unrwa. Cette aide est désormais bloquée. C'est une catastrophe accélérée», a-t-il ajouté.

La bande de Gaza est devenue un endroit extrêmement dangereux pour les organisations humanitaires.

«Des gens ont été tués en recevant de l'aide, des travailleurs humanitaires aussi. Plus de travailleurs humanitaires, plus de mes collègues des Nations unies ont été tués dans cette guerre qu'à n'importe quel moment depuis les débuts de l’organisation. Telle est la réalité à laquelle les gens sont confrontés», a déploré M. Elder.

«Les Nations unies travaillent dans des endroits très dangereux. L'Afghanistan, le Soudan, l'Ukraine, ici, à Gaza. Mais nous devons être très clairs. Le droit international humanitaire est sans équivoque. Israël a l'obligation légale de faciliter l'acheminement de l'aide, non seulement en la faisant entrer, mais aussi en veillant à ce qu'elle soit distribuée en toute sécurité à ceux qui en ont le plus besoin.»

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Des travailleurs de l'ONU préparent une aide alimentaire humanitaire dans un entrepôt/centre de distribution de l'UNRWA à Rafah pour la distribution aux réfugiés palestiniens, dans un contexte de combats incessants entre Israël et le groupe militant palestinien Hamas. L’entrepôt a été partiellement touché par une frappe israélienne le 13 mars 2024. (AFP)

Au cours de son voyage le long de la bande de Gaza, M. Elder a été consterné par l'ampleur de la catastrophe humanitaire. Alors qu'il traversait le poste-frontière de Rafah en venant d'Égypte, il a vu «des centaines de camions bloqués avec de l'aide vitale du mauvais côté de la frontière».

«Nous sommes loin de recevoir suffisamment d'aide», a-t-il ajouté.

Plus tard, lors de sa visite dans le nord de Gaza, il a vu «des gens qui s'accrochent à la vie, des enfants et des familles qui ont un besoin urgent de nourriture». Et pourtant, «il y a des points de passage qui pourraient être ouverts, d'anciens points de passage où l'aide serait acheminée en dix ou quinze minutes».

L'accès routier à Gaza étant limité par les forces israéliennes, les organisations humanitaires ont examiné les possibilités de créer un corridor maritime. À la mi-mars, l'Open Arms a quitté Chypre avec à son bord 200 tonnes de farine, de protéines et de riz à destination de Gaza.

«Toute aide est utile, mais le navire transportait l'équivalent d'environ 12 camions», a indiqué M. Elder. «De l'autre côté de la frontière, il y a 50 fois 12 camions.»

Les États-Unis, la Jordanie et l'Égypte cherchent également à contourner le problème de l'accès à l'aide en procédant à des parachutages d'aide dans la bande de Gaza.

Toutefois, les parachutages sont généralement utilisés «lorsque les populations sont massivement coupées de l'aide humanitaire – lors d'une inondation ou d'une catastrophe naturelle», a expliqué M. Elder. «Ici, ils ne sont pas isolés. Il y a un réseau routier. La route est le moyen le plus efficace. C'est grâce aux routes qu'un cessez-le-feu permettra d'éviter cette catastrophe humanitaire.»

Le 25 mars, le Conseil de sécurité des nations unies a adopté une résolution qui exige un cessez-le-feu immédiat à Gaza pour le mois sacré du ramadan, qui se termine dans moins de quinze jours.

M. Elder a déclaré que la résolution devait être «substantielle, et non symbolique», car un cessez-le-feu «permet aux Nations unies d'inonder la bande de Gaza d'aide humanitaire et nous pouvons renverser cette famine imminente».

Un cessez-le-feu, a ajouté M. Elder, permettrait également à Israël de rapatrier ses citoyens retenus en otage à Gaza depuis le 7 octobre. «Il y a des enfants ici, quelque part dans les souterrains ou ailleurs, qui endurent des supplices épouvantables», a-t-il déclaré. «Mettez fin aux tourments, ramenez les otages chez eux.»

Il a ajouté: «Un cessez-le-feu signifie que les familles – une mère et un enfant – peuvent aller se coucher avec la certitude absolue qu'ils se réveilleront. Ils n'ont pas eu cette certitude depuis de nombreux mois.»

En novembre et décembre de l'année dernière, M. Elder a fait savoir qu’il avait visité l'hôpital Al-Nasr, à Khan Younès, où les «incroyables» travailleurs de la santé «faisaient des gardes de vingt-quatre à trente-six heures dans une zone de guerre».

«Ils faisaient ce travail qu’ils aimaient et pour lequel ils étaient nés, comme certains l'avaient dit, mais ils étaient terrifiés parce que leurs familles étaient à l'extérieur.»

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Des Palestiniens inspectent le site d'une frappe israélienne sur une maison à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 29 mars 2024. (Reuters)

De retour à Khan Younès ces derniers jours, M. Elder a affirmé: «J'ai traversé la ville et elle est tout simplement anéantie. Dans chaque rue, il y a des décombres partout. Je n'avais jamais vu un tel niveau de dévastation, ce qui m'a fait penser à Rafah et à la raison pour laquelle nous ne pouvons pas voir cela se produire ici.»

Aujourd'hui, c'est comme si Khan Younès et Gaza City n'existaient plus. «Il n'y a que des décombres et de l'acier à perte de vue ainsi que des gens qui ont l'air stupéfaits, car les maisons ont été détruites les unes après les autres», a-t-il déploré.

Rafah, quant à elle, «est une ville de tentes. C'est une ville d'enfants. C'est ici que les familles étaient censées se rendre pour rester en sécurité. Il y a du désespoir ici, mais il y a aussi de la solidarité. Les gens font ce qu'ils peuvent pour les autres».

M. Elder a ajouté: «Je me suis rendu dans toute la bande de Gaza. Dans le nord, il y a un niveau de souffrance que les mots ne suffisent pas à décrire; on en arrive au stade où on voit des enfants mourir de malnutrition, de déshydratation.»

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Une personne endeuillée porte le corps d'un enfant palestinien tué lors d'une frappe israélienne à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 29 mars 2024. (Reuters)

«Vous voyez des parents en larmes devant le berceau d'un enfant, un enfant maigre comme du papier. C'est une mère qui a fait tout ce qu'elle pouvait pour protéger son enfant de ces bombardements incessants. Désormais, elle essaie de protéger son enfant de la famine.»

«Ces mères et ces pères apprennent que les vraies décisions relatives à la sécurité de leurs enfants sont prises par d'autres personnes. Il y a donc un niveau de stress et d'anxiété dans l’ensemble de la bande de Gaza».

M. Elder a fait savoir que la situation à Gaza témoignait «du traumatisme mental de plus d'un million d'enfants».

«Comme me l'a dit un psychologue pour enfants, nous sommes en territoire inconnu en ce qui concerne la santé mentale des filles et des garçons de Gaza.»

Ce texte est la traduction d’un papier paru sur Arabnews.com


Le forum de Riyad examine le rôle de la traduction dans la promotion de l'identité saoudienne

L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
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  • La conférence vise à contribuer à un objectif clé de la Vision 2030 du Royaume, à savoir la promotion des valeurs islamiques et de l'identité nationale, en encourageant les Saoudiens à traduire ces concepts dans d'autres langues et cultures
  • Le rôle de la traduction dans la promotion d'une image positive du Royaume sera également discuté, ainsi que la promotion de la reconnaissance internationale et la mise en évidence de l'impact culturel du Royaume

RIYAD : Le Collège des langues de l'Université Princesse Noura bent Abdelrahman de Riyad accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ».

L'événement, dont le slogan est « Nous traduisons notre identité », aura lieu au département des conférences et des séminaires et est parrainé par le ministre saoudien de l'Éducation, Yousef Al-Benyan.

Il se concentrera sur le partage du patrimoine culturel, historique, littéraire et intellectuel du Royaume avec un public mondial, a rapporté l'agence de presse saoudienne.


L'interminable attente des proches de jeunes migrants tunisiens perdus en mer

El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
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  • Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants
  • Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans

EL HENCHA: La plupart avaient gardé le secret: une quarantaine de migrants tunisiens, très jeunes, ont embarqué clandestinement en janvier en quête du "paradis européen" et depuis plus de quatre mois, leurs proches désespèrent de recevoir des nouvelles des disparus.

Ils sont partis vraisemblablement de Sfax (centre), épicentre en Tunisie de l'émigration irrégulière vers l'Italie, la nuit du 10 au 11 janvier sur une mer démontée, selon les familles.

Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants à 40 kilomètres au nord de Sfax. Une mère et son bébé de quatre mois étaient aussi du voyage.

Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans, qui gagnait sa vie en conduisant la camionnette familiale de "louage" (taxi collectif).

"Il est sorti vers 22H00 avec son téléphone, sans rien dire à mes parents, sans vêtements de rechange ni sac, comme s'il allait retrouver ses amis", raconte à l'AFP cette ouvrière de 42 ans, qui souffre d'insomnies depuis.

Yousri, 22 ans, est aussi parti en cachette. "La majorité des jeunes n'ont pas informé leur famille, ils se sont débrouillés pour avoir un peu d'argent", confirme M. Henchi, son oncle instituteur.

Meftah Jalloul, poissonnier de 62 ans, savait lui "depuis un certain temps" que son fils Mohamed, 17 ans, "voulait migrer en Europe" et le lui avait déconseillé "mais c'est devenu une idée fixe".

La nuit fatidique, il a tenté d'empêcher son unique garçon de sortir, l'implorant d'attendre une meilleure météo, mais "il m'a embrassé sur la tête et il est parti", relate M. Jalloul.

«Désespérance»

Le commerçant culpabilise: "chaque jour, il créait des problèmes à la maison, il voulait de l'argent pour migrer. C'est moi qui lui ai donné l'argent, donc je suis responsable".

Les Tunisiens ont représenté la deuxième nationalité des migrants illégaux arrivés en Italie (17.304) en 2023, après les Guinéens, selon des statistiques officielles.

"Cette immigration irrégulière ne s'explique pas seulement par des motifs économiques et sociaux", analyse Romdhane Ben Amor, porte-parole de l'ONG FTDES. Il y a aussi "le facteur politique (le coup de force du président Kais Saied à l'été 2021, NDLR) et le sentiment de désespérance des Tunisiens qui ne croient pas dans l'avenir du pays".

Les disparus d'El Hencha, issus de la classe moyenne, pas particulièrement pauvres, partageaient cette "sensation d'horizon bouché".

Le frère d'Inès avait un travail mais "avec 20 dinars par jour (trois euros environ), une fois payé ses cigarettes, il disait qu'il ne pouvait pas faire de projets, ni construire une maison, ni se marier".

Mohamed l'instituteur pointe du doigt "les jeunes déjà en Italie qui publient sur les réseaux sociaux (...) leur quotidien". Les autres "voient ça et veulent changer leur avenir. Ils imaginent l'Europe comme un paradis", souligne-t-il. C'était, pense-t-il, le cas de Yousri qui travaillait dans un café internet pour 10/15 dinars par jour après avoir quitté le lycée avant le bac.

Meftah Jalloul était lui d'accord pour que son fils, également décrocheur scolaire, émigre, mais légalement et seulement après avoir fait une formation. "Il pouvait apprendre un métier: plombier, menuisier, mécanicien", souligne le père de famille.

Aujourd'hui, M. Jalloul lutte pour garder espoir.

«Temps très mauvais»

"Quatre mois se sont écoulés et je pleure mon fils. Ma famille et moi, nous sommes épuisés", dit-il en fondant en larmes.

Lui et d'autres familles se raccrochent à l'idée que l'embarcation aurait pu dériver vers la Libye voisine. Des contacts ont été pris, des recherches menées, en vain.

Inès Lafi et Mohamed Henchi redoutent le pire. Plus de 1.300 migrants sont morts ou ont disparu dans des naufrages l'an passé près des côtes tunisiennes, selon le FTDES.

"Le temps était très mauvais. Même les pêcheurs qui connaissent la mer sont rentrés, lui est sorti", explique Inès, furieuse contre le passeur, connu de tous pour son activité clandestine, qui n'est pas non plus revenu de cette dernière traversée.

Aux autorités, les familles demandent la poursuite des recherches et davantage d'opportunités à El Hencha.

"Il faut enrichir la zone industrielle avec d'autres unités de production, fournir des emplois aux jeunes", estime M. Henchi.

Il faudrait aussi, dit l'instituteur, "construire un état d'esprit différent" avec des programmes éducatifs pour donner envie de bâtir son avenir en Tunisie. Sinon les jeunes "se contentent d'un tour au café, d'un peu de ping-pong ou volley-ball".


Des progrès substantiels dans les négociations du Caire sur la trêve à Gaza

Un jeune garçon observe les parents de Palestiniens tués dans un bombardement israélien, pleurant près de leurs corps dans la cour de l'hôpital al-Najjar à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 3 mai 2024, dans le cadre du conflit actuel entre Israël et le mouvement Hamas. (AFP)
Un jeune garçon observe les parents de Palestiniens tués dans un bombardement israélien, pleurant près de leurs corps dans la cour de l'hôpital al-Najjar à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 3 mai 2024, dans le cadre du conflit actuel entre Israël et le mouvement Hamas. (AFP)
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  • La deuxième phase durera au moins six semaines, les deux parties acceptant de libérer un plus grand nombre d'otages et de prisonniers, et s'engageant également à un arrêt plus long des combats
  • Ahmed Moustafa, expert en sécurité et en politique, a déclaré à Arab News : « Selon mes informations, le Hamas a accepté la première phase de l'accord de cessez-le-feu à Gaza ».

LE CAIRE : Les pourparlers au Caire entre une délégation du Hamas et des médiateurs égyptiens ont fait des progrès substantiels vers un cessez-le-feu à Gaza, selon une source de haut rang.

Cette source, qui a préféré garder l'anonymat, a déclaré à la chaîne d'information du Caire que les représentants du Hamas et une délégation égyptienne, chargée de la sécurité, étaient parvenus à un consensus sur de nombreux points litigieux.

Quelques heures avant l'arrivée de la délégation du Hamas au Caire samedi, le général Abbas Kamel, chef de la direction des renseignements généraux égyptiens, a reçu un appel téléphonique du chef du mouvement, Ismail Haniyeh, concernant les négociations.

Ahmed Moustafa, expert en sécurité et en politique, a déclaré à Arab News : « Selon mes informations, le Hamas a accepté la première phase de l'accord de cessez-le-feu à Gaza ».

« Cela comprend la libération d'un certain nombre d'otages, avec l'assurance qu'Israël se retirera complètement de Gaza après 124 jours, à l'issue des trois étapes de l'accord majeur qui est coordonné ici au Caire ».

Moustafa a également déclaré que la délégation du Hamas au Caire devrait informer la partie égyptienne de son accord avec seulement des amendements mineurs.

« Je pense que le Hamas s'est mis d'accord sur certains termes avec les médiateurs égyptiens, et auparavant avec les médiateurs qataris sous les garanties américaines », a-t-il précisé.

Toutefois, Moustafa a indiqué que le refus d'Israël de mettre fin à la guerre à Gaza dans le cadre d'un accord sur les otages et sa détermination à éliminer ce qu'il reste du Hamas restent des « points de discorde majeurs ».

Selon Moustafa, un autre point de désaccord concerne l'autorisation de l'entrée dans l'enclave de matériaux à double usage, par exemple du matériel humanitaire qui pourrait également être utilisé à des fins de combat, tel le carburant.

Il a indiqué que la première phase, sur laquelle le Hamas « s'est provisoirement mis d'accord, durera jusqu'à 40 jours, au cours desquels 33 des plus de 100 otages israéliens détenus à Gaza depuis le 7 octobre seront libérés ».

La seconde phase durera au moins six semaines, les deux parties acceptant de libérer un plus grand nombre d'otages et de prisonniers et s'engageant également à interrompre plus longtemps les combats.

Aboud Jamal, chercheur en affaires palestiniennes, a déclaré à Arab News : « Le Hamas a annoncé vendredi soir que des accords avaient été conclus et qu'une délégation du mouvement se rendrait au Caire samedi pour obtenir un accord qui réponde aux exigences des Palestiniens ».

Jamal a ajouté : « Il est clair que les prochains jours devraient être marqués par un accord de cessez-le-feu et la libération de certains otages israéliens ».

« La seule question qui subsiste est celle de la position du gouvernement israélien, qui semble vouloir prolonger la guerre pour maintenir en place le gouvernement de (Benjamin) Netanyahou à la suite des récentes manifestations contre lui en Israël ».

Selon Jamal, le gouvernement israélien a tout intérêt à faire obstruction à tout accord.

« Ainsi, en envoyant sa délégation au Caire et en discutant de son acceptation des termes de l'accord potentiel par l'intermédiaire de médiateurs, le Hamas a devancé le gouvernement de Tel-Aviv, une initiative pour laquelle les dirigeants du mouvement doivent être félicités ».

Il a ajouté « qu’il semble que l'Égypte soit véritablement aux côtés du peuple palestinien et qu'elle soutienne la conclusion d'un accord garantissant un cessez-le-feu afin de sauver ce qui peut l'être de la vie des habitants de Gaza ».

« C'est ce qui ressort de la déclaration publiée par le Hamas avant que sa délégation de sécurité ne se rende au Caire, dans laquelle le chef du Hamas, Ismail Haniyeh, dit apprécier le rôle joué par l'Égypte ».

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com