Au Liban, le phosphore blanc utilisé par Israël touche les civils

Une photo prise du côté israélien de la frontière avec le Liban montre des obus explosant sur les collines autour du village d'Aita al-Shaab, au sud du Liban, le 8 décembre 2023, dans un contexte de tensions transfrontalières persistantes alors que les combats se poursuivent avec les militants du Hamas dans le sud de la bande de Gaza. (AFP)
Une photo prise du côté israélien de la frontière avec le Liban montre des obus explosant sur les collines autour du village d'Aita al-Shaab, au sud du Liban, le 8 décembre 2023, dans un contexte de tensions transfrontalières persistantes alors que les combats se poursuivent avec les militants du Hamas dans le sud de la bande de Gaza. (AFP)
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Publié le Mercredi 05 juin 2024

Au Liban, le phosphore blanc utilisé par Israël touche les civils

  • Les autorités libanaises accusent Israël d'utiliser des munitions au phosphore blanc qui portent atteinte aux civils et à l'environnement
  • Cette substance peut également être utilisée comme arme incendiaire et provoquer des incendies, de graves brûlures, des lésions respiratoires, des défaillances d'organes et même la mort

BEYROUTH: Mohammad Hammoud se trouvait chez lui avec sa femme dans le sud du Liban quand des bombardements israéliens ont visé leur village plus tôt cette année, différents de tous ceux qu'il a connus.

"Un incendie s'est déclaré devant la maison (...) Il y a eu une odeur étrange (...) on n'arrivait pas à respirer", dit le septuagénaire, joint au téléphone par l'AFP.

"Quand les secouristes sont arrivés, ils nous ont dit que c'était du phosphore", ajoute l'homme originaire de Houla, proche de la frontière avec Israël, qui a été hospitalisé.

Depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas le 7 octobre, le Hezbollah libanais échange régulièrement des tirs avec l'armée israélienne, en soutien à son allié palestinien.

Les autorités libanaises accusent Israël d'utiliser des munitions au phosphore blanc qui portent atteinte aux civils et à l'environnement.

Cette substance qui s'enflamme au contact de l'oxygène peut être utilisée pour créer des écrans de fumée et éclairer les champs de bataille.

Mais elle peut également être utilisée comme arme incendiaire et provoquer des incendies, de graves brûlures, des lésions respiratoires, des défaillances d'organes et même la mort.

"L'utilisation généralisée du phosphore blanc par Israël dans le sud du Liban met les civils en danger et contribue au déplacement de civils", a déclaré Human Rights Watch (HRW) dans un rapport publié mercredi.

L'ONG a indiqué avoir "vérifié l'utilisation de munitions au phosphore blanc par les forces israéliennes dans au moins 17 municipalités du sud du Liban depuis octobre", dont cinq où elles ont été "illégalement utilisées contre des zones résidentielles peuplées".

«Crime de guerre»

Des images de l'AFP prises à au moins dix reprises entre octobre et avril montrent d'étranges panaches de fumée en forme de poulpes, généralement associés au phosphore blanc.

Les images ont été prises à au moins huit endroits différents, plusieurs fois à proximité des habitations.

L'armée israélienne a déclaré en octobre que ses procédures exigent que les bombes au phosphore blanc "ne soient pas utilisées dans les zones densément peuplées, sauf certaines exceptions".

"Cela est conforme et va au-delà des exigences du droit international", a-t-elle déclaré dans un communiqué, ajoutant que l'armée "n'utilise pas de tels obus à des fins de ciblage ou d'incendie".

L'agence de presse officielle libanaise Ani a fait état à plusieurs reprises de bombardements israéliens au phosphore dans le sud du Liban, y compris ces derniers jours, provoquant parfois des incendies.

Elle a indiqué que le village de Houla avait subi un tel bombardement le 28 janvier, jour où Mohammad Hammoud et son épouse ont été admis dans un hôpital voisin.

L'hôpital a déclaré à l'AFP que quatre civils avaient été admis en soins intensifs pour "asphyxie et essoufflement sévère dus au phosphore blanc".

Le ministère libanais de la Santé a recensé 173 personnes souffrant d'une "exposition chimique due au phosphore blanc" depuis octobre, sans distinguer les civils des combattants.

Des médecins de trois autres hôpitaux du sud du Liban ont déclaré à l'AFP que leurs établissements avaient traité des personnes présentant des symptômes respiratoires dus à une exposition au phosphore blanc.

"L'utilisation du phosphore blanc dans des zones peuplées de civils peut (...) constituer une violation du droit international humanitaire", a affirmé à l'AFP Brian Castner, expert des questions militaires chez Amnesty International.

"Si des civils sont blessés ou tués, cela peut constituer un crime de guerre", a-t-il ajouté.

Plainte à l'ONU 

Des Casques bleus déployés dans le sud du Liban ont également détecté du phosphore blanc dans leurs locaux, a assuré à l'AFP un responsable de l'ONU, sous couvert d'anonymat.

Les combats transfrontaliers entre le Hezbollah et Israël ont fait plus de 450 morts au Liban selon un décompte de l'AFP, pour la plupart des combattants, mais aussi 88 civils, et provoqué l'exode de plus de 94.000 personnes.

Amnesty International a indiqué l'année dernière avoir "des preuves de l'utilisation illégale de phosphore blanc par Israël" dans le sud du Liban entre le 10 et le 16 octobre.

Elle avait en particulier estimé qu'une attaque le 16 octobre contre le village de Dhayra, qui a blessé au moins neuf civils, devait "faire l'objet d'une enquête en tant que crime de guerre".

En décembre, la Maison Blanche s'est dite préoccupée par des informations selon lesquelles Israël aurait utilisé du phosphore blanc fourni par les Etats-Unis lors d'attaques contre le Liban.

Beyrouth a déposé en octobre une plainte auprès des Nations Unies, accusant Israël d'avoir "mis en danger la vie d'un grand nombre de civils" en utilisant le phosphore blanc et d'avoir "provoqué une dégradation généralisée de l'environnement" en "brûlant des zones boisées libanaises".

L'utilisation de phosphore blanc a également suscité l'inquiétude des agriculteurs du sud du Liban dont les terres ont brûlé, certains craignant une potentielle contamination des sols et des cultures.

Tamara Elzein, secrétaire générale du Conseil National de la Recherche Scientifique (CNRS), a noté qu'il existe peu de documentation relative à l'impact des bombardements au phosphore blanc sur le sol.

Le CNRS prévoit un grand nombre de prélèvements scientifiques pour évaluer d'éventuelles contaminations mais "attend le cessez-le-feu pour envoyer notre équipe et faire cette évaluation", a-t-elle expliqué à l'AFP.


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
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  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
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  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.