Législatives en France: majorité absolue, coalition, blocage institutionnel... Les scénarios du 7 juillet

Pour le camp présidentiel, le Premier ministre sortant Gabriel Attal paraît le mieux placé pour rester en poste, mais M. Macron n'a pas confirmé cette hypothèse, prônant l'élargissement du bloc central. (AFP).
Pour le camp présidentiel, le Premier ministre sortant Gabriel Attal paraît le mieux placé pour rester en poste, mais M. Macron n'a pas confirmé cette hypothèse, prônant l'élargissement du bloc central. (AFP).
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Publié le Mercredi 19 juin 2024

Législatives en France: majorité absolue, coalition, blocage institutionnel... Les scénarios du 7 juillet

  • C'est l'hypothèse la plus claire d'un point de vue institutionnel: au soir du second tour, l'un des trois blocs - Rassemblement national (RN, extrême droite), gauche ou camp présidentiel - obtient une majorité absolue
  • Pour le camp présidentiel, le Premier ministre sortant Gabriel Attal paraît le mieux placé pour rester en poste, mais M. Macron n'a pas confirmé cette hypothèse, prônant l'élargissement du bloc central

PARIS: Majorité absolue ou relative ? Coalition gouvernementale ou blocage institutionnel ? Qui comme Premier ministre ? Le suspense plane en France sur les conséquences des élections législatives des 30 juin et 7 juillet, même si certains avancent déjà leurs pions sur les différents scénarios.

Majorité absolue

C'est l'hypothèse la plus claire d'un point de vue institutionnel: au soir du second tour, l'un des trois blocs - Rassemblement national (RN, extrême droite), gauche ou camp présidentiel - obtient une majorité absolue avec au moins 289 sièges à l'Assemblée nationale.

Une période de cohabitation pourrait alors s'ouvrir. En cas de succès, le parti d'extrême droite compte proposer Jordan Bardella comme Premier ministre, sans demander la démission du président Emmanuel Macron.

Pour le camp présidentiel, le Premier ministre sortant Gabriel Attal paraît le mieux placé pour rester en poste, mais M. Macron n'a pas confirmé cette hypothèse, prônant l'élargissement du bloc central.

A gauche, l'équation est plus complexe. Le Nouveau Front populaire (NFP) n'a arrêté ni le nom ni la méthode de désignation de son potentiel Premier ministre, rôle pris en 2022 par Jean-Luc Mélenchon, qui irrite aujourd'hui nombre de ses alliés.

Le parti La France insoumise (LFI) de ce dernier plaide pour une désignation par le groupe majoritaire au sein de cette alliance, alors que le patron des socialistes prône "un vote" des députés nouvellement élus, insoumis, socialistes, écologistes et communistes.

M. Macron, chargé constitutionnellement de nommer le futur Premier ministre, aura-t-il son mot à dire ? "Il est en théorie libre de choisir qui il veut. Mais l'expérience permet d'imaginer qu'il désignera le nom proposé par le parti majoritaire", explique la professeure de Droit public Anne Levade.

Majorité relative

Les calculs se compliquent sérieusement dans l'hypothèse où aucune force politique, comme c'est actuellement le cas depuis 2022, n'obtient de majorité absolue.

M. Bardella a clairement annoncé mardi soir sur la chaîne France 2 qu'il "refusera d'être nommé" Premier ministre sans majorité absolue à l'Assemblée.

"S'il y a une majorité relative, le Premier ministre ne peut pas agir", avait-il dit plus tôt.

Un tel gouvernement est en effet menacé en permanence par une motion de censure des oppositions, ce qui risque de contraindre le suivant à nouer des accords pour gouverner.

C'est l'objectif affiché par M. Macron lorsqu'il évoque une "fédération de projets", formule dégainée pour illustrer le changement de méthode de l'exécutif.

Jusque-là plutôt fermé à l'hypothèse d'une coalition, il s'y ouvre désormais clairement, en laissant 67 circonscriptions sans investir de candidat au nom de "l'arc républicain". "Ce n'est pas qui m'aime me suive, c'est la volonté de bâtir des consensus, de tisser des compromis", a-t-il expliqué.

En cas de majorité relative de l'alliance de gauche ou du RN, la donne pourrait être encore plus compliquée. "L'hypothèse d'un Premier ministre très marqué politiquement d'un côté ou de l'autre paraît la moins probable, car il peinerait à dégager une majorité claire", pointe Mme Levade.

Dès lors, "On peut tout imaginer", même "l'option d'un Premier ministre technicien ou d'union nationale, si le président l'estime susceptible de créer un accord pour gouverner".

Blocage ou coalition ?

Avec trois blocs potentiellement irréconciliables, le risque d'un blocage institutionnel, sans aucun Premier ministre en mesure de dégager une majorité, est clairement sur la table.

"Si le RN a une majorité relative, comment on gouverne ?", s'interroge un responsable du camp présidentiel. Pour un proche du président, cette hypothèse "obligera des gens à prendre leur responsabilité, à faire un accord de gouvernement".

De là à imaginer une grande coalition susceptible d'obtenir une majorité contre le RN ? Plusieurs sources macronistes y pensent, avec l'espoir de rallier la droite républicaine et une partie de la gauche, en tout cas certains socialistes.

"Cela dépendra beaucoup des équilibres du Nouveau Front populaire" à l'Assemblée, selon Mme Levade. "Chacun des acteurs aura la responsabilité de décider si le pays devient ingouvernable ou si un accord est possible".


«Bloquons tout»: des centaines d'actions mais pas de France à l'arrêt

Des mobilisations étudiantes ont été recensées à Paris, Rennes, Grenoble, Montpellier, Toulouse, Lyon, Mulhouse et Nice, selon l'Union étudiante et l'Unef. (AFP)
Des mobilisations étudiantes ont été recensées à Paris, Rennes, Grenoble, Montpellier, Toulouse, Lyon, Mulhouse et Nice, selon l'Union étudiante et l'Unef. (AFP)
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  • Pour la plupart, les actions se sont déroulées dans un calme relatif mais il y a eu quelques débordements comme sur la rocade de Rennes
  • Un peu partout sur le territoire, y compris à La Réunion, des actions ont été lancées mais sans atteindre des cibles stratégiques

PARIS: Lycées, routes... Des centaines de blocages ou de tentatives, rapidement contrés par des forces de l'ordre en nombre, ont essaimé mercredi en France, mais le mouvement "Bloquons tout" peine à mettre le pays à l'arrêt pour exiger une autre politique.

"Les manifs, ça sert à rien alors il faut bloquer. Contre les milliards donnés aux riches, le budget de la guerre qui double, et pour la retraite à 60 ans", a déclaré une jeune militante qui se fait appeler Camille, sur un barrage filtrant à l'entrée de Dijon, qui a provoqué un embouteillage monstre sous les yeux impuissants des policiers municipaux.

Pour la plupart, les actions se sont déroulées dans un calme relatif mais il y a eu quelques débordements comme sur la rocade de Rennes où un bus a été saccagé et incendié par des manifestants, a rapporté Star, le réseau de transports en commun de la ville.

Le ministre de l'Intérieur démissionnaire et président Les Républicains (LR) Bruno Retailleau a dénoncé cette action et a de nouveau accusé "la mouvance de l'extrême gauche" d'avoir "confisqué" cette mobilisation née sur les réseaux sociaux et soutenue par la gauche, de LFI au PS.

Visant La France Insoumise, il a condamné les députés qui ont "des mots d'ordre d'appel à l'insurrection, au soulèvement, ou bien à la violence". Il a opposé la "France du courage, celle de ces hommes et de ces femmes en bleu, et de l'autre côté, la France du sabotage en noir".

Une centaine de lycées perturbés 

En fin de matinée, près de 200 personnes avaient été arrêtées dont 159 en agglomération parisienne. Les gendarmes décomptaient 241 actions dans leur zone, rassemblant environ 10.000 manifestants.

Un peu partout sur le territoire, y compris à La Réunion, des actions ont été lancées mais sans atteindre des cibles stratégiques. Elles se sont heurtées le plus souvent à l'action préventive des forces de l'ordre, comme à Marseille, où, prépositionnées à l'avance, elles ont empêché 200 personnes d'accéder à l'autoroute venant de Toulon.

A la gare du Nord à Paris, la situation était tendue en fin de matinée avec les forces de l'ordre qui filtraient les entrées. Des manifestants assez jeunes arboraient des pancartes comme "le mépris déclenche la colère" tout en reprenant l'hymne des gilets jaunes "on est là, on est là, même si Macron ne veut pas nous, on est là !", a constaté l'AFP.

Une centaine de lycées étaient perturbés et 27 bloqués, selon le ministère de l'Education nationale, notamment à Paris, à Montpellier, Rennes et Lille.

"Bloquer notre lycée, c'est bloquer l'Education nationale, ça représente l'éducation comme la veut Macron", témoigne Lucia, 17 ans et en première au lycée Claude Monet dans le 13e.

Des mobilisations étudiantes ont été recensées à Paris, Rennes, Grenoble, Montpellier, Toulouse, Lyon, Mulhouse et Nice, selon l'Union étudiante et l'Unef.

Côté transports, la circulation des trains est coupée par des occupations de voies à Cherbourg et Valence, selon la SNCF qui a aussi mentionné une tentative d'intrusion dans la Gare du Nord à Paris et des "actes de malveillance". A Paris et en Ile-de-France, les transports en commun connaissent quelques perturbations, "conformes aux prévisions" selon les opérateurs de transport.

Le musée du Louvre à Paris a prévenu sur X qu'"en raison d'un mouvement social, certaines salles sont exceptionnellement fermées".

"Budget mal géré" 

Signe toutefois que les blocages restaient limités à la mi-journée: dans les raffineries TotalEnergies, où la CGT avait appelé à faire grève, la mobilisation était "très faible", selon un responsable syndical à l’AFP.

Ce mouvement horizontal, sans chef de file identifié, rappelle celui des Gilets jaunes, il y a sept ans, mais rassemble des personnes plus jeunes et plus politisées, selon une enquête de la fondation Jean Jaurès.

"Il y a un budget de l'Etat qui a été mal géré et on nous accuse d'être à l'origine de cette dette, et c'est à nous de travailler plus pour rembourser", a déclaré à l'AFP Juliette, travailleuse sociale à Clermont-Ferrand âgée de 30 ans, qui n'a "pas l'habitude" de manifester et n'est pas syndiquée.

Cette journée d'actions disparates est soutenu par certains syndicats. La CGT et Solidaires ont appelé à s'y joindre quand la CFDT et FO, notamment, ont préféré se concentrer sur la journée intersyndicale du 18.

La convergence des colères se fait aussi, partiellement, avec celle du monde agricole. La Confédération paysanne, 3e syndicat agricole français, a annoncé sa participation.

 


Lecornu prend ses fonctions et promet des «ruptures»

Sans y faire référence directement, M. Lecornu a affirmé  qu'il se fixait comme objectif de mettre fin "au décalage entre la vie politique du pays et la vie réelle" qui devient "préoccupant". (AFP)
Sans y faire référence directement, M. Lecornu a affirmé  qu'il se fixait comme objectif de mettre fin "au décalage entre la vie politique du pays et la vie réelle" qui devient "préoccupant". (AFP)
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  • "Il va falloir des ruptures, et pas que sur la forme, et pas que dans la méthode, des ruptures aussi sur le fond"
  • Pour la traduction concrète de ces "ruptures", M. Lecornu a indiqué qu'il s'exprimerait prochainement devant les Français après avoir lancé à partir de mercredi après-midi des consultations politiques puis syndicales

PARIS: Des "ruptures" dans "la méthode" mais aussi sur "le fond": pour sa première prise de parole depuis sa nomination mardi soir, le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu a lancé un message aux Français et aux oppositions mercredi lors de sa prise de fonctions afin de trouver un compromis permettant la formation d'un gouvernement et l'adoption d'un budget.

"Il va falloir des ruptures, et pas que sur la forme, et pas que dans la méthode, des ruptures aussi sur le fond", a déclaré M. Lecornu depuis le perron de Matignon lors d'une brève déclaration après la passation de pouvoirs avec François Bayrou, renversé lundi soir par les députés.

Pour la traduction concrète de ces "ruptures", M. Lecornu a indiqué qu'il s'exprimerait prochainement devant les Français après avoir lancé à partir de mercredi après-midi des consultations politiques puis syndicales.

La passation de pouvoir dans la cour de Matignon a lieu le jour même d'une mobilisation pour "bloquer" le pays, symbolisée sur les chaînes d'informations par les écrans divisés en deux, montrant à la fois le tapis rouge ministériel et les tensions dans les rues.

Sans y faire référence directement, M. Lecornu a affirmé  qu'il se fixait comme objectif de mettre fin "au décalage entre la vie politique du pays et la vie réelle" qui devient "préoccupant".

Sans majorité à l'Assemblée, il a promis d'être "plus créatif", "plus sérieux dans la manière de travailler avec nos oppositions". "On va y arriver (...), il n'y a pas de chemin impossible", a-t-il plaidé.

Quelques instants plus tôt, François Bayrou l'avait assuré que son "aide" lui était "acquise à tout instant" pour "rassembler" plus largement?

Troisième chef du gouvernement nommé depuis la dissolution de l'Assemblée, cinquième depuis le début du second quinquennat d'Emmanuel Macron, Sébastien Lecornu, 39 ans, est peu connu des Français malgré son long mandat aux Armées depuis 2022.

Des consultations... 

Première tâche confiée par le président Macron à ce fidèle compagnon venu de la droite, ministre de tous ses gouvernements depuis 2017: "Consulter" les forces politiques en vue de trouver des "accords" pour préserver la "stabilité institutionnelle" du pays, alors qu'il ne dispose à l'Assemblée nationale d'aucune majorité.

Il recevra dès 14H30 un prédécesseur devenu président du parti présidentiel Renaissance Gabriel Attal.

Un deuxième rendez-vous est prévu à 15H30 avec Les Républicains, ancien parti de M. Lecornu. Edouard Philippe, président de Horizons, sera reçu à 17H30.

Concernant les oppositions, le PS et les écologistes ont été contactés par Matignon et devraient être reçus dans un second temps.

Enfin, au Rassemblement national, deux proches de Marine Le Pen assuraient en fin de matinée n'avoir pas entendu parler d'une invitation.

La mission de Sébastien Lecornu est à haut risque dans un paysage politique éclaté et au vu des réactions très fraîches voire hostiles des oppositions à l'annonce de sa nomination.

... Pour quelles concessions ? 

Alors que le président de la République a invité sa fragile coalition du centre et de la droite à "travailler" avec le Parti socialiste pour "élargir" son assise, celui-ci a estimé qu'il prenait le "risque de la colère sociale légitime et du blocage institutionnel du pays" en nommant M. Lecornu.

Pour tenir, le futur gouvernement devra obtenir a minima une non-censure du PS, indispensable pour doter la France d'un budget pour 2026, dont la préparation vient de faire tomber le gouvernement sortant qui avait présenté un effort de 44 milliards d'euros.

"Sans justice sociale, fiscale et écologique, sans mesures pour le pouvoir d'achat, les mêmes causes provoqueront les mêmes effets", a prévenu le PS.

Selon un interlocuteur régulier de M. Macron, ce dernier pourrait cette fois accepter de réelles concessions aux socialistes, par exemple sur la taxation des plus riches, jusqu'ici un tabou pour lui.

Comme preuve de "changement de méthode", le patron du PS Olivier Faure a demandé mercredi qu'il s'engage à ne pas recourir à l'article 49.3 de la Constitution, utilisé pour faire adopter sans vote tous les budgets depuis 2022.

Le Rassemblement national et la France insoumise ont pour leur part dénoncé la proximité entre le président et son nouveau Premier ministre, promettant la censure faute de changement de cap politique. LFI compte d'ailleurs déposer une motion de censure spontanée dès la reprise de la session parlementaire.

A l'orée de discussions délicates, l'entourage de M. Lecornu loue le "calme" de l'ancien sénateur normand de 39 ans et son absence d'ambition présidentielle, un "négociateur" qui pu obtenir un "large consensus" sur la loi de programmation militaire.

 


Sébastien Lecornu prend ses marques à Matignon un jour de mobilisation

Sébastien Lecornu, réagit à son arrivée au sommet de la coalition des volontaires, au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
Sébastien Lecornu, réagit à son arrivée au sommet de la coalition des volontaires, au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
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  • Sébastien Lecornu prend ses fonctions comme Premier ministre, dans un climat de fortes tensions sociales et sans majorité parlementaire, avec pour mission urgente de nouer des accords politiques
  • Sa nomination, critiquée par les oppositions, intervient alors que des mobilisations contre le gouvernement se multiplient et que la gauche agite la menace d’une censure sans virage politique clair

PARIS: Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu, accueilli sévèrement par les oppositions, prend ses marques mercredi à Matignon le jour même d'une mobilisation pour "bloquer" le pays, avec pour mission de consulter les forces politiques avant de former un gouvernement.

Troisième chef du gouvernement nommé depuis la dissolution, cinquième depuis le début du second quinquennat d'Emmanuel Macron, Sébastien Lecornu, âgé de 39 ans, succède à François Bayrou, renversé lundi par l'Assemblée nationale. Celui-ci l'avait doublé en décembre en forçant sa nomination alors que l'ex-ministre des Armées était déjà pressenti à ce poste.

La passation de pouvoir entre les deux hommes a lieu à midi, le jour même d'une mobilisation pour "bloquer" le pays initiée par divers mouvements, dont l'ampleur reste indéterminée, avant une mobilisation syndicale le 18 septembre.

Ce sera l'occasion pour Sébastien Lecornu, homme politique discret inconnu du grand public, de se présenter aux Français.

Il a affirmé sur X mardi soir qu'il "mesurait leurs attentes" et qu'il "connaissait les difficultés" qu'ils rencontraient. "Nous sommes au travail, avec humilité, et nous allons tout faire pour y arriver".

Première tâche confiée par Emmanuel Macron à ce fidèle compagnon venu de la droite, ministre de tous ses gouvernements depuis 2017: "consulter" les forces politiques en vue de trouver des "accords" pour préserver la "stabilité institutionnelle" du pays, alors qu'il ne dispose à l'Assemblée nationale d'aucune majorité.

Le nouveau locataire de Matignon a déjà entamé ses consultations, selon un conseiller de l'exécutif.

Sa mission est à haut risque dans un paysage politique éclaté et au vu des réactions très fraîches voire hostiles des oppositions à l'annonce de sa nomination.

- "Colère sociale" -

Alors que le président de la République a invité sa fragile coalition du centre et de la droite à "travailler" avec le Parti socialiste pour "élargir" son assise, le mouvement d'Olivier Faure a estimé qu'il prenait le "risque de la colère sociale légitime et du blocage institutionnel du pays" en nommant M. Lecornu.

Pour tenir, le futur gouvernement devra obtenir a minima une non-censure du PS, indispensable pour doter la France d'un budget pour 2026, dont la préparation vient de faire tomber le gouvernement sortant qui avait présenté un effort de 44 milliards d'euros.

Selon un interlocuteur régulier d'Emmanuel Macron, ce dernier pourrait cette fois accepter de réelles concessions aux socialistes, par exemple sur la taxation des plus riches, jusqu'ici un tabou pour lui.

"Sans justice sociale, fiscale et écologique, sans mesures pour le pouvoir d'achat, les mêmes causes provoqueront les mêmes effets", a prévenu le PS qui proposait de nommer Olivier Faure à Matignon.

Le Rassemblement national et les Insoumis ont pour leur part dénoncé la proximité entre le président et son nouveau Premier ministre, promettant la censure faute de changement de cap politique.

"Le président tire la dernière cartouche du macronisme", a réagi Marine Le Pen, qui réclame une nouvelle dissolution, tandis que Jean-Luc Mélenchon dénonçait "une triste comédie de mépris du Parlement" en demandant une nouvelle fois le départ du président.

- "Calme" -

A l'inverse, l'ancien Premier ministre et candidat d'Horizons à la présidentielle Edouard Philippe a estimé que Sébastien Lecornu avait les "qualités" pour "discuter" et "trouver un accord" avec les autres partis.

Le président des Républicains (LR) et ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, qui réclamait une nomination rapide face aux risques de "débordements" des manifestations de mercredi, s'est dit lui aussi prêt à "trouver des accords" avec M. Lecornu.

A l'orée de discussions délicates, l'entourage de Sébastien Lecornu loue le "calme" de l'ancien sénateur normand et son absence d'ambition présidentielle, un "négociateur" qui a pu obtenir un "large consensus" sur la loi de programmation militaire.

Alors qu'il a été épinglé dans la presse pour un dîner avec Marine Le Pen, ses proches récusent toute connivence avec le parti à la flamme, soulignant que dans l'Eure, son département, quatre députés sur cinq "sont passés au RN".

Ce qui n'empêche pas le député LFI Eric Coquerel de le voir comme celui qui peut "aller chercher non pas du côté du PS mais du RN", en "surjouant" sur "l'économie de guerre" et les "intérêts vitaux de la France".

L'intéressé entend lui composer son gouvernement sur la base de "la défense de (l') indépendance" du pays, du "service des Français" et de "la stabilité politique".