La Palestine : d’un penalty à l’éveil des consciences

Des manifestants brandissent des drapeaux palestiniens et une pancarte sur laquelle on peut lire "La Palestine vivra" lors d'un rassemblement de soutien au "bateau de Gaza" sur la place de la République à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
Des manifestants brandissent des drapeaux palestiniens et une pancarte sur laquelle on peut lire "La Palestine vivra" lors d'un rassemblement de soutien au "bateau de Gaza" sur la place de la République à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
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Publié le Jeudi 12 juin 2025

La Palestine : d’un penalty à l’éveil des consciences

La Palestine : d’un penalty à l’éveil des consciences
  • La Palestine existait, qu’elle était active, et qu’elle portait son identité sportive, culturelle et politique à travers le monde. Aujourd’hui, elle revient sur la scène, luttant toujours pour son droit à exister, à vivre dans la dignité
  • Ce qui se passe à Gaza n’est plus un simple conflit — c’est un effondrement des valeurs humaines

La Palestine était à un cheveu d’atteindre les barrages asiatiques pour les qualifications de la Coupe du Monde 2026 — avant d’en être privée dans les toutes dernières secondes de son dernier match, suite à un penalty. À première vue, il ne s’agissait que d’un simple moment sportif. Mais en réalité, cet instant reflète l’histoire d’un peuple entier, qui endure depuis des décennies une souffrance imposée, non pas à cause de ses manquements, mais parce que l’équilibre du monde n’a jamais été juste envers lui.

Ce moment nous ramène à l’année 1934, lorsque la Palestine — sous son propre nom — affronta l’Égypte dans les qualifications pour la deuxième Coupe du Monde, organisée en Italie, plus d’une décennie avant la création d’Israël. Ce qu’il faut retenir, c’est que la Palestine existait, qu’elle était active, et qu’elle portait son identité sportive, culturelle et politique à travers le monde. Aujourd’hui, elle revient sur la scène, luttant toujours — non seulement pour des objectifs sportifs, mais pour son droit à exister, à vivre dans la dignité.

La cause palestinienne n’a jamais été confinée à un seul terrain ou une seule arène. C’est l’histoire d’un peuple expulsé de sa terre, d’une nation dont les droits ont été violés depuis longtemps, dans un contexte de partialité mondiale prolongée. Aujourd’hui, cette souffrance ne peut plus être réduite à des images ou à des bulletins d’information — elle appelle désormais une interpellation directe de la conscience humaine.

Ce qu’il faut retenir, c’est que la Palestine existait, qu’elle était active, et qu’elle portait son identité sportive, culturelle et politique à travers le monde. Aujourd’hui, elle revient sur la scène, luttant toujours — non seulement pour des objectifs sportifs, mais pour son droit à exister, à vivre dans la dignité.

                                                    Dya-Eddine Saïd Bamakhrama

La justice humaine exige aujourd’hui, avec urgence, une position honnête et impartiale de chaque être humain sur terre pour mettre fin à la guerre brutale et injuste à Gaza, ainsi qu’aux agressions et incursions répétées dans les villes de Cisjordanie. Peu importe le 7 octobre, qui a été utilisé par le gouvernement israélien actuel comme prétexte pour justifier des massacres de masse et des déplacements forcés dans une logique de nettoyage ethnique, ce qui se passe aujourd’hui dépasse toutes les limites de la logique et de l’humanité. Des dizaines de milliers d’innocents ont été tués, d’autres dizaines de milliers ont été blessés, déplacés ou déracinés, dans un tableau qui ne peut en aucun cas être justifié.

Ce qui se passe à Gaza n’est plus un simple conflit — c’est un effondrement des valeurs humaines, lorsque nous voyons les morts, les blessés, les assoiffés, les affamés — enfants et adultes, hommes et femmes — tous innocents et sans défense. Cela appelle à une fin immédiate et globale de cette guerre insensée, pour sauver les vies restantes et empêcher l’aggravation d’une tragédie dont les racines ne datent pas du 7 octobre, mais de plusieurs décennies de souffrances.

Dans ce contexte, certaines positions courageuses de dirigeants du monde arabe émergent, nous rappelant que la Palestine demeure au cœur de la conscience arabe et islamique. Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a affirmé, dans son discours aux invités officiels du Hajj, le soutien indéfectible du Royaume au droit du peuple palestinien, déclarant :

« Nous insistons sur le rôle de la communauté internationale pour mettre fin aux conséquences catastrophiques de cette agression, protéger les civils innocents et créer une nouvelle réalité dans laquelle la Palestine jouit de la paix, conformément aux résolutions de la légitimité internationale. »

De même, le président djiboutien Ismaïl Omar Guelleh a réitéré, dans son message à l’occasion de l’Aïd al-Adha, la position de principe ferme de Djibouti en soutien à la cause palestinienne, affirmant que ce soutien constitue un pilier de la politique étrangère djiboutienne, jusqu’à ce que le peuple palestinien obtienne son droit à l’autodétermination et à l’établissement de son État indépendant.

Ces deux positions ne sont pas isolées ; il en existe bien d’autres qui constituent un véritable appel à la conscience du monde. La Palestine ne demande pas la charité, ni une compassion éphémère — elle réclame ses droits légitimes, et une réponse fondée sur l’humanité avant la politique.

Du terrain au pupitre, du discours à la réalité, la Palestine demeure l’épreuve ultime de la conscience mondiale. Le monde saura-t-il la surmonter — ou écrira-t-il un nouveau chapitre de trahison ?

Aujourd’hui, la justice humaine exige la restitution des droits légitimes du peuple palestinien, la création de son État, et la fin d’une tragédie humanitaire sans équivalent dans l’histoire moderne.

Reconnaître les droits du peuple palestinien et la création de son État indépendant sur son territoire national, avec Jérusalem-Est pour capitale, est une exigence des consciences vivantes de l’humanité. Vivre en paix au Moyen-Orient, atteindre le développement, la sécurité et la dignité pour tous les peuples sans exception — y compris les Palestiniens et les Israéliens — est une exigence de la conscience humaine vivante. Et cela ne peut être atteint que par une paix juste, globale et durable.

Reconnaître les droits du peuple palestinien et la création de son État indépendant sur son territoire national, avec Jérusalem-Est pour capitale, est une exigence des consciences vivantes de l’humanité.

                                                    Dya-Eddine Saïd Bamakhrama

Les Arabes ont proposé de nombreuses initiatives pour mettre fin au conflit au Moyen-Orient — la plus récente étant l’Initiative de paix arabe, fondée sur le principe de la terre contre la paix et la reconnaissance mutuelle. Cette initiative, à l’origine saoudienne, a été unanimement soutenue par le monde arabe et approuvée par l’Organisation de la coopération islamique, la deuxième plus grande organisation internationale au monde. Pourtant, Israël n’a jamais engagé de dialogue sérieux autour de cette initiative, ni proposé d’alternative.

C’est pourquoi, aujourd’hui, nous en appelons à la conscience vivante de l’humanité : n’attendez pas pour soutenir les projets de paix et de justice, avant qu’il ne soit trop tard. La reconnaissance de l’État palestinien et la solution à deux États — aujourd’hui, pas demain — est une voie urgente pour raviver la conscience humaine.

Un penalty décisif pour clore le conflit et inaugurer une nouvelle ère de paix — portée par l’éveil d’une conscience mondiale juste.

 

Dya-Eddine Saïd Bamakhrama est l'Ambassadeur de la République de Djibouti et Doyen du Corps Diplomatique en Arabie Saoudite 

X: @dya_bamakhrama

NDLR: Les opinions exprimées par les auteurs dans cette section leur sont propres et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com