À peine adoptée par le CFCM, la «charte des principes» soulève des interrogations

Les représentants du CFCM et le recteur de la Grande Mosquée de Paris, à l’Elysée après la signature du texte, le 18 janvier (Photo, AFP).Les représentants du CFCM et le recteur de la Grande Mosquée de Paris, à l’Elysée après la signature du texte, le 18 janvier (Photo, AFP).
Les représentants du CFCM et le recteur de la Grande Mosquée de Paris, à l’Elysée après la signature du texte, le 18 janvier (Photo, AFP).Les représentants du CFCM et le recteur de la Grande Mosquée de Paris, à l’Elysée après la signature du texte, le 18 janvier (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 19 janvier 2021

À peine adoptée par le CFCM, la «charte des principes» soulève des interrogations

  • La charte, qui doit poser les bases pour la création d'un Conseil national des imams (CNI), qui sera chargé de «labelliser» les imams exerçant en France, contient dix articles
  • Le sixième article, probablement le plus sensible, est consacré au «rejet de toutes les formes d'ingérence et de l'instrumentalisation de l'islam à des fins politiques»

PARIS: Sous pression de l'exécutif, le Conseil français du culte musulman (CFCM) a adopté une charte inédite rejetant « l'islam politique » et les « ingérences » étrangères mais dont l'application soulève de nombreuses interrogations.

La « charte des principes » de l'islam de France représente « un engagement net, clair et précis en faveur de la République », s'est félicité Emmanuel Macron, selon l'Elysée, après avoir rencontré des responsables du CFCM, lundi en milieu de journée. 

La charte a été présentée alors que les députés ont entamé, le même jour en commission, les débats sur le projet de loi contre le séparatisme. 

Cette charte avait été demandée mi-novembre par Emmanuel Macron aux dirigeants du CFCM. Depuis son discours contre le séparatisme et l'islam radical début octobre, et encore plus depuis l'assassinat de Samuel Paty et l'attentat de Nice, le chef de l'Etat a accentué la pression sur les instances dirigeantes de l'islam en France afin d'avancer vers une réforme. 

Sur le perron de l'Elysée, Mohamed Moussaoui, le président du CFCM s’est réjoui de « l'unité retrouvée » au sein du CFCM, composé de neuf fédérations et encore récemment plombé par des dissensions internes. Il a salué « le pas historique que vient de franchir l’islam de France ».

« Nous avons réaffirmé au président notre volonté de mettre en place le conseil des imams dans les plus brefs délais pour pouvoir commencer le vrai travail, celui d’agréer les imams, clarifier leur statut, leur mission, et protéger l’imamat des auto-proclamés », a-t-il encore dit.

Trois fédérations, dont l'association Foi et Pratique (ultra-rigoristes du Tabligh), n'ont cependant pas signé le texte, a reconnu Moussaoui, parlant de « quelques petites nuances sur lesquelles elles souhaitent consulter leurs instances ». Ibrahim Alci, de la fédération CCMTF, proche de la Turquie, qui est également vice-président du CFCM, a indiqué avoir demandé des modifications. « Dès que cela sera possible, on signera », a-t-il assuré.

La charte, qui doit poser les bases pour la création d'un Conseil national des imams (CNI), qui sera chargé de « labelliser » les imams exerçant en France, contient dix articles. « Aucune conviction religieuse ne peut être invoquée pour se soustraire aux obligations des citoyens », indique le préambule.

Le texte doit être partagé « avec l'ensemble des acteurs de l'islam de France, notamment au niveau local », explique le CFCM dans un communiqué lundi soir. Avec pour but de recueillir « leur appréciation » et « d'apporter d'éventuelles améliorations ».

Déclaration d'intention

Le sixième article, probablement le plus sensible, est consacré au « rejet de toutes les formes d'ingérence et de l'instrumentalisation de l'islam à des fins politiques ». « Les signataires doivent rejeter clairement toute ingérence de l’étranger dans la gestion de leurs mosquées et la mission de leurs imams », est-il également écrit.

Cette charte « est une déclaration d'intention très louable », a réagi l'essayiste Hakim El Karoui, auteur de « L'islam, une religion française » (Gallimard). Il met en avant « le paradoxe » du CFCM, composé de « cinq fédérations financées par des pays étrangers » et « trois fédérations islamistes » : « la charte a été adoptée par des gens qui ont des intérêts en contradiction avec le texte », résume-t-il.

Hakim El Karoui questionne aussi le respect de la charte : « les fédérations sont juges et parties alors qu'il faudrait un collège indépendant chargé de vérifier » son application.

« Cette idée de charte, c'est quand même une verticalité. Il n'y a pas d'équivalent dans d'autres pays, ni même pour d'autres cultes en France », relève Franck Frégosi, spécialiste de l'organisation de l'islam en France, directeur de recherche au CNRS. « Est-ce un texte pour répondre aux besoins des autorités en urgence, ou un texte pour servir les principaux responsables religieux et les imams qui n'ont de toute façon pas été associés à la rédaction de ce texte ? », s'interroge le chercheur.

« Je ne suis pas sûr que ce texte, même une fois signé, fasse l'unanimité dans l'islam des territoires, celui qui ne se reconnait pas dans le CFCM considéré comme une organisation de notables déconnectée du terrain », poursuit Franck Frégosi.

Les plus vives critiques viennent en effet des imams eux-mêmes. « Le CFCM n'a aucune emprise (...) sur la réalité des musulmans de France ; il doit rester sur l'aspect logistique et organisationnel. La liturgie, la pastorale et l'éthique doivent rester aux religieux », explique l'imam de la mosquée de Bordeaux, Tareq Oubrou.

« Et maintenant on va demander aux imams de se plier à cette doctrine de laquelle le CFCM a accouché sans les consulter. Ce sont les savants et théologiens musulmans qui doivent accoucher d'un texte et ensuite le soumettre au CFCM pas le contraire », plaide l'imam.


Dermatose: Lecornu demande «une accélération de la stratégie vaccinale», va recevoir les syndicats

Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet. (AFP)
Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet. (AFP)
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  • Le Premier ministre tiendra une deuxième réunion à ce sujet à 17H30 avec les mêmes ministres et des préfets en visioconférence
  • Il a demandé à son gouvernement "une clarification et une accélération de la stratégie vaccinale qui doit davantage tenir compte de la réalité de chaque département" pour "protéger nos éleveurs et l'élevage français"

PARIS: Sébastien Lecornu a demandé mardi une "accélération de la stratégie vaccinale" contre la dermatose nodulaire contagieuse qui touche les élevages, et recevra "dans la semaine" les syndicats agricoles dont certains contestent la gestion par le gouvernement de cette épizootie, a annoncé son entourage à l'issue d'une réunion sur le sujet.

Le Premier ministre tiendra une deuxième réunion à ce sujet à 17H30 avec les mêmes ministres et des préfets en visioconférence. Il a demandé à son gouvernement "une clarification et une accélération de la stratégie vaccinale qui doit davantage tenir compte de la réalité de chaque département" pour "protéger nos éleveurs et l'élevage français", appelant à "garantir" une "disponibilité des doses" de vaccins "plus forte".

Il a également demandé un "état des lieux des contrôles sur les transports interdits d'animaux", "un plan d’accompagnement pour les petits élevages" ainsi qu'"un plan de repeuplement adapté à l’Occitanie".


Ultime vote sur le budget de la Sécurité sociale à l'Assemblée

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (au centre) s'exprime lors d'une déclaration gouvernementale sur la stratégie de défense nationale à l'Assemblée nationale, à Paris, le 10 décembre 2025. (AFP)
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  • L’Assemblée devrait adopter définitivement le budget de la Sécurité sociale 2026, fruit de compromis, malgré une majorité introuvable et sans 49.3
  • Le budget de l’État reste très incertain : déficit visé à 5% du PIB, fortes divergences sur les recettes, CMP à haut risque

PARIS: Sauf surprise, l'Assemblée nationale devrait définitivement adopter mardi le budget de la Sécurité sociale pour 2026, un succès arraché à force de concessions par Sébastien Lecornu, qui risque toutefois de ne pas réussir le même pari pour le budget de l'Etat, à l'issue bien plus incertaine.

Alors qu'approche la date butoir du 31 décembre, l'heure est aux dernières tractations pour les parlementaires, au terme de longues semaines de débats. Tous les yeux sont désormais braqués sur le projet de loi de finances (PLF), avec des négociations décisives jusqu'au week-end.

Il y a une semaine pourtant, beaucoup doutaient d'une possible adoption du premier des deux textes budgétaires, la loi de financement de la Sécurité sociale, qui doit notamment acter la suspension de la réforme des retraites.

Pour le PS, qui a érigé cette mesure en condition de sa non-censure, l'étape doit marquer le succès de sa stratégie de négociation avec l'exécutif, à rebours du reste de la gauche. Et pour le Premier ministre, elle couronnerait au moins temporairement sa méthode du compromis.

Après un dernier passage express au Sénat vendredi, le texte revient mardi dans l'hémicycle, où les députés devront renouveler le scrutin serré de la semaine dernière (247 voix contre 234), à haut risque en l'absence de majorité et de 49.3.

Les socialistes, quoique dans l'opposition, avaient consenti à massivement voter pour. Hésitant jusqu'au dernier moment à voter contre, les Ecologistes s'étaient en majorité abstenus. Et malgré les consignes d'abstention de leur parti, 18 députés LR et 9 Horizons l'avaient soutenu.

Au gouvernement, une issue semblable est attendue mardi, même s'il "faut veiller à ce qu'il n'y ait pas de démobilisation" dans l'hémicycle, concède un ministre.

Les syndicats FO et CGT ont appelé à des rassemblements devant l'Assemblée, critiquant notamment la limitation de la durée des arrêts maladie, ou une taxe sur les mutuelles dont ils craignent la répercussion sur les cotisations.

Le texte prévoit par ailleurs la création d'un nouveau congé de naissance, ou d'un "réseau France santé" voulu par M. Lecornu pour l'accès aux soins.

Le gouvernement a vu sa copie profondément remaniée par les députés, qui ont supprimé le gel des pensions de retraite et minima sociaux, et contraint l'exécutif à renoncer à doubler les franchises médicales.

Le déficit anticipé pour la Sécurité sociale est de 19,4 milliards d'euros en 2026 (contre 23 milliards en 2025). Mais au prix de transferts de 4,5 milliards d'euros des caisses de l'Etat vers celles de la Sécu.

- Négociations députés-sénateurs -

Des transferts qui contribuent à compliquer l'équation pour le budget de l'Etat, où ils doivent être compensés.

La copie du budget de l'Etat adoptée lundi au Sénat, qui a peiné à trouver des économies significatives dans les dépenses, porterait le déficit à 5,3% du PIB. Or le gouvernement a placé l'objectif à 5%.

Une commission mixte paritaire (CMP) réunissant sept députés et sept sénateurs doit tenter de trouver un accord vendredi et possiblement samedi, une opération périlleuse au vu des divergences entre les deux chambres.

L'Assemblée avait massivement rejeté le texte en première lecture.

Les négociations avant et pendant la CMP porteront notamment sur la question des recettes, alors que les socialistes réclament des mesures de justice fiscale, quand la droite se montre intransigeante dans son refus de nouveaux prélèvements.

"Il ne pourra pas y avoir d'accord sur un budget qui augmenterait considérablement les impôts et ne réduirait pas significativement la dette", insiste le chef des Républicains Bruno Retailleau.

Même si l'ancien socle commun, majoritaire au sein de la CMP, trouve un accord, il faudra encore qu'il puisse être adopté la semaine prochaine à l'Assemblée.

Et ce alors que les socialistes promettent cette fois de s'abstenir au mieux, et les Écologistes de voter contre.

Autres possibilités: utiliser le 49.3 en s'assurant d'une non-censure dans la foulée -- comme le plaident l'ancienne Première ministre Élisabeth Borne ou l'ex-président François Hollande -- ou se résoudre à une loi spéciale, avec une reprise des négociations en janvier.

Une dernière option loin de remporter l'enthousiasme général.

"Il faut que ça s'arrête cette séquence budgétaire", estime un cadre socialiste. "On connaît toutes les données du problème. Si le compromis est possible, alors il faut qu'il ait lieu maintenant."


Le musée du Louvre resté fermé lundi en raison d'une grève

Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron.  Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture. (AFP)
Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron. Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture. (AFP)
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  • Les personnels du musée le plus visité au monde, réunis en assemblée générale, avaient voté "à l'unanimité" une grève reconductible pour dénoncer les conditions de travail et d'accueil du public
  • Plusieurs dizaines d'agents ont ensuite déployé devant la pyramide une banderole indiquant "Le Louvre en lutte pour des conditions de travail décentes, hausse des salaires, + d'effectifs contre la vétusté du palais et le projet LNR"

PARIS: Le musée du Louvre à Paris est resté fermé lundi en raison d'une "grève reconductible" de ses agents, une nouvelle épreuve pour une institution dans la tourmente depuis le spectaculaire cambriolage du 19 octobre et la mise à nu de ses dysfonctionnements.

A 9H00 (8H00 GMT), les portes du musée sont restées closes devant une file de visiteurs, puis la direction a annoncé la fermeture pour "toute la journée".

"Je suis vraiment déçu, le Louvre était la raison principale de notre venue à Paris, parce que nous voulions voir Mona Lisa", le célèbre tableau de La Joconde de Léonard de Vinci, a déclaré à l'AFP Minsoo Kim, 37, Coréen, en lune de miel.

"C'est normal qu'ils fassent grève s'ils ont besoin de meilleures conditions de travail. Bien sûr, en tant que touriste, ce n'est pas génial d'être ici et que le musée soit fermé, mais nous avons réussi à reporter notre visite, donc ça n'est pas un problème", a estimé de son côté Patricia, une touriste brésilienne qui n'a pas souhaité donner son nom.

Un peu plus tôt, les personnels du musée le plus visité au monde, réunis en assemblée générale, avaient voté "à l'unanimité" une grève reconductible pour dénoncer les conditions de travail et d'accueil du public.

Plusieurs dizaines d'agents ont ensuite déployé devant la pyramide une banderole indiquant "Le Louvre en lutte pour des conditions de travail décentes, hausse des salaires, + d'effectifs contre la vétusté du palais et le projet LNR".

Le LNR, ou Louvre Nouvelle Renaissanc, et une rénovation à grande échelle annoncée par le président français Emmanuel Macron.

Les organisations syndicales ont ensuite été reçues au ministère de la Culture.

"Nous avons eu quelques avancées en matière de rémunération, mais cela reste insuffisant et nous attendons une proposition écrite du ministère - certainement mardi - pour nous prononcer", a déclaré à l'AFP Alexis Fritche, du syndicat CFDT-Culture, à l'issue de deux heures de réunion.

Selon lui, "pas d'avancée" non plus sur les emplois: "On nous annonce 28 postes pour la surveillance, mais ils proviennent de redéploiements".

A l'issue de l'AG, le délégué du syndicat CGT Christian Galani avait rappelé que la filière accueil et surveillance avait "perdu 200 équivalents temps plein en l'espace de 15 ans, alors que la fréquentation a augmenté de moitié".

Une prochaine AG est prévue mercredi à 9H00 locales, le mardi étant le jour de fermeture hebdomadaire du Louvre.

Conflit social et réorganisation 

"On est en colère", "nous ne sommes pas d'accord avec la manière dont Le Louvre a été géré", a dit devant la presse Elise Muller, agente de surveillance du syndicat Sud Culture.

Valérie Baud, représentante CFDT, s'était félicitée d'un mouvement "interprofessionnel", regroupant métiers de la "conservation, agents d'accueil et de surveillance, professions support, juristes, graphistes".

En parallèle de ce conflit social, le musée doit faire face à une réorganisation à marche forcée et continuer de répondre aux interrogations sur les failles qui ont permis à un commando de s'emparer de huit joyaux de la Couronne, toujours introuvables.

Fragilisée, la présidente du Louvre, Laurence des Cars, devra travailler en tandem avec Philippe Jost, le haut fonctionnaire chargé du chantier de reconstruction de Notre-Dame, à qui la ministre française de la Culture Rachida Dati a confié vendredi la mission de "réorganiser en profondeur le musée".

Audition de la présidente mercredi 

"Des mesures indispensables sont à prendre, bien au-delà de la sûreté et de la sécurité", a déclaré Mme Dati.

"Toute réflexion sur l'avenir du Louvre ne saurait se limiter à une approche technico-organisationnelle", avait réagi la CFDT.

Le ministère de la Culture a précisé que la mission de M. Jost serait menée en janvier et février et que ses recommandations étaient attendues "fin février".

Des sénateurs vont par ailleurs poursuivre leur quête de réponses sur les dysfonctionnements du musée.

Mardi, ils doivent entendre pour la première fois l'ancien président du Louvre Jean-Luc Martinez, destinataire pendant son double mandat (2013-2021) de deux audits alarmants peu suivis d'effets.

Mercredi, ce sera Mme des Cars, à la tête du musée depuis fin 2021, pour comprendre notamment comment ces deux audits n'ont été découverts par l'actuelle direction qu'après le casse du 19 octobre.