DUBAI: Le ton du PDG du Fonds d’investissement direct russe (RDIF), Kirill Dmitriev est sans appel : «Notre vaccin est incontestablement le meilleur au monde», a-t-il affirmé à Arab News.
Le vaccin Spoutnik V, développé pour lutter contre la Covid-19, fait l’objet de beaucoup de scepticisme dans les médias occidentaux et certains milieux médicaux, mais Dmitriev est imperturbable.
Selon lui, ce scepticisme, fruit d’une campagne de «désinformation délibérée», trouve son origine dans la jalousie des sociétés pharmaceutiques occidentale à laquelle s’ajoute un peu de rivalité géopolitique. Rien de scientifique, et aucun lien avec les résultats du Spoutnik V jusqu’à présent.
«Si l’on considère des paramètres clés tels que l’innocuité, l’efficacité, la logistique, la longueur de la piqûre, l’absence d’allergies et d’autres effets secondaires, Spoutnik V est le numéro un, le meilleur vaccin au monde», a déclaré Dmitriev.
Le grand patron de la société, une figure familière pour les dirigeants saoudiens grâce aux investissements et activités financières du RDIF, s’est exprimé lors de l’émission télévisée Frankly Speaking. L’émission reçoit des décideurs politiques et sonde leurs opinions au sujet des enjeux les plus impérieux dans le monde aujourd’hui.
Dmitriev affirme que Spoutnik V est en voie de conquérir le monde avec ses avantages. Le vaccin utilise un vecteur adénovirus humain, ce qui diffère du processus occidental.
L’Argentine, qui a autorisé le vaccin russe, a reçu ses premières doses et le Paraguay a annoncé son intention de suivre la cadeance. Mais le plus clair de la distribution se fait en Russie. En effet, des doses du vaccin Spoutnik V ont été administrées à 1,5 millions de personnes, dont le correspondant du New York Times à Moscou, qui était d’ailleurs particulièrement cinglant dans ses critiques du Spoutnik à son lancement l’été dernier, a mentionné Dmitriev fièrement.
Andrew Kramer, initialement très critique envers la science derrière le Spoutnik V et le développement du premier vaccin anti-Covid par le gouvernement russe, a enfin admis que ce vaccin est «un véritable exploit pour les scientifiques russes qui bâtissent sur une longue expérience dans le développement de vaccins» —un sacré changement d’avis pour le correspondant d’un journal qui n’est pas connu pour être charitable envers la Russie.
Dmitriev a également détecté un changement de ton parmi les pays européens qui sont désormais plus disposés à adopter le Spoutnik V puisqu’ils n’arrivent pas à se procurer assez de doses des autres vaccins. Les dirigeants russes et allemands, ainsi que la France et d’autres pays européens, ont tenu des pourparlers autour de la coopération sur la production des vaccins.
La Russie cherche à obtenir l’approbation des autorités européennes et travaille aussi en collaboration avec la société pharmaceutique britannique AstraZeneca sur un produit qui combine différentes techniques de vaccination. «Il ne fait aucun doute que les sceptiques sont à court d’arguments. Nous avons l’un des meilleurs vaccins et il est accepté par de plus en plus de pays chaque jour», a-t-il lancé.
Dmitriev s’attend à ce que le pire de la pandémie passe d’ici mai dans les pays qui procèdent à une «vaccination très massive et très rapide».
Bien que financier et expert en investissement de formation, Dmitriev est devenu, au cours de l’année dernière, un expert des questions médicales et de santé publique. Son opinion sur la réaction saoudienne à la pandémie est donc pertinente.
«Je pense que l’Arabie saoudite l’a très bien gérée», a-t-il affirmé. Si on prend en considération le nombre total de cas et les actions du gouvernement saoudien, du roi Salman et du prince héritier Mohammed ben Salman, on remarque que la réponse est très forte, très agressive, et qu’elle a permis à l’Arabie saoudite de contenir le virus probablement beaucoup mieux que de nombreux pays.
«Je pense que cela témoignage de votre système très efficace et très ciblé, axé sur le dépistage et axé sur le traitement des gens de manière précoce».
Dmitriev a également félicité le Royaume pour sa gestion et sa présidence du Sommet du G20 en 2020. En effet, ce Sommet a abordé des questions cruciales relatives au développement des vaccins, à l’investissement médical et à la réponse financière à la récession provoquée par la pandémie.
«C’est un message très important dans notre lutte contre cette pandémie. Nous ne pourrons la vaincre que si nous travaillons ensemble — la Russie et l’Arabie saoudite, l’Arabie saoudite et d’autres dirigeants du G20, et d’autres pays. Ce n’est que si nous collaborons que nous mettrons fin à la pandémie», a-t-il souligné.
La relation entre l’Arabie saoudite et la Russie est de plus en plus étroite. La relation amicale a débuté lorsque le roi Salmane a visité Moscou en 2017, une première pour un monarque saoudien au pouvoir, ainsi qu’avec les échanges entre le prince héritier Mohammed ben Salman et le président russe Vladimir Poutine.
Le RDIF et Dmitriev sont au cœur de ce partenariat en développement, qui s’est manifesté par une série d’accords commerciaux, ainsi que par l’alliance en cours dans le secteur crucial du pétrole via l’OPEP+, alliance forgée par le Royaume et la Russie et qui a géré avec succès les marchés mondiaux de l’énergie lors des moments sombres.
La base de cette relation? «Je pense que l’essence est la confiance, et nous avons vraiment renforcé cette confiance en travaillant ensemble sur un large éventail de questions. Nous avons commencé à travailler sur les questions liées à l’énergie, à l’investissement, à la santé, et à travers ce travail, nous avons établi un partenariat solide qui a mené vers des résultats positifs importants pour les Saoudiens, les Russes et le monde», a répondu Dmitriev.
«Nous avons aussi financé conjointement de nombreux projets d’infrastructure qui contribuent vraiment à créer des emplois en Russie et en Arabie saoudite. Je pense que cette coopération constitue un exemple pour les autres pays qui doivent mettre de côté leurs différences et certains de leurs malentendus politiques afin de se focaliser sur des projets communs, sur l’économie et sur une meilleure compréhension et une meilleure relation politique», a-t-il ajouté.
Dmitriev a reçu l’une des plus hautes distinctions du Royaume, l’Ordre du roi Abdelaziz, pour son rôle dans l’accord saoudien-russe, et il a eu l’occasion d’étudier le style de leadership des décideurs politiques du Royaume, et en particulier celui du prince héritier Mohammed ben Salman.

«Je suis toujours impressionné par sa très grande et très significative vision positive pour le peuple saoudien et pour le monde, et par sa capacité à mettre en œuvre cette vision dans les actions concrètes très spécifiques qui transforment l’Arabie saoudite», a-t-il mentionné.
La Russie, qui investit dans le système de transport Hyperloop dans lequel le Royaume est également partenaire, étudiera de près le mégaprojet The Line annoncé récemment. Elle envisage également d’autres aspects des 6 billions de dollars d’opportunités d’investissement qui devraient être ouverts aux investissements extérieurs dans le cadre de la stratégie de diversification de la Vision 2030.
«Cette technologie d’infrastructure sera vraiment une solution pour le monde et pour les besoins de transport de l’avenir. Nous croyons vraiment en cette technologie et nous pensons que l’écosystème qui sera créé à la suite de ce projet présente un intérêt certain pour la Russie», a déclaré Dmitriev.
L’OPEP+ demeurera au cœur du partenariat économique entre l’Arabie saoudite et la Russie, malgré le récent désaccord sur la politique d’approvisionnement en pétrole qui a été résolu par la décision unilatérale de l’Arabie saoudite de réduire l’approvisionnement mondial d’un million de barils supplémentaires par jour, a-t-il poursuivi.
«Nous sommes tous deux intéressés par des marchés pétroliers stables. Nous sommes donc complètement alignés. Cette réduction surprise de la part de l’Arabie saoudite est une contribution très importante car elle a réellement conduit à plus de stabilité et de prévisibilité sur les marchés pétroliers», a-t-il expliqué.
Dmitriev, qui a joué un rôle personnel dans les délibérations de l’OPEP+ en raison de ses liens étroits avec l’Arabie saoudite, a assuré que le prix du pétrole resterait «plus ou moins stable» à la suite des fortes hausses récentes. Même les meilleurs des alliés peuvent parfois être en désaccord sur des questions de politique. L’amitié de la Russie avec l’Iran a été mise en lumière récemment lorsque la Russie a considéré les allégations américaines de collusion entre Téhéran et Al-Qaïda comme «absolument infondées et déraisonnables».
«La position de la Russie est que nous travaillons avec tous les pays. Nous tentons de trouver des compromis avec les États-Unis, avec l’Europe et avec d’autres pays, et je pense qu’avec l’Iran, il est très important de s’engager et de discuter de nombreuses questions différentes», a indiqué Dmitriev.
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Twitter : @frankkanedubai
Ce texte est la traduction d’un article paru sur ArabNews.com